Page images
PDF
EPUB

une séparation : la cour a mis et met l'appellation et ce dont est appel au néant, émendant, décharge Ducayla des condamnations contre lui prononcées; au principal, déboute Victoire Tu

ses reproches contre les témoins, la même augmentation lui est nécessaire pour la distance de son domicile réel au lieu où se fera l'enquête ; car, quelques instructions qu'elle ait pu donner à son avoué sur l'affaire, elle n'a pu lui fournir la no-lon, femme Ducayla, de la demande en séparatice de ses reproches contre les témoins qui ne lui sont connus que par l'assignation pour être présente à l'enquête, comme cela est fort bien dit dans l'arrêt de 1815. Il semble donc y avoir même raison de décider dans les deux cas. Au surplus, l'arrêt de 1815 émanant de la section civile, et portant cassation, fixe incontestableblement la jurisprudence sur les points qu'il a résolus.

Il résulte du troisième de ces motifs, que la notification à partie des noms, professions et demeures des témoins doit nécessairement être faite trois jours avant l'audition. Et la question s'étant | présentée devant la section civile, y a effectivement été résolue dans le même sens. Voici l'espèce :

La dame Ducayla poursuivait la séparation de corps contre son mari pour cause d'injures graves, et un arrêt de la cour royale de Paris, du 18 août 1818, l'avait admise à faire preuve, tant par titres que par témoins, des faits par elle exposés à l'appui de sa demande. Sur sa requête, une ordonnance du conseiller commis à l'enquête, avait fixé au 12 septembre suivant l'audition des témoins qu'elle devait faire entendre. Le 18 du même mois avait aussi été fixé pour le jour où commencerait la contre-enquête de son mari. Le 14, le sieur Ducayla assigne la dame son épouse pour être présente à l'audition des témoins qu'il devait faire entendre le 18, et l'exploit d'assignation ne contenait l'indication que d'un seul de ces témoins. Deux jours après, c'est-à-dire le 16, il fit notifier à son épouse les noms, profession et domicile des sept autres témoins qu'il devait produire.

Au jour indiqué pour la contre-enquête, la dame Ducayla s'opposa à ce que les sept témoins désignés dans l'exploit du 16 septembre fussent entendus, sur le motif que les noms, profession et demeure de ces témoins ne lui avaient pas été notifiés trois jours d'avance, conformément à l'article 261 du Code de procédure. Le juge n'en crut pas moins devoir passer outre; mais à l'audience de la cour royale, la dame Ducayla renouvela ses protestations, et conclut expressément à ce que la cour déclarât la contre-enquête nulle, et, dans tous les cas, qu'elle ordonnât que les dépositions des témoins dont les noms, professions et demeures n'avaient pas été notifiés trois jours avant l'audition, ne seraient pas lues.

En cet état, arrêt de la cour royale de Paris, du 15 décembre 1818, qui prononce en ces termes: « Attendu que des pièces produites et des enquêtes, il ne résulte pas des preuves suffisantes le sévices ou injures graves qui puissent motiver

tion de corps par elle formée; ordonne en conséquence qu'elle sera tenue de réintégrer le domicile de son mari dans le délai d'une année, à compter du jour de la signification du présent arrêt; ordonne que l'amende consignée sera rendue, tous dépens compensés entre les parties, attendu le lien qui les unit; sur le surplus des demandes, fins et conclusions des parties, les

met hors de cour ».

La dame Ducayla s'est pourvue en cassation contre cet arrêt, pour violation, 1o de l'art. 141 du Code de procédure, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt a rejeté la demande en nullité de la contre-enquête, sans donner de motifs à cet égard; 2o de l'article 261 du même Code, qui veut que la notification à la partie adverse des noms, profession et demeure des témoins qui doivent être entendus dans l'enquête, soit faite au moins trois jours avant l'audition desdits témoins, à peine de nullité.

