Page images
PDF
EPUB

cette donation donnait lieu contre lui, en sa qualité de tuteur, et conséquemment contre ses héritiers, au recours, tel que de droit, accordé aux mineurs par l'article 14 de l'ordonnance de 1731;

« Que cependant l'arrêt dénoncé a refusé ce recours d'une manière absolue, en se fondant sur le motif que, l'acceptation étant nulle ou n'existant pas, ce qui est la même chose, la donation tombe; qu'il n'y a plus d'engagement de la part de celui qui a donné, et, par conséquent, plus de fondement pour une action en garantie contre lui;

disait que le recours est incontestable, quoique | fait nommer à son fils, dont il était tuteur, un le tuteur soit en même temps donateur, parce curateur ad hoc pour accepter la donation qu'il qu'il n'en est pas moins vrai que le tuteur, quoi- lui consentait, le défaut d'acceptation valable de que auteur de la donation, a compromis les intérêts de son mineur, en ne prenant pas les moyens nécessaires pour faire accepter valablement cette donation; que, suivant les expressions de Ricard, le tuteur est, même en ce cas, responsable, en sa qualité de tuteur, de la négligence qu'il a apportée à ce qui regardait les affaires de son mineur; qu'en effet, pour ce qui concerne les donations faites au mineur par autres personnes que par le tuteur, il se pratique, sans contredit, que le tuteur est garant du défaut de solennité qui s'y rencontre, et que, par le même motif, lorsque la donation est faite par lui-même, n'ayant pas moins pour cela sa qualité de tuteur, y va de sa négligence de faire créer un curateur contre lui, comme en toutes les autres affaires qui le regardent en son particulier, et qu'ainsi il n'y a pas de doute qu'en cette qualité il est responsable des nullités qui se sont commises dans la donation, et que, comme les dommagesintérêts du mineur ne peuvent pas moins monter qu'à la chose donnée, le donateur et ceux qui le représentent sont non-recevables à vouloir lui contester cette donation.

il

Le demandeur ajoutait que Bouhier père avait deux qualités à l'egard de son fils, celle de donateur et celle de tuteur; qu'en sa qualité de donateur, il n'avait autre chose à faire qu'à consigner sa volonté dans un acte authentique; mais qu'en sa qualité de tuteur, il était obligé de prendre les moyens prescrits par la loi pour assurer en faveur de son mineur la validité de la donation, et que le défaut d'acceptation valable de la donation provenant de sa négligence, il en est nécessairement responsable en sa qualité de tuteur.

Les défendeurs répondaient que l'article 14 de l'ordonnance de 1731 n'a et ne peut avoir pour objet que la donation faite au mineur par un tiers ou étranger, et non par le tuteur lui-même. Pour établir cette proposition, ils ont développé le dernier motif de l'arrêt dénoncé; ils ont principalement insisté sur ce que, d'une donation qui n'existait pas réellement, puisqu'elle n'avait pas été valablement acceptée, et qui, conséquemment, devait être considérée comme n'ayant pas été consommée, on ne pouvait faire sortir le gerne d'une action en garantie contre le donateur, qui peut-être lui-même n'avait pas voulu consommer sa donation en la faisant accepter valablement. Sur quoi, arrêt ainsi conçu, sous la date du 11 juin 1816:

« Oui le rapport de M. le conseiller Chabot de l'Allier; ensemble les conclusions de M. l'avocatgénéral Cahier; et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

« Vu l'art. 14 de l'ordonnance de 1731;

• Attendu que Lazare Bouhier père n'ayant pas

« Mais que c'est précisément parce que la donation était nulle à défaut d'acceptation qu'il avait été admis, par l'ordonnance de 1731, que le défaut d'acceptation provenant du fait du tuteur ouvrirait contre lui une action en recours de la part du mineur, au préjudice duquel la donation se trouvait nulle et de nul effet, pour n'avoir pas été acceptée;

[ocr errors]

« Que, d'ailleurs, à cet égard, la disposition de l'art. 14 de l'ordonnance étant générale et sans exception, elle est applicable à tous les tuteurs sans distinction, et même à ceux qui sont euxmêmes donateurs, puisqu'en donnant ils ne perdent pas la qualité de tuteurs, et qu'ils n'en sont pas moins tenus de remplir les devoirs que leur impose cette qualité;

«Par ces motifs, la cour casse et annule l'arrêt de la cour royale de Dijon, du 29 juin 1813, etc. » N° 2. Du dépouillement, et de l'irrévocabilité.

