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L'article 22 du décret du 30 mars 1808, d'après lequel les questions d'état portées en cour d'appel doivent être jugées en audience solennelle, ne sont point applicables en cas de séparation de corps. (P. 37.)

L'acquiescement exprès de l'époux défendeur, au jugement de séparation de corps, ne le prive pas du droit de former opposition ou d'interjeter appel : autre chose, en effet, est de laisser expirer les délais accordés pour attaquer le jugement, autre chose est d'acquiescer. (P. 37.)

Le défendeur peut acquiescer au jugement interlocutoire qui a ordonné l'enquête. (P. 38.)

Effets de la séparation de corps.

Les effets de la séparation de corps peuvent être considérés sous trois points de vue :

1o En ce qui touche les enfants;

2o En ce qui concerne les relations des époux entre eux;

3o En ce qui concerne leurs intérêts pécuniaires.

Par rapport aux enfants, le père conserve l'autorité paternelle, lors même qu'il a été défendeur à la demande en séparation de corps; - toutefois, le tribunal peut prescrire telles mesures qu'il juge convenables, relativement à leur personne et à l'administration de leurs biens; les articles 302 et 303 sur le divorce s'appliquent à la séparation de corps. Quant à l'article 386, qui déclare l'époux contre lequel le divorce a été obtenu, déchu de la jouissance des biens de ses enfants, on s'accorde à décider qu'il faut le restreindre au cas de divorce; car c'est là une disposition exorbitante. (P. 39 et 40.)

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En ce qui touche les rapports des époux entre eux, la séparation de corps les affranchit de l'obligation de vivre ensemble; la femme acquiert le droit d'avoir un domicile séparé de celui de son mari, et réciproquement, ce dernier cesse d'être tenu de la recevoir. - Du reste, ils demeurent soumis à toutes les règles du chapitre 6, titre 5, sur les droits et devoirs respectifs des époux; car le mariage n'est pas dissous. (P. 40.)

En ce qui concerne les intérêts pécuniaires des époux (311 C. civ.), la séparation de corps emporte de plein droit la séparation de biens; ce qui donne lieu à une liquidation. Mais il faut observer que la séparation de biens, suite de la séparation de corps, ne produit d'effet qu'à partir du jugement, non-seulement vis-à-vis des tiers, mais encore par rapport aux époux; tandis que la séparation de biens, prononcée principalement, rétroagit au jour de la demande (1445): pourquoi cette différence? La demande en séparation de biens a pour cause unique le désordre des affaires du mari; le demandeur en séparation de cor s prétend que la vie commune est devenue insupportable: dans ce dernier cas, la séparation de biens n'est qu'une conséquence du jugement

intervenu. C'est à la femme, si elle veut obtenir la séparation de biens avec effet rétroactif, à former simultanément une demande en séparation de corps et une demande en séparation de biens.

Par suite du même principe, on décide que les créanciers ne peuvent intervenir dans l'instance en séparation de corps, tandis que cette faculté leur est formellement accordée quand il s'agit de la séparation de biens. (P. 43.)

Questions.

- Les articles 299 et 300, relatifs au cas de divorce, s'appliquent à la séparation de corps. (P. 44.)

Les donations faites à l'époux contre lequel la séparation de corps a été obtenue sont de plus révocables pour cause d'ingratitude. (P. 46.)

Mais il conserve celles qui lui ont été faites par son conjoint. (P. 47.)

Les donations faites à l'époux, demandeur en séparation, par son conjoint, ne cessent pas d'être révocables (1096). (P. 48.)

Peines prononcées contre la femme en cas de séparation pour cause d'adultère.

Par le jugement qui prononce la séparation de corps, le tribunal civil doit condamner la femme, sur la réquisition du ministère public, aux peines portées par l'article 337 du Code pénal.

Observons 1o que cette condamnation ne peut être prononcée que par le jugement; 2o que le tribunal civil n'est compétent que par rapport à la femme; il ne peut donc prononcer de condamnation pénale ni contre le complice (338 C. pén.), ni contre le mari coupable d'adultère. C'est au tribunal correctionnel seul qu'il appartient de statuer. (338 C. pén., 308 ̊C. civ.)

Comme l'intérêt de la société n'est que secondaire quand il s'agit de l'adultère, il a paru convenable de laisser au mari le droit d'arrêter l'effet de la condamnation, en consentant à reprendre sa femme (309 C. civ.). (P. 49.)

Comment la séparation de corps peut cesser. - Effets du rapprochement des époux.

La loi voit avec faveur le rapprochement des époux; elle n'exige même pas qu'il soit dressé acte de ce fait le concours des deux volontés, telle est la seule condition requise; le juge apprécie les circonstances. (P. 50.)

La réconciliation des époux fait renaître dans toute leur étendue, entre les époux, les droits et devoirs résultant du mariage; mais ils restent séparés de biens tant qu'ils n'ont pas manifesté, par un acte passé devant notaire, avec minute, la volonté de revenir à leurs conventions

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Cet acte n'est soumis, du reste, à aucune condition spéciale. (P. 51 et 52.)

Questions.

La faculté, pour l'époux, de contraindre son conjoint défendeur à la demande en séparation de se réunir à lui, est restreinte au cas d'adultère. (P. 52.)

