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a médité sur nos institutions, et qui a approfondi les principes. Il se déclare pour le juri, pour la liberté des journaux avec des précautions, propres à réprimer la licence, et vote le rejet de la loi. Il finit par quelques considérations sur l'opinion publique et sur la majorité, et remarque que les amis du ministère ont paru divisés sur la question, et que des conseillers d'Etat ont parlé contre la loi proposée par le gouvernement. M. Favard de Langlade vote pour le projet avec les amendemens de la commission. On réclame la clôture de la discussion. M. Maurisset deniande la parole, M. de Chauvelin veut faire une observation; ou se décide à l'entendre après quelques difficultés. Il dit que la plupart des orateurs ont proposé un amendement très important, mais que les ministres ont opposé une fin de non-recevoir, et qu'il faut que l'amendement soit proposé et discuté avant d'être soumis à la sanction du Roi. M. le ministre de l'intérieur se plaint de cette expression dédaigneuse de fin de non-recevoir. Il croit l'amendement proposé contraire au droit d'initiative royale; mais on doit attendre en silence ce que S. M, prononcera, et il se plaint qu'on interrompe la discussion par des réflexions étrangères. M. Mestadier demande à parler en faveur de la loi; M. Maurisset se présente également à la tribune. Ils réclament chacun le droit de priorité. M. le président fait la chambre juge de la difficulté. M. Maurisset, qui étoit inscrit pour le projet, voyant que la liste des orateurs contre étoit épuisée, s'est fait inscrire contre, afin d'avoir plutôt la parole. Un rire général éclate dans la chambre, le président lui-même ne peut se contenir. M. Maurisset avoue qu'il s'est servi de cet artifice pour obtenir la parole; mais il n'en concluera pas moins suivant sa conscience. Cette ruse ne luí a pas réussi; la priorité est accordée à M. Mestadier. Il se déclare contre le juri, rejette les articles 9, 10, 11, 12, 13 et 14 de la loi, substitue les cours royales aux tribunaux de police, correctionnelle, et sépare l'article sur les journaux du reste de la loi. Après ce discours, la chambre se prononce à l'unanimité pour la clôture de la discussion.

Le 20 décembre, M. Becquey a remplace à la tribune M. Faget de Baure, rapporteur de la commission, qui étoit retenu par une indisposition. Il a persisté, au nom de la commission, dans les conclusions du premier rapport. Il regarde l'établissement du juri comme un amendement trop important pour qu'on puisse l'introduire dans la loi. Il est d'avis de séparer l'article des journaux du reste de la loi, et de n'accorder au gouvernement que pour un an ce qu'il demandoit pour trois. M. le président, dans son résumé, rappelle les principaux amendemens, M. le garde des sceaux annonce, de la part de S. M., qu'elle consent à l'amendement proposé, tant pour la séparation de l'article sur les journaux, que pour la durée du pouvoir donné au gouvernement. M. le président annonce qu'il va mettre aux voix la division. M. Benoit croit qu'il faut renvoyer l'article sur les journaux à la discussion des bureaux. M. de Courvoisier remarque qu'il faut se hâter, parce que le délai pour les journaux expire dans dix jours. Il se plaint que des orateurs emploient des expressions téméraires. Il est interrompu par de violens murmures, et convient qu'il a pu employer un mot impropre. Il vote pour la division de l'article; M. Corbières et

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M. de Villèle s'y opposent. Il faut attendre, disent-ils, la discussion séparée des articles de la loi. M. le garde des sceaux répond, que la division de l'article sur les journaux n'empêchera pas de les discuter, etqu'il importe de le faire de suite, et ne pas attendre la fin des débats, auxquels les 26 premiers articles de la loi peuvent donner lieu. M. Rivière et M. Favard de Langlade parlent dans le même sens. M. Lafitte, M. de Bondi et plusieurs autres demandent qu'on ne soumette les journaux au gouvernement que pour trois mois, et pour se donner le temps de faire une loi définitive sur ce point. M. Tronchon oppose à la di- ! vision l'article 46 de la Charte; on lui répond que cet article n'est pas applicable. M. le président pose ainsi la question : Séparera-t-on, dans la délibération, l'article 27 du reste de la loi. La majorité se déclare pour l'affirmative; elle se prononce également pour que la délibération : commence par cet article séparé. On lit l'article avec les amendemens, de la commission, et on procède à l'appel nominal et au scrutin. Le nombre des volans étoit de 228. 131 boules blanches ont adopté l'arti- ) cle, et par conséquent la chambre a décidé, à une majorité de 34 voix, que les journaux ne pourroient paroître qu'avec l'autorisation du Roi, jusqu'à la fin de la session de 1818. On revient au projet sur la liberté de la presse, et on accepte sans discussion les trois premiers articles,

