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ils peuvent être annulés: mais il faut, dans ce dernier cas, que la cause de l'interdiction ait existé notoirement à l'époque où les actes ont été faits; le tout sans préjudice de l'action ouverte en vertu de l'article 1109. (P. 569.)

Questions.

L'individu qui était en état de démence notoire au moment où il a souscrit l'acte, et qui a recouvré la raison avant que son interdiction ait été prononcée, peut, en se fondant sur la notoriété de son état, demander la nullité de cet acte. (P. 570.)

L'incapacité résultant de l'interdiction est complète; elle s'étend, sans aucune distinction, à tous les actes de la vie civile. (P. 570.)

L'action se prescrit par dix ans ; le délai court du jour où l'interdiction a été levée. (P. 571.)

Les héritiers ne sont point recevables à demander la nullité des actes à titre onéreux (art. 504) faits par leur auteur non interdit, en se fondant uniquement sur ce que la date de ces actes remonte à une époque où il se trouvait dans un cas notoire d'interdiction.-Le législateur a voulu les punir de leur insouciance. (P. 572.)

Cette règle souffre exception: 1o lorsque l'interdiction a été sinon prononcée, du moins provoquée de son vivant; 2o lorsque l'acte a été souscrit par une personne placée dans un établissement d'aliénés ; 3o lorsque la preuve de la démence résulte de l'acte même qui est attaqué dans ce dernier cas, l'acte peut être déclaré nul, non-seulement pendant dix ans, mais encore à toute époque, puisqu'il n'y a rien.

L'article 504 suppose évidemment qu'il s'agit d'un acte à titre onéreux.-Les mêmes conditions ne sont pas prescrites pour la nullité des actes à titre gratuit. (P. 573.)

Qustion.

Si le défunt n'a eu que des accès momentanés, ses héritiers ne sont point recevables à invoquer le bénéfice de l'article 504; mais ils peuvent toujours se prévaloir du bénéfice de l'article 1109. (P. 573.)

Quelles causes font cesser l'état d'interdiction (art. 512). L'interdiction ne cesse que par un jugement de mainlevée. Le tribunal compétent est celui qui a prononcé l'interdiction.-La procédure à suivre est la même.

Si le jugement ne donne pas mainlevée pure et simple, mais place l'interdit sous l'assistance d'un conseil, il y a lieu de remplir les formes prescrites par l'article 501. (P. 575.)

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Question. - La demande en mainlevée ne peut être formée que par l'interdit lui-même (P. 575.)

CHAPITRE III.

DU CONSEIL JUDICIAIRE (515-515).

Voy. le sommaire (p. 576).

RÉSUMÉ. —

La nomination d'un conseil judiciaire peut avoir lieu dans deux cas: to lorsque l'individu est faible d'esprit, ou incapable, à raison de quelque infirmité qui n'exclut pas l'intelligence, de prendre soin de ses affaires; 2° pour cause de prodigalité. — Les effets de cette nomination sont identiques dans l'un et l'autre cas. (P. 578.)

La loi ne pouvait déterminer les caractères de la prodigalité; elle s'en remet à l'appréciation des tribunaux. (P. 578.)

Le conseil judiciaire est toujours nommé par le tribunal, jamais par la famille ; la procédure à suivre est celle que l'on observe pour faire prononcer l'interdiction.

Nous pensons qu'on ne peut charger de cette mission qu'une seule personne. (P. 578.)

L'individu soumis à un conseil peut faire en général tous actes civils; son incapacité n'est qu'une exception : la loi prend soin de déterminer les actes qu'elle entend lui interdire. (P. 578-580.) - Les actes faits sans assistance, lorsqu'elle est prescrite, sont annulables. La nullité peut se couvrir par la ratification; notamment, par le silence gardé pendant dix années depuis la mainlevée du jugement. (P. 583.)

Quant aux actes antérieurs à la nomination du conseil, nous avons vu qu'ils sont inattaquables, même sous prétexte que la prodigalité existait notoirement. (V. p: 569 et 583.)

Régulièrement, le conseil doit figurer dans l'acte même.-Toutefois, dans la pratique, il exprime ordinairement son avis par écrit séparé: mais il faut que cet écrit soit antérieur à l'acte qu'il s'agit d'autori. ser, qu'il soit annexé à cet acte, et qu'il soit spécial. (P. 582.)