[ocr errors]

I. Le dépouillement actuel du donateur, la transmission au donataire de la propriété des choses données, et l'irrévocabilité de ce dépouillement et de cette transmission, sont de l'essence de la donation entre-vifs, et constituent deux solennités de sa forme intrinsèque, rigoureusement indispensables pour sa validité.

Ainsi, toutes les fois qu'il reste au pouvoir du donateur de porter atteinte à la donation, soit directement, soit indirectement, d'en anéantir ou affaiblir l'effet, la donation est nulle, ou pour mieux dire, il n'y a pas de donation, parce qu'elle est viciée dans son essence par le défaut de dépouillement et d'irrévocabilité.

Toutes les dispositions du Code civil qu'on va rappeler ne sont que des conséquences de ces principes, et l'application de cette maxime fondamentale en matière de donation entre-vifs, donner et retenir ne vaut.

II. On ne peut se dépouiller de ce qu'on n'a pas; on ne peut transmettre ce qu'on n'a pas. De là la nullité des donations des biens à venir cette nullité est proposée par l'art. 943 du Code civil, ainsi conçu: « La donation entre-vifs ne pourra

[ocr errors]

comprendre que les biens présents du donateur; | que le donateur conserverait le pouvoir de ressi elle comprend des biens à venir, elle sera treindre et même d'anéantir la valeur des objets «nulle à cet égard. »

On entend par biens à venir ceux qui n'appartiennent pas au donateur au moment de la donation, et sur lesquels il n'a ni droit, ni action pure ou conditionnelle pour les prétendre ou les espérer.

L'article 15 de l'ordonnance de 1731 pronon çait la nullité des donations de biens présents et à venir, même pour les biens présents. Le Code civil a adouci la sévérité de cette disposition, en restreignant la nullité de ces donations aux biens à venir, en les laissant subsister pour les biens présents.

Ce nouveau droit est bien plus conforme aux principes d'une sage équité, et se concilie même avec les égards dus à la volonté du disposant. S'il est juste, en effet, que la loi anéantisse une disposition qu'elle défendait, il est également juste qu'elle protège et qu'elle assure l'exécution de celle qu'elle autorisait.

Du principe que le donateur doit se dépouiller de la chose donnée, et la transmettre d'une manière irrévocable, doit-on conclure qu'il est tenu à la garantie?

Non, à moins de stipulation contraire : il est présumé n'avoir voulu donner la chose que comme il la possédait, et telle qu'elle pouvait lui appartenir. De quelque manière qu'elle soit revendiquée entre les mains du donataire, il n'est donc tenu d'aucuns dommages-intérêts, qu'en cas de dol de sa part.

Il en est sans doute autrement, lorsqu'il s'agit d'une donation rémunératoire faite pour des services mercenaires, à raison desquels celui qui les a rendus aurait eu action en justice. C'est qu'alors ce n'est pas une donation, mais une véritable dation en paiement. Le donateur, ou plutôt le débiteur qui s'est libéré, est tenu de la garantie jusqu'à concurrence de la valeur réelle des services rendus. Pothier, Traité du Contrat de vente, no 607 et suiv.)

III. Les donations faites sous des conditions dont l'accomplissement dépend de la seule volonté du donateur, sont déclarées nulles par l'art. 944 du Code civil.

Cette disposition, qui se trouvait dans l'art. 16 de l'ordounance de 1731, est une conséquence nécessaire de l'irrévocabilité, qui est un des caractères essentiels de la donation entre-vifs; car cette irrévocabilité n'existe pas lorsque le donateur peut révoquer sa donation par l'effet d'une condition, dont l'accomplissement est en son pouvoir.

Une donation faite sous condition d'acquitter des dettes et charges, autres que celles existantes au moment de la donation, ou exprimées soit dans la donation même, soit dans un état y annexé, pécherait aussi par le défaut d'irrévocabilité, puis

donnés.

Une pareille donation doit donc être déclarée nulle; l'article 16 de l'ordonnance de 1731 en prononçait la nullité, et le Code civil la prononce également par son article 945.

Le donataire peut-il être tenu d'acquitter d'autres dettes du donateur que celles dont il est chargé par la donation même ?

Voy. Partage d'ascendant, no 11I.

