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rétroactif.

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Le ro juin 1810, jugement du tribunal civil de la Seine, qui attribue au sieur Wirion le quart de la succession de son fils. Mais sur l'appel, arrêt du 6 août, qui infirme et ordonne l'exécution pure et simple du don mutuel, « attendu que les lois n'ont pas d'effet rétroactif; le que caractère d'irrévocabilité, attaché aux donations de survie singulières ou réciproques, stipulées par contrat de mariage dont elles sont une condition, en constitue de véritables donations entrevifs, qui ne peuvent être soumises dans leur exécution qu'à la loi du contrat ; et que donation portée au contrat de mariage du 6 ventose an vi, a été faite sous l'empire de la loi du 17 nivòse an 2, qui n'attribuait aucune réserve héréditaire aux ascendants.

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avec la demoiselle Marguerite Raclot. Les époux | le donateur se dépouille actuellement et irrévocablese donnent réciproquement tous leurs biens à ment de la chose donnée, en faveur du donataire venir, par une clause de leur contrat antinuptial, qui l'accepte. Ainsi, pour qu'il y ait donation entreainsi conçue « Les futurs époux se font don vifs, il faut essentiellement qu'il y ait translation « mutuel, indéfini et irrévocable, le premier actuelle et effective, à titre gratuit, d'une propriété « mourant au survivant, de tous les biens généra- présente et certaine. Celui-là ne donne donc pas ⚫lement quelconques que délaissera le premier, entre-vifs qui donne les biens qu'il laissera à sa « pour le second être saisi d'iceux sans qu'il y mort; les biens qu'il laissera à sa mort ne sont << ait inventaire. » Le général Wirion étant pré- pas certains, ils ne sont pas déterminés, ils ne décédé en 1809 sans postérité, son père a récla- sont pas présents; ils ne peuvent donc pas faire mé le quart de sa succession à titre de réserve, la matière d'une donation entre-vifs. Non videntur d'après les art. 915 et 920 du Code civil. — La data, quæ co tempore quo dantur accipientis non veuve Wirion a répondu qu'à l'époque de son fiunt; ce sont les termes de la loi 167, D. de recontrat de mariage la loi ne faisait aucune réserve gulis juris. Peu importe que par un privilége au profit des ascendants; que, par conséquent, particulier au contrat qui la renferme, la donason mari avait pu disposer de tous ses biens; et tion des biens qu'on laissera à son décès soit irréla donation du 6 ventose étant irrévocable, vocable; elle conserve toujours sa nature de doque ne pouvait être réglée par une loi rendue posté- nation à cause de mort, parce que, pour être rieurement, parce que les lois n'ont pas d'effet donation entre-vifs, il faudrait qu'elle portât sur des biens présents, et qu'elle en dessaisît actuellement le donateur. C'est ce qu'enseigne M. Merlin dans son répertoire de jurisprudence, v° don manuel, § 3, no 3, où il s'exprime en ces termes, en examinant la question de savoir si les dons mutuels irrévocables peuvent être qualifiés donations entre-vifs, et s'ils sont comme tels assujettis à l'insinuation prescrite par la déclaration de 1549:— « Qu'y a-t-il de moins révocable que les dispositions qui, par contrat de mariage, assurent aux futurs époux ou à leurs enfants à naître, soit la totalité, soit une quote de biens que telle personne laissera en mourant? Cependant l'art. 3 de l'ordonnance de 1731, les qualifie expressément de donations à cause de mort; toutes donations à cause de mort (y est-il dit ), à l'exception de celles qui se feront par contrat de mariage, ne pourront dorénavant avoir aucun effet..... que lorsqu'elles auront été faites dans la même forme que les testaments et codicifles. L'article 13, parle également des dispositions à cause de mort qui seraient faites par contrat de mariage. Aussi est-il bien constant que l'institution contractuelle n'est pas comprise dans l'article de la déclaration de 1549, qui annule les donations entre-vifs non insinuées du vivant des donateurs, et c'est ce qu'ont jugé deux arrêts du parlement d'Aix, du mois de novembre 1644, et du 29 juin 1699, rapportés par Duperrier et par le président de Buissieux; deux arrêts du parlement de Paris, l'un rendu dans la maison d'Albert, l'autre du 16 septembre 1657, cités l'un et l'autre dans le journal du palais, tome 2, page 394. — C'est encore sur le même fondement qu'un arrêt de la même cour, du 28 avril 1758, a déclaré valable, quoique non insinuée, une disposition par laquelle deux personnes étrangères à une future épouse avaient déclaré, dans son contrat de mariage, lui donner la propriété de tous les biens tant meubles qu'immeubles qu'elles pourraient laisser après leur décès..... » Il est donc incontestable

