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cette affaire. Voilà le grand mal. Cette lettre, que Rome a demandée, et que les évêques ont eu la foiblesse de souscrire, gâte tout. M. D. déplore cet acte humiliant. Malheureusement, dit-il, le courage de la constance n'est pas donné à tous les hommes..... Malheureusement ce n'est pas la première fois que l'Eglise a vu d'antiques et vénérables pasteurs abandonner, dans un áge avancé, par foiblesse, les principes qu'ils avoient défendus avec tant de gloire. Tel fut Osius.... Comme il est de la fragilité humaine que, dans un age avancé, on soit pressé de jouir, on a sacrifié les principes. Et qui est ici coupable? Hélas! tout le monde, le Pape, les évêques, le Roi lui-même, puisqu'il a apparenment donné les mains à cette démarche.

Après ces préliminaires, M. D. en revient au Concordat de 1817. Le 1er. article, qui porte que le Concordat de Léon X est rétabli, l'inquiète et l'effraie. Il y voit le rétablissement des annates, et il croit nécessaire d'appeler sur cela l'attention de la chambre des députés, qui ne souffrira pas que la France devienne tributaire d'un prince étranger. C'est porter loin la sollicitude; au reste, les craintes de M. D. doivent être un peu calmées par le discours de M. le ministre de l'intérieur, qui a déclaré qu'on n'avoit pas eu la pensée de rappeler le Concordat de Léon X pour un autre objet que celui de la nomination aux siéges. M. D. n'approuve pas la rédaction de l'article 2 du Concordat de 1817: Le Concordat du 15 juillet 180 i cesse d'avoir son effet. Et il suppose charitablement que cette manière de s'exprimer cache quelque arrière-pensée. Il en voit même la preuve dans l'article 3, qui dit que les articles organiques sont abrogés en ce qu'ils ont de contraire à la doctrine et aux lois

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de l'Eglise. Comment! s'écrie-t-il, l'église de France est depuis quinze ans sous un régime contraire à la doctrine et aux lois de l'Eglise, et ce n'est que d'aujourd'hui que le souverain Pontife s'occupe du soin de redresser ces griefs. D'où vient donc M. D. s'il ignore que le Pape a réclamé contre ces articles dès 1802, d'abord dans son allocution du 24 mai, puis par des représentations adressées, soit à son légat en France, soit au ministre françois à Rome? On sait assez que Buonaparte n'étoit pas facile à revenir súr ses pas, et il n'est pas bien étonnant que le Pape n'ait rien obtenu de lui. Le saint Père profita de son séjour à Paris pour faire de nouvelles instances qui n'eurent pas plus de succès. C'est ce que nous lisons dans un des écrits qui viennent d'être publiés à l'occasion du Concordat, et ce témoignage nous paroît plus sûr que celui d'un écrivain de mauvaise humeur, qui accuse le Pape de n'avoir point cherché à porter remède aux maux de l'Eglise, quoiqu'il jouit alors de toute la faveur de B. Nous aurions voulu que M. D. eût cité des preuves de cette grande faveur. Il est assez notoire, au contraire, que même avant la persécution déclarée qui commença en 1808, B. traitoit depuis plusieurs années le souverain Pontife avec une froideur marquée, et ne lui accordoit aucune de ses demandes.

Mais voici qui est plus fort, et M. D., par esprit de contradiction, prend la défense de ces mêmes articles organiques que le Pape blâme. Pour un homme qui affecte tant de zèle, le procédé est bizarre. Les articles organiques ne sont que des réglemens d'administration intérieure; mais ces réglemens ont pour but de soustraire les églises de France à l'influence et à la domination de la cour de Rome. Ils corrigent et tem

