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Delit excédant 100 francs.

Double témoignage.

Un procès-verbal, alors que la peine outrepassé la somme de 100 francs, quoiqu'il n'y ait qu'un garde verbalisant, pourvu qu'il soit signé ou appuyé par un autre témoin du délit, fait foi jusqu'à inscription de faux ( Arrêt de la cour de cassation du 19 octobre 1809).

Un procès-verbal, dressé par le garde-général assisté d'un nommé Mayer, pris comme témoin, constatoit qu'ils avoient rencontré un troupeau de moutons pâturant dans la forêt communale de Kirnsulz= bach, sous la garde de Matthias Goetz, domestique de Philippe Becker, berger de Philippe Grimm, admodiateur du pâturage de la commune.

Le tribunal correctionnel de Cousel, où les prévenus furent traduits, ainsi que la commune, comme civilement responsable, les renvoya absous sur la foi d'un certificat constatant que, sous l'ancien gouvernement, la commune jouissoit du droit de mettre les bêtes à laine au pacage et panage dans sa forêt.

L'inspecteur s'en rendit appelant, fondé sur ce que le tribunal n'auroit pas dû faire prévaloir une information aussi frivole, sur la disposition formelle de l'article 13 du titre 16 de l'ordonnance de 1669, qui prononce l'exclusion absolue des bêtes à laine, des forêts, sans avoir égard à l'âge des bois, ni même aux titres de l'usager; cette ordonnance ayant été promulguée dans les quatre départemens.

Le garde rapporteur fut entendu, ainsi que le nommé Mayer. Ce dernier qui, en première instance, avoit attesté le délit, ayant jugé à propos de rétracter son premier témoignage, l'inspecteur demanda que

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le sieur Schmitt, sous-inspecteur, qui avoit vu les moutons pâturant, fût entendu : mais la cour criminelle ne voulut pas faire droit à cette demande, et, regardant, dès-lors, le fait de la dépaissance comme non suffisamment constaté, elle déclara, par son arrêt du 5 août dernier, qu'il avoit été bien jugé et mal appelé.

Cette mauvaise jurisprudence a été réformée ainsi qu'il suit.

"Ouï M. Guieu et M. Giraud reur-général impérial.

pour M. le procu

« Vu l'art. 456, §. 1. de la loi du 3 brumaire an « 4, qui autorise l'annulation des arrêts des cours de justice criminelle, lorsqu'il y a eu fausse application des lois pénales, ou excès de pouvoir, << en quelque manière que ce soit.

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« Attendu, 1., qu'il existoit au procès, un procès-verbal signé par le garde-général forestier ver«balisant, et par André Mayer, appelé comme té<< moin; que ce procès-verbal étant, par conséquent, « revêtu des deux témoignages exigés par la loi, la «foi due en justice à cet acte ne pouvoit être détruite que par la voie de l'inscription de faux.

« Attendu, 2o., qu'en supposant que le procès« verbal du garde forestier n'eût pas été revêtu d'un « second témoignage, la cour de justice criminelle « ne pouvoit rejeter, sans motif, les conclusions prises « par écrit, et à l'audience, par l'administration fo<< restière, tendantes à ce qu'il fût permis de faire en«<tendre un témoignage supplétif à l'appui de celui « du garde verbalisant, cette faculté lui étant acquise « par la disposition expresse des lois, et encore, le «seul moyen de remplir le vœu de l'article 14 du « titre 9 de la loi du 29 septembre 1791.

« Que, sous ces deux rapports, la cour de justice

<< criminelle, en affranchissant les prévenus des pei«nes par eux encourues, à raison d'un délit régu«lièrement constaté, a violé les lois de la matière

faussement appliqué l'art. 14 de la loi du 29 sep«tembre 1791, commis un excès de pouvoir et un déni de justice.

«Par ces motifs, la cour casse, annule l'arrêt rendu "par la cour de justice criminelle du département de la Sarre, le 5 août dernier, etc. »>

Bois d'affouage.

L'affouager ne peut faire aucun trafic des bois qu'il a droit de prendre, ni les employer, autrement qué pour l'objet, à raison duquel ils lui ont été délivrés ( Arrêt de la cour de cassation du 13 octobre 1809).

Les nommés Jean Nicolas Etienne et Marie Anne Royer poursuivis, le premier, pour avoir vendu sa portion affouagère, l'autre, pour l'avoir achetée, avoient été renvoyés des conclusions prises contr'eux.

