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que l'acacia est celui de tous les bois qui approche le plus de la pesanteur du chêne, mais nous n'y trouvons point la différence, en plus, que M. Juglar croit avoir reconnue d'après son expérience.

« Il faut considérer, nous dit Varennes-Fenille, dans la pesanteur des bois, l'âge, la différence de «climat, la qualité du terrain, l'endroit de l'arbre « où a été pris le morceau qu'on soumet à l'expé«rience (1). » Nous ajouterons l'espèce de l'arbre, c'est à dire qu'il faut distinguer si c'est un chêne rouvre, un chêne à grappes, ou autre; car il résulte des expériences de M. Hartig, que le pied cube du bois de chêne rouvre, bien sec, provenant d'un tronc de deux cents ans, pèse 47 liv. 10 onces; qu'un autre pris dans le tronc d'un chêne à grappes, âgé de 190 ans, pèse 45 liv. 10 onces; que celui provenant de grosses branches du même arbre, pèse 41 liv. 6 onces, que celui d'un brin de 50 ans, pèse 47 liv. 12 onces et qu'enfin celui pris dans un tronc échauffé, mais non pourri, ne pèse que 35 liv. 4 onces. C'est sans doute un cube du bois de cette espèce que M. Juglar a pris pour comparaison.

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ans,

Il résulte également de ces expériences que le pied cube d'acacia, pris dans le tronc d'un arbre de 34 pèse 41 liv. 5 onces, et que celui d'un bois de brin de 8 ans pèse 45 liv. 12 onces; ainsi donc l'avantage reste au chêne. La force du bois étant reconnue pour être en raison directe de sa pesanteur spécifique, il s'ensuit naturellement qu'on doit appliquer le même raisonnement contre l'expérience que M. Juglar a faite à ce sujet, et dont il nous a rapporté un long procès-verbal.

(1) Mémoire sur l'administration forestière, deuxième édition.

portion, avec le bas du tronc, on les distingue des premiers par le nom d'arbres de tige; enfin, la troisième classe renferme les arbrisseaux; la simple exposition de ce système vous suffira sans doute pour placer le Robinier dans le rang qu'il doit occuper.

« Nous avons connu plusieurs des acacias dont parle M. Juglar, notamment ceux qui étoient dans la cour de M. la Lande, et ceux de la forge de Verrières; mais aucun n'avoit trente pieds de tige, j'entends parler depuis la naissance du tronc jusqu'à la bifurcation; nous allons plus loin et nous pouvons assurer que parmi le grand nombre de ceux que nous avons vus, il y en avoit peu dont la tige eût atteint la hauteur de six à sept mètres.

« Quant à celui de Verrières dont la dimension donnée par M. Juglar a dû vous étonner, il s'en falloit de beaucoup que la tige eût cette élévation. Le propriétaire n'a pu au surplus en tirer aucun bois d'ouvrage.

« Nous allons parcourir rapidement les chapitres sept et huit de l'ouvrage que nous examinons; l'un traite des qualités de l'acacia, et l'autre des usages auxquels il est propre. Nous ne nous permettrons que quelques remarques, qui toutes ont pour objet la préférence que M. Juglar veut qu'on donne à cet arbre sur le chêne.. « D'après une expérience qu'il a faite, il nous assure que le pied cube de Robinier pèse dix livres de plus que le pied cube de chêne; nous opposerons à cette assertion le tableau qui indique la pesanteur relative des bois, dressé par M. Hartig, directeur de l'école forestière de Dillembourg, et membre de la Société physique de Berlin (1). Il résulte bien de ce tableau

(1) Expériences physique sur les rapports de combustibilité des bois entre eux, fin du volume; traduit de l'allemand, par M. Baudrillart; imprimé à Paris en 1807, chez Arthus-Bertrand.

le

« Le bois d'acacia considéré sous le rapport du bois de chauffage, est, suivant M. Juglar, le meilleur combustible; il l'emporte sur le hêtre, sur le charme et sur le chêne, qui ont passé jusqu'à présent pour meilleur bois de feu; nous sommes fâchés de trouver encore dans cette circonstance M. Hartig en opposition avec M. Juglar.

« Il résulte des expériences faites par ce savant professeur forestier allemand, préparées de longue main, fruit de la plus scrupuleuse attention, de recherches pénibles et de calculs infinis, consignés dans un livre qui a pour titre : Expériences physiques sur les rapport de combustibilité des bois entre eux (1); il en résulte, disons-nous, que ces trois espèces d'arbres ont conservé dans la combustibilité chacun le rang que le simple usage leur avoit assigné.

a En effet, d'après le tableau formé par M. Baudrillart, sur le résultat des expériences de M. Hartig, des valeurs respectives des différentes espèces de bois, à masse égale, le chêne est estimé 14 fr. 67 c., le hêtre 15 fr. 55 c. le charme 15 fr. 68 c., tandis que l'acacia n'est estimé que 12 fr. 62 c.