IV. Lorsqu'une donation est faite avec réserve par le donateur de disposer d'un ou de plusieurs des objets qui y sont compris, ou d'une somme à prendre sur les biens donnés, si le donateur n'use pas de cette faculté, c'est-à-dire, s'il ne dispose pas des objets dont il s'était réservé la disposition, ils appartiennent à ses héritiers, et non au donataire, quand même il aurait été expressément stipulé, que dans le cas où le donateur n'aurait pas disposé des objets dont il se réservait la disposition, ils seraient compris dans la donation et appartiendraient au donataire. (Code civil, art. 946.)

L'article 16 de l'ordonnance de 1731 avait la même disposition, et elle est une conséquence de la nécessité du dépouillement actuel et irrévocable du donateur pour la validité de la donation entre-vifs. En effet, lorsque le donateur se réserve la faculté de disposer d'un objet qu'il comprend dans sa donation, il ne se dépouille pas de cet objet, et, conséquemment, il ne le donne pas, puisqu'il n'y a pas de donation entre-vifs sans dépouillement actuel et irrévocable. D'un autre côté, si l'on pouvait regarder cette disposition comme renfermant donation, elle serait faite sous condition potestative, dont l'accomplissement serait au pouvoir du donateur; et sous ce second rapport, la donation serait nulle.

Mais il n'en est pas de même, si la donation avec réserve par le donateur de disposer d'un ou de plusieurs des objets qui y sont compris, a été faite par contrat de mariage, dans ce cas, l'objet réservé, si le donateur n'en a pas disposé de son vivant, doit appartenir au donataire. (Code civ., art. 1086.)

Cette différence entre les articles 946 et 1086 doit être bien saisie, puisque l'un autorise ce que l'autre défend la faveur du contrat de mariage a fait admettre cet avantage pour le donataire contractuel.

Voyez, à l'article Contrat de mariage, ce qui est dit sur les donations en faveur de mariage.

N° 3.-Des donations d'effets mobiliers. I. Les donations d'effets mobiliers ne sont valables qu'autant qu'il est annexé à la minute des actes qui les contiennent, des états estimatifs des effets donnés, signés par le donateur, et par le donataire, ou ceux qui acceptent pour lui (Code

civil, art. 948, conforme à l'article 15 de l'or- | jouissance, et la transmet irrévocablement à chadonnance de 1731); à moins que les parties ne cun de ses donataires. puissent signer, auquel cas le vœu de la loi est rempli par l'insertion de l'état dans l'acte.

Le donataire d'effets mobiliers, avec réserve d'usufruit, est tenu de les prendre à l'extinction La raison de cette disposition est que toute de l'usufruit, dans l'état où ils se trouvent ; il a donation entre - vifs doit avoir pour objet des seulement une action en recours contre le donachoses certaines et déterminées, à défaut de quoiteur, ou ses héritiers, pour raison de ceux qui ne elle n'a que le nom de donation, et n'en est pas une réelle; qu'une donation d'effets mobiliers qui ne seraient pas constatés, tant sous le rapport de leur quotité, que sous celui de leur valeur, n'aurait aucun objet positif et déterminé,et ne doit, par cette raison, produire aucun effet.

Le vice résultant du défaut d'état estimatif ne serait pas même, en général, couvert par l'exécution volontaire que le donateur aurait consentie de la donation; c'est la conséquence des articles 1339 et 1340 du Code civil.

Voyez cependant Don manuel.

se retrouvent pas en nature, jusqu'à concurrence de la valeur qui leur a été fixée par l'état estimatif. (Code civil, art. 950.)

Cet état estimatif est nécessaire, encore bien qu'il y ait tradition; l'article 948 du Code ne contient ni exception, ni restriction à cet égard, à la différence de l'article 15 de l'ordonnance de 1731, qui ne prescrivait cet état que lorsqu'il n'y avait pas tradition réelle.

la loi, il convenait encore, sous ce rapport, de fixer la nature et la valeur des effets mobiliers donnés, pour pouvoir, en cas de révocation, en exercer la reprise.

