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3o Si le dépôt a été fait uniquement dans l'in- | si la perte n'arrive qu'après la vente du meuble, térêt du dépositaire; ou lorsque le dépositaire a employé la somme dé

4° S'il a été convenu expressément que le déposée, parce qu'alors le dépôt s'est converti en positaire répondrait de toute espèce de faute. prêt de consommation, par la nature duquel la propriété est transférée à l'emprunteur.

« Il est certain que tous ces cas, disais-je au Corps législatif, au nom du Tribunat, changent la position du dépositaire.

La perte est donc pour son compte. (Code civ.,' art. 1893.)

S'il a offert de recevoir le dépôt, il a pu être cause que le déposant ne s'est pas adressé à d'autres qui auraient apporté tous les soins convenables pour la conservation de la chose déposée; il doit donc prendre plus de précautions que le dépositaire qui n'a fait que céder au vœu du dépoques de la révolution, comme le prouvent les lois sant. Aussi la loi romaine exigeait-elle, dans ce cas, des soins plus qu'ordinaires.

«Si quis deposito obtulit (dit la loi 1, § 35 ff. depositi), idem Julianus scribit periculo se depositi illigasse; ita tamen non solum dolum sed etiam culpam et custodiam præstet, non tamen casus for

tuitos.

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Si le dépositaire reçoit un salaire, ou si le dépôt n'a été fait que dans son intérêt, il est juste que dans ces deux cas sa garantie ait plus d'extension; il n'est plus un simple dépositaire, il devient une espèce de préposé à gage ou un débiteur soumis à d'autres engagements.

« Il en est de même si le dépositaire s'est obligé de répondre de toute espèce de faute; s'il a pris sur lui tous les événements, il doit les supporter. C'est une convention qui forme la loi des parties et qui doit être exécutée. »

Quelle que soit cependant la nature des clauses, le dépositaire n'est tenu, en aucun cas, des accidents de force majeure, à moins qu'il n'ait été mis en demeure de restituer la chose déposée (Code civ. art. 1929). Encore le dépositaire n'est-il tenu d'indemniser celui à qui il la devait rendre, que dans la cas où il n'eût pas souffert cette perte si la chose lui eût été rendue, lorsqu'il l'a demandée. (Pothier, Traité du dépôt, no 33.)

On a prétendu que si le dépôt est fait pour l'intérêt du dépositaire, comme lorsqu'on lui confie un meuble pour le vendre et en garder le prix à titre de prêt, ou qu'on lui remet une somme d'argent à condition que s'il fait une acquisition il s'en servira, et qu'il arrive que ce qui est ainsi confié périsse avant l'emploi, le dépositaire est tenu de la perte quand même elle serait arrivée par cas fortuit, parce qu'il ne s'était rendu dépositaire que pour vendre ou employer à son profit la chose déposée, ce qui change la nature et l'effet du dépôt.

Mais c'est évidemment confondre deux contrats qui ont des effets différents.

Tant que le meuble n'a pas été vendu, ou que la somme déposée n'a pas été employée par le dépositaire, le déposant en conserve la propriété. C'est donc pour son compte qu'arrive la perte par cas fortuit: res perit domino.

Il est clair que la décision doit être différente,

VII. Le dépositaire est tenu de rendre identiquement la chose même qu'il a reçue (Code civ.art. 1932.) Cette disposition n'est pas nouvelle; elle ne fait que rappeler un principe reconnu de tout temps et qui a même été respecté à toutes les épodes 24 septembre 1792, 23 septembre 1793, 15 germinal an 11, 3 fructidor an 111 et 13 germinal an iv, qui ordonnent aux dépositaires de se libérer dans les mêmes espèces qui ont été touchées.

Les receveurs des consignations avaient bien voulu se soustraire à cette obligation; ils prétendaient qu'ils pouvaient rembourser en assignats des sommes déposées en espèces métalliques ; ils excipaient d'un arrêt du conseil du 10 mars 1625, qui les autorisait à négocier les fonds dont ils étaient dépositaires d'où ils tiraient la conséquence qu'ils étaient autorisés à se libérer de la même manière qu'on leur avait remboursé les sommes qu'ils avaient prêtées.

