M. BLUNTSCHLI DOCTEUR EN DROIT, PROFESSEUR ORDINAIRE A L'UNIVERSITÉ D'HEIDELBERG CORRESPONDANT Docteur en droit, Conseiller de la Légation suisse en France PAR M. ÉDOUARD LABOULAYE 35 Éditeurs du Journal des Économistes, de la Collection des principaux Économistes, du Dictionnaire RUE RICHELIEU, 14 - MDCCCLXXIV 36831049 Rafael de Ureña CATEDRÁTICO DE LA UNIVERSIDAD CENTRAL YABOGADO de los lustres Colegios de Madrid VALLADOLID Y GRANADA. PRÉFACE DE LA DEUXIÈME ÉDITION La première édition de cette traduction du classique ouvrage de M. Bluntschli a paru un an avant la déplorable guerre de 1870. L'éminent auteur de la préface de cette première édition, M. Edouard Laboulaye, pouvait se féliciter alors des progrès bienfaisants de l'idée de la paix. « L'idéal politique a changé, disait-il, et tellement changé, que nous ne sommes pas loin d'en finir avec l'antique et funeste admiration de nos pères pour ces fléaux de l'humanité qu'on nomme les conquérants. Napoléon diminue, Washington grandit. Abolir la guerre, ou du moins la civiliser et la réduire, répandre jusqu'aux extrémités de la terre les bénédictions du travail et de la paix, telle est aujourd'hui la grande ambition des peuples: il faudra bien qu'elle gagne les ministres et les rois. » Malheureusement, elle ne les a pas gagnés assez tôt, et nous ne pouvons nous dissimuler que la paix est actuellement plus précaire en Europe qu'elle ne l'était à l'époque où l'illustre auteur de l'Histoire politique des États-Unis se plaisait à constater les progrès des idées, des sentiments et des intérêts sur lesquels elle repose. Depuis cinquante ans, aucune guerre n'a eu à cet égard des conséquences aussi funestes que celle qui a enlevé à la France l'Alsace et la Lorraine; aucune n'a laissé après elle des ressentiments aussi amers et un aussi âcre désir de revanche. C'est là un fait qu'on peut déplorer dans l'intérêt du repos de l'Europe et de la civilisation en général, mais sur lequel on ne peut fermer les yeux. Nous sommes trop près encore des événements pour les juger avec l'impartialité nécessaire ; mais ne nous sera-t-il pas permis de dire qu'en arrachant à la France deux provinces qui voulaient rester françaises, l'Allemagne a abusé du droit de la guerre et justifié des revendications futures? Sans doute, et c'est une remarque juste et profonde de M. Bluntschli : « La cause de la guerre n'en détermine qu'en partie le but, et c'est en cela, ajoute-t-il avec raison, que consiste la différence entre les procès ordinaires et le terrible procès qui s'engage entre les parties belligérantes. Le jugement civil ne peut jamais accorder plus qu'on ne demande, et se contente de rétablir les droits lésés. dans leur intégrité première; les frais du procès ne sont la plupart du temps qu'un accessoire sans importance... Le but de la guerre s'agrandit au contraire par suite des circonstances que la guerre elle-même vient ajouter au but primitif. Il ne s'agit plus d'obtenir ce qu'on réclamait à l'origine ou de faire reconnaître les droits contestés à l'ouverture des hostilités; il ne s'agit même plus d'obtenir des dédommagements pour les pertes qu'on a subies et la réparation des offenses dont on a été l'objet. On veut assurer l'avenir et obtenir des conditions de paix qui correspondent à la position respective faite par la guerre aux parties belligérantes '. » Seulement, 1 Blunstchli. La Guerre, livre VIII, 2 536. |