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au créancier, la poursuite en expropriation peut être suspendue par les juges, sauf à être reprise, s'il survient quelque opposition ou obstacle au paiement.

Dans l'expropriation, on distingue le principe, les moyens et la fin.

Le principe comprend,

II. La poursuite en expropriation peut avoir lieu en vertu d'un jugement provisoire ou définitif, exécutoire par provision, nonobstant appel; mais l'adjudication ne peut se faire qu'après un jugement définitif en dernier ressort, ou passé en force de chose jugée.

La poursuite ne peut s'exercer en vertu de ju1o Le titre nécessaire pour poursuivre l'expro-gement par défaut, durant le délai de l'opposition. priation; (Code civil, art. 2215.)

2o Les biens susceptibles d'être expropriés; 3o Les personnes contre qui l'expropriation

peut être poursuivie, et le tribunal devant lequel

la poursuite doit être faite.

C'est l'objet du présent article.

Les moyens sont la chaîne des procédures prescrites pour arriver à l'adjudication de l'immeuble saisi. C'est la matière de l'article Saisie immobi

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Du titre nécessaire pour poursuivre l'expropriation forcée.

I. L'expropriation ne peut être poursuivie qu'en vertu d'un titre authentique et exécutoire, et pour choses liquides et certaines : si la dette exigible n'est pas d'une somme en argent, la poursuite est valable; mais il doit être sursis, après la saisie, à toutes poursuites ultérieures, jusqu'à ce que l'ap. préciation en ait été faite. (Code civil, art. 2213; Code de proc., art. 551.)

Si la dette est en espèces non liquidées, à quelle période de la procedure doit-il être sursis aux poursuites jusqu'après l'appréciation?

Voyez Exécution des jugements et actes civils, § II, no ix.

Quand un titre est-il exécutoire?
Voy. Ibid., § 1.

Si l'opposition à un jugement par défaut, rendu en dernier ressort, est tardive, elle n'est pas un

obstacle à l'expropriation. C'est ce que la cour de

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cassation a décidé, par arrêt du 12 novembre 1806, au rapport de M. Botton, en annulant un arrêt de la cour d'appel de Caen, «attendu que l'on ne peut, d'une part, refuser ni retarder à un créancier étayé d'un titre exécutoire, l'exercice du droit de poursuivre l'expropriation des biens de son débiteur; et que, d'autre part, un jugement par défaut, rendu en dernier ressort, devient un titre exécutoire après l'écoulement du délai de l'opposition.

III. Le cessionnaire d'un titre exécutoire ne peut poursuivre l'expropriation qu'après que la signification du transport a été faite au débiteur. (Code civil, art. 2214.)

La plus-pétition ne détruit l'action dans aucun cas. C'est sur ce principe que l'art. 2216 décide que la poursuite en expropriation ne peut être annulée sous prétexte que le créancier l'aurait commencée pour une somme plus forte que celle qui lui est due.

IV. Un débiteur peut-il renoncer, par une con vention particulière, aux formes de l'expropriation forcée, dans le cas où il serait en retard de payer?

Elles sont fondées, d'une part, sur la volonté de Non, car ces formes tiennent à l'ordre public. la loi, de laisser au débiteur le temps nécessaire pour user de toutes ses ressources afin d'éviter la dure extrémité de subir l'expropriation forcée; d'autre part, sur la nécessité d'environner la vente d'une grande publicité et de délais suffisants pour que l'on ait la certitude morale que l'immeuble

La faillite du débiteur rend exigibles même les créances hypothécaires non échues, aux termes des art. 1188 du Code civil, et 448 du Code de commerce. Doit-on en conclure que les créan-sera porté à toute sa valeur. Or, tant que le débiciers dont les créances sont devenues exigibles, aient le droit de poursuivre l'expropriation des biens du failli, jusqu'à la nomination des syndics définitifs?

