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contester la validité de la vente du 13 floréal an III, comme renfermant une libéralité déguisée faite en faveur d'une concubine, contre la disposition formeile de l'art. 132 de l'ordonnance de 1629. Pour fonder l'admission de la preuve, la cour d'appel considéra, 1° que le Code civil n'ayant pas permis que, dans aucun cas, les enfants adultérins pussent prendre plus que des aliments dans les biens délaissés par leur père, il en résultait nécessairement que les héritiers naturels de celui-ci pouvaient être admis à prouver cette qualité d'enfants adultérins, lorsque, contre la volonté de la loi, leur père les avait appelés à recueillir sa succession;

2° Qu'il fallait distinguer le cas où la preuve était offerte par un demandeur, de celui où elle l'était pour défense à une action intentée à la requête des enfants, et où il n'était question que de repousser une attaque injuste de leur part;

3° Que l'art. 340 du Code civil n'avait pas interdit, d'une manière absolue, la recherche de la paternité; qu'on en trouve la preuve dans les articles 96, 323, 325 et 339;

4° Enfin, que la tranquillité des familles exigeait que les dispositions du Code civil fussent ainsi entendues et appliquées.

Les enquêtes rapportées à la cour, et la cause plaidée de nouveau, arrêt définitif interviut le 2 décembre 1808, qui déclara suffisante la preuve faite à la requête des héritiers naturels, et condamna, en conséquence, les héritiers institués à délaisser aux héritiers du sang les biens de la succession de François Dubois.

Et comme il parut également et suffisamment prouvé par l'enquête que la vente du 13 floréal an I renfermait une libéralité déguisée; que, d'autre part, il était acquis que Françoise Lemur avait été la concubine du vendeur; la cour d'appel condamna Françoise Lemur à relâcher les immeubles qui en avaient fait l'objet.

La cour d'appel régla ensuite ce qui devait être accordé aux héritiers institués, déchus, pour aliments, et compensa les dépens.

Françoise Lemur et ses enfants ont dirigé un nouveau pourvoi contre cet arrêt ; mais ils se sont attachés particulièrement à établir que l'interlocutoire du 31 mars avait été rendu en violation des lois constitutives de la législation actuelle sur l'état des personnes, prévoyant bien que s'ils parvenaient à le faire juger ainsi, l'annulation de l'arrêt définitif en serait une conséquence nécessaire.

Ils ont proposé trois ouvertures de cassation: la première, tirée de la violation de l'art. 340 du Code civil, qui interdit, d'une manière absolue, la recherche de la paternité, sur la seule exception du cas d'enlèvement, qui ne rentrait pas dans l'espèce particulière de la cause; ils ont ajouté que l'art. 322 ne permet pas que celui qui a joui de son état conformément à son titre de naissance,

ni

puisse être autorisé à en prétendre un autre, réciproquement que son état conforme à son titre puisse lui être contesté; ils ont ensuite répondu aux inductions tirées des articles 46, 323, 325 et 339.

Les réclamants ont fait résulter la seconde ouverture de cassation de la violation des art. 16 et 61 de la loi du 17 nivose an 2, qu'ils ont prétendu avoir révoqué les dispositions de l'art. 132 de l'ordonnance de 1629, prohibitif de toutes libéralités entre concubinaires, attendu que l'article 61 de la loi de nivose an 2, a déclaré comme non avenus tous statuts et usages contraires à ladite loi, relativement à la transmission de biens par succession et donation, et que l'article 16 avait laissé au testateur la libre disposition du sixième ou du dixième de ses biens, suivant sa quotité, sans admettre d'autre prohibition à l'exercice de sa volonté que celle de ses héritiers.

Les réclamants en ont tiré une troisième de ce que les faits admis en preuve n'étaient ni pertinents ni admissibles, puisque, d'une part, il n'existait au procès aucun commencement de preuve par écrit, et que, d'autre part, il n'y avait aucun fait, dès lors constaté et avoué, d'où l'on pût induire que les enfants naturels de Françoise Lemur, institués héritiers par François Dubois, fussent les bâtards adultérins du testateur; à quoi ils ont ajouté qu'aucun des faits articulés ne tendait, même directement, à établir que François Dubois fût réellement le père des enfants de Françoise Lemur, et que cependant, dans le système de la cour d'appel, il aurait fallu que cette preuve eût été rapportée de la manière la plus claire et la plus précise, pour enlever auxdits enfants un état dont ils avaient perpétuellement joui conformément à leur titre de naissance.

