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parties ont librement et volontairement exécuté la donation, soit qu'il y ait eu transaction sur icelle, soit qu'il n'y en ait pas eu;

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Attendu, sur le second moyen, que l'article 1097 du Code civil, en prohibant les donations mutuelles entre époux par un seul et même acte, n'a eu ni pu avoir pour objet que de changer le mode et la forme des dispositions de cette espèce; que cette prohibition est tout-à-fait étrangère à la capacité ou incapacité des époux, puisque, aux termes de l'article 1096 du même Code, ils n'en sont pas moins capables de se donner mutuellement par des actes séparés; ce qui ne pourrait pas être, s'ils étaient frappés d'une incapacité légale, dont l'effet naturel et nécessaire serait de les priver de la faculté de se faire, de quelque manière que ce fût, des donations mutuelles;

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Qu'il suit de là, que ladite cour d'appel de Montpellier a fait une fausse application dudit article 1097, et qu'en jugeant nulle une donation mutuelle faite entre époux par un seul et même acte authentique, sous la date du 13 frimaire an iv, époque à laquelle elles pouvaient, en vertu des lois alors existantes, être faites et rédigées dans cette forme, elle a donné un effet rétroactif audit article, et qu'elle a expressément contrevenu à l'article 2 du même Code, qui porte que la loi ne dispose que pour l'avenir, et qu'elle n'a point d'effet rétroactif;

« Sur le troisième moyen résultant du défaut prétendu de réciprocité, en ce que, suivant la cour d'appel de Montpellier, le sieur Henri de Frégeville n'aurait rien reçu de la dame son épouse en échange de ce dont il l'aurait gratifiée par la donation réciproque du 13 frimaire an Iv; «Attendu que les biens de ladite dame, dont elle avait assuré l'usufruit par ledit acte à son mari en cas de survie de la part de celui-ci, se composaient de sa dot mobilière de 86,000 fr., et de celui de tous ses autres biens présents et à venir, tels qu'elle se les était constitués en dot par son contrat de mariage du 14 pluviose de l'an III; « Qu'à l'égard de sa dot mobilière, la donation de l'usufruit qu'elle en avait faite à sondit mari, était réelle et susceptible de produire, le cas échéant, tout son effet;

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Que la convention passée, le jour même de son mariage, entre celui-ci et le sieur Despradels, par laquelle ledit sieur Henri de Frégeville promettait de rendre à ce dernier ladite dot, dans le cas où ladite damne son épouse le prédécéderait sans enfants issus de leur mariage, ne détruisait point cette réalité effective, parce que ladite convention, passée à l'insu et en l'absence de ladite dame, était une véritable contre-lettre proscrite par les lois 7, D. de pactis dotalibus, et 7, C. de jure dotium, rigoureusement observées dans tous les ci-devant pays de droit écrit, admises par la jurisprudence universelle de tous les tribunaux français, et confirmées par l'article 1396 du Code

civil, qui porte, que nul engagement ou contrelettre n'est valable sans la présence et le consentement simultané de toutes les personnes qui ont été parties dans le contrat de mariage;

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Qu'au surplus, quand même cette convention aurait été valable entre le sieur Despradels et le sieur Henri de Frégeville, elle n'aurait du moins pu avoir aucun effet contre la dame demanderesse, qui ne l'avait point souscrite, ni, par conséquent, contre ses héritiers; que, dès lors, si celle-ci était prédécédée sans enfants, Henri de Frégeville aurait été obligé de restituer sa dot à ses héritiers, indépendamment de la restitution qu'il eût été tenu d'en faire audit sieur Despradels ; qu'ainsi ladite demanderesse, en donnant à son mari l'usufruit de sa dot, lui avait donné le droit d'en différer la restitution à ses héritiers tant qu'il vivrait, droit qui avait certainement une valeur appréciable;