Ces moyens ont été accueillis, et par arrêt du 12 juillet 1819, au rapport de M. Vergès et sur les conclusions conformes de M. Mourre, procureur-général, - « La cour, après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil; Vu l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810 et l'àrt. 261 du Code de procédure civile;

[ocr errors]

-

Attendu, sur le premier moyen, que lorsqu'il a été procédé à la contre- enquête, la demanderesse a protesté contre l'audition des sept témoins indiqués dans la notification tardive du 16 décembre 1818; que, lors de l'arrêt attaqué, la demanderesse a conclu à la nullité de la contre-enquête, en s'étayant de l'art. 261 du Code de procédure civile; que cette demande en nullité était de nature à influer essentiellement sur la décision du fond; que, néanmoins, la cour royale de Paris n'a posé, dans l'arrêt attaqué, aucune question relative à cette demande en nullité, et n'a donné aucun motif pour la rejeter; que cette cour s'est bornée à apprécier, sur le fond, les enquêtes respectivement faites par les parties, et à rejeter la demande en séparation, tandis qu'il était préalablement nécessaire d'examiner, et de décider si la demande en nullité de la contreenquête était ou non fondée; qu'à la vérité, par une disposition finale de l'arrêt, les parties ont été mises hors de cour sur le surplus de leurs demandes, fins et conclusions; que cette disposition et la décision sur le fond, établissent bien que la demande en nullité de la contre-enquête a été rejetée, mais qu'il en résulte aussi qu'il n'a été donné aucun motif à l'appui de ce rejet; que par conséquent, l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810 a été formellement violé;

[ocr errors]

par conséquent, en ne prononçant pas la nullité des dépositions des sept témoins qui ont été entendus le 18 septembre, quoique la notification de leurs noms, professions et demeures n'eût été faite que le 16 du même mois, la cour royale de Paris est contrevenue audit art. 261, combiné avec les autres dispositions ci-dessus indiquées :

casse...... »

VI. Une assignation donnée à la partie, au domicile de son avoué est-elle valable, quoique le domicile de cette partie ait été indiqué dans une commune où elle n'habitait pas?

Il semble que non, car on vient de voir par la jurisprudence de la section civile, que l'art. 261 ne doit pas, en général, être isolé de l'art. 61. Or, ce dernier article veut, à peine de nullité, que la demeure du défendeur soit énoncée dans l'assignation pour faire connaître d'une manière positive la personne contre laquelle on agit. Le même motif existe dans l'assignation pour être présent à une enquête. Tout porte donc à croire que cette demeure doit être indiquée d'une manière exacte, et que l'omission ou l'erreur qui serait commise à cet égard pourrait bien n'être pas indifférente.

Attendu, sur ce second moyen, qu'en rap- | à la nécessité qu'a reconnue le législateur de faire prochant les dispositions du titre XII du livre II du notifier aux témoins, avant leur audition; les Code de procédure civile, et en se pénétrant bienfaits sur lesquels ils doivent être entendus; que, de l'intention du législateur, ainsi que des principes de justice et d'équité qui l'ont dirigé, on ne peut se méprendre sur le sens véritable de l'article 261 de ce Code; que le législateur a voulu, en effet, par cet article, que la partie fût assignée pour être présente à l'enquête, trois jours au moins avant l'audition des témoins, et qu'on lui notifiât les noms, professions et demeures des témoins, le tout à peine de nullité; que, si le délai de trois jours n'a pas été répété, ce n'a été que parce que les deux dispositions, aussi importantes l'une que l'autre, étaient renfermées dans la même période; que ce n'a été, en outre, que parce que, d'après l'usage assez généralement observé, le même exploit contient et l'assignation à la partie, et l'indication des témoins; que le délai de trois jours a été reconnu tellement nécessaire par le législateur, qu'il a voulu, par l'art. 270, que les reproches contre les témoins fussent proposés avant leur déposition; qu'on a entendu, par conséquent, donner à la partie un délai suffisant pour s'informer de la moralité des témoins; qu'il résulterait du système contraire, que la partie serait privée d'un délai quelconque pour prendre les renseignements desquels peuvent dépendre son honneur et sa fortune; que cet article est en effet le seul du Code dans lequel le législateur se soit occupé du délai de l'assignation à la partie pour être présente à l'enquête, et de la notification des noms et demeures des témoins; qu'on doit nécessairement supposer que le législateur a mis en harmonie toutes les dispositions du Code, et qu'il n'a pas entendu, en accordant un droit aussi essentiel, en paralyser en même temps l'exercice, et se mettre ainsi en opposition avec lui-même; que, si le législateur avait voulu abréger le délai pour la notification des noms et demeures des témoins, il n'aurait certainement pas manqué d'exprimer sa volonté dans l'art. 260; que le moment était alors bien favorable, puisque le législateur permettait, par cet article, d'assigner les témoins un jour avant leur audition; que, cependant, ce délai ainsi limité n'est relatif qu'à l'assignation des témoins, tandis que l'art. 261, qui prescrit le délai de trois jours, concerne l'assignation à la partie et la notification des noms et demeures des témoins; que cette interprétation de l'art. 261 est encore fortifiée par un exemple frappant qu'offre l'art. 260; que ce dernier article veut, en effet, d'abord, que les témoins soient assignés au moins un jour avant leur audition; qu'il veut ensuite qu'il soit donné copie à chaque témoin du dispositif du jugement en ce qui concerne les faits admis; qu'il est évident que, quoique cette dernière disposition de l'article ne répète pas le délai, cette répétition est sous-entendue par la force du raisonnement et par la force des choses, eu égard

Tome II.

