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et nommé un rapporteur, n'a point indiqué le jour du rapport, que les parties n'ont point été présentes à ce rapport, ni citées pour y être présentes; qu'elles ont donc été privées de faire des observations, et d'être entendues lors des jugemens définitifs, faculté qu'elles devaient avoir, anx termes de l'art. 14 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790. »

Autre ARRÊT de la cour de cassation sur la même question.

Espèce.... Une sentence arbitrale du 2 thermidor an 3, avait déclaré nulle une donation faite à Nicolas Oudin, et attaquée par voie d'appel, par Nicolas Desgranges.

Jugement du tribunal civil du département de Seine et Marne, du 5 nivose an 4, qui ordonne qu'il en sera délibéré au rapport de M. Chalupio, l'un des juges, sans indiquer le jour où ce rapport sera fait.

Jugement définitif du 13 ventose an 4, par lequel le tribunal, après avoir entendu le rapporteur, réformant la sentence arbitrale, déclare Claude Desgranges non recevable dans sa demande en nullité de la donation en question.

Pourvoi en cassation de la part de Desgranges.

ARRÊT de la cour de cassation du 27 nivose an 6, qui casse et annulle.... Motifs.... « Vu l'art. 10 de la loi du 3 brumaire an 2, et attendu que le jugement du 5 nivose an 4, qui prononce un délibéré et nomme un rapporteur, n'a point indiqué le jour où le rapport serait fait; que les parties n'ont point été présentes à ce rapport, et n'ont point été citées pour y être présentes; qu'elles ont donc été privées de la faculté de faire des observations, et d'être entendues lors du jugement définitif, faculté que leur accordait l'art. 13 de la loi du 27 novembre-1er décembre 1790, et l'art. 14 du titre 2 de la loi du 24 août précédent.... »

DEUXIÈME QUESTION. Le jugement qui intervient sur un délibéré contenant nomination d'un rapporteur, est-il nul faute d'énoncer que le rapporteur a fait son rapport, et qu'il l'a fait à l'audience?

Résolu affirmativement par la cour de cassation.

Espèce.... Le sieur Pluvis avait interjete appel d'un jugement du tribunal de district de Louhans, département de Saône-etLoire, et cet appel avait été porté au tribunal civil du Jura, qui, le 3 pluviose an 5, avait entendu les plaidoiries; mais De se trouvant pas encore suffisamment éclairé pour prononcer de suite, il avait ordonné que les pièces seraient mises sur le bureau, pour en être délibéré le 23 du même mois, jour auquel la cause demeura continuée sans nouvelle citation.

Ce jour 23 pluviose, Pluvis demanda un adversaire, le sieur Crétin, venait de distridélai pour répondre à un mémoire que son buer; et ce délai lui fut accordé par un jugement qui continua le délibéré au 13 ventose suivant. Le 13 ventose, l'affaire paraissant aux juges exiger encore un nouvel examen, ils prorogèrent le délibéré au 23 du mème mois, et nommèrent un rapporteur. Le 23, ils prononcèrent définitivement, et mirent au néant l'appel de Pluvis, sans énoncer dans leur jugement que le rapporteur eût fait son rapport, encore moins qu'il l'eût fait en public, et en y exprimant seulement que la cause avait été ce jour-là portée de nouveau à l'audience.

Pourvoi en cassation de la part de Pluvis. sa requête fut admise, et la cause portée à la section civile. Le jugement attaqué était d'une justice frappante, et il était évident que Pluvis n'en demandait la cassation que par esprit de chicane.

ARRÊT de la cour de cassation du II thermidor an 9, au rapport de M. Oudot, qui casse et annulle.... Motifs.... « Vularticle 14 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790, et l'art. 10 de la loi du 3 brumaire an 2; attendu que, par le jugement du 13 ventose an 5, un rapporteur a été nommé, auquel les pièces ont été remises pour faire un rapport; attendu que le jugement du 23 ventose suivant n'énonce pas qu'il eût été fait aucun rapport; d'où il suit que ce dernier jugement a contrevenu aux deux dispositions des lois ci-dessus citées.....” Voyez Rapport.

DÉLIBÉRER. (Jurisprudence.)

I. C'est mettre en délibération, consulter, regarder le pour et le contre d'une affaire,

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2. Cette faculté de délibérer tire son origine du Droit Romain. Le Digeste et le Code contiennent chacun un titre exprès de jure deliberandi.

