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A ce cri unanime, à cette invocation de tout un peuple, le cœur de Votre Majesté s'est ému. Votre Majesté aurait pu tout d'abord accueillir ce vœu national, mais des raisons d'Etat firent taire dans. son cœur l'expression de ces nobles sentiments. Votre Majesté voulut auparavant obtenir une assurance absolue que les vœux du peuple dominicain avaient été spontanés, libres, unanimes. L'œuvre d'un parti n'aurait pu être agréable aux yeux de Votre Majesté. L'intrigue et la violence répugnent également à son âme généreuse. L'Espagne est grande et n'a nul besoin d'acquérir de nouveaux territoires pour occuper un rang distingué parmi les premières nations du monde. Mais, si telle était sa pensée, elle ne le ferait jamais en employant des moyens que la morale et la saine politique réprouvent également, parce qu'il n'y a de durable que ce qui est basé sur le droit et sur la justice.

Les actes de proclamation de Votre Majesté sur tout le territoire dominicain, ont prouvé la spontanéité et l'unanimité qui ont présidé au vœu de cette nation. Nulle part ce vœu n'a fait verser une larme, n'a occasionné une seule infortune. Partout la joie et l'enthousiasme s'y sont montrés d'une manière non équivoque et solennelle. Les autorités publiques, obéissant à leurs propres inspirations, ont fait cause commune avec le sentiment de la nation qui avait mis en eux toute sa confiance. Jamais on n'a vu un pareil concours, une semblable unanimité de volontés pour la réalisation d'une idée, d'une pensée

commune.

Et tout ce résultat, Madame, a été obtenu sans qu'un seul navire ait paru sur les côtes de Saint-Domingue; sans qu'un seul soldat espagnol ait mit le pied sur son territoire. Si, dix-huit jours après, le gouvernement de Votre Majesté jugea à propos d'y envoyer des forces de terre et de mer, ce fut pour y protéger le peuple qui avait acclamé Votre Majesté, et après que le général Santana eut pris, en son nom, les rênes du gouvernement, aux applaudissements universels de la nation dominicaine. Tout pouvoir extérieur qui eût mis obstacle à la volonté du peuple dominicain, en exerçant sur lui une pression tyrannique et odieuse, aurait offensé la dignité de l'Espagne, qui n'aurait pu, sans déshonneur, abandonner ce peuple aux projets d'ambitions étrangères. Déjà le pavillon espagnol flottait sous le ciel où l'immortel Colomb l'avait conduit, l'Évangile à la main, et où il avait implanté cette civilisation, la plus glorieuse de toutes celles que l'on connût alors. C'était le devoir des forces maritimes et terrestres de l'Espagne de défendre et de protéger l'indépendance du peuple dominicain, et d'assurer l'intégrité de son territoire. Ces troupes n'ont pas pris possession de ce territoire au nom de Votre Majesté. Un acte semblable, commis sans l'assentiment de son gouvernement, eût entaché le renom dont jouit cette armée sous le rapport de la discipline, du courage et

de la loyauté. Mais si, à cette époque, ces troupes se sont bornées à remplir la mission que leur avait confiée le capitaine général de la Havane, si jusqu'à présent le peuple dominicain est resté calme en attendant la détermination de Votre Majesté, il est temps maintenant de faire cesser toute incertitude et d'assurer l'avenir de ce peuple. Tout retard apporté dans l'adoption d'une mesure jugée nécessaire, pourrait être attribué à la faiblesse ou à la crainte, et tels ne sont pas les sentiments du gouvernement d'un peuple héroïque, lorsqu'il s'agit d'une question dont la décision est subordonnée bien plus à la voix de T'honneur qu'à celle des intérêts matériels.

Repousser les vœux d'un peuple malheureux, l'exposer à devenir la proie d'ambitions étrangères, méconnaître le cri d'union lancé par toute une nation qui a toujours aimé l'Espagne, ce serait abjurer les traditions glorieuses de notre histoire; ce serait, en un mot, démentir notre caractère chevaleresque et loyal.

Non, Madame, il n'est pas possible de repousser le vœu de tout un peuple qui demande à rentrer dans le sein de la mère patrie, dont il a été séparé depuis si longtemps.

Quels que soient les devoirs que la réincorporation de Saint-Domingue à l'Espagne impose à la monarchie, Votre Majesté et son gouvernement, l'Espagne tout entière, sauront les remplir.