Les réclamants ont enfin répondu aux considérations particulières invoquées par la cour d'appel, que si la législation actuelle pouvait présenter quelques inconvénients, il en résulterait de beaucoup plus grands encore du système contraire, à raison de l'impossibilité d'acquérir la certitude physique que tel enfant est né d'un tel père, et du scandale indispensable d'une pareille discussion portée devant les tribunaux.

La cour de cassation s'étant arrêtée au premier moyen, n'a pas eu besoin de s'occuper des autres; car, du moment que la cour a regardé comme absolue la disposition de l'article 340 du Code civil, il devenait inutile d'entrer dans l'examen des faits admis au procès, comme aussi de se prononcer sur la question de savoir si, sous l'empire de la loi du 17 nivose an 2, les' concubinaires pouvaient se faire des libéralités jusqu'à concurrence de la quotité disponible, puisque les héritiers naturels n'auraient plus, au moyen de l'institution faite d'héritiers étrangers, ni intérêt ni qualité pour contester la validité de la vente que le testateur avait passée à Françoise Lemur.

La cour a rendu, en conséquence, l'arrêt dont | preuve ne pouvait être admise, puisqu'elle ne la teneur suit : pouvait tendre qu'à une recherche de paternité, hors le cas d'exception porté audit article ;

Oui le rapport de M. Carnot, chevalier, conseiller en la cour; les observations de Chabroyd, 'avocat des demandeurs, et les conclusions de M. Merlin, procureur-général;

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Vu l'art. 340 du Code civil;

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Que l'arrêt du 31 mars 1808, en ordonnant une pareille preuve, a donc ouvertement violé les dispositions de l'art. 340;

« Et attendu que l'arrêt définitif du 2 décembre suivant n'a été que la conséquence de celui du 31 mars, et qu'il présente par suite la même

« Et attendu que cet article interdit, d'une manière absolue, la recherche de la paternité, sauf le cas d'enlèvement et lorsque son époque coïn-violation de loi; cide avec la conception de l'enfant réclamant;

«Que cependant, et quoique l'art. 340 ci-dessus cité ne fasse aucune distinction entre la voie d'action et celle d'exception, la cour d'appel de Limoges a supposé cette distinction établie, et sous prétexte que les héritiers naturels de François Dubois étaient défendeurs en l'instance, les a admis à rapporter la preuve que les demandeurs étaient les enfants adultérins dudit Dubois, malgré qu'il fût justifié par la représentation de leurs actes de naissance, qu'ils étaient nés de Françoise Lemur et d'un père inconnu, et qu'il fût avoué en fait qu'ils avaient toujours joui de cet état d'enfants naturels d'un père inconnu, conformément à leur titre de naissance;

« Attendu que l'article 46 du Code civil n'a eu pour objet que de suppléer le silence ou la perte des registres de l'état civil; et que, dans l'espèce particulière, il n'y avait rien à suppléer, puisqu'il y avait existence de registres et inscription sur ces registres des actes de naissance des enfants de Françoise Lemur, nés de père inconnu; « Que les art. 323 et 325 sont également étrangers à la question, puisque l'art. 323 n'autorise la preave qu'à défaut de titre et de possession constante, et que l'article 325 ne l'autorise non plus qu'à l'effet d'établir que le réclamant n'est pas l'enfant de la mère qu'il prétend avoir, ou la maternité prouvée, il n'est pas l'enfant du mari de la mère;

que,

« Que, d'ailleurs, l'art. 323 exige, pour rendre la preuve admissible dans le cas même du défaut de titre et de possession constante, qu'il y ait commencement de preuve par écrit ou des indices assez graves, et dès lors constants, pour faire supposer la véracité des faits allégués; et que l'arrêt attaqué ne s'est fondé ni sur un commencement de preuve par écrit, ni sur aucuns indices assez graves, dès lors constants au procès;

« Attendu que l'article 339 n'est pas plus applicable, puisqu'il n'accorde à ceux qui prétendent y avoir intérêt, que le droit de contester la reconnaissance faite par le père et par la mère, et la réclamation de la part de l'enfant; et qu'il n'y avait eu ni reconnaissance de la part de François Dubois, ni réclamation de la part des enfants de Françoise Lemur;