« Qu'ainsi, de ce chef, il y avait une véritable réciprocité dans la donation; et qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel de Montpellier a violé ladite loi 27, § iv, de pactis, et la loi 12, C. de solutionibus;

il

« Attendu qu'à l'époque de ladite donation mutuelle du 13 frimaire an iv, le père de ladite dame étant décédé le 2 ventose de l'an 111, ses droits à cette succession étant conséquemment ouverts, y avait encore réciprocité bien réelle à l'égard de l'usufruit qu'elle en transmettait à son mari par la donation dont il s'agit;

Π

Que le fait de cette transmission réelle est si constant, qu'il est établi par la transaction même, dans laquelle il est dit que le sieur Henri de Frégeville avait reçu, le 6 floréal an x1, 4,000 francs, et le 30 fructidor an x11, 4,701 francs, à compte des droits successifs de son épouse;

Que les actes qui constataient cette double réception devaient, d'après les articles 1320 et 1322 du Code civil, faire pleine foi contre le défendeur, héritier dudit Henri de Frégeville; et qu'en jugeant le contraire, ladite cour d'appel de Montpellier a violé lesdits articles;

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Attendu, enfin, qu'en ce qui concerne la donation également faite par ladite dame de Possac, à son mari, de ses biens paraphernaux, elle n'en avait aucun de cette espèce lors de ladite donation; ce qui constituait, à la vérité, un défaut de réciprocité partielle; mais, attendu aussi que cette absence de biens paraphernaux ne présentait pas un motif suffisant pour annuler ladite donation, sous le prétexte d'un défaut absolu de réciprocité, soit parce que ledit sieur Henri de Frégeville n'ignorait pas que la dame son épouse s'étant constitué en dot, par son contrat de mariage, tous ses biens présents et à venir, la donation des biens de cette espèce qu'il savait bien ne pas exister, n'avait pas été ni pu être pour lui un motif déterminant pour l'engager à souscrire en sa faveur la donation qu'il lui avait faite, soit parce qu'étant

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capable lui-même de donner, et la dame son épouse capable de recevoir, la donation qu'il aurait simulée, en lui assignant la qualification de donation réciproque, n'en devrait pas moins subsister comme donation pure et simple, puisque, suivant les principes et les lois, les actes simulés, lorsqu'ils sont exempts de dol et de fraude, n'en doivent pas moins subsister dans la qualité réelle que les parties contractantes ont eu l'intention de leur imprimer :

« D'où il suit, qu'en annulant ladite donation contentieuse, sous le frivole prétexte d'un prétendu défaut de réciprocité partielle, tandis que les lois en assuraient la stabilité, soit parce que l'égalité n'a jamais été requise dans les donations mutuelles entre époux, puisque l'un d'eux pouvait donner à l'autre sans retour de la part de celui-ci, soit parce qu'en la considérant comme donation simple, faite par le mari à son épouse, les lois n'en assuraient pas moins la validité;

« De tout quoi il résulte que la cour d'appel de Montpellier, en jugeant le contraire, a tout à la fois contrevenu auxdites lois 7, D. de pactis dotalibus; 7, C. de jure dotium; aux lois 36 et 38, D.; à la loi 3, C. de contrahenda emptione, et à la loi dernière D. pro donato, qui décident toutes que les actes simulés, exempts de dol et de fraude, doivent valoir et subsister de la manière dont les parties contractantes ont entendu qu'ils fussent mis à exécution;

«Par ces motifs, la cour casse et annule ledit arrêt de la cour d'appel de Montpellier, etc, Fait et jugé, etc. - Section civile, etc. »

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DOT. On appelle dot, en général, tout ce que la femme apporte à son mari pour l'aider à supporter les charges du mariage, quel que soit le régime auquel ils soumettent leur association. Dos est pecunia, marito nuptiarum causá data aut promissa (Cujas, au titre de jure dot., art. 1540 du Code civil). On appelle aussi quelquefois dot ce qui est donné au mari par son contrat de mariage.