Si le conseil refuse son concours, le prodigue ou le faible d'esprit peut en référer au tribunal. Si c'est le prodigue qui refuse d'agir, il n'existe aucun moyen de l'y contraindre. (P. 581.)

Pour obtenir mainlevée du jugement qui nomme un conseil, on observe les formes voulues pour la nomination. Le tribunal compétent est celui du domicile du prodigue. (P. 554.)

Questions.

Nul ne peut demander à être pourvu d'un conseil. (P. 582.)

Le ministère public peut faire nommer un conseil à celui qui n'a ni parents connus ni conjoint. On applique ici la règle établie par l'article 491 pour le cas d'interdiction. (P. 583.)

Les actes passés par le prodigue durant l'instance sont valables en principe. (P. 583.)

Le conseil n'est pas responsable des conséquences de ses avis. (P. 583.)

L'individu soumis à un conseil judiciaire peut être tuteur. (P. 583.)

APPENDICE. I oi du 30 juin 1838 sur les aliénés. (V. p. 585.)

593

LIVRE II..

DES BIENS ET DES DIFFÉRENTES MODIFICATIONS DE LA PROPRIÉTÉ.

Après avoir exposé dans le livre précédent les règles qui concernent principalement les personnes, la loi s'occupe des biens.

:

Fixons-nous d'abord sur la signification propre de ces mots choses et biens.

Le mot chose est générique; il désigne tout ce qui existe dans la nature, même ce qui n'est pas susceptible de tomber dans le domaine de l'homme par exemple, l'air, les astres, etc.

Le mot bien a un sens plus restreint: il exprime ce qui peut être l'objet d'une propriété publique ou privée; ce qui peut contribuer au bien être matériel ou moral de l homme, pris individuellement.

Cela posé, on doit considérer comme biens: 1o toutes les choses quæ tangi possunt; - 2o les droits, c'est-à-dire, les liens civils qui unissent les choses à celui qui en a la propriété, ou qui peut exiger qu'on le rende propriétaire;-3° enfin, les rapports moraux, quoiqu'ils ne soient point par eux-mêmes appréciables à prix d'argent nous donnerons pour exemple les liens entre époux, entre ascendants et descendants, l'honneur, la réputation, la considération : ce sont là des biens, car ils constituent l'existence de l'homme dans la vie sociale, et donnent lieu, en certains cas, à des dommages-intérêts, même à l'exercice d'une action publique.

Quoi qu'il en soit, il ne peut être question dans ce livre que des choses appréciables, c'est-à-dire, des biens qui sont susceptibles d'être relatés dans un inventaire.

Le patrimoine d'une personne se compose de l'utilité collective que ses biens sont susceptibles de procurer.

Le patrimoine est donc une universalité de biens, un ensemble juridique.

Comme la loi ne s'occupe des choses qu'autant qu'elles peuvent entrer dans le domaine de l'homme, on emploie indistinctement, dans le langage du droit, les mots choses et biens.

Ce livre renferme 4 titres le premier traite de la distinction des biens; les trois autres déterminent les divers droits que l'on peut acquérir.

TITRE PREMIER.

DE LA DISTINCTION DES BIENS.

La loi considère les biens sous deux points de vue : 10 en eux-mêmes, d'après leur nature constitutive (chap. 1 et 2);-2o dans leurs rapports avec les personnes (chap. 3).

Les biens, considérés sous ce dernier point de vue, sont l'objet de plusieurs divisions admises par la doctrine; quelques-unes sont consacrées par la loi elle-même. Nous croyons utile de les réunir au commencement de ce titre, sauf ensuite à revenir sur chacune d'elles lorsque nous examinerons les règles qui s'y réfèrent spécialement.

Les biens sont corporels ou incorporels corporels, lorsqu'ils ont une existence matérielle, comme une maison, un cheval;

Incorporels, lorsqu'ils ne consistent que dans un droit, lorsqu'ils n'ont qu'une existence intellectuelle (1).

Les biens corporels sout meubles ou immeubles.

Les biens meubles sont ceux qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit par eux-mêmes, comme les êtres animés; soit par l'effet d'une force étrangère, comme les corps inanimés.

On comprend sous le nom d'immeubles, les fonds de terre, tout ce qui s'y trouve incorporé, et qui n'en peut être séparé sans dégradation, ainsi que les objets mobiliers placés sur un fonds à perpétuelle demeure (voy art. 517).