«

Que l'art. 340 reste donc seul à consulter, et que, comme il interdit, pour tous les cas, la recherche de la paternité, il en résulte qu'aucune

« Attendu que c'est également par suite que ledit arrêt du 2 décembre a prononcé l'annulation du contrat de vente du 13 floréal an III, puisque, si le testament de François Dubois devait sortir effet, les défendeurs se trouveraient sans qualité et sans intérêt pour contester l'exécution de ladite vente :

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La cour, sans qu'il soit besoin d'examiner si la vente du 13 floréal an III renferme une libéralité déguisée, et si la loi du 17 nivose an 2 a révoqué l'article 132 de l'ordonnance de 1629, prohibitif de toutes donations entre concubins, casse et annule l'arrêt interlocutoire du 31 mars 1808, et par suite celui définitif du 2 décembre suivant, pour violation ouverte de l'article 340 du Code civil, et pour fausse application des art. 46, 323, 325 et 339 du même Code, etc. « Fait et prononcé, etc. Section civile. » VI. Un enfant adultérin peut-il être adopté par son père ou par sa mère?

La cour de cassation a jugé que non dans Yespèce suivante :

François Thiery, demandeur en cassation, est né le 10 fructidor an 2.

Son acte de naissance le désigne comme fils de Marie-Anne Thiery: le père n'est pas désigné

dans cet acte.

A cette époque du 10 fructidor an 2, François Delisle, père des défendeurs, était marié avec la demoiselle Barois.

Elle mourut le 7 brumaire an vi, laissant de son union avec François Delisle quatre enfants légitimes. Ces enfants sont défendeurs à la cas

sation.

Le 27 pluviose an vi, Delisle père épousa Marie-Anne Thiery.

Trois jours après, ils se présentèrent devant l'officier de l'état civil avec le mineur Thiery, né le 10 fructidor an 2.

Ils déclarent que cet enfant avait été constamment élevé sous leurs yeux depuis sa sortie de la maison de la nourrice; qu'ils le reconnaissaient l'un et l'autre pour leur fils, et qu'ils l'adoptaient même en tant que besoin.

Ils ajoutaient qu'ils voulaient qu'à l'un ou à l'autre de ces titres, il jouît de tous les droits que les lois rendues et à rendre pourraient lui accorder, sans que l'un de ces titres pût préjudicier à l'autre.

Ces déclarations furent insérées dans un acte authentique.

Par contrat public du 7 messidor an x, François Delisle fit, à ses enfants légitimes, une donation de quelques immeubles.

Il fit, en même temps, donation d'une vigne au mineur Thiery.

Cette donation fut acceptée par Marie-Anne Thiery, avant leur mariage.

Marie-Anne Thiery décéda le 8 fructidor an x. Ses héritiers collatéraux transigèrent avec le mineur Thiery, par acte authentique du 30 juin 1806. La succession entière de Marie-Anne Thiefemme Delisle, fut accordée au mineur Thiery, sauf le droit de retour, stipulé au profit des héritiers collatéraux, lors du décès du mineur Thiery.

Le 7 octobre 1812, François Delisle mourut. Le 11 décembre suivant, le tuteur du mineur Thiery fit notifier aux enfants légitimes un acte, par lequel il déclara s'opposer à ce qu'il fût procédé, sans sa participation, au partage et à la vente des biens dépendants de la succession de François Delisle.

Le tuteur fonda cette prétention sur ce que, en vertu de l'acte d'adoption du 1er ventose an vi, et des lois rendues sur cette matière, le mineur Thiery avait droit à une part d'enfant légitime dans cette succession.

Les enfants légitimes engagèrent une instance, qui eut pour objet de faire rejeter cette oppo

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Par jugement du 16 juillet 1813, le tribunal de Saint-Mihiel annula l'acte d'adoption et la do

nation.

Sur l'appel émis de ce jugement par le tuteur du mineur Thiery, la cour royale de Nancy en confirma les dispositions, d'après les motifs donnés par les premiers juges.

François Thiery, devenu majeur, s'est pourvu contre cet arrêt, et soutient qu'il n'a pas pu être considéré comme un enfant naturel adultérin.

Son état, dit-il, était irrévocablement fixé par son acte de naissance. J'étais, ajoute-t-il, d'après cet acte, un enfant naturel, et non un enfant naturel adultérin.