Suivant les lois du Digeste, si un esclave était institué héritier, ce n'était point à lui qu'on accordait un délai pour délibérer, mais à son maître, parce que les esclaves étaient comptés pour rien par le préteur qui accordait ce délai. Que si l'esclave appartenait à plusieurs maîtres, tous avaient le délai.

L'édit du préteur portait que si on lui, demandait un délai pour délibérer, il l'accorderait; ce qui fait connaître que l'on n'avait point ce délai sans le demander.

La durée de ce délai n'étant point fixée par l'édit, il était au pouvoir du juge de le fixer. On ne devait pas accorder moins de cent jours, ce qui revient à trois mois et dix jours à peu près. Le premier délai n'étant pas suffisant, on en accordait quelquefois un second, et même un troisième; mais cela ne se devait faire que pour une cause importante.

Le délai pour délibérer fut introduit, non seulement en faveur des créanciers, mais aussi pour l'héritier institué; c'est pourquoi le juge devait accorder aux uns et aux autres la facilité de voir les pièces, pour connaître s'ils accepteraient ou non. Si l'hérédité était considérable, et qu'il y eût des choses sujettes à dépérir, comme certaines provisions de bouche, ou de trop grande dépense d'entretien, comme des cheyaux, on permettait à l'héritier qui délibérait, de les vendre. Tome XII.

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3. Dans nos principes, une succession peut être acceptée purement et simplement, ou par bénéfice d'inventaire. (Code Civil, art. 774-)

L'héritier peut déclarer qu'il entend ne prendre une succession que sous bénéfice d'inventaire. (Ibid., art. 793.) Alors l'hé ritier a trois mois pour faire inventaire, à compter du jour de l'ouverture de la succession; il a de plus, pour délibérer sur son acceptation ou sur sa renonciation, un délai de quarante jours, qui commencent à courir du jour de l'expiration des trois mois donnés pour l'inventaire, ou du jour de la clôture de l'inventaire, s'il a été terminé avant les trois mois. (Ibid., art. 795.) Voyez l'article Délai, nombre 16. DÉLINQUANT. ( Droit criminel, Droit forestier.)

En terme de palais, c'est celui qui a commis quelque délit : noxæ reus, delicti

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et si l'instrument dont se sert le délinquant est une hache, une serpe, etc.; et si le dé linquant a une voiture, il faut énoncer de combien de chevaux elle est attelée, si elle est chargée de bois, etc. Il faut aussi que le garde somme le délinquant de déclarer par quel ordre il abat le bois dont il s'agit, et qu'il fasse mention de la réponse.

Si le délinquant a une voiture et des chevaux, et qu'il n'ait point pris la fuite, le garde doit le sommer de conduire sa voiture jusqu'au prochain endroit, pour la remettre entre les mains d'un gardien. Si le délinquant obéit, on doit lui donner sur le champ copie du procès-verbal, ainsi qu'au gardien. Si le délinquant a pris la fuite aussitôt qu'il a apperçu le garde, celui-ci doit en faire mention dans son procès-verbal, ainsi que de la route que le délinquant a prise. S'il arrive que le délinquant se mette en défense contre le garde, ee dernier doit pareillement en faire mention dans son procès-verbal, et spécifier l'espèce d'arme avec laquelle ce délinquant

s'est mis en défense.

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être réputé délit, s'il n'y a contravention à une loi promulguée antérieurement. (Ibid., art. 2.)

La loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif. (Code Civil, article 2.) Les lois de police et de sûreté obli – gent tous ceux qui habitent le territoire français. (Ibid., art. 3.)

Nul délit ne peut être puni de peines qui n'étaient pas prononcées par la loi avant qu'il fût commis. (Code des Délits et des Peines, art. 3.)

Pour tout fait antérieur à la publication du présent code, si le fait est qualifié crime par les lois actuellement existantes, et qu'il ne le soit pas par le présent décret, ou si le fait est qualifié crime par le présent code, et qu'il ne le soit pas par les lois anciennes, l'accusé sera acquitté, sauf à être puni correctionnellement s'il y échoit ; si le fait est qualifié crime par les lois anciennes et par le présent décret, l'accusé qui aura peines portées par le présent code.... (Code été déclaré coupable sera condamné aux Pénal de 1791, 2e partie, tit. 3, art. 4.)

Action.

3. Tout délit donne essentiellement lien à une action publique. Il peut aussi en résulter une action privée ou civile. (Code des Délits et des Peines, art. 4.)

