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Il fut élu, comme nous l'avons dit dans notre second volume, le 9 février, et sacrilègement sacré le 6 mars 1791 (1).

(1) Voici ce que nous lisons dans le Mandement de Mgr Joseph-Marie Paget au clergé et aux fidèles de son diocèse :

a Il est de notoriété publique, que le 9 février et jours suivants, on a procédé à une élection pour remplir ce siége de nouvelle origine.

« Il est de notoriété publique, que le 9 février, le sieur Royer, curé de Chavannes, au diocèse de Saint-Claude, a été proclamé dans une séance de l'Assemblée du département, élu au siége de l'évêché du département de l'Ain.

« Il est de notoriété publique enfin, que le sieur Royer, depuis cette proclamation et son acceptation, a reçu, le 6 mars, la consécration épiscopale. »

CHAPITRE II

Les débuts de la Révolution dans le diocèse de Genève

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Premier symptôme de la Révolution en Savoie. Essai d'émente.
Légion des Allobroges à Grenoble. — Invasion de la Savoie. →
Les commissaires. Assemblée nationale des Allobroges.
Premiers actes révolutionnaires. Spoliation des biens de
l'Eglise. Philibert Simond. - Avis de M. Bigex. Il se rend
à Lausanne. Siège de l'administration. Ses antécédents.
Le serment. Déclaration du Chapitre. M. de Thiollaz et
L'interrogatoire. Leur condamnation. Leur
Mathieu et la marquise de la Rochefoucault.

M. Besson. fuite.

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Les principes révolutionnaires proclamés à Paris n'avaient pas tardé à s'étendre dans la plupart des contrées voisines. Il y avait en Savoie des hommes exaltés par le mot de liberté, qui s'étaient mis en communication avec les principaux meneurs de France, par le moyen des sociétés secrètes.

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On leur donna ce mot d'ordre : « Guerre au trône et à l'autel. Les premiers symptômes du mouvement révolutionnaire se produisirent à Chambéry. Ils éclatèrent dans un essai d'émeute, qui avorta complètement. Bientôt on

apprit qu'à Thonon une soixantaine d'individus, échauffés par le vin, avaient parcouru les rues, en chantant le sinistre refrain: Çà ira, çà ira, les aristocrates à la lanterne!» A leur tête étaient Dessaix, qui devint plus tard général sous la république, Soubiran et Frézier, qui firent sonner le tocsin d'alarme. La population, surprise un moment, ne se laissa cependant pas entraîner dans ce mouvement, qui avait pour but d'acclamer la révolte contre le roi et d'amener l'annexion de la Savoie à la France.

Cette tentative ayant échoué, les meneurs jugèrent prudent de prendre la fuite. Ils traversèrent le lac et se réfugièrent à Nyon, d'où ils gagnèrent le territoire français, où ils furent accueillis, comme des martyrs de la liberté.

Le Sénat les avait condamnés par contumace à la peine de mort; ils furent exécutés en effigie, à Chambéry.

Les porte-drapeaux révolutionnaires n'eurent ni trève ni repos jusqu'à ce qu'ils pûssent obtenir de l'Assemblée nationale l'autorisation d'organiser une légion, dite des Allobroges, afin de préparer une invasion à main armée sur les terres de Savoie. Ils allèrent fixer leur quartier général à Grenoble, où ils virent bientôt accourir une foule de mécontents.

Ils y attendirent des ordres de Paris, qui arrivèrent en effet, et, sans déclaration de guerre aucune, l'Assemblée décréta l'invasion de la Savoie. A l'instant même, les troupes, sous le commandement du général Montesquiou, franchirent la frontière du côté du Dauphiné et arrivèrent, sans coup férir, à Chambéry, le 22 septembre 1792.

Il fallait au moins colorer cette violation inique du droit des gens. Le gouvernement français fit sonner bien haut le mot de représailles et déclara la Savoie terre ennemie, pour avoir proscrit les amis de la liberté, tout en donnant

asile aux émigrés, et refusé de reconnaître Semonville pour ambassadeur de France..

A la suite des armées de la Convention marchaient toujours des commissaires redoutables, qui avaient droit de vie et de mort, et devant lesquels on tremblait, tant était brutale et arbitraire leur administration!

Les premiers, qui arrivèrent à Chambéry, furent DuboisCrancé, Lacombe, Saint-Michel et Gasparin. On leur adjoignit bientôt le représentant Philibert Simond (1), qui, jouant le rôle honteux d'apostat, se fit plus tard nommer vicaire général de l'évêque constitutionnel Panisset.

Pour ménager le sentiment national, fortement accentué en Savoie, ces commissaires firent publier, dans toutes les communes, un appel aux citoyens, pour les engager à se donner eux-mêmes, par le moyen de leurs députés, un gouvernement de leur choix.

Les clubs se mirent partout à l'œuvre et envoyèrent dans toutes les paroisses des émissaires, pour y préparer des élections favorables aux idées révolutionnaires. Elles se firent en effet dans ce sens le 14, le 15 et le 16 octobre; et le 23, les représentants des communes furent convoqués à Chambéry dans la cathédrale, pour y prêter le serment de fidélité à la nation, et jurer de maintenir la liberté et l'égalité ou de mourir en les défendant ».

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Cette assemblée s'intitula Assemblée nationale des Allobroges. C'était assez dire qu'elle allait marcher sur les traces des fougueux révolutionnaires de Paris, qui avaient organisé les massacres des Carmes et de SaintFirmin.

Cinq jours après, les biens du clergé furent confisqués, et l'on fit main basse sur les sacristies, en séquestrant

(1) Philibert Simond était né à Rumilly, en 1755. Ordonné prêtre en 1780, il fut placé comme vicaire au Grand-Bornand, où il se fit interdire pour cause d'immoralité, quatre mois après sa nomination.

les ornements d'églises et les vases sacrés (1). Le tout fut déclaré, ainsi que les biens des émigrés, propriété de la nation.

Sans perdre de temps, des commissaires spéciaux se mirent en campagne pour inventorier tout ce que possédait, comme meubles ou immeubles, chaque communauté religieuse. Ils saisirent tous les titres des cures, des séminaires, des chapitres et des évêchés.

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Ce fut, dit Mgr Billet, une capture de vingt à trente millions au moins. A Annecy, la prise en argenterie et vases sacrés du même métal fut de 1,910 marcs, 2 onces, 3 quarts (2).

Au 29 octobre 1792, la Savoie n'avait pas encore été déclarée terre française. Quatre députés en partirent pour Paris, afin d'y soumettre ce vœu à la Convention nationale.

Il fut ratifié le 27 novembre, jour où l'on proclama la réunion de l'antique duché de Savoie à la République française, pour former le quatre-vingt-quatrième département, sous la désignation du Mont-Blanc.

Mgr Conseil, évêque de Chambéry, espérait peut-être empêcher par des égards les chefs révolutionnaires de se jeter dans la voie de la persécution. Il alla, dans ce but, jusqu'à offrir ses services à la municipalité, pour une messe d'actions de grâces, accompagnée d'un Te Deum.

On lui fit bon accueil; le Te Deum fut chanté à la cathédrale, mais la Révolution ne changea rien dans sa marche et dans ses plans.

Bien loin de là; malgré toutes les protestations de respect pour la religion et en dépit des prétendues garanties en faveur de la liberté des cultes, la persécution devint

(1) Le 28 octobre 1792.

(2) Archives de la ville d'Annecy. Voyez Pièces justificatives, n° II.

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