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vation. Le conservateur devra délivrer, sous sa responsabilité, l'état général ou spécial des transcriptions ou inscriptions concernant un immeuble, et mentionées sur ses registres.

Les actes d'acquisition entre-vifs soumis à la transcription sont les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux.

Les actes à titre gratuit sont les donations et les substitutions. Ces actes sont nécessairement notariés : les notaires devront guider les parties dans l'accomplissement de cette formalité (939).

Celui qui souffre de la non-transcription est le donataire; c'est donc lui qui doit faire transcrire. Si le donataire est un mineur, ou un interdit, ou un établissement public, la transcription devra être faite à la diligence des tuteurs, curateurs ou administrateurs; si c'est une femme mariée, c'est le mari qui fera faire la transcription.

Tant que la transcription ne sera pas faite, le donateur pourra aliéner en tout ou en partie l'immeuble, il pourra concéder des droits valables aux tiers. Ces tiers opposeront au donataire le défaut de transcription.

Mais remarquons-le bien: ces tiers ne pourraient opposer le défaut de transcription, s'ils avaient été chargés par la loi de la faire. Ainsi les maris, tuteurs, curateurs ou administrateurs, dont nous parlions plus haut, n'auront pas le droit d'invoquer le défaut de transcription puisqu'ils sont coupables de ce défaut; leurs ayants cause, c'est-à-dire ceux qui tiennent de ces coupables un droit quelconque sur l'immeuble, ne peuvent non plus alléguer le défaut de transcription ; le donataire pourra réclamer l'immeuble qu'ils avaient acquis, nier le droit qu'ils invoqueraient sur l'immeuble.

Ce donataire pourrait également revendiquer le bien, l'immeuble que détiendrait encore le donateur ou ses héritiers; ils ne peuvent refuser d'exécuter la donation, sous prétexte qu'il n'y a pas eu de transcription. Entre le donateur et ses héritiers d'une part, et le donataire d'autre part, la donation faite dans les formes solennelles est parfaite, quoique non encore publiée.

La publicité n'est exigée que pour prévenir les tiers qui, dans l'ignorance de la donation non transcrite, seraient tentés de traiter avec le donateur ou les héritiers, et de recevoir des droits réels sur l'immeuble donné. La transcription les avertit de ne pas traiter. Des acheteurs, des échangistes, des créanciers hypothécaires, en un mot, tous les tiers intéressés à ce que le donateur, de qui ils ont reçu un droit, soit resté propriétaire de l'immeuble, pourront opposer au donataire le défaut de transcription (940, 1072).

Les actes à titre onéreux sont soumis à la nécessité de la transcrip

tion depuis la loi du 23 mars 1855. Ils sont énumérés avec soin par législateur :

le

Tout acte entre-vifs translatif de propriété immobilière ou de droits réels susceptibles d'hypothèque ;

Tout acte portant renonciation à ces mêmes droits: par exemple, si l'usufruitier d'un immeuble renonçait à son droit, le nu propriétaire devrait faire transcrire l'acte de renonciation;

Tout jugement qui déclare l'existence d'une convention verbale entraînant translation d'un des droits précédents ou renonciation à un de ces droits;

Tout jugement d'adjudication, autre que celui rendu sur licitation au profit d'un cohéritier ou d'un copartageant ;

Tout acte constitutif d'antichrèse, de servitude, d'usage et d'habitation, ou portant renonciation à ces droits, ou tout jugement qui en reconnaît l'existence en vertu d'une convention verbale.

Quelle est la sanction de cette obligation? Jusqu'à la transcription, l'acquéreur ne peut opposer son droit aux tiers. Un exemple fera bien comprendre cette règle: Paul vend son immeuble à Lefebvre le 1er mars 1874; transcription est faite seulement le 17 juin de la même année : tout tiers ayant un droit réel du chef de Paul, soit qu'il l'ait acquis avant le 1 mars, soit qu'il l'ait acquis après cette date, pourra valablement l'opposer à Lefebvre, à la condition d'avoir publié lui-même son titre avant le 17 juin. Ainsi, entre deux acquéreurs successifs de droits réels sur un même immeuble, celui-là est préféré qui le premier a publié, c'est-à-dire fait transcrire son droit, s'il s'agit d'un droit de propriété, de servitude, où fait inscrire, s'il s'agit d'une hypothèque.

