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négociants allemands et étrangers ne craignent même pas de contrefaire les marques de fabrique françaises.

Les articles français les plus atteints par ces manœuvres sont : les conserves alimentaires, les vins, les modes, les draps, les cuirs, etc. Les vins de Bordeaux, de Bourgogne et de Champagne, très appréciés en Roumélie depuis que les Russes les y ont fait connaître en 1878, ne se rencontrent plus qu'à l'état de falsification de provenance allemande ou autrichienne. (J. Ch. de com., 25 déc. 1891.)

- Cf. sur ce même sujet de la contrefaçon des marques françaises en Turquie et des moyens de la combattre, Clunet 1889, p. 543, et l'étude très complète de Salem, ibid. 1888, p 719.

BIBLIOGRAPHIE

Conflits des lois suisses en matière internationale et intercantonale. Commentaire du traité franco-suisse du 15 juin 1869, par M. Ernest ROGUIN, professeur de législation comparée à l'université de Lausanne, ancien conseiller de la légation de Suisse à Paris. Lausanne, Rouge; Paris, Pichon, 1891.

Le livre de MR. doit certainement compter au nombre des meilleurs auxquels a donné naissance la science du droit international. De parti pris, M. R. a écarté de son œuvre les développements purement théoriques; les quelques aperçus qu'il a dû, néanmoins, parfois fournir, pour la bonne intelligence des renseignements pratiques qu'il donnait, montrent d'ailleurs, ainsi que la Regle du Droit qu'il publia il y a quelques années, que son esprit est ouvert aux spéculations théoriques; quoi qu'il en soit, dans le livre que nous signalons aujourd'hui à nos lecteurs, notre distingué collaborateur a voulu s'en tenir a l'étude de ce qui est, sans rechercher s'il n'y aurait pas lieu de réaliser certaines améliorations dans les relations intercantonales ou internationales de la Suisse. La place malheureusement restreinte dont nous disposons ne nous permet pas de signaler les parties de ce travail qui nous ont particulièrement intéressé. Nous attirerons, cependant, l'attention sur la critique savante faite par l'auteur de la jurisprudence suisse, en matière de divorce, comparée à celle admise en matière de mariage, sur les renseignements complets et logiquement exposés relatifs aux dispositions du traité de 1869 sur la compétence, nous indiquerons les pages ingénieuses consacrées à la question de l'unité de la faillite dans les rapports entre la France et la Suisse et, par dessus tout, nous insisterons sur la discussion véritablement captivante et attachante que M. R. consacre au point de savoir si, nonobstant le traité de 1869, la loi française du 14 juillet 1819 est encore invocable à l'encontre des héritiers suisses. Pour être complet, nous devrions indiquer tous les chapitres de ce livre, dont M. R. avait déjà fourni la quintessence à nos lecteurs en voulant bien consacrer, dans notre Journal, des articles très remarqués aux principales difficultés susceptibles de naitre dans les rapports réciproques de la Suisse et de la France. Nous nous contenterons de dire qu'en résumé, cet excellent livre est indispensable à tous ceux qui ont à s'occuper des relations entre Suisses et Français.

Traité élémentaire de droit civil germanique (Allemagne et Autriche), par M. Ernest LEHR, docteur en droit, professeur honoraire de législation comparée à l'Université de Lausanne, membre de l'Institut de droit international. — 2 vol. in-8°, Paris, Plon, Nourrit et Cie.

En 1875, notre éminent collaborateur commençait, par la publication des éléments de droit civil germanique, la série des traités qu'il a depuis successivement consacrés à l'étude des principales législations de l'Europe; depuis longtemps, le monde savant et le

monde des affaires demandaient une réimpression des éléments du droit germanique; les deux volumes qui viennent de paraître, et dont nous ne saurions trop faire l'éloge, sont destinés à donner pleine satisfaction aux désirs des uns et des autres; sur chacun des points traités, M. L. a pris soin d'indiquer les solutions admises par le projet du Code civil allemand; au surplus, l'ordre adopté dans cette seconde édition est, en principe, le même que celui suivi dans la publication précédente, mais les développements fournis sont de beaucoup plus nombreux, et l'on peut dire que son auvre remarquable est un véritable traité, très harmonieusement disposé, du droit civil allemand et autrichien. Traité théorique et pratique du droit international privé, tome Ier, de la nationalité, par M. ANDRÉ WEISS, professeur agrégé à la Faculté de droit de Paris, associé de l'Institut de droit international. 1 fort vol. in-8°. Paris, Librairie du recueil général des lois et des arrêts et du Journal du Palais, 1892.

M. W. dont le traité élémentaire a obtenu le prix Wolowski, vient de commencer la publication d'un traité théorique et pratique de droit international privé en cinq volumes; le premier volume de cette œuvre considérable est consacré aux questions de nationalité, et particulièrement au commentaire de la loi française de 1889; cette étude s'imposait au début de ce traité; l'œuvre de notre très distingué collaborateur est divisée en deux grandes partics, dont l'une est consacrée à la nationalité d'origine, l'autre, au changement de nationalité, ce qui comprend la naturalisation, la perte et le recouvrement de la qualité de Français; chacune de ces parties se termine par des données très importantes de législation comparée et par l'indication de quelques-uns des conflits que fait naitre cette diversité de législation. Cette œuvre, d'une grande valeur doctrinale et élégamment écrite, comptera au nombre de celles dont la science française est en droit de s'enorgueillir.

