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péenne. Mais, afin que ces traités conservent pour nous cette valeur et leur efficacité, il est nécessaire qu'ils soient exécutés consciencieusement par le Danemark. Je puis considérer comme une chose qui n'est douteuse pour personne que cela n'a pas eu lieu jusqu'ici, et puis me dispenser en conséquence d'énumérer les faits de détail. Le Gouvernement du roi doit se réserver la décision sur la question de savoir si et quand le non-accomplissement des obligations du Danemark nous mettra en position de nous dédire du traité de Londres; il ne peut laisser cette décision à la Diète germanique, ni en faire ici l'objet de déclarations. Nous sommes convenus avec l'Autriche d'arrangements qui, en attendant, assurent une attitude concordante des deux puissances concernant le traité de Londres et ses conséquences.

Ces arrangements partent de la supposition que dans le Lauenbourg le roi Christian serait apte à succéder, même sans le traité de Londres, le plus proche héritier, le prince Frédéric de Hesse, ayant renoncé en sa faveur. Dans le Holstein, au contraire, le titre de succession repose sur le traité de Londres, et sa réalisation dépend de l'accomplissement des traités préliminaires qui sont en connexion solidaire avec le traité de Londres. Le fait de cette solidarité a été confirmé au sein du Rigsrad danois par le témoignage du plus compétent de tous les témoins, de M. Bluhme, qui, en 1851 et 1852, était ministre des affaires étrangères du Danemark. C'est sur cette manière de voir que repose notre vote dans la séance de la Diète germanique du 28 novembre, qui a déjà été publiée par les journaux.

Nous verrons, tant que nous ne considérerons pas le traité de Londres comme non-avenu, dans le roi Christian l'héritier du droit de ses prédécesseurs. En conséquence, les motifs qui ont provoqué la résolution d'exécution du 1er octobre dernier subsistent toujours, et les circonstances mêmes paraissent exiger que cette résolution soit mise en œuvre promptement.

A cet effet, nous avons, de concert avec l'Autriche, posé les propositions nécessaires à la réalisation immédiate de l'exécution.

Quelle que soit la résolution qu'on prenne à cet égard à Francfort, la Prusse soutiendra, dans tous les cas, avec une fermeté réfléchie, dans la mesure de sa position comme puissance européenne et comme membre de la Confédération, le droit allemand dans les duchés et sa propre considération dans le conseil des grandes puissances.

Le Gouvernement compte, dans l'accomplissement de ce devoir, sur l'appui bienveillant du pays et de ses représentants. En vue de notre coopération à l'exécution, décidée par la Diète germanique, il aura à prendre des mesures militaires et présentera aux Chambres la demande d'un crédit destiné à en fournir les moyens.

La proposition Virchow et Stavenhagsn a été adoptée par 221 voix contre 63. Les députés polonais se sont abstenus.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS. Séance du 15 décembre 1863.

La commission de l'emprunt soumet à la Chambre le projet d'adresse qui suit:

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« Votre Majesté Royale a daigné nous faire présenter, en raison de la contestation pendante entre l'Allemagne et le Danemark, un projet de loi concernant les besoins extraordinaires de l'administration de la guerre et de la marine.

<< La Chambre des députés a déjà débattu, dans une discussion détaillée, la question du Schleswig-Holstein, et indiqué par sa résolution du 2 décembre la direction de la politique commandée, d'après notre conviction, par l'honneur et l'intérêt de l'Allemagne.

«La loi de succession de 1853, telle qu'elle avait été tracée d'avance par le traité de Londres, n'a jamais obtenu l'assentiment des partis les plus directement intéressés de la représentation des duchés, des agnats de la maison d'Odenbourg et de la Diète germanique.

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Déjà privé d'une base fondée en droit, le traité de Londres a perdu ensuite, pour les puissances signataires, toute sa force obligatoire quand le Gouvernement danois eût rompu, de son côté, toutes les promesses qu'il avait faites. La Prusse et l'Allemagne sont obligées, en conséquence, de reconnaître le droit héréditaire de Frédéric VIII, de rétablir l'union et l'indépendance des duchés et de délivrer le territoire fédéral allemand de la présence des troupes danoises.

« Il n'est pas d'autre État auquel la tâche de remplir cette obligation promptement et efficacement incombe d'une façon aussi urgente qu'à la Prusse.