L'action publique a pour objet de punic les atteintes portées à l'ordre social; elle appartient essentiellement au peuple. Elle est exercée en son nom par des fonctionnaires spécialement établis à cet effet. L'action civile a pour objet la réparation du dommage que le délit a causé; elle appartient à ceux qui ont souffert du dommage. (Ibid., art. 5, et 6.)

L'action publique s'éteint par la mort du coupable. L'action civile peut être exercée contre ses héritiers. L'action civile peut être poursuivie en même temps et devant les mêmes juges que l'action publique; elle dans peut aussi l'être séparément; mais, ce cas, l'exercice en est suspendu tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique intentée avant ou pendant la poursuite de l'action civile. (Ibid., ar

Aucun acte, aucune omission ne peut ticles 7 et 8.)

Prescription.

4. Il ne peut être intenté aucune action publique ni civile, pour raison d'un délit, après trois années révolues, à compter du jour où l'existence en a été connue et légalement constatée, lorsque dans cet intervalle il n'a été fait aucunes poursuites. Si dans les trois ans il a été commencé des poursuites, soit criminelles, soit civiles, à raison d'un délit, l'une et l'autre action durent six ans, même contre ceux qui ne seraient pas impliqués dans ces poursuites. Les six ans se comptent pareillement du jour où l'existence du délit a été connue et légalement constatée. Après ce terme, nul ne peut être recherché, soit au criminel, soit au civil, si dans l'intervalle il n'a point été condamné par défaut ou par contumace. (Ibid., art. 9 et 10.)

Répression.

6. La répression des délits exige l'action de deux autorités distinctes et incompatibles celle de la police et celle de la justice. L'action de la police précède essentiellement celle de la justice. La police est instituée pour maintenir l'ordre public, la liberté, la propriété, la sûreté individuelle; société, considérée en masse, est l'objet de son caractère principal est la vigilance. La sa sollicitude. Elle se divise en police administrative et en police judiciaire. (Ibid., art. 15, 16, 17 et 18.)

La police administrative a pour objet le maintien habituel de l'ordre public dans chaque lieu et dans chaque partie de l'adlement à prévenir les délits. Les lois qui ministration générale; elle tend principala concernent font partie du code des adFrançais en pays étranger. Etranger en France ministrations civiles. ( Ibid., art. 19.) et hors France.

5. Tout Français qui s'est rendu coupable, hors du territoire de la république, d'un délit auquel les lois françaises infligent une peine afflictive ou infamante, est jugé et puni en France, lorsqu'il y est arrêté. Sont dans les mêmes cas jugés et punis en France, les étrangers qui ont contrefait, altéré ou falsifié, bors du territoire de la république, soit la monnaie nationale, soit des papiers nationaux ayant cours de monnaies, ou qui ont exposé sciemment, hors du territoire de la république, soit des

monnaies nationales contrefaites ou altérées, soit des papiers nationaux ayant cours de monnaie, contrefaits ou falsifiés. (Ibid.,

art. 11 et 12.)

A l'égard des délits de toute autre nature, les étrangers qui sont prévenus de les avoir commis hors du territoire de la république, ne peuvent être jugés ni punis en France. Mais sur la preuve des pour suites faites contre eux dans les pays où ils les ont commis, si ces délits sont du nombre de ceux qui attentent aux personnes ou aux propriétés, et qui, d'après les lois françaises, emportent peine afflictive ou infamante, ils sont condamnés par les tribunaux correctionnels à sortir du territoire français, avec défense d'y rentrer jusqu'à ce qu'ils se soient justifiés devant les tribunaux compétens. (Ibid., art. 13.)

Voyez Police administrative.

La police judiciaire recherche les délits cher de commettre, en rassemble les preuque la police administrative n'a pu empêves, et en livre les auteurs aux tribunaux

chargés par la loi de les punir. (Art. 20.) Voyez Police judiciaire.

Désignation des délits.

7. Pour ne rien laisser dans le domaine effrayant de l'arbitraire, le législateur a eu un soin particulier de désigner les actions qui peuvent constituer un délit aux espèce de délit, et de distinguer et graduer yeux de la loi, de classer ensuite chaque les peines qui y sont applicables. Cet ouvrage ne pouvait être que le fruit de l'expérience des siècles, que le résultat de la comparaison du droit criminel de toutes les nations. Qu'il nous soit permis de jeter un coup d'œil rapide sur l'état et sur l'origine de ce droit criminel.