Dans les différentes parties de la France, régies par le droit romain, avant la promulgation du filles avaient une action contre leur père pour Code, et qu'on appelait pays de droit écrit, les les contraindre à les doter. Dans les pays coutumiers, au contraire, on tenait pour maxime ne dote qui ne veut.

pas

qu'ils peuvent. Le principe du droit coutumier était d'ailleurs plus conforme au maintien du respect que les enfants doivent aux auteurs de leurs jours.

La constitution de dot renferme un contrat synallagmatique dont l'accomplissement du mariage est la condition essentielle, et qui demeure sans effet lorsque le mariage ne s'accomplit pas. (Code civil, art. 1083.)

La dot est susceptible de toutes sortes de conventions qui ne sont pas contraires aux bonnes mœurs ni aux lois (Code civil, art. 1387). Ainsi, par exemple, il peut être valablement stipulé que des meubles constitués en dot seront vendus et convertis en immeubles; que des deniers constitués en dot seront employés en acquisition d'hé ritages; qu'en cas de prédécès de la femme, le mari retiendra la dot, soit en totalité, soit pour partie, ou qu'il ne la rendra qu'après un certain délai.

Les pères, mères, parents, tuteurs, et pareillement les étrangers qui constituent une dot, peuvent en stipuler le retour, soit dans le cas de prédécès du donataire, soit dans le cas de prédécès du donataire et de ses enfants; mais ce droit de retour ne peut être stipulé qu'au profit du donateur seul. (Code civil, art. 951.)

L'effet de ce droit de retour est de résoudre

les aliénations qui auraient pu être faites des
biens donnés en dot, et de les faire revenir à
celui qui les a constitués, francs et quittes de
toutes charges et hypothèques. (Code civil, art.
952.)

donnés au mari, par son contrat de mariage
Il est cependant une hypothèque dont les biens
avec stipulation de retour, demeurent grevés,
lorsque ce retour s'effectue ; c'est celle de la
femme pour raison de sa dot, et de ses conven-
tions matrimoniales, lorsque les autres biens du
mari ne sont pas suffisants. (Ibid.)

Tout ce qu'on vient de dire s'applique égale-
ment à la dot, dans le régime de la communauté,
et dans le régime dotal. Il faut voir, au mot Ré-
gime dotal, ce qui est particulier à la dot consi-
et Donation entre-vifs, sect. 11, § 11.
dérée sous le rapport de ce dernier régime. Voyez
aussi Communauté conjugale, Contrat de mariage

supporter. Voy. Hospice.

DOTATION. On se sert du mot dotation pour Le Code civil a adopté et consacré ce dernier exprimer ce qui est donné à des établissements système, par son article 204, qui porte : « L'en-publics, afin de subvenir aux charges qu'ils ont à fant n'a d'action contre ses père et mère pour « un établissement par mariage, ou autrement. » Cette préférence en faveur du principe établi par le droit coutumier a été particulièrement dé terminée la considération de la tendresse et par de l'affection que les pères et mères ont, en général, pour leurs enfants, qui les porte presque toujours à faire pour eux au-delà même de ce

Ce mot désigne encore plus spécialement les biens du domaine extraordinaire dont il a été fait des dotations, en vertu de l'article 21 du sénatus-consulte du 30 janvier 1810, pour récompenser les soldats et les grands services civils ou militaires rendus à l'état.

Voy. Domaine extraordinaire.

222

DOUAIRE. C'est ainsi qu'on appelait l'usufruit | légaux ou statutaires ont été abolis, pour l'avenir, d'une certaine portion des biens du mari que les par la loi du 17 nivose an 2; qu'ainsi ces droits coutumes et les conventions matrimoniales accor- n'existent plus pour l'époux marié depuis la loi. daient à la femme survivante; et c'est la même portion en propriété que quelques coutumes réservaient aux enfants après la mort de leurs père et mère, lorsqu'ils ne se portaient pas héritiers du père.

