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voient pas le procès-verbal de martelage déposé à la sous-préfecture, mais le sieur Merlin présent étoit porteur de l'expédition de son adjudication; ils troúvent, d'après elle, un déficit de baliveaux de l'âge; 462 modernes et 411 anciens, portés en réserve dans cette expédition, sont reconnus être sur pied; mais l'expédition du sieur Merlin n'étoit pas le procès-verbal de martelage, et le procès-verbal de martelage pouvoit seul déterminer le jugement sur l'existence ou la non-existence d'un délit, son importance, et ses circonstances. Dans cette incertitude ces agens ne pouvant rédiger de procès-verbal de leur opération, se bornent aux notes par eux recueillies. Quelques temps après l'inspecteur consulte l'expédition à lui délivrée du procès-verbal d'adjudication; il trouve que le nombre des anciens réservés y est porté à 481, au lieu de 421, seulement énoncés dans l'expédition délivrée au sieur Merlin. Cette différence fait pousser plus loin l'examen de l'inspecteur; il retire le procèsverbal de martelage qui étoit déposé à la sous-préfecture, et le comparant avec les notes et documens qui étoient en son pouvoir, il trouve dans les réserves, un déficit considérable de baliveaux de l'âge et de vieille écorce. Mais pour assurer à leur opération un caractère qui la mit à l'abri de toute critique, il falloit recommencer le récolement. Cette opération eut lieu le 23 août par l'inspecteur et le sous-inspecteur, accompagnés du garde-général et du garde-particulier. Le procès-verbal qu'ils en dressèrent renfermoit les énonciations suivantes, qui ont fait le fondement de tout le procès.

Le 23 août 1806, ".... nous.... sommes transportés sur la coupe d'Avenay.... à l'effet de procéder à la vérification du récolement par nous fait en ladite coupe, le 12 mai dernier, pour pouvoir asseoir un

jugement certain sur le déficit des baliveaux, tant de l'âge du taillis, que modernes et anciens, par nous reconnu le 12 mai, en présence du sieur Merlin dùment appelé; ledit sieur Merlin adjudicataire présent nous avons procédé ...... déclarant que nous avons rédigé le présent procès-verbal triple, que nous inspecteur et sous-inspecteur susdits avons signé avec le sieur Oudin en l'absence dudit sieur Martin, les jour mois et an susdits. Signé à la minute... enregistré... visé pour timbre le 22 septembre 1806.

En conséquence de ce procès-verbal, le sieur Merlin fut cité, par exploit du 27 septembre 1806, à comparoître devant le tribunal correctionnel de Rheims, pour par lui avoir contrevenu à l'article 66, du cahier des charges de l'an 13, en laissant des bois abattus dans la coupe d'Avenay, avoir arraché avec pioche un très-grand nombre d'autres arbres abandonnés, même arraché des rejets poussés sur plusieurs troncs, et avoir en outre abattu des arbres marqués du marteau impérial, se voir condamner d'après les conclusions qui seroient prises à l'audience.

Le sieur Merlin en excipant de l'expédition de l'adjudication à lui délivrée, contenant la réserve de 421 arbres anciens et de 462 modernes en total 883, disoit que le procès -verbal de récolement dressé par les agens forestiers le 23 août 1806, constatoit qu'il existoit dans la coupe par lui exploitée 886 baliveaux tant anciens que modernes, d'où il resultoit qu'il avoit laissé dans cette coupe 3 arbres au-delà de la quantité réservée; qu'en supposant qu'il y eût erreur dans l'expédition de l'adjudication à lui délivrée, cette expédition devoit faire sa règle et son titre ; qu'il n'avoit fait abattre que les arbres abandonnés, et dont il avoit droit de disposer; il ajoutoit que l'administration devoit être déclarée non recevable dans l'ac

tion dirigée contre lui; que cette fin de non recevoir étoit fondée sur la clause du cahier des charges, qui porte que pendant la durée de son exploitation, l'adjudicataire sera responsable de tous les délits commis dans la vente, à l'ouïe de la coignée; que le temps. de son exploitation étoit limité au premier floréal an 14; que suivant ladite adjudication, il devoit être procédé au récolement dans les 40 jours qui suivent celui des délais accordés pour la vidange des coupes; que le délai pour la vidange des coupes étant expiré le premier floréal an 12 (avril 1806), celui pour le récolement étoit expiré le premier juin suivant. Qu'à cette dernière époque sa responsabilité cessoit, que n'existant pas de procès verbal qui constatât qu'il ait été commis avant des délits dans la coupe par lui exploitée, il ne pouvoit plus être récherché ni inquiété; que le procès-verbal de récolement qu'on lui opposoit ne pouvoit être d'aucune considération, puisqu'il avoit été fait près de trois mois après que la responsabilité avoit cessé. Il soutenoit aussi, qu'aux termes de l'article 8 de la loi du 27 septembre 1791, it n'étoit accordé qu'un délai de trois mois, pour intenter une action en réparation des délits, à compter du jour ou ils avoient été reconnus; que le procèsverbal du 23 août n'étant qu'une vérification du procès-verbal de récolement fait le 12 mai précédent, le délai de trois mois, à partir de cette époque, jusqu'au moment de l'action, étoit plus qu'expiré.