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Mais une loi du 30 pluviose an v, a fait cesser cette prétention, en ordonnant que les sommes versées dans les caisses de consignations devaient être restituées en mêmes espèces qu'elles avaient été reçues.

Aussi l'art. 1932, qui s'applique au dépôt judiciaire comme au dépôt volontaire, dit-il que le dépôt des sommes monnoyées doit être rendu dans les mêmes espèces qu'il a été fait, soit dans le cas d'augmentation, soit dans le cas de diminution de leur valeur.

La précision de cet article prévoit tous les cas et ne laisse aucun espoir à la mauvaise foi du dépositaire.

Si la loi est justement sévère, à l'égard des dépositaires infidèles, elle protège aussi autant qu'il est en elle ceux qui ont rempli leur mission avec fidélité; ils ne doivent rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution; les détériorations qui ne sont pas de leur fait, sont à la charge du déposant. (Code civ., art. 1933.)

Et si la chose déposée leur a été enlevée par force majeure, et qu'ils aient reçu un prix ou quelque chose à la place, ils ne sont tenus que de restituer ce qu'ils ont reçu en échange. (Ibid., art. 1934.)

Lorsque l'héritier du dépositaire a vendu de bonne foi la chose dont il ignorait le dépôt, il n'est tenu que de rendre le prix qu'il a reçu, on de céder son action contre l'acheteur, s'il n'a pas touché le prix. (Ibid., art. 1935.)

Si la chose déposée a produit des fruits qui

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aient été perçus par le dépositaire, il est obligé de les restituer; mais il ne doit aucun intérêt de l'argent déposé, si ce n'est du jour où il a été mis en demeure de faire la restitution (ibid., article 1936). Ce n'est aussi que dans le cas où il aurait été mis en demeure, qu'il doit les fruits qu'il aurait pu percevoir, et qu'il n'a pas perçus. VIII. Le dépositaire ne doit restituer la chose déposée qu'à celui qui la lui a confiée, ou à celui au nom duquel le dépôt a été fait, ou à celui qui a été indiqué pour le recevoir. ( Code civ., art. 1937.)

Si donc le dépôt a été fait dans l'intérêt de tierces personnes, il ne peut être rendu au déposant en l'absence des tiers intéressés. C'est aussi ce que la cour de cassation a décidé par arrêt

du 26 août 1813.

Le dépositaire ne peut pas exiger de celui qui a fait le dépôt, la preuve qu'il était propriétaire de la chose déposée.

par les héritiers du déposant comme chose à eux appartenant, si à l'époque du décès de ce dernier, le dépôt n'a pas été livré à la personne désignée? La cour de cassation a décidé l'affirmative par un arrêt du 22 novembre 1819, rapporté à l'article Don manuel, no 111.

S'il y a plusieurs héritiers, la chose déposée doit être rendue à chacun d'eux, pour leur part et portion.

Si la chose déposée est indivisible, les héritiers doivent s'accorder entre eux pour la recevoir. (16.) Si le dépositaire devient insolvable après que l'un des cohéritiers a retiré sa portion, celui-ci n'est soumis à aucune répétition de la part des autres cohéritiers, parce que la diligence de celui qui a reçu, ne doit profiter qu'à lui; et que les autres doivent supporter l'insolvabilité du dépositaire, ou comme un effet de leur négligence, ou comme un cas fortuit qui ne peut tomber que

sur eux.

Néanmoins s'il découvre que la chose a été Lorsque la personne qui a fait le dépôt a volée et quel en est le véritable propriétaire, il changé d'état; par exemple, si la femme, libre doit dénoncer à celui-ci le dépôt qui lui a été au moment où le dépôt a été fait, s'est mariée fait, avec sommation de le réclamer dans un délai depuis et se trouve en puissance de mari; si le déterminé et suffisant. Si celui auquel la dénon-majeur déposant se trouve frappé d'interdiction; ciation a été faite, néglige de réclamer le dépôt, le dépositaire est valablement déchargé par la tradition qu'il en fait à celui duquel il l'a reçu. (Ibid., art. 1938.)