François Delisle, en se déclarant postérieurement mon père, n'a pas pu changer mon état et m'imprimer la tache d'enfant adultérin.

Le demandeur soutient, en second lieu, qu'en supposant même qu'il fût un enfant naturel adultérin, l'adoption n'en serait pas moins valable en vertu de la loi transitoire du 25 germinal an xi, dont les dispositions sont générales et absolues.

Les défendeurs répondent qu'il a été reconnu en fait, d'après le rapprochement des actes produits, que le demandeur était un enfant naturel adultérin.

Ils se fondent, en outre, sur les mêmes motifs qui ont déterminé les premiers juges et la cour royale de Nancy.

Sur quoi, la cour, par arrêt de la section civile, du 23 décembre 1816,« oui le rapport fait par M. le conseiller Vergès; les observations de Champion pour Badin, avocat des demandeurs; celles de Teysseyre, pour Deliège, avocat des défendeurs, et les conclusions de M. l'avocat-général Jourde;

Après en avoir délibéré en la chambre du conseil, à l'audience du 3 de ce mois, et à celle de cejourd'hui ;

« Considérant que la cour royale de Nancy a reconnu, d'après le rapprochement des titres produits au procès, d'après les faits qui lui ont été soumis, et d'après les déclarations des parties, que François Thiery était bâtard adultérin;

« Considérant que l'incapacité des bâtards adultérins les a toujours fait exclure, tant dans l'anCe tribunal considéra que, dans l'ancienne lé-cienne que dans la nouvelle législation, de l'exergislation, les enfants naturels adultérins n'avaient cice des droits de filiation et de successibilité; droit qu'à des aliments, et que la législation in- Qu'ils n'ont eu constamment droit qu'à des termédiaire ne leur avait pas attribué d'autres aliments; droits, quelque favorable qu'elle eût été aux enfants naturels.

Ce tribunal considéra, en outre, qu'il était impossible d'admettre que l'enfant naturel adultérin, qui était exclu de tout droit de successibilité, pût acquérir ce droit en vertu de l'adoption.

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«Que, quelque favorable qu'ait été aux enfants naturels la loi du 12 brumaire an 2, elle a maintenu l'incapacité absolue des enfants adultérins, en les réduisant à des aliments;

«

Que cette incapacité a été formellement maintenue par le Code civil, qui a défendu la reconnaissance des bâtards adultérins, et même leur légitimation par mariage subsequent;

Ce tribunal considéra enfin que la loi du 25 germinal an xi, en validant les adoptions qui n'auraient été accompagnées d'aucune des condi- «Qu'on ne peut supposer que le législateur, qui tions prescrites postérieurement par le Code ci-a toujours si solennellement consacré l'incapacité vil, pour adopter et être adopté, n'avait pas fait cesser les incapacités et les nullités absolues, prononcées par toutes les législations.

absolue des bâtards adultérins pour acquérir des droits de filiation et de successibilité, se soit mis en opposition avec lui-même, en étendant à ces

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On voit que cet arrêt est fondé sur ce que la cour de Nancy avait déclaré en fait, que François Thiery était bâtard adultérin. S'il eût réussi à faire adopter par les juges du fond la doctrine consacrée par l'arrêt du 28 juin 1815, rapporté ci-dessus no 1, qui considère la reconnaissance spontanée d'une filiation adultérine comme non avenue, elle eût certainement été confirmée de nouveau par la cour régulatrice.

ENFANT INCESTUEUX. C'est celui qui a reçu le jour d'un commerce illicite de deux personnes entre lesquelles le mariage est prohibé par la loi, pour cause de parenté ou d'alliance.

Les enfants incestueux sont une monstruosité dans l'ordre social. Leur naissance bouleverse tous les sentiments d'honnêteté et de pudeur; elle révolte la nature, lorsqu'elle est due à l'horrible accouplement de ceux qui ont donné le jour et de ceux qui l'ont reçu, ou à l'amour profane d'un frère et d'une sœur. Ils sont moins odieux lorsqu'ils tiennent le jour d'un oncle et d'une nièce; mais ils sont toujours le fruit du crime, et comme tels, enveloppés dans la même proscription.

Les enfants incestueux sont, pour toutes les prohibitions prononcées contre eux par la loi, assimilés aux enfants adultérins.