pèrent les concessions qui lui ont été faites par le Concordat de 1801, et ils ordonnent surtout l'enseignement des propositions de 1682. Voilà la véritable et la seule pierre d'achoppement. Les articles organiques ne contiennent sur la doctrine que ce qui est relatif à nos libertes. Ainsi ce ne peut être qu'elles que le contraire de 1817 désigne comme contraires à la doctrine et aux lois de l'Eglise; et c'est à des évéques de France qu'on tient un langage si extraordinaire! Ainsi voilà M. D. qui, pour le plaisir d'accuser'le Pape, justifie Buonaparte. Que n'eût-il pas dit si Pie VII se fùt avisé d'autoriser les articles organiques? Il eût crié au scandale. Pie VII les réprouve; alors M. D. en prend la défense. Ces réglemens, dit-il, ont pour but de sous'traire les églises de France à l'influence et à la domination de la cour de Rome, et il dissimule qu'ils tendoient à mettre ces églises sous un joug mille fois plus dur, qu'ils imposoient au clergé des entraves continuelles, et qu'ils prescrivoient de demander à chaque pas des permissions au gouvernement. Mais M. D. est peu touché de cette servitude. Ce qu'il redoute, c'est l'influence du chef de l'Eglise; celle de l'ennemi de la religion l'effraie Les articles orgapeu. niques, dit-il, ne contiennent sur la doctrine que ce qui est relatif à nos libertés, comme s'il n'étoit pas contre la doctrine de l'Eglise, que le gouvernement règle scul ce qui doit être observé dans l'administration ecclésiastique, qu'il ordonne, par exemple, que les grandsvicaires d'un évêque continueront, après sa mort, à gouverner le diocèse; comme si ce n'étoit pas là enr piéter sur la juridiction de l'Eglise; comme si c'étoit aussi par amour pour nos libertés que B. avoit or donné que les évêques ne feroient aucune ordination,

sans avoir soumis au gouvernement le nombre des personnes à ordonner, qu'ils enverroient, tous les ans, les noms de leurs séminaristes, qu'ils soumettroient au gouvernement les réglemens de leurs séminaires, etc. etc. Je passe sous silence des réglemens minutieux, et dont quelques-uns parurent si injustes à B. lui-même qu'il les révoqua par un décret du 28 février 1810. Il paroît que M. D. ne les auroit pas révoqués.

M. D., qui prend aisément l'alarme, a cru voir, dans l'article 6 de la nouvelle convention, un acte de domination et d'envahissement de la cour de Rome, tandis que cet article paroît, au contraire, avoir été sollicité par le gouvernement françois. Ainsi il accuse le souverain Pontife d'avoir voulu autoriser, par cet article, des destitutions arbitraires, tandis que ce même article est destiné à les prévenir. Un peu plus d'attention ou de bonne foi lui eût fait éviter cette méprise, si c'en est une. Il s'élève avec vigueur contre les clauses ou formules qui terminent les deux bulles. Il sait bien que ce sont des choses de style. Mais quand on est mécontent, et qu'on cherche des rai sons de se facher, on tire parti de tout. La colère est vétilleuse.

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La bulle de circonscription des diocèses fournit encore matière à l'animadversion de M. D. Le Pape y dit qu'il place la dot des évêchés en bien-fonds et en rentes sur l'Etat. Au lieu de ne voir dans ces expressions que le style antique de la chancellerie romaine, comme l'a dit, avec une réserve remarquable, M. le ministre de l'intérieur dans son dernier discours, M. D. dénonce cette phrase conime attentatoire à l'autorité du souverain et aux droits des dé

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putés. Il a peur qu'ils ne soient pas assez sensibles à cet affront, et il provoque de son mieux leur ressentiment sur ce point, comme sur la protestation relative au comtat d'Avignon, quoique ce dernier article soit mentionné dans la bulle avec une extrême -modération. M. D. n'y voit pas moins un abus inoui du pouvoir des clefs, et à la vivacité de son langage, je craindrois, s'il avoit une armée à ses ordres, qu'il ne la fit marcher pour venger son injure. N'ayant que sa plume, il en use sans discrétion. Son écrit est un véritable manifeste contre la cour de Rome. Il faut qu'elle ait de graves reproches à se faire envers l'auteur, car il la traite avec une sévérité implacable; il ne lui épargne ni les inculpations les plus graves, ni les qualifications les plus dures. C'est une ennemie -qu'il poursuit sans relâche, et dont il interprète malignement toute la conduite. Un tel procédé n'est pas fort chrétien, et est encore moins ecclésiastique. Il est fâcheux, puisque M. D. a cru devoir reprendre son titre d'abbé, qu'il n'ait pas senti qu'il étoit convenable de reprendre en même temps le langage et les habitudes de son ancien état. Accoutumé à d'autres études, il a, durant une longue révolution, perdu de vue le style des matières de religion. La politique et l'histoire l'ont distrait de la théologie, et le syncronisme des annales des différens peuples lui a fait oublier tant soit peu le Catéchisme.

Qu'y a-t-il en effet de plus opposé à la théologie et au Catéchisme qu'une brochure pleine d'animosité contre le vicaire de Jésus-Christ? Qu'y a-t-il de plns déplacé que de voir un prêtre chercher à soulever les esprits contre le saint Siége, et le harceler par des plaintes amères et assidues? Je sais que M. D.

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