Sur l'appel, ce jugement ayant été confirmé par la cour criminelle du département des Vosges, M. le procureur-général près cette cour, s'est pourvu contre l'arrêt, fondé sur ce que les tribunaux ne peuvent arrêter l'exécution, ni faire la censure des actes administratifs; qu'ils ne peuvent les interprêter, ni créer des exceptions aux mesures générales que ces actes renferment, sarfs commettre une usurpation de pouvoir.

Cette usurpation de pouvoir étoit, ici, évidente.

M. le préfet des Vosges, certain que les ventes des portions affouagères, délivrées aux habitans dés communes, étoient une source de délits forestiers, et voulant les prévenir, avoit, par un arrêté du 23 ventôse

an 10, défendu, à ses administrés, de vendre les bois qui leur seroient delivrés pour affouage.

Cette défense résultoit du rappel des lois prononçant des peines contre cette vente, de l'obligation imposée aux gardes forestiers, de dresser des procès-verbaux contre les particuliers qui vendroient leurs portions dans les affouages; au ministère public, de les poursuivre, et, aux tribunaux, de les condamner.

Regarder cette défense comme ne frappant pas contre les particuliers, ainsi que la cour de justice criminelle l'a prétendu, c'est méconnoître le but, soit de l'arrêté du 23 ventose an 10, soit des lois et rè glemens rappelés, qui tendent à prévenir le maraudage dans les forêts.

En refusant de prononcer les peines portées par cet acte administratif, et, en limitant son exécution, cette cour avoit violé un principe précieux pour l'intérêt général, commis un excès de pouvoir, fait une fausse application des lois précitées ; ce que la cour suprême a reconnu par l'arrêt suivant.

« Oui M. Guieu et M. Pons pour M. le procureur« général impérial.

Vu l'art. 456, §. 6 de la loi du 3 brumaire an 4, <<< qui autorise l'annulation des arrêts des cours de « justice criminelle, lorsqu'il y a eu, de quelque ma«nière que ce soit, usurpation de pouvoir.

"Attendu que les dispositions de l'arrêté du pré«fet du département des Vosges, du 23 ventôse an 10, « sont claires, et n'étoient pas susceptibles d'une in«<< terprétation restrictive; que les motifs exprimés dans le préambule de cet arrêté, indiquoient suf<< fisamment que la prohibition faite aux administrés,

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de vendre les bois provenant de leur affouage « s'applique aux ventes faites de particulier à particu<< lier, comme à celles que feroient les communes,

« elles-mêmes, puisque la surveillance de ces abus << n'est pas seulement recommandée aux maires, au «< regard des communes, mais que les maires et les << agens forestiers sont chargés de surveiller tous ceux « qui se permettroient des contraventions, et de dres<< ser contr'eux des procès-verbaux..

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Que, d'ailleurs, cette disposition de l'arrêté du « préfet n'est que la reproduction des lois de la ma«tière qui y sont relatées, et d'autres, non moins précises; telles sont les ordonnances de 1376, « 1388, art. 31, et 1402, art. 30, et de 1529, les «<arrêts du conseil, de 1603, et 1770, et d'une foule « de règlemens semblables, du grand-maître des eaux « et forêts.

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« Que, de droit commun, et d'après les lois pré«< citées, les droits d'usage et d'affouage sont incessibles et incommunicables, et que des considérations «sages et paternelles ont dû déterminer le législa«teur à empêcher que les habitans des communes «< affouagères ne vendent le bois qui leur est délivré, << afin de les préserver des atteintes du besoin, fruit « de leur imprévoyance, et de prévenir les délits fo<< restiers qui, souvent, sont le fruit du besoin.

« Qu'il n'appartenoit pas à la cour de justice cri<< minelle d'opposer ses considérations particulières « à celles du législateur et de l'autorité administrative, « et de faire prévaloir son opinion sur le texte pri" mitif de la loi.

«Que, dès-lors, son arrêt, en rejetant l'action « de l'administration forestière, contre Jean Nicolas « Etienne et Marie Royer, sous le prétexte du silence « de la loi et des prétendus inconvéniens qui naî<< troient de l'exécution de l'arrêté du 23 ventôse «an 10, présente un excès de pouvoir, dans l'interprétation arbitraire de cet acte administratif, et

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