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Le droit international codifié et sa sanction juridique, suivi d'un résumé historique des principaux traités internationaux, par Pasquale FIORE, trad. par A. CHRÉTIEN. 1 vol. in-8°, Paris, Chevalier. Marescq, 1890. L'ouvrage que nous signalons à nos lecteurs présente ce caractère tout particulier que l'auteur a abordé de front la question si ardue de la sanction juridique des données du droit international public; il pense que l'arbitrage international peut être de nature à mettre fin aux problèmes d'ordre secondaire, mais il ne lui reconnait pas la vertu de pouvoir servir à trancher toutes les difficultés susceptibles de naître entre les divers Etats formant la magna civitas; ce sur quoi il compte, c'est sur le développement progressif de la conscience des masses qui aura pour effet, dans un avenir plus ou moins éloigné, non pas de supprimer la guerre, mais de créer entre les divers Etats une union juridique dont le rôle sera, par des délégués, de trancher les conflits entre nations, et, au besoin, de faire respecter, par tous moyens, les décisions prises par ce Tribunal international ou congrès. Le livre de M. Fiore est un des plus fortement pensés auxquels la science du droit international a donné lieu dans ces derniers temps.

Le droit de la guerre, 1r partie, les hostilités, par A. PILLET, professeur à la Faculté de droit de Grenoble. 1 vol. in-8°. Paris, Arth. Rousseau, 1892.

Ce livre est la reproduction de conférences faites aux officiers de la garnison de Grenoble; l'étude des questions traitées par notre très distingué collaborateur ne rentre pas directement dans le cadre de ce journal; nous tenons cependant à attirer tout specialement l'attention de nos lecteurs sur l'introduction dans laquelle M. P. démontre, d'une manière très neuve et très heureuse, que le droit des gens constitue un véritable droit ; il établit que, si certains jurisconsultes admettent sur ce point une opinion opposée, leur erreur provient non pas d'une conception erronée de la nature du droit des gens, mais procede d'une méconnaissance de la véritable nature du droit en général; M. P. pense qu'à cet égard on a eu tort de ne pas se résoudre à séparer la loi de la force qui sert à la faire respecter; pour lui, la force n'étant pas le droit lui-même et ne lui donnant pas son autorité, l'existence d'un droit entre les nations n'est pas impossible par cela seul que l'intervention d'une force publique supérieure est irréalisable. Ces pages, d'une pensée profonde, seront méditées par tous avec profit.

Les Editeurs-Gérants: MARCHAL ET BILLARD.

MACON, PROTAT FRÈRES, IMPRIMEURS

De l'état actuel du droit des auteurs étrangers en France et des auteurs français à l'étranger.

INTRODUCTION

1. Le 1er février 1892, une modification profonde a été apportée au régime économique de la plupart des peuples d'Europe; le système protectionniste a été substitué à celui du libre échange. L'initiative de ce changement appartient à la France et les autres nations n'ont fait qu'imiter ce pays lorsqu'elles ont frappé de droits plus élevés que par le passé les marchandises pénétrant sur leur territoire. Certains de ces Etats avaient menacé d'exercer des représailles à l'encontre des auteurs et des artistes français. Depuis quelque temps déjà, le nouveau système douanier est en vigueur, il nous a paru utile de rechercher quelle est, à l'heure actuelle, la condition des auteurs étrangers en France et, réciproquement, celle des auteurs français à l'étranger. Nous avons spécialement insisté sur les difficultés qui pouvaient naître entre la France et les principaux Etats avec lesquels notre pays est ou peut être en conflit économique, mais, en vue de fournir de la question un tableau d'ensemble, nous avons successivement passé en revue les diverses lois et conventions qu'il nous a été donné de consulter.

2. On peut s'étonner, à première vue, que la mise en vigueur de nouvelles lois douanières puisse avoir ainsi son contre-coup sur la reconnaissance du droit des auteurs et des artistes. S'il est, en effet, une idée qui semble acceptée actuellement sans protestation, c'est que les droits intellectuels sont des droits naturels qui, par suite, doivent ètre consacrés au profit de tous, sans distinction de nationalité; cela est vrai, et maints congrès, maints pouvoirs ou assemblées politiques ont proclamé ce principe; mais les circonstances changent et les conseils de l'intérêt peuvent obscurcir une notion qu'avait mise en pleine lumière une recherche désintéressée des principes de justice.

