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que les colonies espagnoles sont dans la pleine jouissance de leur indépendance, délibère si le moment n'est pas venu pour elles d'être élevées', dans leurs relations avec les Etats-Unis, au rang des nations indépendantes. L'Espagne jette les hauts cris et proteste d'avance contre une décision «< qui ne pourrait dans aucune conjoncture ni aucun temps diminuer ou annuler ses droits sur des provinces rebelles (1). » Le gouvernement américain suit la maxime : Qu'il n'appartient pas aux nations étrangères d'examiner quelle est l'autorité légitime d'un pays, mais seuIement de traiter avec le pouvoir existant, et que, pour qu'une nation ait le droit de prendre rang comme puissance souveraine dons la société politique, il suffit qu'elle se gouverne par ses propres autorités et ses lois (2). » Les Etats-Unis reconnaissent donc l'indépendance du gouvernement de la Colombie, de Buenos-Ayres, du Chili, du Mexique et du Pérou (28 avril 1822); mais en se proposant d'observer, comme devant, la plus religieuse neutralité entre les deux parties belligérantes.

(r) Note remise au secrétaire d'Etat J. Quincy Adams, par le ministre d'Espagne, à Washington. Annuaire de Lesur, pour

1822, p. 590.

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(2) Texte du rapport fait par le comité des affaires étrangères à

la Chambre des représentans des Etats-Unis.

Id., p. 592.

Augustin Iturbide, qui s'était fait nommer président de la régence du Mexique, se lasse d'une autorité qui n'est pas aussi souveraine qu'elle pourrait l'être ; et il sent le besoin d'être gêné le moins possible par les lois. Le gouvernement espagnol vient de déclarer invalide le traité par lequel le général O'donoju, chargé de lui tenir tête, avait reconnu l'indépendance de l'empire mexicain (4); et Iturbide, s'emparant de cette conjoncture, se fait proclamer empereur du Mexique (18 mai 1822), en apparence par les membres du Congrès qui l'élisent; mais en effet par ses soldats, qui violentent les suffrages de l'assemblée.

Le parlement britannique commence les travaux d'une importante session par l'examen des souffrances de l'agriculture. Il modifie le bill adopté en 1815, pour régler la législation des grains (2); et il maintient que le blé étranger pourra paraître sur les marchés nationaux lorsque le prix du quarter aura atteint 80 shillings (mai 4822); mais en même temps, il assujettit l'importation de ces denrées à des droits gradués, de manière à assurer la préférence et une vente avantageuse aux grains britanniques.

(1) Voyez plus haut.
(2) Voyez t. 1, p. 273.

Cette puissance, maîtresse dans la sage politique aussi bien que dans l'art de naviguer sur toutes les mers, ose abandonner le système des restrictions commerciales, qui a fait pendant trois siècles sa fortune et sa grandeur. Les lois auxquelles le ministère propose au Parlement d'apporter de considérables corrections, promulguées en partie du temps de Charles II, par une jalousie contre le commerce et la navigation hollandaise, ne permettaient aux marchandises étrangères d'aborder aux ports de l'Angleterre que sur des vaisseaux britanniques ou appartenant à la nation qui les avait produites: de sorte que les Hollandais, qui étaient alors les commissionnaires de l'univers, ne pouvaient faire aucun transport vers cette puissance trop jalouse du crédit de leur marine. Aujourd'hui, le pavillon des Pays-Bas n'annonce plus l'empire du commerce; les matelots de la Grande-Bretagne couvrent les mers; et elle n'a plus rien à faire qu'à changer ces lois qui sont inutiles depuis qu'elles ont réussi à l'élever au faîte de l'opulence et de la gloire. Le débit de ses marchandises sur tous les marchés n'a plus d'autres limites que les moyens de les acheter: «Toute mesure qui tend à accroître le commerce des pays étrangers scra donc d'un bénéfice assuré pour le sien; et l'accroissement de leurs richesses tournera au profit de

la fortune de la Grande-Bretagne (1). » Aussi s'est-elle empressée de proclamer à la face des nations qui commencent à agir de représailles prohibitives contre elle, l'avantage de la liberté réciproque, dans les communications et les échanges. Déjà plus de trois cents actes avaient successivement relâché la rigueur de son ancienne législation commerciale (2); et il ne s'agit plus que de les accorder en y ajoutant le peu d'harmonie qui leur manque, pour achever de fonder sur des maximes de tolérance et de conciliation ce nouveau système de la police des mers. Les deux Chambres sanctionnent enfin (20 juin 1822) les mesures proposées qui, sous le nom de bills de commerce et de navigation, ouvrent indistinctement les ports de l'Angleterre aux productions du monde entier, permettent aux navires étrangers d'y apporter les marchandises de tout autre pays que les leurs, pourvu qu'elles se soient trouvées dans le port d'où ils viennent; accordent une liberté entière de commerce aux colonies de l'Angleterre, et font jouir les Etats d'Amérique, anciens et nouveaux, des droits d'importer les

(1) Disc. de lord Liverpool dans la Chambre des lords.-Séance du 5 ou 6 juin 1822.

(2) Disc. de M. Wallace, dans la Chambre des communes, Annual register, for 1822, p. 229.

séance du 20 mai.

produits de leur sol dans toutes les possessions britanniques (1). Par cette dernière disposition, les colonies espagnoles, insurgées contre la mèrepatrie, participaient aux avantages promis aux pays indépendans. C'était un acheminement à la reconnaissance de leur nouvelle forme de gou

vernement.

- Tandis que la fièvre jaune ravageait celle des provinces de l'Espagne qui avoisine le plus nos frontières, le gouvernement français avait réuni des troupes le long des Pyrénées, afin de marquer pour limites à la contagion les confins de notre territoire. Aujourd'hui, la peste avait disparu, et le cordon sanitaire subsistait encore, non plus contre la fièvre, mais contre la révolution. Ce voisinage de nos troupes excitait les plaintes des constitutionnels et encourageait la révolte des royalistes. La frontière de France avait servi à ceux-ci pour se rassembler en armée et inonder la Catalogne de manifestes (juin 1822), au nom d'un gouvernement provisoire résolu à restaurer Ferdinand VII dans ses premiers droits; et elle servait encore à les dérober, dès que les constitutionnels les pressaient de trop près. Nous tolérions ces mouvemens. On a admiré

(1) Voyez l'Analyse détaillée de ces bills dans le 3° ou 4° numéro du Quaterly-Review de l'année 1822.

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