qui portent que les auteurs, traducteurs et éditeurs sont responsables

du contenu de leurs ouvrages. On rejette sur l'article 4 un amendement de M. Mestadier, et on adopte l'article, qui dit que l'imprimeur n'est responsable que lorsque l'auteur n'est pas connu. L'article 5,′′ qui dit que le libraire est responsable quand l'auteur n'est pas connu, est adopté après quelque discussion. L'article 6 statue que l'imprimeur d'un écrit qui provoqueroit directement à des crimes et le libraire ou vendeur seront responsables. L'article passé, et la chambre rejette un amendement de MM. Beugnót et Sartelon, en faveur des libraires. On vient à l'article 7, relatif aux poursuites, pour lequel on donne la priorité à la rédaction de la commission. On met aux voix la suppression du second paragraphe de l'article, portant qu'il y a lieu à poursuite si l'écrit contient une provocation directe à des crimes. La majorité paroît se prononcer pour la suppression. MM. Bellart et Voysin de Gartempe se plaignent que la question, est mal posée, M, Ravez et M. le garde des sceaux défendent l'article, et présentent les inconvéniens de le supprimer; il importe, disent-ils, de laisser un moyen d'empêcher la publication d'un écrit criminel. M. Dupont, de l'Eure, se plaint que cette disposition, peut servir de prétexte pour faire des visites continuelles, et saisir de bons ouvrages. M. de Villèle et M. Corbières disent que ces provocations directes au crime, sont des cas chimériques. M. Jacquinot objecte que l'argument de M. Corbières est faux, et qu'il ne l'ignore pas lui-même. M. Corbières demande que M. Jacquinot soit rappelé à l'ordre. Le président croit que cette expression a échappé à M. Jacquinot. Après un long débat, on va aux voix, et l'épreuve étant douteuse on passe au scrutin 110 boules, blanches sont pour la suppression de la partie de l'article, 101 boules noires con tre. Cette partie de l'article est rejetée.,

Le 31 décembre, après la lecture du proces-verbal, M. Piet a réclamé contre l'endroit de ce procès-verbal relatif à l'adoption de la loi sur les journaux. Il prétend qu'on a violé les formes en cette circons-, tance, et qu'il auroit fallu que cette loi eût été proposée séparément par le Roi. M. de Villèle et M. Benoît appuient cette observation. M. le président et M. Bellart défendent la rédaction. On demande la question préalable, qui est adoptée par une forte majorité. M. de Salaberry fait un rapport sur quelques pétitions. L'ordre du jour appelle la discussion sur le projet de loi relatif à la perception des six douzièmes des contributions. M. Casimir Perrier demande qu'on restreigne le délai et le crédit marqués dans le projet; M. Beugnot reproduit les motifs qu'il avoit exposés dans son rapport; le ministre des finances les appuie. M. Pontet réclame contre le doublement de l'imposition personnelle et mobilière à Bordeaux, et M. de Marcellus contre l'impôt sur les huiles comme trop onéreux à l'indigence. L'amendement de M. Casimir Perrier est rejeté, et le projet de loi est adopté avec un autre amendement, portant que le crédit provisoire, accordé au mi-› nistre, est de 200 millions. Il y a eu, au scrutin, 211 boules noires pour la loi, et 5 contre. On reprend la discussion sur la liberté de la presse. La discussion commence par l'article 7 et l'article 8; M. Bec->. quey propose d'y joindre les articles suivans comme étant liés au même sujet. M. Duvergier de Hauranne se déclare contre la rédaction de la commission, et préfère celle des ministres. M. Mestadier et M. Courvoisier parlent à peu près dans le même sens. Plusieurs membres par lent contre la séparation ou la cumulation des articles de la loi. M. le› président résume le débat, et pose la question en ces termes: Admettra-t-on le systême de la commission, qui veut qu'il soit accordé àc l'autorité un délai de trois jours pour délivrer le récépissé, pendant lequel temps on pourra délérer l'ouvrage aux tribunaux. La question: préalable est demandée sur cet article, et adoptée. M. Beugnot propose qu'on spécifie que nul ne pourra être poursuivi avant qu'il n'y ait eu publication. M. de Villèle appuie cet amendement; M. Rivière parle contre. On va aux voix sur cet amendement. Une première épreuve paroît douteuse; à la seconde, le président annonce que l'avis du bureau est que l'amendement est rejeté par la majorité. Plusieurs membres soutiennent que cela n'est pas possible; d'autres membres sortent. M. de la Boulaye, un des secrétaires, demande l'appel nominal pour la justification du bureau. L'appel nominal est invoqué d'un côté, et rejeté de l'autre. L'appel nominal est décidé à une grande majorité, quoique plusieurs membres soient sortis et sortent encore. Il s'élève du tumalte dans la chambre; on parle au milieu du bruit. Les membres à la droite et à la gauche du président restent sur leurs siéges; les banes derrière les ministres sont presque vides. M. le ministre de l'intérieur et M. le président invitent la chambre à remettre l'appel nominal au lendemain. On procède néanmoins à l'appel nominal. Il n'y avoit que fit votans; il y a eu to boules blanches, et quatre noires. Le nombre des députés étant de 255, il auroit fallu 128 votans pour que le résultat fût légal. On recommencera la délibération le lendemain.