3. Il est bon de remarquer d'ailleurs que, depuis que les divers Etats ont pris l'habitude de signer entre eux des conventions réciproques pour la garantie des droits intellectuels, une certaine connexité s'est établie entre ces matières et celles qui forment l'objet ordinaire des traités de comJOURNAL DU DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ, T. 19. No VII-VIII-IX-X 1892. 51

merce; quelques pays étrangers n'ont consenti à respecter les œuvres françaises que moyennant la concession qui leur était faite d'avantages commerciaux; c'est ce qui s'est passé notamment en 1852 dans nos rapports avec la Belgique et en 1864 dans nos relations avec la Suisse. Le plus souvent même, presque dans ces derniers temps, les dispositions relatives à ce qu'on appelle la propriété littéraire et artistique trouvaient place dans les traités de commerce. Cependant, sous l'influence des vœux émis par divers congrès, un progrès considérable paraissait avoir été réalisé dans ces dernières années; il semblait que la reconnaissance réciproque du droit des auteurs et des artistes avait été rendue indépendante des stipulations des traités de commerce.

4. Mais cette apparence était trompeuse; sans doute, depuis 1880, les dispositions relatives à nos matières n'ont plus été insérées que très rarement dans les traités de commerce et lorsqu'elles ont fait l'objet de conventions spéciales, la durée de celles-ci n'a plus été que très exceptionnellement subordonnée d'une manière expresse à celle des traités de commerce. Cependant la plupart des Etats étrangers s'étaient arrangés de façon à pouvoir dénoncer leurs conventions littéraires et artistiques avec la France pour que celles-ci cessent de produire effet le 1er février 1892, c'est-à-dire le jour même depuis longtemps indiqué pour l'échéance des principaux traités de commerce de ces pays avec la France.

5. Voici quelle était, à cet égard, la situation à l'époque choisie pour le renouvellement des traités de commerce : tout d'abord, certains accords particuliers étaient manifestement solidaires des traités de commerce; il en était ainsi dans nos rapports avec le Mexique (traité d'amitié, de commerce et de navigation du 27 novembre 1886, art. 21, § 7), avec la Suède et la Norwège (arrangement du 15 février 1884, art 1er, combiné avec l'article additionnel au traité de commerce du 30 décembre 1881) et avec le Luxembourg (Convention du 16 décembre 1865, art. 17).

6. D'autres conventions littéraires et artistiques avaient été conclues, avec la faculté pour les hautes parties contractantes den faire cesser les effets le 1er février 1892, sous la condition de faire connaître leur intention conforme par une dénonciation faite un an à l'avance; il en était ainsi du traité Franco-belge (du 31 octobre 1881, art. 16) et du traité francosuisse (du 23 février 1882, art. 34).

7. Quelques autres conventions, signées depuis un certain temps, ne subsistaient plus que par une sorte de tacite reconduction et pouvaient par suite faire l'objet d'une dénonciation avant le 1er février 1891. Dans cette catégorie, il y avait lieu de ranger nos accords avec l'Allemagne (traité du 19 avril 1883, art. 17); l'Autriche-Hongrie (conv. du 11 décembre 1866, combinée avec l'arrangement du 18 février 1884); l'Espagne (traité du 16 juin 1880, art. 10); le Portugal (traité du 11 juillet 1866, art. 15); le Salvador (traité du 2 juin 1880, art. 17).

8. On pouvait, semble-t-il, placer dans la même classe la déclaration du 8 septembre 1887 entre la France et la Bolivie ; celle-ci, mise en vigueur en France par un décret du 30 juin 1890, n'indique pas la durée pour laquelle elle a été consentie, mais il semble que, conformément à la pratique ordinairement suivie en nos matières, elle peut faire l'objet d'une dénonciation, destinée à produire effet après l'expiration

d'une année.

9. Sous le rapport que nous examinons, nos traités avec l'Italie et les Pays-Bas faisaient exception; ils ne pouvaient. être dénoncés pour cesser d'être obligatoires le 1er février 1892; c'est qu'en effet le traité franco-italien du 9 juillet 1884, exécutoire depuis le 21 avril 1885, doit, au minimum, rester en vigueur pendant une durée de dix années, c'est-à-dire tout au moins jusqu'au 21 avril 1895; le traité franco-hollandais du 29 mars 1855 et l'arrangement supplémentaire du 27 avril 1860 étaient jadis solidaires du traité de commerce entre les deux Etats intéressés, mais la déclaration du 19 avril 1884, qui les a remis en vigueur, doit demeurer exécutoire pendant dix ans, c'est-à-dire au moins, jusqu'au 8 août 1895.

10. Cette situation avait éveillé des craintes très vives chez les intéressés ; le Journal a déjà enregistré certaines des protestations des auteurs et des artistes contre les tarifs douaniers (V. Clunet, 1891, p. 120); il n'est donc pas nécessaire d'insister à nouveau sur ces incidents de la discussion des lois douanières; mais il est un point des débats au Sénat qui mérite attention: le 15 décembre 1891, le Sénat avait à statuer sur un amendement de MM. Volland, Cordelet et autres qui tendait à frapper d'un droit d'entrée les livres en langue française, imprimés à l'étranger; l'association littéraire et artis

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