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teur n'est pas réellement poursuivi pour remplir son obligation; tant qu'il ne peut pas ainsi mesurer toute l'étendue des ressources qui lui restent, la loi n'a pas cru qu'il pût renoncer à l'observation des formes protectrices qu'elle a établies en sa faveur. C'est bien aussi ce que décide implicitement l'art. 747 du Code de procédure civile, en disant, par exception au principe général, qu'après la saisie réelle, et lorsque tous les intéressés sont majeurs et maîtres de leurs droits, peuvent convenir que la vente se fera aux enchères, devant notaires. Donc, avant la saisie réelle, pareille convention est nulle.

Voy. Saisie immobilière, § 11.

ils

S II.

Des biens susceptibles d'être expropriés.

I. Le créancier peut poursuivre l'expropriation, 1o Des biens immobiliers qui sont dans le commerce, et de leurs accessoires réputés immeubles, appartenant en propriété à son débiteur;

2o De l'usufruit appartenant au débiteur, sur les biens de même nature. ( Code civil, art. 2204 et 2118.)

On a élevé la question de savoir si l'on peut poursuivre l'expropriation des actions immobilières, et la difficulté a été débattue devant la cour de cassation. Le sieur Blanquiers - Limoux avait vendu un héritage à vil prix, et il paraît que l'action en rescision, pour lésion, lui était ouverte. Le sieur Fabre, son créancier, voulut exproprier sur lui cette action; mais sa prétention fut proscrite, par un arrêt de la cour d'appel de Toulouse. Il se pourvut en cassation, pour violation des dispositions du Code civil, qui autorisent l'expropriation des biens immobiliers; et, par arrêt du 14 mai 1806, au rapport de M. Sieyes, la cour, attendu que l'action en lésion d'cutre moitié du juste prix, n'a essentiellement pour fin que le supplément du juste prix, sauf la faculté accordée à l'acquéreur d'abandonner l'immeuble, s'il ne veut pas fournir le supplément du prix; attendu que de la combinaison des divers articles du Code civil, au titre de l'expropriation forcée, il résulte qu'il n'y a que les objets susceptibles d'hypothèques, qui puissent être la matière d'une expropriation, rejette.... »

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qu'il s'agit du paiement d'un douaire ouvert avant la publication dudit Code?

Et particulièrement, la femme normande peutelle, depuis le Code civil, obtenir contre le débiteur du douaire, qui ne paie pas, l'envoi en possession de la nue propriété de son lot à douaire, lorsqu'il est constant que c'était l'usage ancien, à l'époque de l'ouverture du douaire?

Dans ce cas, l'expropriation forcée est-elle la seule voie à prendre, comme s'il s'agissait d'un douaire ouvert postérieurement au Code civil? résolu ces deux premières questions pour la négaVoici un arrêt de la cour de cassation, qui a tive, et la troisième pour l'affirmative.

Par le contrat de mariage de la dame Robillard avec François Deshommais, il fut stipulé un droits de la future sur les meubles, aux termes douaire de 600 francs de rente viagère, sauf les de la coutume de Normandie.

par

Après le décès du mari, les droits de sa veuve ont été réglés par une transaction du 19 octobre 1779, et fixés à une rente viagère de 1,500 fr. La succession de François Deshommais fut bientôt recueillie Louis Sillas-Deshommais, son petit-fils, qui servit quelque temps la rente viagère promise; mais les affaires de ce dernier se dérangèrent, et ses biens ayant été mis en vente, la dame Pinçon, sa femme, se rendit addouaire de sa belle-mère, et paya aussi pendant judicataire, en l'an iv, d'une terre affectée au quelque temps, à celle-ci, les arrérages de la rente représentative de ce douaire.

La dame Pinçon ayant cessé de servir cette rente, la dame Robillard la fit assigner, pour se voir condamner à lui fournir, en nature, un lot

Le premier et principal motif de cet arrêt està douaire. pris de ce que l'action en rescision, pour lésion dans la vente d'un immeuble, n'est pas immobilière; mais on voit aussi, par le second motif, que si notre question avait été précisément soumise à la cour, elle l'eût résolue négativement, et nous pensons que cette doctrine doit être suivie.

Sa demande fut accueillie par divers jugements confirmés par arrêts. En conséquence, des lots furent formés, et la dame Robillard fut envoyée en possession, à titre d'usufruit, du lot auquel sa qualité de veuve douairière lui donnait droit, lot qui portait précisément sur la terre adjugée à la dame Pinçon.

