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ne peut devenir fructueuse, qu'autant qu'elle est dirigée d'après les principes établis. Ils ont également emprunté aux autres sciences ce qui pouvoit être utile à l'art du forestier. Monsieur de Burgsdorf en insistant avec force sur la nécessité d'étudier les sciences naturelles et mathématiques, a déterminé dans le manuel dont j'ai donné la traduction (1), la portion de chacune de ces sciences, qui devoit concourir à former la science forestière proprement dite. Il a considéré que si l'instruction en général étoit nécessaire dans une partie qui embrasse les trois règnes de la nature, on ne devoit pourtant point exiger d'un élève des connoissances trop étendues de ces objets et qu'en un mot, on pouvoit être un fort bon forestier sans être précisement un naturaliste. Mais ce qu'il exige et ce qu'on exige dans toute l'Allemagne, est déjà considérable, et l'on ne peut l'acquérir sans des études spéciales. Aussi existe-t-il dans plusieurs contrées de cet empire des écoles forestières où l'on enseigne la botanique, la minéralogie, la zoologie, la physique, les mathématiques, le droit, etc. (chacune de ces sciences dans ses rapports avec l'économie forestière). Le système de botanique généralement suivi dans ces écoles est celui de Linné, et il paroît que le langage latin de l'auteur est encore celui dans lequel se fait l'enseignement. Delà vient que de simples gardes, de simples jardiniers emploient des phrases linnéenes pour dénommer et caractériser les plantes. Ces hommes qui ont contracté pour l'une des sciences les plus intéressantes un goût décidé, s'attachent ordinairement avec passion à leur état, et tâchent d'y appliquer utilement pour la chose, les connoissances qu'ils ont acquises. Il

(1) Deux volumes in-8°. aussi chez Arthus-Bertrand.

st certain qu'on rencontrera plus rarement ce goût, cet attachement pour son état, dans celui qui est étra nger aux mêmes connoissances et qui, transporté toutà coup dans les forêts, s'y trouve comme un voyageur au milieu d'une nation dont il ignore le langage, les mœurs et jusqu'aux usages les plus habituels. Ses idées sont vagues, ses observations incertaines et ses essais souvent malheureux; le dégoût suit, et au lieu d'occupations qui devoient charmer sa vie, il ne voit que des travaux pénibles dont il conteste souvent l'utilité parce qu'il ne l'aperço:t pas. On remarque en effet que les hommes n'attachent que peu ou point d'importance aux choses dont ils ne se sont point occupés, et que celles qu'ils savent le mieux, leur paroissent toujours les plus utiles, ce qui semble provenir d'un sentiment d'amour propre. Il résulte de cette observation, qu'un homme sage devroit se méfier de ses propres goûts et chercher à s'assurer que ceux des autres sont sans utilité avant de les condamner. Sachons donc prendre dans les différentes connoissances humaines ce qui est nécessaire pour former un bon forestier, et sans montrer d'autre préférence que celle que mérite réellement telle ou telle partie d'instruction, essayons de diriger nos goûts vers les objets. dont les bons maîtres ont constaté le mérite. Au nombre de ces objets se trouve l'étude des plantes; et notamment de celles sur lesquelles s'exerce l'économie forestière. Les grands arbres qui composent la masse des forêts doivent fixer particulièrement notre attention. Viennent ensuite les arbres de moindre importance, les arbrisseaux et les arbustes; enfin les plantes herbacées qui se trouvent le plus ordinairement dans les bois, et dont l'étude intéresse plus qu'on ne pense les opérations qu'on y fait. Elles donnent lieu de connoître la qualité des pâturages, la