On voit que cet article prescrit au dépositaire de faire au propriétaire une sommation de retirer l'objet déposé dans un délai suffisant, et qu'il ne fixe pas ce délai, parce que dépendant de l'éloignement de la personne et de la nature de l'objet déposé, il est sensible qu'il doit varier suivant les circonstances. Si dans ce délai, le véritable propriétaire ne réclame pas, le dépositaire se libère valablement en rendant la chose au déposant; il a fait alors tout ce que sa position exigeait, tant pour l'intérêt du propriétaire que pour celui de la justice.

L'art. 1938 enjoignant au véritable propriétaire de réclamer l'objet déposé, il en résulte que le dépositaire n'est pas obligé de la lui rendre, jusqu'à ce qu'il n'ait fait ordonner qu'il lui serait restitué par un jugement rendu avec celui qui a fait le dépôt, lequel doit être mis en cause par le dépositaire, à moins toutefois que les parties ne s'accordent amiablement. Sans cela, le dépositaire ne serait pas déchargé à l'égard du déposant. En cas de mort naturelle ou civile de la personne qui a fait le dépôt, la chose déposée ne peut être rendue qu'à son héritier (ibid., article 1939); d'où la conséquence que si le déposant meurt avant l'époque fixée pour en faire la restitution à une personne par lui indiquée, c'est à l'héritier qu'elle doit être rendue, et non à la personne indiquée.

Le dépôt fait entre les mains d'une personne pour être remis à un tiers, peut-il être réclamé

dans tous ces cas et autres de même nature, le dépôt ne peut être restitué qu'à celui qui a l'administration des droits et des biens du déposant. (Ibid., art. 1940.)

Si le dépôt a été fait par un tuteur, par un mari ou par un administrateur, dans l'une de ces qualités, il ne peut être restitué qu'à la personne que ce tuteur, ce mari ou cet administrateur représentaient, si leur gestion ou leur administration est finie. (Ibid., art. 1941.)

IX. Si le contrat de dépôt désigne le lieu dans lequel la restitution doit être faite, le dépositaire est tenu d'y porter la chose déposée. S'il y a des frais de transport, ils sont à la charge du déposant. (Ibid., art. 1942.)

Cet article est conforme au principe d'équité, officium suum nemini debet esse damnosum. Le dépôt étant en effet essentiellement gratuit, et tout entier dans l'intérêt du déposant, l'équité ne permet pas que le dépositaire supporte aucuns frais.

Par suite du même principe, si le dépôt a été fait dans le lieu où l'on est convenu que s'en ferait la restitution, et que le dépositaire ait eu quelque juste sujet de le transporter ailleurs, ce sera aux frais du déposant, qu'on l'en fera revenir. (Pothier, du Dépôt, no 56.)

Si le contrat ne désigne point le lieu de la restitution, elle doit être faite dans le lieu même du dépôt. (Code civ., art. 1943. )

Le dépôt doit être restitué aussitôt qu'il est réclamé. Il n'y a point à cet égard de stipulation de délai qui puisse s'opposer à la remise; le dépositaire qui doit toujours être prêt à rendre le dépôt, peut y être contraint, si d'ailleurs il

n'existe pas entre ses mains une saisie ou une opposition qui empêche la restitution et le déplacement de la chose déposée (ibid., art. 1943). Il est bien évident que c'est par le dépositaire que le dépôt doit être restitué; mais si plusieurs personnes à la fois sont constituées dépositaires du même objet, qu'elle sera pour chacune d'elles l'étendue de l'obligation de restituer?