Il semble cependant que les actions de la banque de France, qui sont immobilisées, doivent être Mais, à cette époque, il était dû à la dame exceptées de la règle. L'article 7 du décret du 16 Robillard plusieurs années d'arrérages de sa rente janvier 1808, déclare formellement qu'elles sont viagère; elle avait à réclamer, en outre, diverses soumises au droit de privilége et d'hypothèque, réparations aux biens composant son lot; enfin, comme les propriétés foncières; qu'elles ne peu-elle était créancière de différentes sommes pour vent être aliénées, et les priviléges et hypothèques être purgés, qu'en se conformant au Code civil, et aux lois relatives aux priviléges et hypothèques, sur les propriétés foncières. Dès qu'elles sont, en tout point, assimilées aux propriétés foncières, il résulte nettement de l'arrêt rapporté cidessus, que l'on peut en poursuivre l'expropriation

forcée.

Voy. Banqueroute, sect. 1, § II, no Iv... II. Est-ce donner un effet rétroactif au Code civil, que de régler, par ses dispositions, le mode d'exécution d'un contrat qui lui est antérieur, lors

dommages-intérêts et frais de procédure qui lui avaient été alloués par des jugements précédents.

Ces répétitions donnèrent lieu à de nouvelles poursuites de sa part, qui furent suivies d'un jugement du 10 acût 1810, par lequel le tribunal de Caen adjugea à la dame Robillard les condamnations par elle requises contre la dame Pinçon, et faute par celle-ci d'y satisfaire, envoya d'hors et déja la dame Robillard en possession de la nue propriété de son lot à douaire, jusqu'à concurrence du montant de ces condamnations.

Le 17 février 1811, arrêt confirmatif de la cour

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a

« Attendu néanmoins que la disposition de cet arrêt qui confirme la liquidation des créances de la dame Robillard sur la succession de son mari, et sur les biens en provenant, n'a été l'objet d'aucune critique de la part de la demanderesse en cassation;

« Par ces motifs, la cour casse et annule ledit arrêt, en ce qui concerne l'envoi pur et simple de la dame Robillard, dans la propriété de son lot à douaire, etc. »

Fait et jugé, etc. Section civile. »

La cour a de nouveau consacré le même principe par un arrêt du 4 août 1818, en décidant que le douaire de la femme mariée sous l'empire de la coutume de Normandie ne peut être pris sur les biens du mari à due estimation, et qu'il y a nécessité de les faire vendre par expropria

tion forcée.

Voici comment le Bulletin civil en retrace l'espèce:

L'article 121 des Placités de Rouen, porte : <«< la femme peut demander que partie des héritages affectés à sa dot lui soit baillée, à due estimation, en paiement de ladite dot, sans être obligée de les faire saisir et adjuger par décret.

Par arrêt du 22 mars 1817, la cour de Rouen a ordonné le remplacement autorisé par cet article pour la dot de la dame veuve le Danois; ce qui est juste, cette dame étant mariée en 1779, sous l'empire de la coutume de Normandie, avec consignation de sa dot sur les biens de son mari; mais la cour de Rouen a ordonné qu'il serait de la même manière donné des héritages du mari en paiement du douaire de la dame le Danois,

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Par ces motifs, la cour a cassé l'arrêt de la cour de Rouen de la manière suivante :

« Oui le rapport fait par M. le conseiller Gandon; les observations de Cochin et de Leroy de Neufvillette, avocats des parties; et les conclusions de M. l'avocat-général Cahier;

« Vu l'article 2204 du Code civil; Attendu

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que

les demandeurs ont restreint

leurs conclusions à obtenir la cassation de l'arrêt attaqué, en ce qu'il ordonne que des biens du mari de la défenderesse seront donnés en remplacement à celle-ci, pour son douaire, et pour les intérêts tant de ce douaire que de sa dot;