La commission avait proposé la même restriction; elle fut rejetée sur la demande de M. Tronchet, motivée sur ce que toute donation étant II. Il est essentiel de remarquer que la dispo- sujette à réduction, lorsqu'elle excède la portion sition de l'article 948 du Code est générale, et disponible, il convenait de fixer un mode de poun'introduit aucune exception; d'où il suit qu'elle voir vérifier, par la suite, la valeur des effets mos'applique aux donations d'effets mobiliers faites biliers qui auraient été l'objet d'une donation (1); par contrat de mariage, comme à celles des mêmes on peut aussi ajouter que toutes donations étant objets, faites par actes particuliers. Le défaut d'ex-sujettes à révocation, dans les cas déterminés par ception à la règle générale suffirait à la preuve de cette vérité; mais cette preuve, comme l'observe M. Merlin, dans son Répertoire de jurisprudence, au mot Donation, section 5, paragraphe 2, n° 4, « est pour ainsi dire convertie en démonstration mathématique, par la place qu'occupe l'article 948 même, dans le Code civil. En effet, cet article est placé immédiatement après celui qui dispense les donations faites par contrat de mariage, des formalités prescrites par les quatre articles qui le précèdent; or, si la volonté du législateur eût été de dispenser les donations d'effets mobiliers, faites par contrat de mariage, de la nécessité de l'état estimatif qu'il prescrivait par son article 948, il n'eût placé, qu'après cet article, l'exception qu'il établissait en faveur des contrats de mariage, au lieu de le placer immédiatement avant. C'est bien le cas d'appliquer la maxime: Qui dicit de uno, negat de altero.

La donation d'effets mobiliers faite sans acte, de main à la main, est-elle valable? Voyez Don manuel.

N° 4. De la réserve d'usufruit.

-

Le donateur peut se réserver l'usufruit des biens donnés, soit mobiliers, soit immobiliers, ou en disposer en faveur d'un tiers (Code civ., art. 949). Ce mode de disposition ne porte, en effet, aucune atteinte aux règles sur la nécessité du dépouille ment actuel et irrévocable du donateur. S'il se réserve l'usufruit des biens donnés, il se dépouille seulement de leur propriété, qu'il transmet actuellement et irrévocablement au donataire; s'il dispose de cette jouissance au profit d'un tiers, il se dépouille tout à la fois de sa propriété et de sa

Il est essentiel de remarquer que si l'état ne contenait pas l'estimation de quelques-uns des effets donnés, la donation ne serait pas nulle pour le tout. L'article, d'après l'observation du Tribunat, a restreint la nullité aux seuls effets pour lesquels il y aura eu omission d'estimation.

No 5. Du droit de retour.

La stipulation de retour des biens donnés, en cas de prédécès du donataire seul, ou du donataire et de ses enfants, ne porte, non plus que la réserve ou la disposition en faveur d'un tiers de l'usufruit des biens donnés, aucune atteinte à la règle du dépouillement actuel et irrévocable du donateur; elle est autorisée par l'article 951 du Code civil.

On distinguait autrefois le retour légal et le retour conventionnel.

Le retour légal est aboli; il n'y a plus de droit de retour que celui qui a été stipulé, si ce n'est au profit des ascendants donateurs, ainsi qu'il est réglé par l'article 747 du titre des successions. Le droit de retour ne peut être stipulé qu'au profit du donateur seul; il est incommunicable et ne peut être transmis.

En cas d'ouverture du droit de retour, les aliénations que les donataires auraient pu faire des biens donnés sont résolues; le donateur les re

(1) Voy. la Conférence des discussions du Code civil, tome 4, page 275.

prend dans la main du tiers détenteur, et il les reprend francs et quittes de toutes les charges et hypothèques dont ils auraient pu être grevés; il n'y a d'exception qu'en faveur de l'hypothèque subsidiaire de la femme, pour sa dot et ses conventions matrimoniales, lorsque les autres biens de son mari sont insuffisants pour la remplir, et dans le cas seulement où la donation aurait été faite au mari par le contrat de mariage, duquel résultent les droits et hypothèques de la femme. (Code civil, art. 952.)

Il y avait une grande diversité de jurisprudence sur la question de savoir si le donataire pouvait disposer librement des biens donnés au préjudice du droit de retour, les aliéner, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux, les grever de charges et hypothèques.

Le Code civil a fait cesser cette diversité, en disposant textuellement que les aliénations qui seraient faites des biens donnés, avec stipulation de retour, seront résolues par l'ouverture de ce droit, et que ces biens reviendraient au donateur, francs et quittes de toutes charges et hypothèques. Les tiers ne peuvent se plaindre de cette disposition, parce qu'ils ont tous les moyens nécessaires pour s'assurer de la nature des droits de ceux avec qui ils contractent, sur les biens qu'ils possèdent, soit qu'ils veuillent les acquérir, soit qu'ils leurs soient offerts pour sûreté des engagements à subir envers eux.

S II.

De la transcription.