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nature du sol et le plus ou moins de difficulté des semis et des plantations. On juge par exemple, qu'un, pâturage est bon, quand on y voit dominer le trifolium, plusieurs espèces de festuca, d'avena, les luzernes, les chicorées, les pimprenelles, les sanguisorbes, la vesce des bois, plusieurs espèces de paturins, les stellaires, l'aspérule odorante dont les bestiaux sont très avides; le muguet de mai, et le muguet anguleux ou sceau de Salomon dont les chevaux sont très friands, etc., etc.; on juge au contraire que le pâturage est mauvais, s'il est principalement composé de leiches, de presle, de fougères, de brôme, de bétoine, de berle, de patience sauvage, de joncs, de roseaux, etc., etc.; la présence de l'oseille ordinaire, de la berce, de gesce, des luzernes, des chicorées, des trefles, etc., et la belle croissance de ces plantes décèlent un bon fond; tandis qu'on juge de la maigreur et de l'aridité d'un terrain par la présence des brômes, de la thitimale, de la petite oscille, de l'élyme et des autres plantes dites des sables, de l'ajonc, du génèvrier, des genéts, des bruyères, etc.; un terrain humide s'annonce par la production des plantes qui lui sont propres, telle que la presle des bois, la lychnide laciniée, langelique sauvage, l'osmonde et quelques autres fougères, quelques espèces d'iris; les glayeuls, la patience aquatique, le pied de veau des marais, le ledum palustre, le festuca fluitans, la massette, etc.; enfin un terrain argileux se reconnoit à la présence du tussilage pas-d'ane, de la potentille rampante, du plantain moyen, de la chicorée sauvage, de l'yeble, etc.; le terrain calcaire par la brise vulgaire, le seslerie bleuatre, la germandrée-petit chêne, celle des montagnes, le sainfoin, etc.; le terrain

sableux par une foule de plantes dites des sables, telles que le saule des sables, le genét à balais, l'élyme des sables, le roseau des sables; l'aillet des sables, Therniaire glabre, le serpolet, l'euphorbe ésule, et une grande quantité d'autres plantes dont on peut voir la nomenclature dans le nouveau dictionnaire d'agriculture de Déterville, à l'article terrain, rédigé par monsieur Bosc (1). On verra encore à cet article le nom des plantes qui croissent particulièrement dans les bois. Ils forme à lui seul un espèce de flore forestière.

L'étude des arbustes et des herbes qu'on trouve dans les forêts est également utile, comme nous l'avons déjà exposé, pour faire apprécier la dépense des semis et plantations; par exemple, on jugera que le défoncement sera difficile, et que les façons devront être multipliées, si le terrain est couvert de plantes à racines traçantes, telles que les bruyères, les genéts, l'ajoncs, le tamarix, le liciet, l'arrête boeuf, les ronces, les épines, le chiendent, les luzernes, les festuca, les fougères, plusieurs espèces de roseaux, de polypodium, de carex, etc.

Cet aperçu des indices que l'on peut tirer de la présence des plantes dans les forêts, suffiroit pour faire sentir la nécessité d'apprendre à les connoître, si on n'en n'étoit déjà convaincu. L'ouvrage que nous annonçons ne peut donc qu'être fort utile aux forestiers. Nous n'avons rien à dire de cet ouvrage en luimême qui ne soit déjà connu. Le systema vegeta

(1) Ce dictionnaire composé de 13 volumes in 8° est rempli d'excellens articles forestiers que nous devons à messieurs Bosc et Déperthuis, fils. (On le trouve chez Arthus - Bertrand, libraire.

bilium de l'immortel LINNÉ, est dans les mains de tous ceux qui étudient les végétaux. On ne peut même s'en passer, quelque soit le système ou la méthode de botanique que l'on suive, parce que la plupart des autres méthodes se rattachent à ce système par plusieurs points essentiels, et qu'elles ont adopté les formules claires et précises introduites dans la science par le botaniste suédois.

par

Jetons maintenant un coup d'œil rapide sur l'histoire de la botanique pour faire connoître l'importance de cette science et combien cette riche et belle partie de l'histoire naturelle a occupé les savans. Nous emprunterons ce que nous aurons à dire à cet égard des savans articles de M. Dutour dans le dictionnaire d'histoire naturelle, et de M. Décandolle, dans le dictionnaire d'agriculture.

La botanique doit sa naissance à l'agriculture et à la médecine. L'homme avant d'avoir acquis aucune industrie, chercha à connoître les végétaux qui pouvoient lui fournir un aliment commode et sain. Il en fit usage, et dans la suite, il les multiplia et les perfectionna par l'agriculture. L'art de guérir vint à son tour chercher dans le règne végétal des moyens de prolonger la vie des hommes, et de soulager les maux de l'humanité. Mais l'étude des plantes devint de plus en plus difficile, à mesure que les découvertes se multiplièrent, et le défaut d'indication exacte des caractères auxquels on pouvoit les reconnoître occasiona de la confusion et des méprises dangereuses. Les noms différens et les formules vagues et équivoques dont les premiers médecins chargèrent la botanique contribuèrent encore à l'envelopper d'obscurité. Mais par la suite, ils la firent sortir du cahos, et posèrent les principes qui en ont rendu l'étude plus facile et plus certaine.

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