« Considérant que ce n'est que pour la dot que l'article 121 des Placités de Rouen autorise les femmes à demander que partie des héritages du mari affectés à leur dot leur soit baillée, à due estimation, en paiement desdites dots, sans qu'il y ait nécessité de les faire saisir et adjuger par décret d'où il suit que la cour de Rouen a fait une fausse application de cet article, en ordonnant la même chose pour le douaire de la défenderesse, et qu'elle a violé l'article 2204, ci-dessus cité, qui, dans les cas ordinaires, ne donne au créancier, sur les immeubles de son débiteur en retard de satisfaire aux condamnations prononcées contre lui, que la voie de l'expropriation par cret;

a

. Considérant

que

les intérêts suivent le sort du principal, et qu'ainsi la cour de Rouen n'a pu ordonner que le remplacement à donner pour la dot s'étendrait aux intérêts de cette dot qui peuvent être acquis à la défenderesse ;

«La cour casse et annule l'arrêt de la cour royale de Rouen, du 22 mars 1817; mais seulement en ce qu'il a ordonné que des biens de le Danois seraient donnés, à due estimation, en paiement du douaire de la défenderesse et des intérêts dudit douaire, etc.

"

Fait et jugé, etc. Section civile.»

III. D'après l'article 40 du décret du 1er mars 1808, les biens qui forment les majorats sont inaliénables; ils ne peuvent donc être expropriés. En est-il de même de ceux disponibles déclarés insaisissables par le donateur ou testateur, et de ceux donnés ou légués pour aliments?

Pour l'affirmative, on peut dire que l'article 581 du Code de procédure le décide ainsi pour les meubles, et qu'il y a parité de raison pour les immenbles; que le donateur ou testateur ne fait aucun préjudice aux créanciers, parce qu'il a été maître d'apposer telle condition que bon lui a semblé à sa libéralité; et que, quand il serait vrai que les créanciers postérieurs à la dona

tion ou au testament peuvent avoir prêté, en vue des sûretés apparentes qu'offrait le débiteur, il faut bien reconnaître que les créanciers antérieurs n'ayant pu être trompés par cette considération, l'intention du bienfaiteur doit être suivie au moins en ce qui les concerne.

teur saisi. Cette distinction est juste, car le créancier est suffisamment puni par la perte de ses frais et la condamnation aux dépens envers son débiteur; mais vis-à-vis de l'adjudicataire, il doit s'imputer de n'avoir pas mieux connu les droits de son débiteur, et ne peut dès lors se dispenser de réparer le tort qu'il a commis par son imprudence.

Nonobstant ces raisons, l'opinion contraire nous paraît préférable, parce que, d'un côté, l'article 2204 du Code civil établit en principe gé- L'article 2205 du Code civil qui défend aux néral et sans distinction, que le créancier peut créanciers personnels d'un cohéritier de mettre poursuivre l'expropriation des biens immobiliers en vente sa part indivise des immeubles d'une sucappartenant, en propriété, à son débiteur, et de cession, avant le partage ou la licitation, s'oppol'usufruit sur les biens de même nature; et que, se-t-il à ce qu'ils saisissent cette part, sauf à prode l'autre, les articles 2205, 2206, 2207 et 2209 voquer le partage avant l'adjudication définitive? qui contiennent des exceptions à ce principe, ne La cour de cassation, section des requêtes, a parlant nullement du cas dont il s'agit, on ne doit décidé que non, par arrêt du 14 décempre 1819, pas créer, sous prétexte d'analogie, une excep-au rapport de M. Dunoyer, « attendu que l'article tion que le législateur n'a pas cru devoir établir. 2205 ne prohibe que la vente de la part indivise L'article 581 du Code de procédure, relatif aux d'un cohéritier dans les immeubles d'une successaisies mobilières, loin d'être contraire à cette sion, avant le partage ou la licitation, et n'emdoctrine, vient même la confirmer, car il fait pêche pas de le mettre sous la main de la justice lui-même exception à l'article 557; or, si cette par une saisie réelle. » (Sirey, 1820, page 203.) exception qui concerne les meubles a eu besoin, pour être admise, d'être formellement exprimée dans la loi, il en est à plus forte raison de même pour les immeubles, qui sont ordinairement d'une bien autre importance.