la

Pourvoi en cassation, pour violation de l'article 915 du Code civil, qui attribue une réserve aux ascendants, et pour fausse application de l'article 2, d'après lequel la loi n'a point d'effet rétroactif. Toute la difficulté, a dit le demandeur, consiste à savoir si le don mutuel est une donation à cause de mort, ou entre-vifs; s'il a son effet du jour du contrat, ou seulement de celui de la mort du donateur; et si, en conséquence, il est soumis, pour la réduction, à la loi existante lors du contrat, ou à celle en vigueur du temps de la mort. Or, il est certain qu'un don mutuel est une donation à cause de mort, et ne peut être assimilé aux donations entre-vifs. En effet, qu'est-ce qu'une donation entre-vifs? C'est une disposition par laquelle on se dessaisit actuellement de la propriété de choses certaines et déterminées, au profit d'une personne que l'on en saisit à l'instant même. Dat aliquis (dit la loi 1 au D. de donationibus) ea mente ut statim velit accipientis fieri, nec ullo casu ad se reverti, et propter nullam aliam causam facit, quam ut liberalitatem et munificentiam exerceat; et hæc proprie donatio appellatur. La donation entre-vifs (porte l'art. 894 du Code civ.), est un acte par lequel

que la donation du 6 ventose an vi est une véritable donation à cause de mort. Mais le donateur est décédé sous l'empire du Code civil; la portion disponible doit donc être réglée d'après les principes qu'il établit; et l'arrêt de la cour de Paris qui a jugé le contraire, a violé l'art. 915, et faussement appliqué l'article 2 sur l'effet rétroactif.

Toute cette argumentation, a répondu la défenderesse, ne roule que sur une confusion de principes. Il est inutile d'examiner si le don mutuel est une donation entre-vifs ou à cause de mort. L'essentiel est qu'il constitue une convention matrimoniale et que dès lors il est irrévocable. Or de ce point constant et reconnu, il résulte nécessairement qu'il doit se régir par la loi du temps où il a été fait.

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an 2, sous l'empire de laquelle la donation a eu lieu, attendu qu'il s'agit d'une donation irrévocable de sa nature bien qu'éventuelle. Sur l'appel, ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour royale d'Aix du 11 février 1817; et cette décision déférée à la cour régulatrice, y a été confirmé, - attendu que la donation était régie par la loi du 17 nivose an 2, sous l'empire de laquelle elle a eu lieu, et, par conséquent, que la réduc tion a dû être opérée conformément aux dispositions de cette loi. »

L'art. 1097 du Code civil, qui défend aux époux de se donner mutuellement par un seul et même acte, s'applique-t-il aux donations mutuelles faites avant sa promulgation, lorsque les donateurs ne sont décédés que sous l'empire du Code?

Est-il la règle de la capacité des parties qui ont disposé avant le Code?

A-t-il trait à antre chose qu'à la forme de la donation?

Peut-on annuler les actes simulés, lorsqu'ils ne font que fraude à la loi?

Et particulièrement, est-ce frauder la loi que de faire une donation simple sous la forme d'une donation mutuelle, si le donateur et le donataire étaient également capables de donner et recevoir par une donation simple?

Toutes ces questions ont été négativement résolues par un arrêt de la cour de cassation du 13. juin 1813.