VII. L'art. 261 veut que la demeure des témoins soit notifiée, mais il n'y aurait sûrement pas nullité si au lieu d'indiquer la demeure, le domicile avait été désigné dans l'assignation, car ces deux mots sont dans l'usage employés comme à peu près synonymes.

La peine de nullité prononcée comme ci-dessus par le même article, exige que l'on fasse des distinctions entre les formalités qu'il prescrit. Si la nullité se trouve dans l'assignation à la partie, toute l'enquête est nulle; mais si elle ne consiste qu'en ce que les nom, profession et demeure de l'un des témoins n'ont pas été indiqués, la nullité ne frappe que la déposition du témoin à l'égard duquel ces indications n'ont pas été fournies. Cela est d'ailleurs conforme à l'art. 294.

VIII. Nul ne peut être assigné comme témoin, s'il est parent où allié en ligne directe de l'une des parties, ou son conjoint même divorcé ( Ibid., art. 268). La prohibition d'assigner, emporte celle d'entendre comme l'exprime formellement l'art. 413. Ainsi, dès que le juge-commissaire s'aperçoit qu'un témoin a été assigné malgré la défense de la loi, il doit d'office refuser de l'entendre, attendu sa qualité.

La défense faite par l'art. 268, doit-elle être appliquée en matière de séparation de corps?

La raison de douter est que les articles 307 du Code civil et 879 du Code de procédure disent que la demande en séparation de corps doit être intentée, instruite et jugée dans les formes établies pour les autres demandes, et que l'art. 251 du Code civil qui permet d'entendre des témoins

46

parents ou alliés des parties, en ligne directe, se trouve dans le chapitre du divorce pour cause déterminée, et non dans celui de la séparation de

corps.

Mais un arrêt de la cour de cassation, section des requêtes, du 8 mai 1810, au rapport de M. Rupérou, a décidé que ces témoins peuvent être entendus, « parce que le législateur, en décidant qu'on pourra intenter la demande en séparation de corps, dans le cas où il y aura lieu à demander le divorce pour cause déterminée, n'a pas établi de différence dans la manière de prouver, dans un cas comme dans l'autre, des faits qui sont les mêmes; et qu'on ne peut pas dire que l'art. 307 du Code civil et l'art. 879 du Code de procédure, en prononçant que la demande en séparation de corps sera intentée, instruite et jugée dans les formes établies pour les autres demandes, se soient expliqués sur la qualité des témoins ni sur les causes qui les rendent reprochables. »

nelle, sur les conclusions conformes de M. Daniels, a annulé l'arrêt de la cour criminelle par les motifs que voici :

[ocr errors]

« Attendu que la prohibition d'appeler en témoignage le fils et la fille de l'accusé et les alliés au mème degré, comprend nécessairement les enfants de la femme ou du mari, à l'égard de l'autre conjoint, à cause de l'alliance que le mariage établit entre leurs conjoints et leurs enfants respectifs; que rien ne peut empêcher cette alliance d'exister, dès qu'elle a été produite par un mariage valablement contracte; qu'en conséquence, le vice de la naissance d'un enfant n'est d'aucune considération à l'égard du mari qui a contracté une union légale avec la mère reconnue de cet enfant illégitime; - qu'on doit décider ainsi, par la raison qu'il existe toujours un lien naturel entre la mère et son enfant, lors même que cet enfant serait un bâtard adultérin; que l'existence de ce lien naturel est indépendante du La défense portée en l'art. 268 est, au surplus, physiquement impossible qu'il n'existe pas, et droit positif; -il existe par cela seul qu'il est générale et semble n'admettre aucune autre exception, si ce n'est quand il s'agit de prouver lité et ses effets, des dispositions de la loi civile dès lors on ne peut rien conclure contre sa réal'âge de quelqu'un; alors l'usage a consacré que l'on peut entendre les parents les plus proches, concernant l'état et les droits du bâtard adultéet les articles 46 et 71 du Code civil nous parais-rin, soit dans la société, soit à l'égard des auteurs de sa naissance, ces dispositions étant uniquement IX. La parenté ou l'alliance en ligne directe relatives à l'ordre civil, et ne pouvant rien chandont parle l'art. 268 du Code de procédure, doit-ger aux règles immuables de la nature; — que, elle s'entendre de la parenté ou de l'alliance le- par une déduction nécessaire de ces principes, il faut dire que, tout comme le bâtard même adulgitime et naturelle? térin ne pourrait, dans l'objet et l'esprit de la loi prohibitive, être admis à déposer sur le crime imputé à sa mère, il ne peut également être reçu à rendre témoignage sur l'accusation dirigée contre celui qui, en devenant l'époux de la mère, a acquis, à l'égard de l'enfant, les rapports inaltérables d'une alliance naturelle;