En agissant ainsi, on ne heurte aucun intérêt particulier ni international. Saint-Domingue n'était lié par aucun lien, par aucune obligation qui entrave son indépendance et sa libre volonté. Les seules relations que cette île avait conservées étaient celles de sa nationalité primitive, auxquelles elle a rendu un culte inaltérable. Il n'y a donc heureusement aucun changement à apporter dans son état social. Les habitants sont libres. L'esclavage, cette plaie indispensable des autres colonies, n'est aucunement nécessaire à l'exploitation et à la culture de ce territoire fertile, et le gouvernement de Votre Majesté ne saurait songer à jamais l'y rétablir. Les Dominicains, dociles à la voix de l'autorité, accepteront avec joie l'organisation administrative que le gouvernement de Votre Majesté jugera convenable d'établir parmi eux. Tous jouiront également de la protection bienfaisante de Votre Majesté. En face du trône auguste qu'elle occupe si glorieusement, toutes les catégories disparaissent, toutes les haines de parti s'éteignent, et il ne reste plus qu'une mère, jalouse d'assurer le bonheur et la paix parmi ses enfants. Votre Majesté, qui s'étudie à procurer ces bienfaits à son peuple et qui a tant contribué à sa glorieuse régénération, montrera pour Saint-Domingue le même intérêt et la même sollicitude que pour les autres provinces de la monarchie.

La Providence qui, à des époques de souvenir éternel, a immortalisé la monarchie et qui a daigné conserver, au milieu des terribles

épreuves qu'elle a traversées, la pureté de son nom, a voulu qu'elle se repose de ses secousses passées, et qu'elle puisse étreindre de nouveau dans ses embrassements, une nation qui s'était séparée d'elle dans des temps de troubles et de faiblesse, qui ne reparaîtront jamais. C'est pourquoi le conseil des ministres a l'honneur de soumettre à l'approbation de Sa Majesté le projet de décret suivant :

Attendu les raisons qui m'ont été exposées par mon conseil des ministres, accueillant avec l'entière effusion de mon âme les vœux du peuple dominicain, dont j'ai reçu tant de preuves d'adhésion et de loyauté, je décrète ce qui suit :

Art. 1. Le Territoire qui constituait la République Dominicaine est réincorporé à la Monarchie.

Art. 2. Le Capitaine général, gouverneur de l'île de Cuba, conformément aux instructions de mon Gouvernement, prendra les mesures nécessaires pour l'exécution de ce décret.

Art. 3. Mon Gouvernement rendra compte aux cortès de ce présent décret et des mesures adoptées pour son exécution. Donné à Aranjuez, le 19 mai 1861.

Signé de la main de la Reine.

Le Président du conseil des ministres,
LEOPOLDO O'DONNELL.

ÉTATS CONFÉDÉRÉS D'AMÉRIQUE.

Proclamatiou du Gouverneur de la Géorgie.

Attendu que, par la conduite oppressive et malfaisante du gouvernement et du peuple de cette partie des ex-États-Unis, connus sous le nom d'États anti-esclavagistes, la guerre existe actuellement entre eux et le peuple des États du Sud;

Attendu que le Président des États-Unis a publié une proclamation déclarant sa détermination de bloquer les ports des États du Sud, et assemble aujourd'hui des troupes fédérales sur le sol du Sud, dans le but de nous subjuguer et de nous réduire en servage;

Attendu que des propriétés appartenant à des citoyens de l'État de la Géorgie, toutes les fois qu'il s'en est trouvé dans les limites des États anti-esclavagistes, ont été enlevées de force à leurs propriétaires ;

Attendu que tous les contrats passés avec l'ennemi pendant la durée des hostilités, sont, d'après la loi des nations, nuls et illégaux, et que toutes les poursuites devant nos cours pour faire exécuter des contrats passés entre des citoyens de cet État et des États qui nous font aujour

d'hui la guerre, antérieurement au début des hostilités, sont suspendues jusqu'à la fin de la lutte;

Attendu que, dans le langage de la loi des nations, l'achat de valeurs sur le pays ennemi ou les remises et dépôts de fonds qu'on y fait, sont des actes illégaux et dangereux, parce qu'ils peuvent nourrir les ressources et fournir aux besoins de l'ennemi, et que l'envoi de fonds en argent ou en billets aux sujets de l'ennemi est contre la loi; Attendu que la saine politique, aussi bien que les lois internationales, interdissent absolument qu'aucun citoyen de cet État, sous quelque prétexte que ce soit, prête assistance à l'ennemi en faisant des remises, en payant ou en fournissant de l'argent ou autres objets de valeur, pendant la continuation des hostilités, au gouvernement ou au peuple des États qui ont engagé et qui maintiennent contre nous une guerre malfaisante et contre nature;