« C'est sur le sol des duchés que notre brave armée a remporté ses premières victoires depuis les guerres de délivrance, et engagé ainsi l'honneur de ses armes pour le triomphe définitif de la cause qu'elle a défendue forcément, mais sans résultat.

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L'oppression des duchés depuis 1851 a été la première suite et la suite nécessaire de la funeste convention d'Olmütz, dont la réaction désastreuse sur la situation intérieure de la Prusse et sa position comme puissance a été amèrement ressentie par tous les cœurs patriotiques, et ne sera effacée que par la délivrance des duchés.

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La Chambre des députés voit, en conséquence, avec une profonde douleur le Gouvernement agir dans un sens qui ne tend pas à l'annulation, mais au rétablissement et à la consolidation des conventions de 1851 et 1852. Or, ces conventions consacrent la rupture de l'an

tique union des duchés, et, par suite, l'impuissance de l'élément allemand dans les deux pays. Dès l'origine elles n'ont eu d'autre signification européenne que de compromettre gravement les intérêts politiques de la Prusse, de façon que la participation de la Prusse à ces conventions doit être considérée comme un acte de suicide. Tandis que si le Gouvernement prussien prenait franchement en mains la défense des droits du Schleswig-Holstein, toute l'Allemagne se réunirait sous la conduite de Votre Majesté; la persistance dans le point de vue de 1851-52 a mis notre État en contradiction ouverte avec la majorité des gouvernements allemands et le sentiment unanime du peuple allemand. Le Gouvernement de Votre Majesté a employé toute l'influence de la Prusse à faire adopter, de concert avec l'Autriche, une résolution fédérale contradictoire en soi et obscure dans toute sa tendance, qui abandonne l'indépendance des duchés et par suite les intérêts les plus importants de l'Allemagne, sans diminuer le danger de complications extérieures.

« La Chambre des députés s'adresse à Votre Majesté pour ne pas s'exposer au grave reproche de ne pas avoir tout essayé pour modifier une politique qui menace de porter préjudice au pays pour longtemps. Car, d'après le système du ministère, nous devons craindre que, dans ses mains, les moyens demandés ne seraient pas employés dans l'intérêt des duchés et de l'Allemagne, ni au profit de la couronne. Presque seuls parmi toutes les représentations du peuple en Allemagne, nous nous voyons dans la situation pénible de ne pouvoir donner au sentiment national du peuple l'expression confiante que donne seulement l'union entre le Gouvernement et la représentation du pays.

Très-gracieux Roi et Seigneur!

Votre Majesté a déclaré un jour que pas un pouce de terre allemande ne serait jamais abandonné.

Le droit des duchés à une union indissoluble et à l'indépendance se confond avec le droit de succession de la maison d'Augustenbourg. Voilà pourquoi nous prions Votre Majesté respectueusement de ne plus se considérer comme liée au traité de Londres, de reconnaître le prince héréditaire du Schleswig-Holstein-Augustenbourg comme duc de Schleswig, et de faire en sorte que la Confédération germanique lui prête une aide efficace pour la prise de possession et la délivrance de son pays.

La Chambre des députés n'a pas de vœu plus ardent que celui de mettre avec joie tous les moyens possibles à la disposition d'une politique qui, portée par la confiance de la nation et exécutée avec un dévouement sans réserve pour la cause nationale, se proposerait cette grande tâche pour but. »

Le rapporteur, M. de Sybel, annonce que la pensée de présenter une Adresse au roi a été approuvée par la commission, à la majorité de 15 voix contre 6, et que le projet qu'il vient de présenter a été adopté par 14 voix contre 7.

Le commissaire du Gouvernement prend la parole pour répéter les déclarations données par le ministre des affaires étrangères, au sein de la commission, avant que la Chambre prenne une décision sur la demande de crédit. Le but des armements est, en première ligne, de remplir les obligations fédérales qui incombent à la Prusse, savoir l'obligation de mettre sur pied une réserve de 30 000 hommes. En seconde ligne, ils ont pour but de parer à des complications ultérieures qui pourraient survenir, si le Danemark s'opposait à l'exécution, si la Confédération déclarait la guerre au Danemark, si la Prusse avait lieu de se dédire du traité de Londres. Ces éventualités peuvent se présenter; il est donc nécessaire que, le Gouvernement y soit préparé. La question de savoir si le Gouvernement se dédira ou non du traité est une question d'opportunité.