Cet arrêt a jugé, en outre,

Cette défense a été accueillie; et par arrêt du 18 mai 1812, au rapport de M. Carnot, Attendu que le don mutuel entre époux, fait par contrat de mariage, met le donateur dans En pays de droit écrit, était-il nécessaire, pour Tincapacité de disposer ultérieurement de ses la validité d'un don mutuel, qu'il conferât des biens à titre gratuit; d'où il suit qu'il est irré-avantages égaux aux parties? vocable, et par une conséquence nécessaire, qu'il doit se régir par la loi du temps où il a été fait; que si, par la nature des choses, son exécu tion est purement éventuelle, cette éventualité se rattache à l'époque de la disposition, puisque c'est elle qui constitue le droit du donataire; que ce droit étant acquis d'une manière irrévocable, ne peut être altéré en tout ou en partie par une législation qui lui est postérieure; que la prohibition de l'effet rétroactif des lois est, en effet, l'une des bases fondamentales de notre législation, et que ce serait violer ce principe, établi par l'article 2 du Code civil, que de faire prévaloir les dispositions de ce Code aux lois existantes à l'instant de la convention; attendu que l'art. 915 du même Code, sur lequel le demandeur fonde son ouverture de cassation, n'a disposé que pour l'avenir; que cela résulte, non-seulement de sa combinaison avec l'art. 2, mais même de ses propres termes, pris dans leur sens littéral;- Qu'ainsi le don mutuel que se firent les époux Wirion, par leur contrat de mariage du 6 ventose an vi, n'a pu recevoir aucune atteinte des dispositions dudit article 915, qui n'a acquis le caractère de loi qu'en l'an XII; et que, loin de violer ledit article, l'arrêt attaqué à fait une juste application de l'art. 2: rejette, etc.

Même décision dans un arrêt du 1er février 1820, au rapport de M. Zangiacomi. Dans l'espèce, un enfant était né du mariage; et il s'agissait de savoir si sa réserve devait être déterminée par la loi du 17 nivose an 2, sous laquelle le don mutuel par contrat de mariage avait eu lieu, ou par le Code civil, sous l'empire duquel la donatrice était décédée. Le 3 août 1814, jugement du tribunal civil de Marseille, qui ordonne que la réduction sera faite suivant la loi du 17 nivose

1° Que l'art. 2054 du Code civil, qui permet de demander la rescision d'une transaction faite en exécution d'un titre nul, lorsque les parties n'ont pas expressément traité sur la nullité, ne s'applique point au cas où la transaction a été suivie d'exécution volontaire; - que, dans ce cas, l'exécution donnée à la transaction rend cet article 2054 inapplicable, etrend applicable l'art. 1340, d'après lequel aucune action en rescision n'est admise contre un acte exécuté volontairement;

2° Que lorsqu'une transaction a été faite par le mandataire, et que le mandant la soutient nulle, si la question dépend du point de savoir s'il a eu connaissance de la nullité qui est le fondement de son action, la connaissance qu'en a eue le mandataire est réputée la connaissance personnelle du mandant;

3o Qu'une contre-lettre dérogatoire à un contrat de mariage est nulle, même à l'égard des contractants, si elle n'a été faite en la présence, et du consentement simultané de toutes les personnes qui ont figuré comme parties au contrat de mariage.

Voici l'espèce de cet arrêt telle qu'elle est rapportée au Bulletin civil:

En 1774, Henri de Frégeville épousa en pre

mières noces la demoiselle Despradels, qui reçut de ses parens une dot de 86,000 francs.

somme de 100,000 francs, au moyen de quoi le sieur de Frégeville demeurerait quitte envers elle de sa dot et de tous les objets compris dans la do

En l'an III, il contracta un second mariage avec la demoiselle de Possac, nièce du père de sa pre-nation. mière femme.