Et attendu que la justice veut que toutes les sommes dues par les citoyens de cet État aux individus desdits États hostiles, qui ne maintiennent et ne soutiennent point la guerre sauvage et cruelle entreprise par leur gouvernement, soient payés aussitôt après la cessation des hostilités et la reconnaissance par les États-Unis de l'indépendance des États confédérés :

Conséquemment, en vue de ces considérations, moi, Joseph E. Brown, gouverneur et commandant en chef de l'armée et de la flotte de l'État de Géorgie, je publie ceci, ma proclamation, ordonnant et enjoignant à chaque citoyen ou habitant de cet État, de s'abstenir absolument de toute violation de la loi ci-dessus transcrite, et, sous aucun prétexte, de ne remettre, transférer ou payer au gouvernement des États-Unis ou de n'importe quel État composant ledit gouvernement et connu comme État au sol libre, y compris entre autres le Massachusetts, le Rhode-Island, le Connecticut, le New-York, le NewJersey, la Pennsylvanie et l'Ohio, ou à des citoyens ou habitants de ces États, aucun argent, billets, traites ou autres objets de valeur, soit en payement d'une dette échue ou à échoir, soit en à-compte, soit pour toute autre cause, avant la fin des hostilités.

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Par la présente, j'invite chaque citoyen ou habitant de cet État, endetté envers ledit gouvernement ou aucun desdits États ou quelqu'un de leurs citoyens et habitants, à payer à échéance au trésor de la Géorgie le montant qu'il doit, en fonds ayant cours à Augusta ou à Savannah, ou à déposer le même montant à l'ordre du trésorier de cet État, dans une des banques solvables de ces villes, ou à l'une de leurs succursales autorisées, et en faisant ce dépôt au trésor, ou sur la présentation d'un certificat de dépôt, le trésorier de cet État est requis de délivrer à la personne un certificat spécifiant la somme déposée, laquelle cet État s'engage, sur sa foi et son crédit, à rembour

ser audit déposant en fonds ayant cours à Augusta et Savannah, avec sept pour cent d'intérêt de la date du dépôt, dès que les hostilités auront cessé, et qu'il sera légal de payer lesdits créanciers dans les États hostiles ci-dessus mentionnés. Ceci ne permettra pas seulement à ceux de nos citoyens qui doivent au Nord de l'argent que les lois internationales et la politique publique leur interdisent de payer, de faire un bon placement, avec la plus grande sécurité de remboursement, mais aussi de remplir un devoir patriotique, en rendant service à l'État, et par cela même à la Confédération, en fournissant les fonds nécessaires à la défense de nos demeures, de nos foyers et de nos autels.

J'ordonne et j'enjoins strictement, en outre, à toute banque autorisée dans cet État, qui se trouve en possession de notes, billets, traites ou autres papiers contre aucun citoyen de cet État ou aucun de ses habitants ou corporations, émanant desdits États hostiles, de s'abstenir de faire protester ces notes, billets, traites ou autres papiers, pourvu que les personnes intéressées leur exhibent un certificat montrant qu'elles ont déposé la somme due au trésor de cet État ou dans une des banques mentionnées plus haut, au crédit de son trésorier, ou qu'elles le feront à l'échéance de leur dette.

J'ordonne et j'enjoins aussi à tous les notaires publics de cet État de s'abstenir complétement de remplir aucun des actes officiels pour le protêt des papiers dont il est question dans les cas déjà spécifiés. Donné sous ma main et sous le grand sceau de cet État, au capitole de Milledgeville, ce 23e jour d'avril de l'année de Notre Seigneur 1861, et des États confédérés la première.

Signé JOSEPH E. BROWN.

Texte des lettres de marque délivrées par le président
Jefferson Davis.

1o La teneur de votre commission, en vertu d'un acte du Congrès intitulé « Acte reconnaissant l'existence d'une guerre entre les ÉtatsUnis et les États confédérés, et concernant les lettres de marque et prises» dont une copie est ici annexée, sera constamment sous vos yeux. La haute mer dont il est parlé dans votre commission signifie la zone côtière (the low water mark), à l'exception de l'espace d'une lieue ou trois milles, depuis la côte des pays en paix avec les ÉtatsUnis ou les États confédérés. Vous exécuterez néanmoins votre commission dans la distance de la côte de la nation en guerre avec les États-Unis, et même dans les eaux qui sont sous la juridiction de cette nation, s'il vous est permis de le faire.

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