« On se tromperoit étrangement, Messieurs, si l'on pensoit, d'après ce que nous venons de dire, que nous sommes l'ennemi du Robinier; pour éviter cette fausse conséquence, nous vous devons notre opinion toute entière sur cet arbre. Nous le classerons d'abord au premier rang des arbres de tige, et convaincus de ses bonnes qualités dans son état de mort, c'est-à-dire après son exploitation, (car nous devons considérer les arbres sous les deux rapports, de leur utilité pendant qu'ils sont sur pied, et de celle que nous en

(1) Voyez la note page 282.)

retirons après les avoir abattus), nous le croyons digne de fixer l'attention des agriculteurs. La rapidité de sa végétation nous fera attendre patiemment l'époque à laquelle nos forêts seront entièrement régénérées; la dureté, la force de son bois, et la facilité avec laquelle il se prête à la fente, le rendent propre aux divers ouvrages que M. Juglar a fait graver en tête de son livre; nous en exceptons cependant les bois de marine, étant bien persuadés qu'il ne peut jamais atteindre les dimensions exigées pour ces pièces, surtout dans nos climats (1).

« Nous dirons donc avec M. Bosc, aux cultivateurs, plantez du Robinier dans les terres médiocres, dans les sables humides, dans les terres argilo- caillouteuses, dans les interstices des roches fendillées; nous leur dirons avec M. François de Neufchâteau (2), préférez toujours les arbres fruitiers indigènes; mais s'ils ne peuvent prospérer dans votre terrain, plantez du Robinier. Nous leur rappellerons enfin cette maxime générale dictée par la sagesse : en replantant de nou❤

(1) Le plançon doit porter 25 pieds de long sur 11 pouces d'équarrissage (8 mètres 12 centimètres 30 millimètres). Varangues plates de fonds et de porques 22 à 28 pieds le long, sur 15 à 20 pouces de largeur, et de 12 à 16 d'épaisseur. Varangues acculées de fond et de porques de 12 à 18 pieds de long, de 15 à 20 pouces d'épaisseur, et de 12 à 16 de largeur. Genoux de revers de 14 à 22 pieds de longueur sur 15 â 18 pouces de largeur, es de 14 à 16 pouces d'épaisseur.

Les courbes proviennent du corps de l'arbre et d'une maîtresse branche, ou du corps de l'arbre et d'une racine, on enfin de deux branches qui forment entre elles un angle plus ou moins ouvert. Le pied de la courbe de première espèce doit avoir 10 à 12 pieds de long, la branche 8 à 9 pieds aussi de long, la largeur sur le tour, au pied, de 15 à 18 pouces, et la branche. 13 à 15 ponces, etc., etc. (2) Lettre sur le Robinier, page 26.

pour

veaux arbres, choisissons au moins ceux dont le port, le feuillage et les fruits promettent le plus d'avantages à l'harmonie rurale (1).

« Nous avons rempli la tâche que vous nous aviez imposée, mais nous ne pouvons vous cacher que c'est avec peine que nous nous y sommes livrés. En effet, Messieurs, il répugnoit à notre caractère d'accueillir par la critique un ouvrage dont l'auteur n'a que des vues bienfaisantes, et qui, s'il est tombé dans quelques erreurs, n'y a été entraîné que par l'enthou siasme pour le bien général. »

En adoptant entièrement l'avis de M. le conservateur des forêts du neuvième arrondissement, nous ajouterons cependant que d'après son rapport, il paroît être échappé à l'auteur du TRIOMPHE DE L'ACACIA, de parler d'une des propriétés de cet arbre; nous di rons donc, pour réparer cette omission, que l'Académie de Bordeaux, ayant proposé l'année dernière un prix, dont l'objet étoit de déterminer « quelles sont les espèces de bois qu'on peut faire concourir avantageusement, avec le chéne, pour la fabrication des barriques. » Ce prix a été adjugé unanimement à M. DUPUIS, agriculteur, domicilié à SaintFoix sur Dordogne, qui a démontré, par des expériences incontestables, que l'Acacia peut-être de même usage que le chêne sous ce rapport: d'ou il résulte une découverte importante pour les pays de vignobles, où l'Acacia, comme le chêne, pourroit, à la fois, être employé en échalas et à la fabrication du Merrain. Nous observerons encore qu'en Amérique, on emploie des chevilles de bois d'Acacia dans le construction des vaisseaux, de préférence à tout autre bois.

(1) Harmonie hydro-végétale, T. premier, page 130.

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