Ajoutons que, comme l'a décidé la cour de cassation, par arrêt du 30 janvier 1821, rapporté au mot Biens, le privilége de l'inaliénabilité ne peut être conféré à un immeuble, que par celuilà seul qui a droit de donner des lois, si ce n'est dans les cas formellement exceptés par les lois, au nombre desquels ne se trouve point celui dont nous parlons.

IV. La part indivise d'un cohéritier dans les immeubles d'une succession ne peut être mise en vente par ses créanciers personnels, avant le partage ou la licitation qu'ils peuvent provoquer, s'ils le jugent convenable, ou dans lesquels ils ont droit d'intervenir. (Code civ., art. 2205.)

par

Cette prohibition peut être invoquée par tout cohéritier, par le débiteur personnel, comme celui qui est étranger à la dette. Mais elle doit être strictement bornée au cas pour lequel elle est faite, c'est-à-dire, à celui de l'indivision entre cohéritiers; elle n'est pas applicable toutes les fois que l'indivision ne provient pas d'un titre héréditaire. C'est ainsi qu'un arrêt de la cour royale de Metz, du 28 janvier 1818, a décidé que les copropriétaires d'un immeuble ne peuvent s'opposer à l'expropriation de la part indivise de l'un d'eux. (Sirey, 1818, 2o partie, page 337. )

Un arrêt de la cour d'appel de Besançon, du 21 juin 1810, avait déja prononcé dans le même sens et jugé, en outre, que le créancier dont les poursuites en exprcoriation sont annulées, parce qu'il a mis en vente la part indivise d'un cohéritier, peut être condamné à des dommages-intérêts envers l'adjudicataire, mais non envers le débi

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V. Les immeubles d'un mineur, même émancipé, ou d'un interdit, ne peuvent être mis en vente avant la discussion du mobilier. (Code civil, art. 2206.)

Cette discussion n'est pas requise avant l'expro. priation des immeubles possédés par indivis entre un majeur et un mineur ou interdit, si la dette leur est commune, ni dans le cas où les poursuites ont été commencées contre un majeur, ou avant l'interdiction. (Ibid., art. 2207.)

S'il y a lieu à la discussion du mobilier, le créancier doit, ou demander au tuteur un compte sommaire de tutelle, pour savoir si son pupille a des ressources mobilières, ou saisir-exécuter les meubles, ou faire dresser un procès-verbal de carénce. Si le mineur est sans tuteur, le créancier doit avant tout lui en faire nommer un.

Le défaut de discussion préalable du mobilier, emporte-t-il nullité des poursuites en expropriation?

La ur d'appel de Gênes a décidé qu'il y a seulement lieu à surseoir à la vente de l'immeuble jusqu'après la discussion. Voici les motifs de son arrêt, qui est du 23 juillet 1812:

« Considérant que la mise en vente des immeubles est quelque chose de bien différent des actes tendant à préparer la mise en vente; qu'ainsi la défense de mettre en vente n'entraîne pas la défense de faire les actes qui tendent à cette opération; en effet, l'art. 2205 du Code civil, qui défend aux créanciers personnels de mettre en vente la part indivise d'un cohéritier dans les immeubles d'une succession avant le partage ou la licitation, les autorise, expressément à provoquer le partage ou la licitation; acte qu'on ne peut regarder que comme préparatoire à la mise en vente; Considérant que les règles de bonne interprétation ne permettent de donner

-

aucune extension aux lois prohibitives, et que ce serait violer ces lois que d'étendre la défense de mettre en vente au commandement, à la saisie et aux autres actes qui précèdent la mise en vente; considérant qu'on s'efforcerait en vain d'argumenter le contraire de la combinaison des différents articles du liv. 11, tit. xIx du Code civil, et singulièrement de celle des articles 2207 et 2215 avec l'article 2296, d'abord parce qu'une défense, et surtout une défense qui entraîne nullité, doit être clairement exprimée; en second lieu, parce qu'il n'y a aucune raison pour qu'on doive plutôt interprêter l'art. 2206 par l'art. 2207, que l'article précédent, l'un d'eux contenant la règle générale, et l'autre la modification de cette même règle; considérant que tandis que, d'un côté, l'intérêt bien entendu du mineur est mis à couvert, d'après l'intention formelle de la loi, toute fois que, même après la saisie des immeubles, mais avant de les mettre en vente, on procède à la discussion du mobilier, il est juste, d'autre côté, que le créancier d'un mineur qui a des raisons fondées de craindre que le mobilier de son débiteur ne suffira pas pour le satisfaire, puisse, en attendant, s'assurer le paiement de sa créance par le moyen de la saisie des immeubles, sauf à ne les mettre en vente qu'après la discussion du mobilier. »