Elle avait déja reçu 68,000 francs à compte de Par contrat passé à Milhaud, le 14 pluviose cette somme, lorsque les retards qu'elle éprouvait an III, cette demoiselle se constitua en dot la pour le paiement à lui faire du surplus, l'obligèsomme de 86,000 francs, dont le sieur de Frége-rent à faire un commandement à son débiteur. ville lui donna quittance.

Cette dot était une libéralité du sieur Despradels son oncle, qui lui donna ainsi la dot de sa fille, mais qui ne parut pas au contrat de mariage de sa nièce, attendu que la loi du 17 nivose an 2 ne lui permettait pas de faire un don de cette importance.

Par acte notarié du 13 frimaire an iv, Henri de Frégeville et sa femme se firent une donation mutuelle au profit du survivant des deux.

Celle du mari à son épouse comprenait, 1o la jouissance d'une rente annuelle de 4000 francs; 2o la jouissance de sa maison de Réalmont et des héritages en dépendant; 3o la jouissance de son domaine de Peyralbie; 4° la propriété de tous les meubles existants le jour de son décès dans sa maison de Réalmont; 5° enfin, la propriété de tout l'argent comptant, assignats, billets et obligations qui lui appartiendraient à la même époque. De son côté, la dame de Possac donnait à son époux la jouissance de sa dot, celle des biens qui lui étaient échus depuis son mariage, enfin celle de ses biens paraphernaux.

En 1805, Henri de Frégeville mourut en sa maison de Grandval; les scellés y furent apposés. Charles de Frégeville, frère du défunt et son seul héritier, se trouvait alors en Italie, où il était en activité de service dans les armées françaises en qualité de général de division.

Il envoya une procuration pour assister en son nom à la levée des scellés. Cette opération finie, la veuve s'adressa au procureur fondé de l'héritier absent, pour obtenir l'envoi en possession provisoire des objets compris dans la donation. Sur son refus, elle présenta requête à cette fin au tribunal d'Alby, et elle joignit à sa demande l'acte de donation dont il s'agit. Ordonnance du tribunal qui en ordonna la signification au général Frégeville, pour y répondre dans le délai de deux mois.

Le 4 juillet 1806, jugement par défaut qui fit droit à sa demande il lui fut signifié dans la même forme que le précédent exploit.

Ce fut alors que le sieur de Frégeville attaqna la donation du 13 frimaire an iv, et la transaction des 27 et 28 septembre 1806.

Il prétendit que l'art. 1097 du Code civil, qui déclare que les époux ne pourront se faire aucune donation mutuelle par un seul et même acte, en prononçait la nullité, parce que cet article réglait, non la forme de l'acte, mais la capacité des époux. Il opposa encore une autre nullité résultant du prétendu défaut de réciprocité.

Quant à la transaction, il la soutint sans effet, aux termes de l'art. 2054 du même Code, parce qu'il n'avait pas été expressément transigé sur cette nullité.

La veuve de Frégeville soutint, de son côté, que toutes ces nullités étaient imaginaires et chimériques.

La cause portée à l'audience du tribunal de Montpellier, il y fut rendu un interlocutoire, dont cette veuve interjeta appel.

Toutes les parties ayant conclu à l'évocation, l'arrêt qui intervint admit les nullités proposées, et annula, en conséquence, la donation et la transaction qui en avait été la suite.

C'est contre cet arrêt que la veuve de Frégeville s'était pourvue en cassation: elle proposait trois moyens.

Elle faisait résulter le premier d'une fin de non-recevoir prise de la disposition de l'art. 1340 du Code civil, qui porte que la confirmation ou ratification, ou exécution volontaire d'une donation par les héritiers du donateur, emporte leur renonciation à opposer soit les vices de forme, soit toute autre exception.

Or, elle prétendait que le général de Frégeville avait ratifié la donation contentieuse par la transaction qui la confirmait. Cette donation portait encore avec elle la preuve de son exécution, par les abandons qui lui avaient été faits au nom du général, qui l'avait de plus exécutée par les paiements des sommes promises par le même acte.