Le procureur-impérial après avoir répondu sur les fins de non recevoir, conclut à ce que le sieur Merlin fût condamné en 8,200 fr. d'amende, déduction faite de 750 fr. pour 15 arbres encroués et 8,200 fr. de restitution, pour 164 baliveaux manquant, et en 140 fr. aussi d'amende et en pareille somme de restitution pour les étocs d'arbres arrachés, et qu'il fût or

donné que les arbres trouvés gisans dans la coupe, ainsi, que les arbres trouvés sur pied fussent déclarés acquis et confisqués au profit du gouvernement.

Après plusieurs renvois par différens motifs, it intervint le 29 novembre 1806, jugement par lequel le tribunal, sans arrêter ni avoir égard à la première fin de non recevoir relativement à la décharge de l'exploitation, par le seul fait du procès-verbal de récolement (du 12 mai), ayant au contraire égard à celle relative à l'extinction et à la prescription de l'action, sans s'arrêter, ni avoir égard au procès-verbal de vérification du 23 août dernier, lequel est considéré comme nul, et non avenu, par défaut d'enregistrement dans 4 jours, déclare éteinte et prescrite l'action intentée le 24 septembre dernier, par l'administration de forêts, contr le sieur Merlin.

On voit que le sieur Merlin faisoit valoir deux fins de non recevoir. La première tirée de ce que le récolement de la coupe avoit été fait après les six semaines fixées par l'article premier du titre 16 de l'ordonnance de 1669, et de ce que cette opération procuroit sa décharge. La seconde de ce que (supposant qu'un procès-verbal dit de récolement, avoit été fait le 12 mai précédent) l'action étoit éteinte et prescrite pour avoit été intentée après les trois mois.

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Comme la loi en fixant le délai pour le récolement n'en fait pas une obligation irritante, que d'un autre côté, elle fait durer la responsabilité de l'adjudicataire, tant qu'il n'a pas obtenu congé de cour, ou décharge de son exploitation, le sieur Merlin a dû être déclaré non recevable dans la première fin de non recevoir par lui invoquée.

La seconde fin de non recevoir ne devoit pas être plus accueillie que la première. En effet, à son égard, le procès-verbal du 12 mai n'existoit pas, ou il étoit

censé ne pas exister, tant qu'on ne le représentoit pas; et dans le cas ou il eût existé et qu'on l'eût représenté, il auroit fallu encore qu'il eût constaté les mêmes faits, les mêmes délits que ceux constatés par le procès-verbal du 23 août; ainsi cette fin de non recevoir n'étant nullement justifiée, le tribunal n'auroit pas dû s'y arrêter.

En conséquence l'inspecteur forestier et le procureurimpérial appelèrent de ce jugement devant la cour de justice criminelle du département de la Marne.

Les principales questions que présentoit cette affaire, étoient celles de savoir: 1o si la déclaration d'appel faite par l'inspecteur et sa requête étoient nulles à défaut d'autorisation de l'administration, tant pour émettre l'appel que pour signer la requête; 2° si le procèsverbal de récolement du 23 août 1806 étoit nul, n'ayant été enregistré que vingt-neuf jours après sa date; 3° si en déclarant l'action de l'administration éteinte et prescrite, les premiers juges avoient fait une juste application de l'article 8 du titre 9 de la loi de 1791.

Après plusieurs plaidoieries des parties, la cour rendit le 13 mars 1808, arrêt qui en infirmant le jugement de première instance adjugea à l'administration et au ministère public les conclusions par eux prises.

Il est énoncé dans les considérans de l'arrêt, que les moyens de nullité contre la déclaration d'appel ne peuvent être admis, tant parce que la disposition de l'article 17 du titre 9 de la loi du 29 septembre 1791 est étrangère à l'intimé et ne pouvoit être obligatoire pour le préposé que vis-à-vis de l'administration, que parce qu'au cas particulier c'est l'administration elle-même qui figure sur l'appel, et qui par là, autorise ses préposés. Qu'un autre motif qui écarte ce

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