Lefebvre donc, dans notre exemple, n'est pas devenu propriétaire vis-à-vis des tiers acquéreurs de droits réels, tant qu'il n'a pas transcrit: mais il l'est vis-à-vis de Paul, vis-à-vis de ses héritiers, vis-à-vis de ses créanciers chirographaires ; il peut exiger la tradition de l'immeuble, il est bien propriétaire enfin (1138).

Il ne faut donc pas croire que c'est la transcription qui rend propriétaire; non, c'est toujours le consentement: la transcription affermit seulement la propriété vis-à-vis des tiers sur la tête de l'acquéreur.

A un autre point de vue, la transcription ne confère pas non plus le droit publié si l'aliénateur n'était pas propriétaire de l'immeuble, il n'a pu transmettre la propriété, ni aucun démembrement de la propriété. L'acte translatif est transcrit tel qu'il est, valable ou non, avec ses vices, avec ses conditions: c'est aux tiers qui traitent avec le nouvel acquéreur à s'assurer de la validité du titre transcrit. Il n'y a dans la transcription qu'une publicité donnée à l'acte, un moyen de le faire connaître.

Il y a des pays, en Allemagne, par exemple, où la transcription sur les registres publics a un bien autre effet: sans doute elle avertit les tiers. de l'existence de l'acte de transmission, comme chez nous, où c'est son unique effet, mais elle fait plus: elle donne au tiers dont le titre est publié le droit d'aliéner valablement, même quand il aurait acquis d'un aliénateur non propriétaire.

Dans ce système, on soumet à la publicité tous les actes, même les acquisitions à cause de mort, par succession, ou par legs, ou par partage. Mais alors, comme la transcription est plus qu'un fait de publicité, qu'elle donne presque des droits, un acte ne peut être transcrit sans l'approbation d'un tribunal particulier qui s'assure du droit du transcrivant acheteur, héritier, donataire, légataire, coéchangiste.

Un pareil système entraîne des lenteurs, des gênes considérables dans la circulation des biens, des frais enfin : gênes et frais qui seraient intolérables dans un pays où la propriété est très-morcelée, comme chez nous, mais qui sont des maux bien moindres dans des pays de grande propriété, où la constitution aristocratique tend à empêcher les biens de sortir des mêmes mains.

On a donc cru devoir, chez nous, ne faire de la transcription qu'un mode de publicité. On a cru enfin ne devoir l'imposer que lorsqu'elle était rigoureusement nécessaire; ainsi on ne l'a pas imposée à ceux qui acquéraient par succession ou par legs: l'acquéreur, ici, héritier ou légataire, tient son droit du défunt et, à partir de la mort, il ne peut donc être en conflit avec aucun autre acquéreur. Que si un héritier sans droit, ce qu'on appelle un héritier apparent, a été à tort investi des droits du défunt, et s'il a aliéné, la jurisprudence fait respecter les droits du tiers de bonne foi qui a traité avec cet héritier.

7° PUBLICITÉ DES BAUX ET QUITTANCES.

Dans l'intérêt du commerce, de l'industrie et de l'agriculture, le Code civil a voulu donner à ceux qui prenaient à bail des biens urbains ou des biens ruraux une sécurité qu'ils n'avaient point autrefois. Lorsque le propriétaire d'un immeuble loué ou affermé le vendait, le nouvel acquéreur n'était point forcé de respecter le contrat de louage consenti par son auteur, et il pouvait expulser le locataire.

La loi actuelle a permis au locataire ou fermier d'opposer au nouvel acquéreur son contrat, si l'acte constatant le bail a date certaine. Mais cette innovation engendrait un danger fatal: le bail, en effet, pouvait être clandestin, et le nouveau propriétaire, achetant un immeuble qu'il croyait libre, pouvait ignorer l'existence de ce contrat, qui n'était soumis à aucune publicité (1743).

Il y avait plus à craindre: le propriétaire, avant de vendre, avait pu recevoir par anticipation plusieurs années de loyers ou de fermage ; il avait pu en faire cession à autrui, quittances ou cessions pouvaient être également inconnues à l'acquéreur. En sorte que, lorsqu'il croyait pouvoir entrer en possession de son immeuble, ou au moins en toucher les revenus, un locataire se présentait, son acte enregistré en main, prouvant l'existence d'un long bail ou sa libération anticipée de plusieurs années de loyers.