Celui-ci opposait en réponse à cette fin de nonrecevoir l'art. 2054 du même Code, qui porte qu'il y a lieu à la rescision d'une transaction, lorsqu'elle a été faite en exécution d'un titre nul, à moins que les parties n'aient expressément tran

Dès lors, et par deux actes des 27 et 28 septembre de la même année, le sieur Rech, jurisconsulte de Montpellier, qui avait reçu la procuration spéciale du général, régla définitivement, avec la veuve de Henri de Frégeville, tous les droits ré-sigé sur cette nullité. sultant en sa faveur de la donation.

Par ces deux actes, il lui céda, en toute propriété, la maison de Réalmont avec les meubles, celle du domaine de Peyralbie, et il s'obligea, en outre, à lui payer en deux termes égaux une

Tome II.

Mais la veuve de Frégeville répliquait que cet article ne pouvait s'appliquer qu'au cas d'une transaction non exécutée; mais qu'il était sans force dans l'hypothèse actuelle, où la transaction attaquée présentait par elle-même la preuve de

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part de l'épouse donataire, elle devait être dé clarée nulle pour le tout.

La veuve de Frégeville répondait d'abord que, relativement à sa dot mobilière de 86,000 francs, la donation de l'usufruit d'icelle, par elle faite à son mari, était valable et susceptible de produire tout son effet, le cas prévu arrivant, parce que n'ayant ni stipulé ni parlé dans la convention passée entre le sieur Despradels, son oncle, et son

l'exécution la plus complète de la donation qui y avait donné lieu: sans quoi il faudrait dire qu'une transaction confirmative d'une donation et qui a reçu toute son exécution, aurait moins de force que la simple exécution non suivie de transaction, et alors l'art. 1340 deviendrait inutile. A l'égard de la prétendue ignorance de la donation dont il s'agissait, la veuve de Frégeville observait que les significations réitérées, qui avaient été faites au général en son domicile à Montpel-mari, elle devait être considérée comme une contrelier, ne permettaient pas de douter qu'il n'en eût été instruit, mais que son mandataire spécial l'avait parfaitement connue, et que cela suffisait pour détruire la présomption d'ignorance qu'il affectait d'alléguer sans cause et sans motif.

La veuve de Frégeville fondait son second moyen sur la fausse application de l'art. 1097 du Code civil, qui défend aux époux de se faire des donations mutuelles et réciproques par un seul et même acte, et sur la contravention à l'art. 2 du même Code, qui prohibe tout effet rétroactif dans les lois.

lettre proscrite par les lois romaines, et en particulier par la loi 7, D. de pactis dotalibus, et par la loi 7, C. de jure dotium, dont les dispositions avaient été renouvelées et confirmées par l'art. 1396 du Code civil: d'où elle concluait que la donation contenait réciprocité de ce chef, ce qui la mettait à l'abri de toute critique.

Elle observait qu'il en était de même à l'égard des biens à elle survenus depuis son mariage, puisque le sieur de Possac, son père, était mort en ventose an III, conséquemment bien avant la donation dont il s'agissait; que, dès lors, son mari avait reçu, à compte de ses droits successifs, une somme de 8701 fr., dont il avait donné deux quittances relatées dans la transaction contentieuse. La réciprocité subsistait donc encore de ce second chef.

La fausse application de l'art. 1097 résultait, suivant elle, de ce que sa disposition n'était relative qu'à la forme des donations de cette espèce, cet article n'ayant fait que changer le mode de disposer entre époux par cette voie; mais elle était absolument étrangère à la capacité de leurs per- Elle observait enfin, qu'il en était encore de sonnes d'où il résultait qu'en l'appliquant à l'es-même à l'égard du troisième chef relatif à ses pèce, l'arrêt avait fait une fausse application de biens paraphernaux. Elle convenait, à la vérité, la disposition dudit article, et qu'il lui avait donné qu'elle n'en possédait aucun; mais elle soutenait un effet rétroactif, prohibé par l'art. 2. en même temps que cette absence de biens paraphernaux n'était pas un motif suffisant pour annuler la donation dont il s'agissait, soit parce que l'égalité parfaite n'avait jamais été requise entre les époux mariés en pays de droit écrit, soit parce que l'article 13 de la loi du 17 nivose an 2 permettait les avantages singuliers ou réciproques entre époux, soit parce que la réciprocité parfaite n'ayant jamais été le motif qui avait déterminé son mari à lui faire la donation qu'il avait souscrite en sa faveur, cette même donation déguisée sous la dénomination de réciproque, devait subsister comme donation simple, parce qu'il était capable de donner de cette manière, et elle capable de recevoir, toute simulation exempte de dol et de fraude étant permise par les lois.