On peut dire, en général, que chacune d'elles est obligée de rendre le tout, car ce n'est pas rendre le dépôt que de ne le rendre qu'en partie. Cependant, il semble qu'il n'y a point de solidarité entre elles, si elle n'a pas été exprimée. (Ibid., arg. de l'art. 1995.)

Mais toutes les obligations du dépositaire cessent, s'il vient à découvrir et à prouver qu'il est lui-même propriétaire de la chose déposée. (Ibid., art. 1946.)

XI. Le dépositaire ne peut opposer la compensation (Code civ., art. 1293.). Voy. Com

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Comme le dépositaire ne possède pas pour lui, mais pour le propriétaire, il est clair qu'il ne peut pas prescrire, à moins que le titre de sa possession ne se trouve interverti, soit par une cause venant d'un tiers, soit par la contradiction qu'il a opposée au droit du propriétaire. (Ibid., art. 2238.)

à la restitution du double de la valeur de la chose déposée. (Loi 1, § 1, ff. Depositi.)

Le motif de cette distinction entre le dépôt volontaire et le dépôt nécessaire était très-juste et très-politique. Celui qui a fait choix de son dépositaire, ne peut s'en prendre qu'à lui-même s'il a été trompé; il a suivi la foi de la personne dans laquelle il a placé sa confiance; il ne peut dès lors exiger que la restitution du dépôt, ou sa valeur, s'il n'existe plus.

« Mais celui qu'une circonstance malheureuse a forcé de se confier à la première personne qui s'est présentée à lui, mérite une protection particulière. L'intérêt de la société exige que le dépositaire nécessaire, qui est assez vil pour méconnaître les devoirs les plus sacrés, soit traité plus sévèrement que le dépositaire volontaire.

Nos lois françaises n'avaient point admis cette peine double de la valeur du dépôt, prononcée par la loi romaine; mais elles l'avaient remplacée par d'autres dispositions qui faisaient également ressortir toute la faveur du dépôt nécessaire. L'Ordonnance de 1667, art. 3 du tit. xx, et art. 4 du tit. XXIII, autorisait la preuve par temoins pour cette espèce de dépôt, quoiqu'elle l'eût rejetée pour le dépôt volontaire, lorsque la chose déposée était au-dessus de cent francs. L'article 1950 du Code a adopté ce du Code a adopté ce principe de l'ordonnance; il est ainsi conçu : « La preuve par témoins peut être reçue pour le dépôt nécessaire, même quand il s'agit d'une valeur au-dessus de 150 francs. »

L'ordonnance admettait aussi la contrainte par Corps contre le dépositaire nécessaire, et le Code civil, au titre de la contrainte par corps, a aussi consacré cette seconde disposition. (Ibid., article 2060.)

XII. Les obligations de la personne qui a fait le dépôt se réduisent à rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la conservation de la chose déposée, et à l'indemniser de toutes les pertes que le dépôt peut lui avoir occasionnées Code civ., art. 1947). Celui-ci a même un pri-férence dans la manière de poursuivre la vioIl est juste en effet, de conserver cette difvilége pour le remboursement de ses frais, puis-lation du dépôt nécessaire. N'est-il pas évident que l'art. 1948 l'autorise à retenir le dépôt, quasi quodam jure pignoris, jusqu'à l'entier paiement de ce qui lui est dû.

On a vu comment se forme le dépôt volontaire et quelles obligations il impose au déposant et au dépositaire. Nous allons examiner maintenant comment se forme le dépôt nécessaire et quelles obligations en sont la suite.

§ II.

Du dépôt nécessaire.

I. Le dépôt nécessaire est celui qui a été forcé par quelque accident, tel qu'un incendie, une ruine, un pillage, un naufrage ou autre événement imprévu. (Code civil, art. 1949.)

Cette définition est puisée dans les lois romaines.

Ces lois, disais-je aussi au Corps législatif, avaient porté la sévérité jusqu'à punir la violation de ce dépôt, jusqu'à condamner le dépositaire infidèle

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que lorsqu'un incendie, un pillage, un naufrage, ou tout autre événement imprévu, oblige le malheureux qui éprouve l'un de ces accidents, de sauver à la hâte une partie de ses biens, il n'a ni le temps ni le soin de faire rédiger un acte de dépôt ?