(Samedi 27 décembre 1817.)

(No. 353).

Examen du Pouvoir législatif de l'Eglise sur le mariage, où l'on relève quelques-unes des erreurs du livre intitulé: Principes sur la distinction du contrat et du sacrement de mariage; avec une Dissertation sur la réception du concile de Trente dans l'église de France (1).

Il nous faut encore parler de M. T. et de ses élucubrations théologiques, qui ne sont pas heureuses. On se rappelle qu'il publia, il y a près de deux ans, ses Principes sur la distinction du contrat et du sacrement de mariage, dans lesquels il ne dissimuloit pas son projet d'opérer une réforme dans l'enseignement sur cet objet. Nous analysâmes, dans le temps, sa brochure, et sans en entreprendre une réfutation complète, ce que n'eût pas comporté le peu d'étendue de nos numéros, et l'obligation où nous sommes de parcourir diverses matières, nous tâchâmes du moins de faire sentir tout ce qu'avoit de ridicule, de faux, d'inexact, de scandaleux même, la nouvelle théologie de l'ancien oratorien. On peut consulter nos numéros 203, 205 et 209, tome VIII. Mais tout en signalant de notre mieux les nouveautés profanes de M. T. sur le mariage, sur le concile de Trente, et sur les autres questions qui se présentoient sur sa route, nous désirions cependant qu'on en entreprît une réfutation en for

(1) Vol. in-8°. ; prix, 4 fr. et 5 fr. franc de port. A Paris, chez Adrien Le Clere, au Bureau du Journal.

Tome XIV. L'Ami de la Religion et du Ror. O

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me, et nous appiîmes avec plaisir qu'un théologien, non moins choqué que nous des faux principes de M. T., se proposoit de leur opposer l'enseignement véritable de l'Eglise, et de venger la saine doctrine des dédains d'un faiseur de systèmes. C'est l'ouvrage de ce théologien que nous annonçons. Au simple aperçu de son plan, on découvre que c'est un homme qui connoît son sujet, qui le domine, qui l'approfondit, et devant lequel l'étoile de M. T. pâlira.

L'auteur de l'Examen du Pouvoir législatif de l'Eglise sur le mariage, prouve d'abord que ce pouvoir est un dogme de la foi catholique, solennellement défini par le concile de Trente, et secondement que ce décret a son fondement dans la doctrine enseignée depuis les apôtres jusqu'à nous. C'est la matière des deux premiers chapitres. Dans le troisième, l'auteur explique la nature du contrat de mariage, et fait voir que la nature seule de ce contrat doit le faire ranger parmi les attributions de l'Eglise.

L'Eglise, dit-il, étoit en possession depuis dixhuit siècles de mettre des empêchemens dirimans au mariage, quand le docteur Launoy entreprit de lui ravir ce pouvoir. Les canons du concile de Trente, qui sont si précis sur cet article, gênoient le docteur; il essaya de les éluder par des explications sophistiques, et prétendit qu'en disant que l'Eglise avoit le droit de mettre des empêchemens dirimans, on avoit voulu désigner les princes qui font partie de l'Eglise; défaite qui a paru si misérable à M. T., qu'il n'a pas osé la reproduire. Il a mieux aimé recourir à une autre subtilité; c'est qu'un concile écuménique est infaillible quand il prononce sur le dogme, mais nou quand il prononce sur des questions

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