I. Le besoin de garantir les tiers des piéges et des dangers auxquels aurait pu les exposer la clandestinité des donations entre-vifs, avait fait introduire leur publicité dans la législation romaine. Cette publicité s'opérait par la formalité de l'insinuation. Elle était prescrite par la loi 36, au Code De donat. L'insinuation n'était autre chose que la transcription de l'acte de donation sur un registre à ce destiné, et ouvert au public. Nos anciennes ordonnances avaient adopté ce mode de publicité des donations. L'article 58 de l'ordonnance de Moulins la prescrivait, à peine de nullité.

Un grand nombre de lois furent rendues postérieurement sur cette matière, et prescrivirent les délais et la forme dans lesquels l'insinuation devait avoir lieu, et les effets qui devaient résulter de l'observation ou de l'omission de cette formalité.

L'ordonnance de 1731 régla de nouveau les formalités de l'insinuation. Quinze de ces articles furent consacrés à les poser et à les expliquer, depuis et compris le 19°, jusques et compris le 33.

Toute cette législation sur l'insinuation, est devenue à peu près inutile depuis la loi du 11

[ocr errors]

brumaire an vir, qui a ordonné la transcription sur des registres à ce destinés, de toutes espèces; d'actes translatifs de la propriété des immeubles elle l'est devenue complètement depuis la promulgation du Code civil, qui a définitivement substitué la formalité de la transcription à celle de l'insinuation.

L'article 939 ordonne particulièrement la transcription de tous actes portant donation de biens susceptibles d'hypothèques, de leur acceptation, et de la notification de cette acceptation, lorsqu'elle a été faite par acte séparé, au bureau des hypothèques de la situation des biens donnés.

Pour justifier la nécessité de cette notification, le Tribunat s'expliquait ainsi : La donation n'a son effet que par l'acceptation, lorsqu'elle est postérieure. Elle est donc imparfaite sans l'acceptation, et il serait inconvenant de faire la transcription d'un acte imparfait qui ne donnerait au public aucun renseignement fixe sur l'état de la fortune du donateur.»

La propriété des biens donnés n'est conférée au donataire, vis-à-vis des tiers intéressés, que par la transcription; tant que cette formalité n'a pas été remplie, il ne peut leur opposer sa donation. Mais le donateur, ceux qui sont chargés de faire faire la transcription, et les ayant-cause de ces derniers, ne peuvent se prévaloir du défaut d'accomplissement de cette formalité. (Code civil, art. 941.)

Les donations faites aux femmes mariées doivent être transcrites à la diligence de leurs maris; mais, en cas de négligence de leur part, elles peuvent en réquérir elles-mêmes la transcription, et sans avoir besoin d'autorisation à cet effet. (Code civil, art. 940.)

A l'égard des donations faites aux mineurs, aux interdits, et à des établissements publics, elles doivent être transcrites à la diligence des tuteurs, curateurs ou administrateurs. (Ibid.)

On a vu ci-dessus que les mineurs, les interdits et les femmes mariées, ne sont point restileurs tuables contre le défaut d'acceptation par tuteurs et maris, des donations entre-vifs qui leur auraient été faites; ils ne le sont pas non plus pour cause du défaut de transcription; la loi leur accorde seulement, dans ce cas, comme dans celui du défaut d'acceptation, un recours contre leurs tuteurs et maris, sans que leur insolvabilité puisse donner ouverture en leur faveur à la restitution. (Code civil, art. 942, conforme à l'article 32 de l'ordonnance de 1731.)

II. Le défaut de transcription d'une donation peut-il être opposé par le tiers-acquéreur ?

La cour de cassation a décidé l'affirmative par arrêt du 10 avril 1815, rapporté en ces termes au Bulletin civil :

Le 30 avril 1766, contrat de mariage entre Joseph Hueber et Anne Deiss.