Le législateur a remédié à ces inconvénients en exigeant que tout bail d'une durée de plus de dix-huit années, que tout acte ou jugement constatant, même pour bail de moindre durée, quittance ou cession d'une somme équivalente à trois années de loyers ou fermages non échus, devraient être transcrits. A défaut de transcription, ces actes ne pourraient être opposés à l'acquéreur: il ne serait obligé dé respecter le bail que pour une durée de dix-huit ans, et quant aux quittances et aux cessions de plus de trois ans, elles ne pourraient être opposées aux tiers, ni pour le nombre d'années indiqué, ni même pour trois ans cet acte ne permet pas de les réduire à ce délai, elles sont justement suspectes; le législateur ne veut donc pas qu'on en tienne compte (23 mars 1855).

8° PUBLICITÉ DES PRIVILÉGES ET DES HYPOTHÈQUES.

Nous n'avons point à nous occuper du privilége ayant pour objet des meubles; on n'a point trouvé le moyen de le rendre public, et cela se comprend la circulation si facile de ces sortes de biens rend impossible la détermination d'un lieu où le privilége pourrait être efficacement porté à la connaissance des tiers.

Il n'en est pas de même des priviléges sur les immeubles et des hypothèques leur publicité sera efficace si elle se fait à un endroit fixe, et si elle est commodément accessible à tous. Le bureau des hypothèques de l'arrondissement où les biens privés sont situés est le lieu possible où les tiers qui veulent savoir si tel ou tel immeuble est frappé d'un pareil droit viendront s'en informer. Ils demanderont au conservateur un état des priviléges ou hypothèques affectant ce fonds, et inscrits sur son registre.

En effet, la publicité des priviléges et des hypothèques se fait par une mention de ces droits sur les registres du conservateur. Le créancier qui requiert une inscription doit lui présenter deux sortes de pièces :

1. Un acte constatant le droit au privilége ou à l'hypothèque par exemple une expédition du jugement ou de l'acte notarié qui y a donné

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naissance, le testament olographe constatant la libéralité qui donne au légataire une hypothèque légale, l'acte de partage sous seing privé engendrant le privilége.

2o Deux bordereaux écrits sur papier timbré. Le bordereau est un écrit rédigé par le créancier, ou plutôt généralement par son avoué ou son notaire; il est fait en deux exemplaires. Le conservateur copie intégralement ce qui y est contenu, et c'est en cela que consiste matériellement l'inscription; il certifie sur l'un des exemplaires qu'il a fait cette inscription, le remet au créancier, et garde l'autre pour prouver qu'il a exactement reproduit le bordereau et que, si l'inscription est irrégulière, la faute en est au créancier, dont le bordereau contenait des erreurs.

Que doit contenir le bordereau et par conséquent l'inscription?

« L'inscription des priviléges et des hypothèques, a-t-on dit, con« siste dans la description qui en est faite sur des registres publics, << afin de mettre les tiers en état de s'en procurer une connaissance « exacte. » De là, la nécessité des mentions suivantes :

1° Une indication exacte du créancier et du débiteur la première permet au public de venir demander au créancier si sa créance est ou non acquittée; elle apprend à l'acquéreur de l'immeuble à qui il doit s'adresser pour le libérer du droit qui le grève; la seconde révèle surtout aux tiers l'étendue du crédit qu'ils doivent accorder à celui dont l'immeuble est ainsi affecté de droit réel (2148).

La meilleure indication résultera de l'énonciation des prénoms, profession et domicile du créancier et du débiteur: quand il s'agira du premier, comme c'est lui-même qui rédige le bordereau et requiert l'inscription, il n'y a pas de raison pour justifier une mention irrégulière. Quant au débiteur, ce qu'il faut, c'est que sa désignation individuelle et spéciale soit telle que le conservateur puisse dans tous les cas le reconnaître.

2o Une élection de domicile de la part du créancier dans un lieu quelconque de l'arrondissement du bureau : cette mention est exigée dans l'intérêt unique du créancier; elle permet de l'avertir en cas de purge ou d'expropriation de l'immeuble, afin qu'il puisse faire valoir son hypothèque.

3o La date et la nature de l'acte qui a donné naissance au droit réel, indication qui permet aux tiers de savoir si l'hypothèque est valable; car la validité, entre autres conditions, dépend de la capacité du concédant à l'époque de la création du droit.

4o Le montant de la' dette et l'époque de son exigibilité.

5o La désignation précise de l'espèce et de la situation des biens sur lesquels il entend conserver son privilége ou son hypothèque.

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