sent l'autoriser.

Lorsque les enfants naturels sont légalement reconnus, la loi attache des liens civils et d'intérêt à cette reconnaissance, comme le prouvent les articles 158, 383, 756 et 765 du Code civil. Ainsi, ces enfants paraissent compris dans la prohibition de l'art. 268 du Code de procédure.

Mais il y a plus de difficulté pour les enfants naturels non reconnus, et pour les adultérins et incestueux qui ne peuvent l'être volontairement. La question s'est présentée devant la cour de cassation dans l'espèce suivante :

1

Etienne Ferrand, accusé d'assassinat, fut traduit devant la cour de justice criminelle du département de la Loire. Lors des débats, il déclara s'opposer à ce que Thomas Alamartine fût entendu comme témoin, parce qu'il était fils adultérin de sa femme; qu'il était dès lors son allié, et que l'art. 358 du Code des délits et peines, reproduit dans l'art. 322 du Code d'instr. crim. s'opposait à l'audition. Mais la cour criminelle refusa de faire droit à cette réclamation, attendu qu'en parlant des alliés, la loi avait entendu les alliés légitimes. Étienne Ferrand ayant été condamné à mort, se pourvut en cassation; et alors se présenta à décider le point de savoir si l'enfant adultérin de la femme est l'allié du mari.

« Attendu, d'ailleurs, que les motifs de prudence et les considérations morales qui ont dicté la prohibition de l'article 358 de la loi du 3 brumaire an iv, à l'égard du fils légitime de l'un des conjoints, s'appliquent aussi à l'enfant illégitime de la femme, vis-à-vis du mari de celle-ci ;

« Attendu, enfin, que dans l'espèce, Étienne Ferrand et Madelaine Chaignard, ayant légitimement contracté mariage, et Thomas Alamartine étant reconnu pour l'enfant de Madelaine Chaignard né avant son mariage de son commerce avec un homme marié, Étienne Ferrand a eu le droit de s'opposer à ce que cet enfant fût entendu aux débats; - et que, dès lors, en refusant de faire droit à sa réquisition, et en admettant Thomas Alamartine à déposer devant le jury de jugement, la cour de justice criminelle du département de la Loire a violé l'art. 358 prescrit à peine de nullité.

Cet arrêt décide en pur point de droit que les Par arrêt du 6 avril 1809, au rapport de enfants bâtards, même adulterins, ont des parents M. Guieu, la cour de cassation, section crimi-ou alliés naturels, et que quand la loi, dans une

[blocks in formation]

I. Les procès-verbaux d'enquête doivent contenir la date des jour et heure, les comparutions ou défauts des parties et des témoins, la réprésentation des assignations, les remises à autres jour et heure, si elles sont ordonnées, à peine de nullité; ils sont ouverts par la mention que fait le juge-commissaire de la réquisition et de la délivrance de son ordonnance portant permission d'assigner la partie et les témoins; ils sont signés à la fin par le juge et le greffier, et par les parties, si elles le veulent ou le peuvent, et en cas de refus, il en est fait mention, à peine de nullité. (Code de proc., art. 259, 269 et 275.)

La loi voulant que les procès-verbaux mentionnent expressément la représentation des assignations, les juges ne peuvent y suppléer par des équivalents, en disant, par exemple, qu'il résulte des faits et des circonstances que les assignations ont été représentées. C'est ce que la cour de cassation, section civile, a décidé par arrêt du 4 janvier 1813, rapporté ci-dessus, § 1, no 11.