Le douaire coutumier est aboli par l'art. 1390 du Code civil. Mais on peut toujours stipuler par contrat de mariage, un douaire conventionnel ou préfix; et cette stipulation a l'effet d'une donation par le mari à sa femme, pour le cas où elle lui survivra. Voyez Contrat de mariage, sect. iv.

La cause ayant été renvoyée devant la cour d'appel de Nancy, elle y a été jugée par arrêt du 2 mars 1812, de même qu'elle l'avait été par la cour d'appel de Metz.

Ce nouvel arrêt a été dénoncé à la cour régulatrice, sections réunies, sous la présidence du grand juge, ministre de la justice. Et après une discussion approfondie, arrêt est intervenu, le 8 janvier 1814, au rapport de M. Boyer, et sur les conclusions de M. Merlin, par lequel,

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La

17

nivose

vu l'art. 61 de la loi du cour, an 2, portant: « Toutes lois, coutumes, usages <«<et statuts relatifs à la transmission des biens par succession ou donation, sont déclarés abolis, sauf à procéder au partage des successions échues depuis et y compris le 14 juillet 1789, et de celles à venir, selon les règles ci-après, etc.

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I. La femme mariée avant la loi du 17 nivose an 2 peut réclamer sur la succession de son mari décédé sous l'empire de cette loi, ou même depuis le Code civil, le douaire auquel le statut local ou son contrat de mariage lui donnait droit d'après les lois du temps où elle s'est mariée. C'est« une conséquence nécessaire du principe que les « conventions matrimoniales, expresses ou tacites, « Les articles 13 et 14 de la même loi, et les constituent des droits irrévocables, principe éga- articles 49 de celle du 22 ventose, et 24 de celle lement reconnu dans l'ancienne et la nouvelle lé- du 9 fructidor de la même année; gislation. Voy. Contrat de mariage, sect. 1.

Mais la femme mariée depuis la loi du 17 nivose an 2 peut-elle réclamer le douaire qui lui était conféré de plein droit par la coutume sous l'empire de laquelle elle s'est mariée ?

Cette question, d'abord très-controverse, a été irrévocablement jugée pour la négative par la cour

de cassation.

Le 7 thermidor an ix, Jean-Joseph Leclerc épouse, sans contrat de mariage, Catherine-Joséphine Picnard, domiciliée comme lui dans la coutume de Luxembourg, qui attribuait au survivant des époux la propriété de tous les biens meubles, et l'usufruit de tous les biens immeubles du premier mourant.

En mars 1807, Jean-Joseph Leclerc meurt sans enfants, et sans avoir disposé d'aucune partie de

ses biens.

Sa veuve se met en possession des meubles et de l'usufruit des immeubles qu'il a laissés.

Demande en désistement de la part de MarieCatherine Leclerc, sa sœur, et de Jean-Henri Leclerc, son frère, fondée sur l'article 61 de la loi du 17 nivose an 2.

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Arrêt de la cour d'appel de Metz, du 21 juin 1808, qui les déboute: « Attendu que l'art. 6r de la loi du 17 nivose an 2, n'a eu pour objet que de régler les droits successifs et les libéralités, et non les droits de survie et les avantages matrimoniaux; que cette loi ne renferme aucune disposition positive qui ait abrogé ou rapporté les anciennes coutumes qui réglaient les droits de la communauté conjugale.