Il y avait, dans le projet du Code civil, un article duquel il résultait que l'adjudication serait annulée, s'il était prouvé que lors des affiches, le mineur dont le mobilier avait dû être discuté, possédait des deniers suffisans pour acquitter la dette. Sur la demande du Tribunat, cet article fut retranché comme dangereux, en ce que, si les acquéreurs se voyaient exposés à la nullité, ils acheteraient à un plus bas prix. Ainsi, l'adjudication serait valable; mais le mineur aurait son recours contre le préposé à la défense de ses droits, et, suivant les circonstances, contre le créancier qui aurait poursuivi l'expropriation.

C'est sur le même principe qu'un arrêt de la cour de cassation, section civile, du 13 avril 1812, au rapport de M. Pajon, a décidé que la nécessité de discuter les meubles d'un mineur, avant de faire vendre ses immeubles, est une exception qu'on ne peut proposer en appel, qu'autant qu'elle a été opposée avant l'adjudication. (Sirey, 1812, page 276.)

Si par l'effet de la discussion du mobilier, le créancier trouve des deniers pour se remplir d'une partie de sa créance, est-il tenu de recevoir cette partie avant de passer à l'expropriation?

La négative résulte de l'art. 1244 du Code civil, suivant lequel le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement d'une dette, même divisible.

VI. Le créancier ne peut poursuivre la vente des immeubles qui ne lui sont pas hypothéqués,

que dans le cas d'inffisance des biens qui lui sont hypothéqués. (Code civil, art. 2209.)

Si le débiteur prétend que les biens hypothéqués sont suffisants, c'est à lui d'en fournir la preuve, comme l'a jugé un arrêt de la cour de cassation, section des requêtes, du 7 octobre 1807, au rapport de M. Lachèze. (Sirey, 1808, p. 81.) Si les biens hypothéqués au créancier et les biens non hypothéqués, ou les biens situés dans plusieurs arrondissements, font partie d'une seule et même exploitation, la vente des uns et des autres est poursuivie ensemble, si le débiteur le requiert; et ventilation se fait du prix de l'adjudication, s'il y a lieu. (Code civil, art. 2211.)

La vente forcée des biens situés dans différents arrondissements ne peut être provoquée que successivement, à moins qu'ils ne fassent partie d'une seule et même exploitation. (Ibid., article 2210.)

Cependant, si la valeur totale desdits biens est inférieure au montant réuni des sommes dues, tant au poursuivant qu'aux autres créanciers inscrits, la vente peut en être faite sinultanément, Dans ce cas, la valeur des biens s'établit d'après les derniers baux authentiques, sur le pied du denier vingt-cinq; et à défaut de baux authentiques, elle se calcule d'après le rôle de la contribution foncière sur le pied du denier trente. (Art. 1 et 2 de la loi du 14 novembre 1808.)

Le créancier qui veut ainsi vendre en même temps les biens situés dans plusieurs arrondissements, doit présenter requête au président du tribunal de l'arrondissement où le débiteur a son domicile, et y joindre, 1o copie, en forme, des baux authentiques, ou, à leur défaut, copie, également en forme, du rôle de la contribution foncière; 2° l'extrait des inscriptions prises sur le débiteur dans les divers arrondissements où les biens sont situés, ou le certificat qu'il n'en existe aucune. La requête est communiquée au ministère public et répondue d'une ordonnance portant permis de faire faire la saisie de tous les biens situés dans les arrondissements et départements y désignés. (Ibid., art. 3.)

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