MM. Valentini et Waldeck protestent contre le droit que s'est arrogé la commission de proposer une Adresse.

M. le vice-président Unrah répond que la commission a pu le faire au même titre que tout député.

Il est décidé qu'il sera nommé une commission chargée de faire un rapport verbal sur la question de l'Adresse.

M. de Sybel est nommé rapporteur, M. Virchow corapporteur.

Séance du 18 décembre 1863.

L'ordre du jour appelle la discussion sur le projet d'Adresse. M. de Sybel étant tombé malade, c'est M. Virchow qui prend la parole comme rapporteur.

M. Virchow insiste sur l'importance du Schleswig pour l'Allemagne, et commence par exposer le côté historique de la question. Dans le protocole de Londres, on a réservé, sans doute, les droits de la Confédération germanique; mais on n'a jamais su pourquoi, depuis dix ans, la Diète de Francfort n'a pas été saisie de cette affaire. On ne l'explique que par l'intention de l'Autriche et de la Prusse de mettre la Confédération en dehors de ces négociations, intention dictée par l'esprit de la funeste politique d'Olmutz.

Dans les derniers temps, on pouvait espérer que la Prusse reconnaîtrait enfin ses devoirs fédéraux, mais au lieu de cela elle n'a cherché qu'à exercer, de concert avec l'Autriche, une pression sur les Gouvernements allemands. Dans la Note adressée récemment à la Diète, on lui demande de ne rien faire qui puisse porter atteinte à la paix et à la tranquillité de l'Europe; mais la Confédération est une institution

purement allemande. Les deux grandes puissances allemandes, en lui demandant de se placer à un point de vue européen, transforment une question allemande en une question européenne, et, en même temps, la Prusse se fait satellite de l'Autriche, les États secondaires sont comprimés et l'Autriche relevée. Le changement de succession opéré par le traité de Londres ne pouvait être valable que si les États des duchés y donnaient leur assentiment.

Le Gouvernement prussien aurait dû faire en sorte de mettre ces États en position de se prononcer. Il n'en serait pas résulté plus de complications européennes que de la dernière résolution fédérale, et les Gouvernements européens ne se seraient pas plus opposés au vœu national des duchés qu'ils ne se sont opposés au vœu national des Grecs. Deux puissances seulement auraient peut-être résisté, l'Autriche et la Russie, parce qu'elles ont intérêt à rapetisser la Prusse. On dit généralement du président de notre Ministère qu'il cherche le salut de la Prusse dans l'alliance avec la Russie. On dit que c'est dans l'intérêt russe qu'il a déterminé le chef de la ligne d'Augustenbourg à signer un acte de renonciation. Mais il ne faut pas admettre que S. M. le roi soit absolument convaincu de la bonté de la politique du Ministère actuel. C'est là le motif qui justifie l'Adresse. Il faut faire voir au Roi que la politique de ce Ministère est un acte de suicide, que ce Ministère porte atteinte à l'existence de l'État.

Si aujourd'hui les princes allemands sacrifiaient des droits et des pays allemands à des convenances européennes, les peuples n'oublieraient pas la vengeance que mériterait cet acte de trahison, elle resterait écrite en lettres de sang dans le cœur du peuple. C'est pour cela que nous devons signaler les dangers de cette politique, et si le roi ne veut pas nous écouter, nous pourrons dire au moins que nous avons fait notre devoir.

M. de Bismarck commence par demander au préopinant s'il consentirait à recevoir des leçons d'anatomie de la part d'un amateur et s'il consentirait à réfuter des erreurs anatomiques devant un auditoire qui ne serait pas parfaitement initié à cette science. Je me borne là pour cette question, dit le Ministre, et ne vais m'occuper que de quelques reproches personnels qu'on m'a faits. On m'a accusé successivement tantôt d'être l'allié de la France, tantôt de la Russie; d'autres fois, de vouloir fonder une alliance prusso-russo-française. Dans les derniers temps, on m'a reproché de marcher trop d'accord avec l'Autriche; après, on m'a dit que j'ai trop suivi le point de vue anglais dans la question du Schleswig-Holstein; tantôt j'exerce une pression trop forte sur la Confédération germanique, tantôt on m'accuse de faire de la question du Schleswig-Holstein une question européenne, comme si la Prusse et le Danemark étaient dans une île éloignée

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