Ce contrat porte qu'il y aura entre les époux

Anne Deiss est décédée sans enfants, à la fin de l'année 1785, les demandeurs en cassation sont ses héritiers.

une communauté universelle, partageable particle 938 du Code civil, la donation dûment moitié, dans le cas où il existerait des enfants issus acceptée est parfaite par le seul consentement des du mariage; mais il ne contient pas de réglement parties, et la propriété des objets donnés est transexprès sur le partage de cette communauté, dans férée au donataire, sans qu'il soit besoin d'autre le cas où il n'existerait pas d'enfants; il y est seu- tradition; que, à la vérité, l'article 939 exige la lement stipulé que, dans le cas de non-existence transcription des donations de biens susceptibles d'enfants, le survivant des deux époux aura l'usu- d'hypothèque, et que l'article 941 permet à toutes fruit viager de toute la masse des biens, et qu'a- personnes ayant intérêt, d'opposer le défaut de près son décès, les biens appartiendront aux pa- transcription; mais qu'il résulte de ces deux arrents respectifs des deux époux. ticles combinés, que le legislateur n'a eu en vue, par le dernier de ces articles, que les créanciers, puisque l'article 939 ne prescrit la transcription que sous le rapport des biens donnés qui seraient susceptibles d'hypothèque; que les héritiers d'Anne Deiss, ne se trouvant pas dans ce cas, ne peuvent se prévaloir de la prétendue tardiveté de la transcription de la donation dont il s'agit, d'autant que cette transcription a eu lieu encore du vivant de Hueber; que, d'ailleurs, les pratiques mises en œuvre par les héritiers d'Anne Deiss, pour abuser de la crédulité de Joseph Hueber, vieillard simple, sont évidentes; qu'elles ont eu pour but d'établir l'incapacité de la femme Zimmermann de recevoir la donation, en l'inculpant témerairement d'être un enfant adultérin du donateur subsidiairement de la frustrer du fruit de la donation par les engagements qu'ils ont extorqués

En 1786, il a été dressé inventaire de tous les biens de la communauté, et Joseph Hueber a joui de tous ces biens.

Le 6 avril 1809, contrat de mariage entre Fridolin Zimmermann et Catherine Hueber, qui sont les défendeurs en cassation.

Dans ce contrat est intervenu Joseph Hueber, veuf d'Anne Deiss, et il y a fait donation aux futurs époux de tous les biens qu'il possédait alors, et de ceux qu'il pourrait délaisser au jour de son décès.

Cependant, par un acte notarié du 22 septembre 1810, il a consenti vente et abandon aux héritiers de sa femme, de plusieurs immeubles, moyennant une pension viagère.

Peu de temps après, il a formé contre eux une demande en nullité de cet acte; mais par un acte notarié, du 16 décembre de la même année, il s'est désisté de son action.

Il est mort le 10 janvier 1811; et le 22 février suivant, les mariés Zimmermann ont formé, contre les héritiers d'Anne Deiss, une demande tendant à ce que, sans s'arrêter à l'acte du 22 septembre 1810, il fût procédé au partage de la communauté qui avait existé entre Joseph Hueber et Anne Deiss.

Devant les premiers juges, les héritiers d'Anne Deiss ont conclu à ce que la donation consentie à Catherine Hueber et à son mari, fût déclarée nulle, par la raison que ladite Catherine Hueber étart fille adultérine de Joseph Hueber, donateur. Les conclusions ont été accueillies par le tribunal de première instance.

Les parties ont respectivement appelé de ce jugement.

Les héritiers d'Anne Deiss ont fondé leur appel sur ce que la donation n'avait pas été déclarée nulle, conformément aux articles 939 et 941 du Code civil, à défaut de transcription avant la vente qui leur avait été consentie.

Mais la cour de Colmar n'a pas accueilli leurs conclusions; et, par arrêt du 4 août 1812, elle a ordonné le partage de la communauté qui avait existé entre Joseph Hueber et Anne Deiss, et de laquelle deux tiers appartiendraient aux mariés Zimmermann, et l'autre tiers aux héritiers Deiss. Cette cour s'est fondée sur ce que, d'après l'ar

du donateur.

[ocr errors]

La cour de Colmar avait, par cette décision, formellement violé les articles 939 et 941 du Code civil, et faussement appliqué l'article 938 du même Code, en ce qu'elle avait jugé qu'une donation d'immeubles était parfaite et translative de propriété, même à l'égard des tiers, indépendamment de la transcription, et que, dès lors, des tiers-acquéreurs à titre onéreux ne pouvaient se prévaloir du défaut de transcription.

L'arrêt qui a réprimé cette violation et cette fausse application, est ainsi conçu:

«Ouï le rapport de M. le conseiller Chabot de l'Allier; les observations de Jousselin, avocat des demandeurs, celles de Guichard, avocat des défendeurs; ensemble les conclusions de M. Lecoutour, avocat-général; et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

"

Vu les articles 938, 939 et 941 du Code - Attendu,

civil;

[merged small][ocr errors][merged small]
« PreviousContinue »