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Recours en cassation contre cet arrêt; et le 6 mars 1811, au rapport de M. Gandon, arrêt qui casse, sur le fondement que les droits de survie

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Que cette définition des avantages statuaires entre époux se trouve justifiée au besoin par le rapprochement des art. 1er et 13 de la loi du 17 nivose, puisque en maintenant, par ce dernier article, les avantages résultant entre époux déja mariés et encore existants, soit des conventions, soit des coutumes et statuts, le législateur déclare faire exception en ce point à l'art. 1er, lequel ne statue littéralement que sur les donations ou les suc➜ cessions;

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Qu'en admettant avec la cour d'appel de Nancy, que les droits de communauté légale eussent survécu à la disposition abrogative de la loi du 17 nivose, on n'en pourrait tirer aucune conséquence pour le maintien des gains de survie qui en diffèrent essentiellement, puisque la communauté n'est qu'une association des biens appartenants aux deux époux, et que le partage égal de ces biens, lors même que les mises y ont été inégales, n'est pas réputé par la même loi un avantage au profit de l'époux dont la mise a été inférieure,

tandis que les gains de survie opèrent nécessai- | cable, mais une simple expectative conditionrement une transmission quelconque des biens de nelle qui pouvait ne pas se réaliser. Or, la loi l'époux prédécédé au profit de l'époux survivant, du 17 nivose an 2 a atteint et aboli toutes les et constituent, par conséquent, un véritable avan- dispositions de ce genre qui ne constituaient pas réellement un droit acquis. La cour suprême l'a tage en faveur de ce dernier; ainsi décidé par trois arrêts portant cassation, des 29 messidor, 4 thermidor et 2 fructidor an x11, rapportés au Bulletin civil à leurs dates, et dans les Questions de droit de M. Merlin, verbo Tiers coutumier.

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Que cette manière d'envisager les gains de survie a été expressément appliquée par le législateur à l'égard des douaires coutumiers, dans sa réponse à la vingt-quatrième question de la loi du 9 fructidor, par laquelle il déclare ces derniers formellement abolis par l'art. 61 de celle du 17 nivose;

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Qu'on ne peut, avec raison, argumenter de ce que, dans sa réponse à la dixième question de la loi du 22 ventose, le législateur énonce que le système restrictif de la loi n'est pas pour les dispositions entre époux, parce que les expressions mêmes de la question, comme celles de la réponse, indiquent suffisamment que l'une et l'autre n'avaient pour objet que les mariages antérieurs à la loi ;

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Enfin, que la considération prise de l'intérêt de plusieurs époux mariés depuis la loi du 17 nivose, qui, se reposant sur la foi des anciens statuts, ont cru pouvoir s'abstenir de faire des contrats de mariage où ils eussent pu stipuler les avantages dont il leur convenait de se gratifier, est absolument sans force, parce que ces époux ont su ou dû savoir que la loi nouvelle, en même temps qu'elle leur assurait une liberté presque illimitée de s'avantager par des stipulations expresses, avait, d'un autre côté, aboli, pour l'avenir, toutes les transmissions résultantes des

statuts;

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III. Les articles 1081 et 1093 du Code civil ne permettent plus de stipuler, par contrat de mariage, un douaire préfix au profit des enfants à naître. Cela est évident, et tout le monde en convient.

Il y a plus de difficultés pour savoir si la loi du 17 nivose an 2 a prohibé la stipulation d'un pareil douaire. La question a été soumise à la cour régulatrice, qui l'a résolue affirmativement dans l'espèce suivante :

Par le contrat de mariage du sieur Poncet-Dumont et de la demoiselle Tant, du 28 nivose an vii, il avait été stipulé, article 7: « Le futur époux fixe le douaire de la future à miile francs de rente viagère, dont elle jouira dès qu'il y aura lieu; le fond duquel douaire sera propre aux enfants à naître du mariage. »

La dame Poncet-Dumont est morte avant son mari, et lui a laissé plusieurs enfants

Le mari est depuis tombé en faillite; et des immeubles, qu'il avait acquis pendant son mariage, ayant été vendus par ses créanciers, le tuteur de ses enfants a demandé qu'ils fussent colloqués, dans l'ordre du prix, pour les 20,000 francs qui formaient le fonds de leur douaire préfix.