Le troisième moyen résultait de ce que la cour de Montpellier avait jugé la donation en litige nulle par défaut prétendu de réciprocité, en décidant que la veuve de Frégeville n'avait rien donné à son mari en échange ou en compensation de ce qu'elle recevait de lui.

Pour prouver cette proposition, cette cour avait décidé que le sieur Henri de Frégeville s'étant engagé par une convention particulière, en date du même jour de son contrat de mariage, à rendre au sieur Despradels la dot de son épouse dans le cas où elle décéderait avant lui sans enfants issus de leur mariage, il en résultait que, ce cas arrivant, il n'aurait rien reçu d'elle, puisqu'il n'aurait pas pu jouir de l'usufruit de cette dot qu'elle lui avait promis.

A l'égard de ses autres biens, la même cour avait encore décidé qu'il n'en était échu aucun à cette dame pendant son mariage.

En ce qui concerne enfin ses biens paraphernaux, par elle également donnés quant à l'usufruit, la même cour avait jugé que la veuve de Frégeville n'en possédant aucun, il y avait impossibilité qu'elle pût en transmettre l'usufruit à son mari, dans le cas de survie de la part de celui-ci.

Elle avait conclu de là que, n'existant aucune éciprocité dans la donation contentieuse de la

Sur quoi, arrêt est intervenu, dont les motifs et le dispositif suivent :

R

Ouï le rapport de M. le chevalier Cochard, conseiller en la cour; les observations de Mailhe, avocat des demandeurs; celles de Coste, avocat du défendeur, ensemble les conclusions de M. le comte Merlin, procureur-général; et après en avoir délibéré;

« Vu les art. 1340, 2052, 2054 et 1097 du Code civil;

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« La loi 7, D. de pactis dotalibus;

La loi 7, C. de jure dotium;

« La loi 27, § Iv, D. de pactis;

« La loi 12, D. de solutionibus;

« Les art. 1320 et 1322 du Code civil;
« Les lois 36 et 38, D. de contrahenda emptione;
« La loi 3, C. eodem titulo;

«

La loi 46, D. locati conducti;

« La loi 6, D. pro donato;

« Vu enfin la rubrique du Code, plus valere quod agitur quàm quod simulatè concipitur;

"

à

1340, qui veut que la confirmation, ou ratification, ou exécution volontaire d'une donation par les héritiers ou ayant-cause du donateur, après son décès, emporte leur renonciation à opposer, soit les vices de forme, soit toute autre exception; et qu'il a fait en même temps une fausse application de l'art. 2054 du même Code, qui porte qu'il y a lieu à l'action en rescision d'une transaction, Et attendu, 1o que, bien qu'il paraisse in- lorsqu'elle a été faite en exécution d'un titre nul, vraisemblable que le général Charles de Frége- moins que les parties n'aient expressément tranville ait ignoré, avant la transaction du 27 sep-sigé sur cette nullité, puisque l'exécution volontembre 1806, l'existence de la donation mutuelle taire donnée à la donation dont il s'agit, exécupassée entre le général Henri de Frégevile, son tion constatée par la transaction même, et par les frère, et la dame de Possac, son épouse, parfaits personnels audit sieur de Frégeville, postéacte notarié du 13 frimaire an iv, puisqu'elle avait été produite devant le tribunal civil d'Alby dans l'instance que ladite dame y avait poursuivie contre lui, comme seul héritier de sondit frère, laquelle instance avait pour objet l'envoi en pos session provisoire des biens compris dans ladite donation faite en sa faveur; que l'ordonnance de ce tribunal portant permission de le faire citer pardevant lui, dans le délai de deux mois, à raison de son absence, étant alors en service actif comme général dans les armées françaises en Italie, lui avait été signifiée à son domicile habituel, à Montpellier; toujours est-il vrai de dire que le sieur Rech, son fondé de pouvoir et jurisconsulte, en avait une connaissance parfaite, puisque ladite donation est expressément rappelée dans ladite transaction, dans laquelle il a stipulé les intérêts de son commettant, sous la qualité de mandataire spécial de celui-ci, et que l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier ne renferme ni motifs, ni dispositions, desquels on puisse induire que ledit sieur Rech n'ait pas eu une connaissance entière, pleine et parfaite de tout le contenu en ladite donation;