Il est donc conforme aux lois de l'humanité, qu'on ne lui refuse pas d'établir par une preuve supplétive le dépôt que ces événements ont rendu nécessaire. Il est d'ailleurs difficile de croire que l'homme qui a été secouru dans le malheur, porte l'oubli du bienfait jusqu'à exiger de son bienfaiteur plus qu'il ne lui a confié; il est malheureusement plus dans le cœur de l'homme avide de profiter du désastre de son semblable pour grossir sa fortune. »

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Au surplus, le dépôt nécessaire est régi par toutes les règles énoncées précédemment (Code civil, art. 1951). La seule différence consiste, comme nous venons de le voir, dans le moyen d'en faire la preuve, et dans la contrainte par

corps qui peut être exercée contre le dépositaire

nécessaire.

par témoins peut être reçue, même quand il s'agit d'une valeur au-dessus de 150 fr. Mais il faut observer que l'admissibilité de cette preuve est facultative : l'ordonnance de 1667 en avait une disposition formelle ; elle déclarerait n'entendre empêcher que la preuve par témoins ne puisse être admise suivant la qualité des personnes et les circonstances du fait.»

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II. Les dépôts dont nous venons de parler, ne sont pas les seuls qui soient rangés dans la classe des dépôts nécessaires; on y comprend encore les dépôts faits par les voyageurs dans les hôtelleries où ils vont descendre; cette exception qui était textuellement exprimée dans l'ordonnance de 1667, l'est aussi par le Code civil; elle est L'article 1348 du Code civil, en dispensant de fondée sur l'impossibilité morale de constater par la preuve par écrit les dépôts nécessaires, ajoute écrit les dépôts qui se font à chaque instant par également, le tout suivant la qualité des perles voyageurs dans les hôtelleries; il faut cepen- sonnes et les circonstances du fait. » Ainsi le Code dant que la plus grande sécurité les y accompagne, civil ne fait que maintenir une disposition admise et qu'ils la conservent par la certitude que la loi par nos anciennes lois. La faculté laissée aux leur donne que leurs effets ne seront pas impuné-juges d'ordonner ou de rejeter, suivant les cirment divertis, soit par l'aubergiste, soit par les constances, la preuve offerte par le déposant, domestiques qu'il emploie, soit par les étrangers fait que ses intérêts et ceux du dépositaire ne qui vont et viennent dans l'hôtellerie; aussi le pourront jamais être compromis. Voyez Preuve, Code civil a-t-il prévu ces différents cas dans les § 1, n° xxvII. deux articles suivants :

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Art. 1952. « Les aubergistes et hôteliers sont responsables comme dépositaires des effets apportés par le voyageur qui loge chez eux; le dépôt de ces sortes d'effets doit être regardé comme un dépôt nécessaire. »

V. Les baigneurs publics sont-ils, comme les aubergistes et les hôteliers, dépositaires nécessaires des effets apportés chez eux par les personnes qui vont s'y baigner?

des bains?

Les dispositions des articles 1952 et 1953 du Code civil, sont-elles applicables aux effets ouArt. 1953. Ils sont responsables du vol oubliés chez eux par les personnes qui y ont pris du dommage des effets du voyageur, soit que le vol ait été fait ou que le dommage ait été causé par les domestiques et préposés de l'hôtellerie, ou par des étrangers allant et venant dans l'hôtellerie. »

« Cette responsabilité, disais-je encore, qui paraît rigoureuse, est peut-être la base la plus solide de la prospérité des aubergistes; c'est la confiance qu'ils inspirent, ou la bonne foi et la surveillance à laquelle la loi les oblige, qui rend les voyages plus faciles, plus multipliés, et qui appelle les voyageurs chez eux. »

S'il était juste d'établir cette responsabilité contre les aubergistes, ils ne pouvaient du moins être rendus responsables des événements de force majeure; aussi l'article 1954 porte-t-il qu'ils ne sont pas responsables des vols faits avec force armée ou autre force majeure.