La réhabilitation de l'époux condamné à une peine infamaute ne suffit pas pour anéantir l'effet de la séparation prononcée. Il en serait autrement si cette condamnation avait été réformée. (P. 53.)

TITRE VII.

DE LA PATERNITÉ ET DE LA FILIATION.

(Décrété le 23 mars 1803, promulgué le 2 avril.)

Les mots paternité et filiation sont deux corrélatifs qui expriment, l'un la qualité de père, et l'autre la qualité de fils.

Mais sous cette dénomination générale, paternité, la loi comprend ici le lien paternel et le lien maternel.

La paternité peut être naturelle et civile tout à la fois, naturelle seulement, ou civile seulement.

Elle est naturelle et civile (mixte, comme le disent quelques auteurs), à l'égard des enfants conçus pendant le mariage, ou légitimés par mariage subséquent ;

Elle est civile, pour les enfants adoptifs;

Naturelle, à l'égard des enfants conçus hors mariage. Nous verrons toutefois que la loi donne ce nom, mais improprement, aux enfants nés pendant le mariage, bien qu'ils aient été conçus antérieurement (314). — La paternité naturelle se subdivise en naturelle simple, adultérine ou incestueuse.

Les questions relatives à la paternité et à la filiation, comme toutes celles qui concernent l'état civil en général (1), intéressent l'ordre public; dès lors, elles ne peuvent être l'objet ni d'un compromis, ni d'une transaction; elles ne sont point soumises au préliminaire de conciliation (49 Pr.); elles doivent être communiquées au ministère public (83 Pr.); enfin, elles doivent être jugées en audience solennelle, à moins qu'elles ne s'élèvent incidemment comme défense à l'action principale (décret du 30 mars 1808). — Du reste, ces sortes d'actions se forment, s'instruisent et se jugent comme toute autre action civile (2).

L'action relative à la filiation peut être intentée soit par l'enfant ou ses héritiers, soit contre lui.

Dans le premier cas, elle prend le nom de réclamation d'état; Dans le deuxième, elle est désignée sous le nom générique de contestation d'état.

Ce titre est divisé en trois chapitres :

Le premier traite de la filiation des enfants légitimes;

Le deuxième, des diverses manières d'en établir la preuve;

Le troisième concerne les enfants naturels.

(1) On nomme question d'état toute difficulté relative à la position d'un individu dans la 90ciété en qualité de père, mère, enfant ou époux ; toute question, en un mot, relative à l'état civil d'une personne.

(2) Cass., 12 décembre 1827; Pau, 9 mai 1829; Cass., 19 mai 1830, Pal. Dev,

CHAPITRE PREMIER.

DE LA FILIATION DES ENFANTS LÉGITIMES (1).

Sous cette rubrique, la loi donne la qualification d'enfant légitime à l'enfant qui a été conçu, et, par extension, à celui qui est né pendant le mariage (314).

Puisque la légitimité a pour source unique le mariage, il est clair que celui qui prétend à la qualité d'enfant légitime doit, au préalable, prouver la célébration. (Voy. art. 194-200.)

Cette preuve faite, c'est aux personnes qui contestent la légitimité, en d'autres termes, qui opposent que le mariage est nul, à établir l'existence du vice sur lequel ils se fondent (181-193): Reus excipiendo fit actor.

Rappelons-nous que le mariage frappé de nullité produit néanmoins ses effets légaux, tant en faveur des enfants qu'en faveur de l'époux ou des époux qui ont été de bonne foi (201 et 202).

En principe, pour connaître la filiation d'un enfant, c'est à l'époque de sa conception qu'il faut se reporter; car l'enfant vit dans le sein de sa mère mais comment reconnaître l'époque de la conception? Tout, à cet égard, repose sur des probabilités (voyez Fenet, t. 10, p. 13 et suiv.): le législateur a dû se borner à déterminer, d'après l'avis des hommes de l'art, et en prenant pour base l'intérêt de l'enfant, les limites extrêmes de la gestation la plus courte et de la gestation la plus longue: il a fixé, pour le premier cas, 180 jours, et pour le second, 300 jours.

Ainsi, l'enfant est illégitime, s'il naît viable avant le 180o jour du mariage, ou s'il naît plus de 300 jours après celui de la dissolution. Pareillement, pour que l'enfant né pendant le mariage soit censé provenir des œuvres du mari, il faut que la cohabitation ait été possible avant le 180o jour qui a précédé sa naissance; en d'autres termes, il faut que la conception ait eu lieu dans l'intervalle du temps antérieur à la naissance qui se trouve compris entre le terme de la gestation la plus longue et celui de la gestation la plus courte (120 jours); on ne peut la placer hors de ces limites.

Observons ici que la loi ne compte point par heure, de momento ad momentum; mais par jour, de die ad diem (312, 314, 315, 2147, 2160, 2161); que le jour légal est de 24 heures, de minuit à minuit (2) ; que ce jour appartient en entier à l'enfant.

Ici vient se placer une question qu'il faut examiner dans cet exposé préliminaire, car elle touche à des généralités : le jour à quo, c'est-à

(1) Rubrique inexacte; il fallait dire : des enfants conçus ou nés pendant le mariage. (2) Merlin, Rép., vo Date, no 2; vo Jour, no 1; Demolombe, no 27, t. 1er; no 18, t. 5; Dur.,

no 44, t. 2; Valette sur Proudhon, t. 2, no 26.

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