Origine et développement des lois criminelles.

8. La société a nécessairement précédé les lois, dont, sans elle, on n'aurait jamais connu le besoin; et, la première société n'ayant été sans doute qu'une famille, les lois y auront été imposées par le chef, et non pas convenues entre les membres. Toute

autre supposition, relativement à l'origine des sociétés et des lois, ne présente qu'une chaîne de contradictions et d'absurdités.

a reçue,

Comme, dans l'état de nature, chacun est le juge et le vengeur de l'offense qu'il les hommes dûrent attenter à la vie de leurs semblables long-temps avant d'attaquer leurs propriétés. De plus, sous le gouvernement des pères de famille, il n'y a point de propriétés; le chef possède tout, et les membres n'ont rien à prétendre, ni par conséquent rien à discuter. Cain tua son frère Abel la société naissante eut

donc, dès son origine, des violences à réprimer et des crimes à punir; et ce ne fut qu'en recevant une forme plus stable et des accroissemens plus étendus après le partage des propriétés, qu'elle trouva des différens à prévenir ou à régler. Les lois criminelles ont donc précédé de beaucoup les lois civiles; elles sont donc presque aussi anciennes que l'établissement de la société qui les rendit nécessaires, et dont elles devinrent, non la base, mais la sauve-garde et l'appui.

Les premières lois criminelles dûrent être et furent en effet très-sévères. On ne pouvait opposer de digues trop solides à la violence des hommes encore profondément pénétrés du sentiment de leur force et de leur indépendance.

Cette sévérité ne fut point adoucie sous les gouvernemens théocratiques, où le tort causé à la société devenait une injure faite à la divinité même. Organes et ministres d'un Dieu législateur, c'était en vengeant d'une manière éclatante et terrible sa puissance outragée, que les prêtres établissaient la leur.

A la théocratie succéda le pouvoir arbitraire d'un seul, lorsqu'il se trouva un audacieux qui osa ne plus gouverner au nom de son Dieu, mais au sien propre. A cette époque, les lois, et sur-tout les lois pénales, ne dûrent point recevoir de changement; l'administration elle-même n'en éprouvait point dans sa forme; et le despote visible qui remplaçait un souverain imaginaire, redoutant peut-être de se voir respecter moins, chercha sans doute à se faire craindre autant.

L'autorité des premiers monarques, ou

plutôt des premiers chefs de peuplades, fut certainement très - limitée chez les nations qui se choisissaient elles-mêmes leurs rois; mais les lois pénales n'en furent pas moins rigoureuses. Dans la société naissante, le frein le plus sévère suffit à peine pour contenir les efforts par lesquels chaque individu tend sans cesse à reprendre et à exercer les droits qu'il tient de la nature : aussi peut-on observer que, dans ce qui nous elles ont principalement pour objet la puest resté des lois des plus anciens peuples, nition des crimes. Aussi les supplices effrayans qu'employèrent les premiers législateurs sont-ils tous décernés contre des forfaits nécessairement fréquens chez les lence et la férocité font commettre. nations encore barbares: ceux que la vio

La loi pénale la plus anciennement établie est sans doute celle du talion. Conforme à l'équité, dictée en quelque sorte par la nature, commandée au moins par la réciprocité, elle était très-exactement observée chez les Hébreux, fidèles imitateurs, sur plusieurs objets, des usages primitifs. Elle fut autorisée par les législateurs grecs et par les législateurs romains. Elle est usitée chez les sauvages, peuple où l'ou retrouve, non l'homme naturel, mais l'homme social dans l'enfance de la société. Mais, comme cette loi rencontra nécessairement bientôt, dans son exécution, des inconvéniens et même des impossibilités, on imagina, pour y remédier, des compensations, des chảtimens, qui tinrent lieu de cette exacte parité entre le crime et le supplice; et voilà ce qui forma le premier code criminel, dont on peut dire, eu égard à toutes les nations, ce que l'on disait des lois de Dracon qu'elles étaient écrites en caractères de sang.

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Nous ne nous arrêterons point à examiner les lois pénales des Egyptiens, ce peuple si anciennement policé, ni celles des Grecs qui puisèrent en Egypte leurs connaissances et leurs institutions; bornonsnous à porter quelques regards sur cette partie de la législation chez les Romaius, dont la jurisprudence criminelle, mèlée avec celle des barbares qui détruisaient leur empire, a formé jusqu'ici celle de toute l'Europe.

Les lois royales, destinées à gouverner

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