III. Les voituriers par terre et par eau sont assujétis, pour la garde et la conservation des choses qui leur sont confiées, aux mêmes obligations que les aubergistes ou dépositaires nécessaires (Code civil, art. 1782); ainsi la preuve des obligations des voituriers peut s'établir par témoins pour une valeur au-dessus de 150 fr., sans commencement de preuve par écrit. Ils répondent non-seulement de ce qu'ils ont déja reçu dans leur bâtiment ou voiture, mais encore de ce qui leur a été remis sur le port ou dans l'entrepôt pour être placé dans leur bâtiment ou voiture. (Ibid., art. 1783.)

Le fait de l'oubli de ces effets peut-il être établi · par des présomptions abandonnées à la prudence du magistrat, encore bien que la valeur excède

150 fr. ?

Ces principes sont-ils communs aux caffetiers, limonadiers traiteurs, etc.?

Le 28 juillet 1812, M. F., conseiller à la cour de....., se rend dans la maison de la veuve Ayma, baigneuse, à Cahors, pour y prendre un bain.

En se mettant dans la baignoire, il dépose sur une table placée à côté, son mouchoir et sa montre.

La veuve Ayma survient un instant après, prend la montre et la suspend à un crochet qui

est au fond de la chambre.

M. F., ne trouvant sur la table, à sa sortie du bain, que son mouchoir, ne pense point à sa montre, et se retire après avoir payé la veuve Ayma.

sa montre, et il envoie son domestique pour Rentré chez son père, il s'aperçoit qu'il a oublié

réclamer.

la

domestique, avant de lui parler; enfin, elle paLa veuve Ayma fait attendre quelque temps le la chambre du bain, elle doit y être encore; elle raît, lui dit que, si la montre a été oubliée dans tique, et revient en déclarant que la montre ne ouvre cette chambre, y entre sans le domess'y trouve pas.

De là s'ensuivent, entre M. F. et la veuve Ayma, quelques pourparlers; et M. F. finit par IV. Nous avons vu que pour les dépôts néces-assigner la veuve Ayma devant le tribunal civil de saires et les cas qui leur sont assimilés, la preuve | Cahors, pour se voir condamner à lui restituer

sa montre, sinon, à lui en payer la valeur qu'il fixe à 600 fr., d'après la description qu'il en fait. Le 19 août, jugement par défaut qui prononce conformément à ses conclusions.

La veuve Ayma y forme opposition. Le 14 septembre 1812, jugement contradictoire par lequel,

«Attendu que les dispositions des articles 1952 et 1953 du Code civil ne sont point limitatives, mais démonstratives de quelques espèces de dépôts nécessaires; et que ces deux articles n'embrassent pas généralement tous les dépôts nécessaires qui peuvent exister.

« Attendu qu'un entrepreneur de bains publics qui tient une maison ouverte au public pour les bains, doit être assimilé aux aubergistes et aux hôteliers, et devient conséquemment responsable de tous les vols et de toutes les pertes qu'éprouvent, dans sa maison, les personnes qui y viennent prendre des bains;

« Attendu, dans le fait, qu'il est convenu que le sieur F., fils, étant allé prendre un bain, le 28 juillet dernier, chez la veuve Ayma, plaça sa montre sur une table; que la veuve Ayma prit cette montre, et la suspendit à un crochet; que le sieur F. laissa, en se retirant, sa montre chez la veuve Ayma; et que cette montre ne s'est plus retrouvée ;

que

« Attendu qu'il n'est pas vraisemblable que la montre se soit perdue par le sieur F., depuis la maison de la veuve Ayma jusqu'à la sienne, dans Cahors, parce que le sieur F. aurait entendu le bruit qu'aurait occasionné la chûte de la montre, et s'en serait aperçu; Attendu dès que, les parties sont d'accord sur le fait principal que la montre a été placée par le Sienr F. sur une table, et ensuite suspendue par la veuve Ayma elle-même à un crochet, le sieur F. doit en être cru sur les faits accessoires; «Attendu enfin qu'on n'impute nullement à la veuve Ayma d'avoir volé la montre, mais qu'on lui impute la perte de la montre dans sa propre maison; et qu'elle en est civilement responsable;

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« Le tribunal, jugeant en dernier ressort, sans avoir égard à l'opposition......, ordonne que son jugement du 19 août dernier sera exécuté selon sa forme et teneur.....