D'où il suit que cette connaissance est devenue personnelle au mandant lui-même, puisqu'il y était représenté par son mandataire qui avait titre et qualité suffisants pour agir pour lui et l'obliger personnellement;

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Attendu, 2o que ladite transaction portant avec elle la preuve de l'exécution libre et spontanée qu'avait donnée ledit sieur Charles de Frégeville, par le fait de son mandataire, à ladite donation du 13 frimaire an iv, le fait seul de cette exécution le rendait non-recevable à l'attaquer, soit sous le prétexte de la prétendue ignorance où il disait être de son existence, soit sous le prétexte, plus frivole encore, de la prétendue nullité qui l'affectait à raison de ce que, reunissant tous les caractères d'une donation entre époux mutuelle et réciproque, elle avait été passée par un seul et même acte, et qu'il n'avait pas été expressément transigé sur cette nullité;

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Attendu qu'en étayant l'annulation qu'elle en a prononcée, sur ce double motif, ladite cour d'appel a formellement contrevenu audit article

rieurs à ladite transaction, en prouve la consommation définitive, contre laquelle il ne lui est plus possible de revenir, parce qu'aux termes de l'article 2052 les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort, et que, suivant l'article 1340, lorsque la donation est exécutée volontairement par les héritiers du donateur après son décès, cette exécution couvre tous les vices de forme, ainsi que toutes autres exceptions;

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Qu'il suit de là que cette exécution spontanée que ladite donation a reçue, soit par ladite transaction qui en est elle-même l'exécution de la part du mandataire dudit sieur Charles de Frégeville, soit par le fait de celui-ci, postérieurement à ladite transaction, en payant à ladite dame de Possac partie des sommes dont il lui était redevable, a suffi pour couvrir tous les vices de forme qu'il opposait contre ladite donation, tels que le défaut de lecture d'icelle aux parties intéressées après sa rédaction, et le défaut d'insinuation;

a Que du système contraire il résulterait une contrariété choquante entre les articles 1340 et 2054 du même Code, en ce que la simple exécution d'une donation, après la mort du donateur, rendrait, au termes du premier, ses héritiers nonrecevables à l'attaquer ensuite, soit pour vices de forme, soit par tout autre moyen de droit, et que, suivant le second, une donation suivie d'une transaction, après même l'exécution la plus complète qu'elle aurait pu recevoir, ne serait pas moins susceptible d'être attaquée, sous le prétexte qu'il n'aurait pas été transigé d'une manière expresse sur les nullités qui auraient pu affecter ladite donation;

Qu'une contrariété aussi révoltante n'a jamais pu exister, soit dans les expressions combinées et bien entendues des deux articles, soit dans les vues et l'intention du législateur, puisqu'il est évident que la disposition dudit article 2054 ne peut jamais avoir lieu que lorsque les parties intéressées sont restées dans les termes d'une simple transaction non encore suivie d'aucune exécution de la donation qu'elle a eu pour objet; mais que ledit article 1340 reprend toute sa force et tout son empire, dans tous les cas, où les mêmes

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