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Bulletin

PUBLIÉ PAR

LA SOCIETE INDUSTRIELLE
De l'arrondissement de Saint-Etienne.

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TYP. DE F. GONIN, 4, RUE DU MARCHÉ.
1838.

Bunung

rijh.

4-28-31

MONT-DE-PIÉTÉ.

2367 Parmi les établissemens de bienfaisance que possèdent les villes populeuses et qui rendent des services réels aux classes ouvrières, il faut placer les maisons de prêt régies au compte des communes ou des hospices. Quelle n'est pas la détresse des ouvriers qui n'ont pas su déposer à la caisse d'épargnes une partie de leurs salaires, lorsqu'ils sont atteints par les maladies ou la cessation des travaux ? Privés des ressources qu'aurait pu leur fournir une économie bien entendue, ils sont obligés d'emprunter et de donner en gage leurs effets les plus indispensables. Des usuriers abusent de leur position et disposent souvent du gage qui vaut plusieurs fois la somme prêtée. C'est pour arrêter les abus crians de l'usure que des maisons publiques de prêt ont été autorisées dans les grandes villes, sous le nom de Mont-de-Piété.

Les premiers établissemens de ce genre ont été créés en Italie. Un homme que l'Eglise a placé au rang des Saints, Bernardin de Feltre, crut qu'en prêtant gratuitement sur gage, on réduirait à l'inaction les Juifs et les Lombards qui faisaient leur profession de l'usure. Il ouvrit à Mantoue une banque où chacun était admis à emprunter en déposant un gage. Ce fut le premier mont-de-piété. Cet établissement, dit M. Beugnot, obtint un grand succès et

devint le modèle de beaucoup d'autres qui furent successivement fondés dans les principales villes d'Italie. L'Allemagne, la Hollande, l'Espagne, la Belgique eurent aussi leurs monts-de-piété. La France ne s'empressa pas d'importer chez elle cette institution, car le mont-de-piété de Paris ne fut ouvert qu'en 1777.

Si ces établissemens ne rendent pas tous les services que les fondateurs se sont proposés; si pour faire face aux frais d'administration, ils exigent en général un intérêt trop élevé de leurs avances, c'est sans doute une raison pour améliorer l'institution, mais ce n'est pas un motif pour y renoncer. Les administrateurs doivent employer tous leurs efforts pourabaisser le taux de l'intérêt. Les autres reproches que l'on adresse aux monts-de-piété sont-ils de nature soit à en motiver la suppression dans les villes où ils sont établis, soit à en empêcher l'établissement dans les villes où ils ne le sont pas?

La facilité qu'offrent les monts-de-piété aux ouvriers pour emprunter de l'argent, les engage, diton, à chômer certains jours ouvrables, à faire des dépenses extraordinaires certains jours de fête et les éloigne des caisses d'épargne.

Ces assertions ont été réfutées par M. Ch. Dupin dans le savant rapport qu'il a fait à la chambre des députés, dans la séance du 22 février 1838.

A l'aide des documens qu'il a recueillis, il a démontré que les prêts ne sont pas beaucoup plus

nombreux les lundis et les mardis que les autres jours de la semaine. En 1826, la supériorité du nombre des dépôts n'était à Paris, le lundi, que de 245 et le mardi de 8, terme-moyen.

Aux époques des grandes fêtes, les dépôts sont-ils plus multipliés que dans les autres temps de l'année? On aurait pu croire que ces fêtes étant des occasions de dépense, il y a dans la quinzaine qui les précède ou dans, celle qui les suit un plus grand nombre de prêts; c'est cependant le contraire qui arrive.

L'influence des quatorze fêtes prises ensemble, s'est manifestée à Paris, dit M. Dupin, 1o par une diminution d'engagemens égale à 25,181 dépôts;

20 par une augmentation de retraits égale à 15,121 dépôts; ce qui, sur l'ensemble, équivaut au dégagement total de 40,302 dépôts dans l'année.

On se rend compte de ce fait remarquable, en concevant que les jours de réjouissance et de solennités sont, pour les classes laborienses, l'occasion d'un accroissement de travaux productifs extrêmement variés; le solde de ces travaux permet aux ouvriers de retirer plus d'effets et d'en engager .moins. Sans doute une partie de leurs bénéfices leur sert à prendre part eux-mêmes, suivant leurs facultés, aux diverses réjouissances; mais les résultats signalés démontrent que loin de dépenser au-delà de leurs bénéfices immédiats, les travailleurs réservent à l'instant même une portion notable de leurs gains pour dégager les dépôts qu'ils ont faits au mont-de-piété.

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