Quoique chacun des témoins doive représenter la copie de l'assignation qui lui a été donnée, il semble que si l'un d'eux avait oublié ou perdu sa copie, il devrait être entendu en sa déposition sur la demande du poursuivant qui représenterait l'original de l'assignation. Dans ce cas l'assignation ayant été représentée, le vœu de la loi est rempli, puisqu'elle ne distingue pas entre l'original et la copie.

Parmi les formalités dont l'art. 269 prescrit l'observation à peine de nullité, les unes frappent la substance de l'enquête et en entraînent la nullité, les autres ne touchent que des dépositions isolées. Ainsi, l'enquête est nulle si elle ne contient pas la date des jour et heure; et si, à la déposition d'un témoin, on a omis de mentionner la représentation de l'assignation qui lui a été donnée, cette déposition seulement est nulle. (Articles 260 et 294.)

II. Les témoins sont entendus séparément, tant en présence qu'en l'absence des parties.

Chaque témoin, avant d'être entendu, déclare ses noms, profession, âge et demeure, s'il est parent ou allié de l'une des parties, à quel degré, s'il est serviteur ou domestique de l'une d'elles; il fait serment de dire vérité : le tout à peine de nullité. (Art. 262.)

Il est d'usage de ne procéder à l'audition des témoins qu'environ une heure après celle indiquée, pour donner aux parties et aux témoins le temps de se présenter. On y trouve aussi l'avantage d'avoir une réunion complète des témoins et de pouvoir leur donner à tous en même temps une seule lecture du jugement, en ce qui concerne les faits sur lesquels ils ont à déposer.

La loi dit que chaque témoin déclarera ses noms, profession, etc. : le procès-verbal doit donc exprimer clairement que ces indications ont été faites d'après la déclaration du témoin.

Si un témoin refuse de prêter serment, sa déposition ne doit pas être reçue puisqu'elle serait nulle. Le juge-commissaire doit le considérer comme défaillant et lui appliquer les dispositions pénales de l'art. 263, car c'est par sa faute qu'il ne rend pas à la justice témoignage de la vérité que lui doit chaque individu.

Le serment doit-il être prêté conformément au rit prescrit par le culte que professe la personne assujettie au serment?

L'article 5 de la Charte constitutionnelle garantit l'entière liberté dans l'exercice des cultes. Si donc le juge ordonne la prestation de serment suivant le rit d'un culte particulier, il oblige à un acte religieux, et dès lors ne semble-t-il pas violer la liberté assurée par la Charte ?

La loi n'exige qu'une chose, le serment de dire vérité; et quand le témoin a fait serment, il a rempli le vœu de la loi, qui semble évidemment faire abstraction de toute croyance à une religion, plutôt qu'a telle autre.

Si même un témoin prétend que le serment est une promesse faite à Dieu, de dire la vérité, et que sa religion lui défend de prendre Dieu à témoin de la vérité, il doit lui être permis d'af firmer selon sa religion. C'est, en effet, ce qu'a décidé un arrêt de la cour de cassation, section des requêtes, du 28 mars 1810, au rapport de M. Pajon, en rejetant le pourvoi en cassation dirigé contre un arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, qui avait permis à un quaker de prêter serment en affirmant en ame et conscience. Voici les motifs de cet arrêt:

[ocr errors]

La cour, attendu, 1° que la liberté des cultes est garantie à tous ceux qui habitent la France;

[ocr errors]

Attendu, 2° qu'il est universellement reconnu, que la religion connue sous le nom de quakérisme, interdit à ses sectateurs de jurer au nom de Dieu, et ne leur permet pas de prêter d'autre serment que d'affirmer en leur ame et conscience,

[ocr errors][merged small]
[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

On ne doit toutefois pas étendre ces exceptions au-delà de leurs justes bornes. Ainsi, un prêtre catholique est tenu, comme tout autre citoyen, de déclarer la vérité à justice, à moins que les faits, sur lesquels il est appelé à déposer, ne lui aient été confiés sous le secret de la confession. C'est ce que la cour de cassation, section criminelle, a formellement décidé par arrêt du 30 novembre 1810. (Sirey, 1811, page 49.)

Ainsi, encore les avocats, les avoués, les notaires, ne sont pas dispensés de déposer lorsqu'ils ont eu connaissance des faits avant que la partie intéressée leur ait accordé sa confiance, ou lorsqu'ils n'ont été consultés ou employés par elle qu'à dessein de les empêcher de déposer.