Attendu qu'il suit de là que la cour d'appel de Nancy, en accordant, dans l'espèce, à la veuve Les créanciers ont soutenu que la stipulation Leclerc, mariée sans contrat de mariage posté- de ce douaire était nulle; et un jugement du tririeurement à la loi du 17 nivose, les gains de sur-bunal de première instance du département de la vie qu'elle réclamait, en vertu de la seule dispo- Seine, du 25 janvier 1814, l'a effectivement désition de la ci-devant coutume de Luxembourg, clarée telle, a formellement violé l'article 61 de la loi du 17 nivose :

<< Par ces motifs, casse et annule l'arrêt de ladite cour, du 2 mars 1812, etc.............. »

Il est définitivement jugé par cet arrêt, que, depuis la loi du 17 nivose an 2, il n'existe plus de douaire coutumier ou purement statuaire.

Mais ces motifs prouvent aussi que les douaires stipulés par contrat de mariage doivent valoir comme conventions matrimoniales, qui ne sont aucunement atteintes par les lois citées dans

l'arrêt.

II. Le douaire que certaines coutumes, et notamment celles de Paris et de Normandie, réservaient aux enfants, a été aboli par la loi du 17 nivose an 2. Il n'a pu être réclamé dans les successions ouvertes depuis la publication de cette loi, par les enfants nés de mariages contractés antérieurement, parce qu'il ne constituait point une propriété pleine, parfaite, absolue, irrévo

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Attendu que le contrat de mariage des sieur et dame Dumont a été passé le 28 nivose de l'an vii; que la clause établissant le douaire au profit des enfants à naître dudit mariage, contient une stipulation contraire à la loi du 17 nivose an 2, sous l'empire de laquelle le mariage a été contracté;

«

Attendu que, par l'art. 61 de la même loi, confirmé par celle du 22 ventose de la même année, les coutumes, usages, lois et statuts relatifs à la transmission des biens par succession ou donation, ont été abolis; que, dès lors, il n'a plus été permis de stipuler un douaire propre aux enfants, ni de donation au profit des successibles; et qu'on ne peut pas plus, à cet égard, invoquer l'édit (l'ordonnance) de 1731, qui permettait, en faveur du mariage et contre les principes du droit, ces sortes de donations;

α

« Attendu qu'il est évident que le législateur, en abolissant le douaire coutumier, en annulant et prohibant, en termes généraux, toutes donations

au profit de personnes appelées par la loi au partage des successions, a eu en vue, non-seulement d'établir et d'assurer l'égalité parfaite entre les enfants, mais aussi d'empêcher que des créanciers de bonne foi ne fussent victimes de la préférence que la loi accordait, à leur préjudice, aux enfants de leurs débiteurs ;

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tenus par

Qu'enfin, en scrutant avec attention les principes consacrés par la loi du 17 nivose, et mainla nouvelle législation, il est impossible de ne pas y voir l'abolition expresse du douaire propre aux enfants, soit qu'il résulte d'un statut coutumier, soit qu'il résulte d'un pacte couventionnel, puisque l'un et l'autre ont les mêmes effets;

« D'où il suit que le douaire établi par le contrat de mariage des sieur et dame Dumont, est fondé sur une stipulation que la loi elle-même a frappée de nullité. »

Le tuteur des mineurs Poncet-Dumont appelle de ce jugement; et un arrêt de la cour royale de Paris, du 19 janvier 1815, le confirme par des motifs calqués sur ceux des premiers juges.

Le tuteur s'est pourvu en cassation contre cet arrêt, pour violation de l'art. 57 et fausse application de l'article 61 de la loi du 17 nivose an 2. Cette loi, a-t-il dit, n'a eu pour objet que d'empêcher que les successions fussent inégalement réparties entre les successibles; voilà pourquoi, d'un côté, elle a aboli toute disposition tendante à déranger l'égalité, et, de l'autre, n'a accordé qu'aux héritiers naturels le droit de réclamer contre les dispositions prescrites. Or, dans l'espèce, il n'y avait d'autres successibles que les enfants; le douaire avait été également stipulé à leur profit commun; ils en réclamaient formelle ment l'exécution; et puisque personne n'avait droit de la combattre, l'arrêt attaqué devait l'or