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« Les Romains avaient distingué toutes les espèces d'enfants naturels avec un soin qu'on pourrait citer en preuve du degré de corruption où ils étaient parvenus; les enfants de femmes libres ou esclaves, de concubines domestiques ou de prostituées, du simple ou du double adultère, de l'inceste civil direct ou collatéral, et de l'inceste religieux. » (M. Duveyrier, Motifs du Code civil, tome 3, page 110.)

Notre ancienne jurisprudence française confondait tous ces enfants sous la dénomination de bátards, et elle les traitait avec une extrême sévérité, surtout lorsqu'ils étaient le fruit de l'adultère, ou de l'inceste.

Notre droit intermédiaire s'est précipité dans un excès contraire. Des législateurs égarés par une dangereuse philantropie et par l'esprit de novation, les ont presque assimilés aux enfants nés sous l'égide du mariage. « Dans la révolution, dit M. Duveyrier, dans ces temps où l'exaltation a franchi tous les extrêmes, la réforme d'un abus ne pouvait être elle-même qu'un excès. L'enthousiasme des idées naturelles et l'ivresse de l'égalité firent prodiguer aux bâtards reconnus, dans les successions de leurs père et mère, de tels avantages que la différence était presque insensible entre eux et les enfants légitimes.» (Motifs du Code civil, tome 3, page 113.)

Les rédacteurs du Code civil ont été plus sages; ils ont évité ces deux écueils, en respectant tout à la fois les droits sacrés de la nature et ceux non moins puissants de la morale et de la société.

C'est dans ce juste milieu qu'ils ont trouvé le bien dont s'étaient également écartées la législation qui refusait tout, et celle qui accordait trop.

Le Code civil distingue deux sortes d'enfants naturels; les enfants naturels simples, c'est-à-dire ceux qui sont nés de personnes libres et non parentes ou alliées au degré où le mariage est prohibé, et les enfants naturels nés d'un commerce incestueux ou adultérin. Voy. les articles Enfant adultérin et Enfant incestueux.

Parmi les enfants naturels simples, il en est qui ont été légalement reconnus par leur père ou par leur mère, ou par tous les deux, et d'autres qui ne l'ont pas été. Ces derniers n'ayant aucun droit de famille, de parenté légale, de succes sion, etc., les enfants naturels reconnus forme ront seuls l'objet de cet article, dans lequel nous exposerons les droits, les obligations, les devoirs, les rapports qui dérivent de la paternité et de la maternité constatées de la manière et dans les formes expliquées au mot Reconnaissance d'enfant naturel.

Nous parlerons 1o des aliments dus aux enfants naturels par ceux qui les ont reconnus, ou à ceux-ci par les enfants naturels, et de l'éducation de ces derniers;

ENFANT NATUREL. L'enfant naturel est celui qui est né hors le mariage, ou qui, étant né pendant le mariage, a été déclaré non légitime.fants naturels;

2o De la puissance paternelle à l'égard des en

3o De la tutelle de ces enfants;

4o De la parenté et de l'affinité qui résulte de février 1811, consacre cette vérité et développe

leur reconnaissance;

5o De leur mariage;

6o De leurs droits héréditaires.

Quant aux questions de savoir: 1o si dans l'intervalle entre la loi du 18 janvier 1792, et la promulgation du Code civil, le père a pu adopter son enfant naturel par lui antérieurement reconnu; 2° s'il l'a pu, lorsqu'au moment de l'adoption il avait déja un enfant légitime; 3° si, sous l'empire du Code civil, l'enfant naturel peut être adopté par son père qui l'avait précédemment reconnu. Voy. Adoption, sect. 1, no ш, et sect. 11, § I, no iv.

Un arrêt de la cour de cassation, en date du 28 d'une manière lumineuse les principes sur lesquels elle repose. En voici l'espèce:

Par acte notarié du 1' mai 1809, le sieur Carayon, alors marié, reconnaît la dame Cabanon pour sa fille naturelle, qu'il a eue d'une autre que de la dame Carayon. La dame Cabanon ainsi reconnue, forme bientôt contre lui la demande d'une pension alimentaire. Le 24 juillet 1810, arrêt de la cour royale de Toulouse, qui condamne le sieur Carayon à payer à sa fille naturelle une pension annuelle et alimentaire de 500 francs. Le sieur Carayon se pourvoit en cassation contre cet arrêt, pour fausse application des art. 202, 205, 206, 207 et 208 du Code civil; pour violation de l'art. 337 du même Code, qui veut que la reconnaissance faite pendant le mariage, par I. Tout homme qui donne le jour à un enfant un des époux, ne puisse nuire ni à l'autre époux doit pourvoir à sa nourriture, protéger sa fai-ni aux enfants nés de ce mariage, et aussi pour blesse, le préserver du mal et le diriger vers le bien : c'est un des premiers devoirs que nous imposa la nature.