Recours en cassation contre ce jugement, de la part de la veuve Ayma.

M. Merlin portant la parole sur cette affaire, s'est exprimé en ces termes :

« Le moyen de cassation qui vous est proposé par la demanderesse, présente à votre examen trois questions les dispositions des art. 1952 et 1953 du Code civil, concernant les aubergistes et les hôteliers, sont-elles communes aux baigneurs publics? 2o en supposant l'affirmative, ces dispositions sont-elles applicables aux effets oubliés chez les baigneurs publics par les personnes qui y ont pris des bains? 3° dans l'espèce particulière,

le tribunal civil de Cahors a-t-il pu tenir tenir pour constant le fait que M. F. avait oublié sa montre chez la veuve Ayma?

« Sur la première question, il est un principe universellement reconnu : c'est que, dans l'interprétation des lois, on doit s'attacher moins à leur lettre qu'à leur esprit, et que, par suite, les objets dont elles ne se sont pas expressément occupées, doivent être réglés par celles de leurs dispositions qui s'y adaptent par une identité parfaite de raison: semper hoc legibus inesse credi opportet, ut ad eas quoque personas et ad eas res pertinerent, quæ quan doque similes erunt. Ce sont les termes de la loi 27, D. de legibus.

Or, les motifs qui ont porté le Code civil à déclarer les aubergistes et hôteliers dépositaires nécessaires, et par conséquent responsables des effets apportés chez eux par les voyageurs, ne reçoiventils pas une application directe et entière aux baigneurs publics?

« Ces motifs sont que la confiance des voyageurs dans les hôteliers et aubergistes,est commandée par la nature même des choses; et qu'il n'est pas possible de constater par écrit l'apport que les voyageurs font de leurs effets dans les auberges et hôtelleries.

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Eh bien! Les personnes qui vont se baigner dans les bains publics, sont également forcées, par la nature même des choses, d'avoir, pour la sûreté de leurs effets, pleine confiance dans les baigneurs, et il leur est également impossible de se faire donner, en entrant dans les bains, des déclarations par écrit qui renseignent les effets dont ils sont porteurs.

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Il n'y a donc point, quant à la responsabilité des effets apportés chez eux, de différence entre les baigneurs publics et les aubergistes ou hôteteliers. Les art. 1952 et 1953 du Čode civil sont donc applicables aux premiers comme aux seconds.

« Et dans le fait, qu'est-ce qu'un bain public, si ce n'est une sorte d'hôtellerie dans laquelle le public est admis à se baigner, moyennant une rétribution pécuniaire?

« Mais, s'écrie la demanderesse, il faudrait donc aussi appliquer les art. 1952 et 1953 du Code civil aux teneurs de billards et de cafés, aux traiteurs, aux restaurateurs?

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Pourquoi non? Ce serait, dit la demanderesse, une absurdité. C'est pourtant la conséquence nécessaire de plusieurs arrêts de la section criminelle.

«La même confiance que les personnes reçues dans les auberges ou hôtelleries, sont forcées d'avoir dans les aubergistes ou hôteliers, les aubergistes ou hôteliers sont forcés de l'avoir dans les personnes qu'ils reçoivent dans leurs hôtelleries ou auberges; et par cette raison, l'art. 386, no 4, du Code pénal, punit également de la réclusion et le vol que fait l'hôtelier ou aubergiste des effets apportés chez lui par les personnes qu'il reçoit en

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