Enfin, ceux qui font profession de l'art de guérir, ne peuvent se dispenser de déposer, qu'autant qu'ils ont eu à traiter des maladies secrètes, ou que le secret leur a été recommandé.

Ces décisions sont conformes à la loi 5, § 1, ff. De jurejurando, qui porte: Divus Pius jurejurando, quod propria superstitione juratum est, standum rescripsit; et, à la loi 34, § 5, eod. tit. qui dispose: si de qualitate juramenti fuerit inter partes dubitatum, conceptio ejus in arbitrio judi- IV. Si la partie intéressée trouve suffisants les cantis est. C'est surtout ce dernier texte que la motifs allégués par le témoin pour se dispenser cour de cassation paraît avoir pris pour règle; mais de déposer, le juge-commissaire fait mention du ce n'est pas, selon nous, un motif pour que les tout sur son procès-verbal; mais si la partie ne tribunaux s'écartent de l'esprit général de la lé-reconnaît pas la légitimité des motifs, et persiste gislation, qui est de ne point mêler les actes à demander que le témoin soit entendu, le comcivils, avec les actes religieux de tel ou tel culte. missaire, qui n'est pas juge de la difficulté, doit L'énonciation des prénoms des témoins est-elle en référer au tribunal qui, seul, a droit de statuer. prescrite à peine de nullité?

Voyez Ajournement, § 1, no 1.

III. Les témoins défaillants sont condamnés, par ordonnances du juge-commissaire, qui sont exécutoires nonobstant opposition ou appel, à une somme qui ne peut être moindre de to fr., au profit de la partie, à titre de dommages-intérêts; ils peuvent de plus être condaninés par la même ordonnance, à une amende qui ne peut excéder 100 fr. (Code de proc., art. 263.)

Comme il est probable que pendant cette discussion, qui peut subir les deux degrés de juridiction, le délai pour faire enquête expirera, la partie intéressée doit le prévoir et demander la prorogation, crainte d'encourir la déchéance prononcée par l'art. 278. C'est la conséquence qui nous paraît résulter de l'arrêt de la cour de cassation, section civile, du 7 mars 1814, au rapport de M. Oudot, qui a décidé que le délai pour faire enquête ne peut être prorogé au neuvième jour, par cela seul que le huitième est un dimanche, attendu que la partie a dû prévoir le péril en la demeure, et prendre la permission du juge pour assigner dans le délai de rigueur. (Voyez ci-dessus § 11, no 1.)

V. Lorsque le témoin assigné se trouve sous le coup d'une contrainte par corps, la partie qui requiert son audition, ou le témoin lui-même, présente au président du tribunal de première instance une requête à l'effet d'obtenir un sauf-conduit. Ce magistrat, après avoir ordonné la communication au ministère public et sur ses conclusions, accorde le sauf-conduit et en fixe la durée. En vertu du sauf-conduit, le débiteur appelé en témoignage ne peut être arrêté ni le jour fixé pour l'audition, ni pendant le temps nécessaire pour aller et pour revenir. (Code de proc., art. 782; Tarif, art. 77.)

Les témoins qui refusent de déposer, doivent être assimilés aux temoins défaillants. Dès que tout individu doit la vérité à justice, il est aussi repréhensible, de ne pas vouloir dire, que quand il ne se présente pas pour la dire, puisque le résultat est le même. Cependant il est des personnes qui, quoiqu'assignées, peuvent et même doivent refuser de déposer. Ce sont celles qui, aux termes de l'art. 268, n'ont pas dû être assignées, et celles qui par état sont obligées au secret. Ainsi les confesseurs, les avocats, les avoués, les notaires, les médecins, les chirurgiens, les officiers de santé, les sages-femmes, ne sont pas sujets à l'application des peines portées par l'art. 263 quand ils refusent de déposer, parce que l'exercice de ces professions suppose une confiance intime que la morale défend de méconnaître. Ils sont même punissables d'un emprisonnement d'un mois à six mois et d'une amende de 100 fr. à 500 fr., lors- Lors même que l'enquête se poursuit devant un que, hors les cas où il s'agit de crimes qui com- tribunal de commerce ou une justice de paix, le promettent la sûreté de l'état, ils ont révélé les sauf-conduit ne peut être accordé que par le présecrets qu'on leur a confiés. (Code pénal, arti-sident du tribunal de première instance sur les cle 378.) conclusions du ministère public.

« PreviousContinue »