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Qu'il ne s'agit point, dans l'espèce, d'une donation légitimement faite avant la loi du 17 mivose an 2, et annulée par ladite loi, mais bien d'une donation prohibée par cette loi même et par celle antérieure du 7 mars 1793, ainsi qu'elle l'est encore aujourd'hui par l'article 1081 du Code civil; en sorte que l'article 57 de ladite loi du 17 nivose est absolument sans application;

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« Par ces motifs, la cour rejette le pourvoi.... >> M. Merlin, dans ses Questions de droit, tome 6, verbo Douaire, § 5, n° 2, combat avec force cet arrêt. Il reproduit et développe le système du demandeur proscrit par la cour; et après avoir établi, par la jurisprudence de la cour résultant de ses arrêts des 3 brumaire an ix, 2 vendémiaire an x, et 24 fructidor an XIII, que l'article 61 de la loi du 17 nivose an 2 était étranger à l'incapacité de recevoir et à la forme des donations, il continue : « Cela posé, je reviens à l'article 10 de l'ordonnance de 1731. Cet article déclarait les enfants à naître capables de recevoir des donations par contrat de mariage, et il dispensait ces donations de la formalité de l'acceptation. n'avait donc aucun rapport à la disponibilité des biens, c'est-à-dire, au seul objet de l'article 61 de la loi du 7 nivose an 2.- Il ne se référait donc qu'à la capacité de recevoir et à la forme des donations. Il conservait donc, sous la loi du 17 nivose an 2, toute son autorité sur l'un et l'autre point. Qu'il la conservât quant à la dispense de l'acceptation, cela se sent de soimême. L'acceptation tenait alors, comme aujourd'hui, à la forme de la donation; et si l'ordonnance de 1731 faisait encore loi, en tant qu'elle prescrivait certaines solennités, elle devait nécessairement aussi continuer de faire loi, en tant qu'elle dispensait de ces solennités, dans certains Considérant que la loi du 7 mars 1793 avait cas et pour certains actes. Que cet article condéja prohibé toute donation en ligne directe, soit servât également son autorité quant à la capacité entre-vifs, soit à cause de mort, lors qu'a été de recevoir, cela ne peut pas davantage être rérendue la loi du 17 nivose an 2; — que cette der- voqué en doute. La capacité est évidemment cornière loi, loin de rapporter ou de restreindre la rélative à l'incapacité; et du moment que l'on prohibition de donner aux successibles en ligne reconnaît que les anciennes lois concernant celledirecte, l'a étendue, dans sa généralité, aux suc-ci, n'avaient pas été abrogées par l'article 61 de cessibles en ligne collatérale; -que l'article 61 la loi du 17 nivose an 2, il faut bien que l'on rede ladite loi du 17 nivose an 2, a déclaré aboli- connaisse aussi que les anciennes lois concernant toutes les lois, coutumes, usages et statuts relas celle-là, n'avaient reçu, du même article, aucune tifs à la transmission des biens par succession ou espèce d'atteinte. Le second motif de l'arrêt du par donation; que cette disposition est com-31 décembre 1817, n'est donc pas moins erroné mune aux lois qui permettaient des donations aux que le premier. Mais ces deux motifs écartés successibles, ainsi qu'aux coutumes qui accor- que reste-t-il dans l'arrêt? ́ Pas un mot qui puisse daient à ces successibles des avantages en certains le justifier. » cas; qu'elle renferme et confirme l'abolition Ces raisons sont très-fortes, on ne peut en disde l'article 1o de l'ordonnance de 1731, qui avait | convenir. Cependant la cour a consacré l'opinion

donner.

Mais par arrêt de la section civile du 31 décembre 1817, au rapport de M. Gandon,

« Vu la loi du 7 mars 1793, les articles 16, 57 et 61 de la loi du 17 nivose an 2;

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