Les biens incorporels ne sont par eux-mêmes ni meubles ni immeubles; néanmoins, comme toutes les choses que l'on peut acquérir sont rangées dans l'une de ces deux grandes catégories, le législateur a cru devoir y comprendre les biens incorporels, en attribuant à ces biens, par sa force créatrice, une nature mobilière ou immobilière, suivant que l'objet auquel ils s'appliquent est meuble ou immeuble.

Les biens sont principaux ou accessoires : la chose principale est celle à laquelle l'autre n'est attachée que pour augmenter les avantages qu'elle procure, ou comme ornement.-Les choses accessoires sont celles que l'on doit considérer comme le complément d'une autre. — Cette distinction est donc fondée sur la relation intime qui peut exister entre deux choses dont l'une est destinée à suivre le sort et la condition

(1) Cette dénomination de biens ou de choses, donnée à une faculté, à un droit, à une abstraction, est vivement critiquée : quand l'objet est caractérisé, disent quelques auteurs, à quoi bon caractériser le droit? Ainsi, les servitudes, étant une qualité du fonds, ne peuvent être séparées du fonds. Ainsi, l'action n'est autre chose que le droit de propriété en exercice devant la Justice. Cette observation est juste lorsqu'il s'agit de la propriété d'une chose corporelle; comme le droit absorbe alors toute l'utilité que la chose procure, on peut prétendre qu'il représente cette chose et l'envisager en quelque sorte comme constituant un droit corporel. Mais il en est autrement lorsque le droit est personnel, ou lorsque le droit, bien que réel, n'absorbe pas toute l'utilité de la chose. Alors, on n'est plus fondé à dire que le droit est représenté matériellement par cet objet.

de l'autre Accessorium sequitur principale. Elle se rattache au droit de propriété. (Voyez tit. 2.)

Enfin, les biens sont fongibles ou non fongibles : cette division ne résulte pas du texte; néanmoins, elle a son importance en matière d'usufruit (587), de compensation (1291) et de prêt (1892).

516-Tous les biens sont meubles ou immeubles.

=

Dans une foule de circonstances, il importe de distinguer les meubles des immeubles par exemple, les meubles que les époux possèdent au jour de la célébration de leur mariage tombent dans la communauté conjugale; les immeubles n'y tombent pas (1401-1404). — Les immeubles peuvent être grevés d'hypothèques; les meubles n'en sont pas susceptibles (2118-2119).-Les formes de la saisie mobilière ne sont pas les mêmes que celles de la saisie immobilière. - Tel peut aliéner ses meubles qui ne peut aliéner ses immeubles (484, 513, 1538, 1576).—La revendication des immeubles est admise; on ne peut revendiquer les meubles, à moins qu'ils n'aient été perdus ou volés (2219).—La vente des immeubles peut être rescindée pour cause de lésion de plus des sept douzièmes (1672); la lésion ne donne pas lieu à la rescision de la vente d'un meuble. Enfin, il peut arriver qu'une personne lègue tous ses meubles ou tous ses immeubles.

Il est certains meubles que les lois permettent d'immobiliser sous certaines conditions: telles sont les rentes sur l'État, les actions de la banque de France, et celles de la compagnie des canaux de Loing et d'Orléans (1).

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Nous verrons qu'en certains cas la loi considère la même chose tantôt comme meuble, tantôt comme immeuble (art. 528); ce qui a lieu pour les récoltes et pour les choses dites immeubles par destination (2). - Nous verrons en outre que les parties elles-mêmes ont la faculté d'attribuer, par contrat de mariage, la qualité de meubles à des immeubles, aut vice versa. Toutefois, cet ameublissement ou cette immobilisation ne produit d'effet qu'à l'égard des époux: vis-à-vis des tiers, la chose conserve son caractère propre (1500, 1510).

Les obligations de faire sont-elles meubles ou immeubles? Elles prennent le caractère de la chose qui en est l'objet : ainsi, elles sont meubles, s'il s'agit de faire ou de conserver un objet mobilier; immeubles, si elles s'appliquent à un immeuble, et cela quand même il y aurait lieu d'appliquer l'art. 1141 relatif aux dommages-intérêts; car ce ne sont pas les dommages-intérêts qui sont dus principalement : la loi ne dit pas que les obligations de faire consistent dans des dommages-intérêts.

(1) Décrets du 16 janvier 1808, du 1er mars 1808, du 3 mars et du 16 mars 1810. (2) Cass., 22 mars 1833, Dev. Pal.

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