§ I.

Des aliments et de l'éducation.

Cette loi naturelle a été érigée en loi positive par le Code civil. « Les époux contractent ensemble par le fait seul du mariage, l'obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants.» (Art. 203.) Par une juste réciprocité, par un motif également puisé dans la nature, l'art. 205 dispose que les enfants doivent des aliments à leurs père et mère, et autres ascendants dans le besoin.

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« On ne doute pas, disait M. Portalis, dans l'exposé des motifs du titre du Mariage, on ne doute pas que les pères naturels ne soient obligés d'élever leurs enfants; de les entretenir et de les nourrir: la loi positive elle-même a placé ce devoir parmi les obligations premières que la nature, indépendamment de toute loi, impose à tous les pères. (Motifs, tome 2, page 229.)

violation de l'art. 856, qui ne donne de droits aux enfants naturels que sur les biens de leurs père et mère décédés. Mais le 27 août 1811, arrêt de la section des requêtes, au rapport de M. Chabot de l'Allier, par lequel,

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Attendu, 1o que la nature elle-même, indépendamment de toute loi positive, impose aux pères l'obligation de fournir des aliments à leurs enfants, et que cette obligation, qui dérive nécessairement du fait de la paternité, s'applique au père qui a reconnu son enfant naturel, comme au père d'un enfant légitime; -que la novelle 89, chap. xII, donnait à cet égard les mêmes droits aux enfants naturels qu'aux enfants légitimes, et qu'ils leur étaient accordés également en France, par une jurisprudence constante et uniforme;

Mais le Code a gardé le silence sur les enfants naturels. Doit-on conclure de là que les père et mère, qui les ont reconnus, ne sont pas tenus de leur nourriture, de leur entretien et de leur éducation? Doit-on conclure de là que les enfants naturels eux-mêmes ne sont pas tenus de fournir qu'à la vérité, le Code civil ne contient aucune des aliments à leur père et mère dans le besoin? disposition expresse, quant aux aliments, en faNon, sans doute. Dans le silence de la loi posi-veur des enfants naturels reconnus; mais que, tive, il faut obéir à la voix de la nature. dans le silence des lois positives, il faut recourir au droit naturel; qu'il n'y a dans le Code civil aucune disposition contraire;- que les art. 756 et 757 ne s'occupent que de la succession, et que, suivant la maxime du droit, viventis nulla est hæ reditas, ils devaient nécessairement supposer le décès des pere et mère de l'enfant naturel, pour régler leur succession; qu'au surplus, ils ne déclarent pas que l'enfant naturel n'aura de droits sur ces biens des père et mère, qu'après leur décès; qu'ils décident seulement que, pour avoir des droits sur les biens des père et mère, après leur décès, il faut qu'il ait été légalement reconnu : mais qu'il n'en résulte pas que le père vivant ne doive pas d'aliments à l'enfant naturel qu'il a reconnu: qu'on ne peut et ne doit pas supposer que les auteurs du Code civil ayent voulu affranchir les pères naturels de la dette la plus sacrée, du devoir le plus impérieux de la paternité; qu'en effet, un des rédacteurs du Code disait, en parlant au nom du gouvernement, sur le titre de la

«La reconnaissance, disait au Corps législatif M. le tribun Duveyrier, en présentant le vœu du Tribunat sur le titre de la paternité et de la filiation, la reconnaissance d'un enfant naturel manifeste et rend certains aux yeux de la société les rapports que la nature a mis entre lui et son père. Elle établit devant la loi et leurs droits et leurs devoirs réciproques; pour le père, l'obligation de fournir à son enfant les moyens d'exister; pour l'enfant, l'obligation d'obéir à son père, de le respecter et de le secourir. » (Motifs, tome 3, page 117.)

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