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« De même, les cantons respectifs régleront, au moment où la remise des malfaiteurs aura lieu, les frais occasionnés par leur transport.

« ART. 4. Le transit par le territoire suisse ne sera jamais autorisé pour le transport des ressortissants suisses, ni pour les prévenus de délits politiques, de quelque pays qu'ils soient originaires.

« ART. 5. Si l'un des individus transportés n'est pas accepté à la frontière par l'autorité allemande ou italienne, quel qu'en soit le motif, il sera envoyé à l'autorité-frontière par laquelle l'ordre de transport a été délivré, et les autorités de l'État d'où il vient seront tenues de reprendre cet individu et de rembourser aux agents suisses, qui en feront la remise, tous les frais de transport, aller et retour.

« En foi de quoi, les soussignés, dùment autorisés à cet effet, ont signé en triple expédition la présente déclaration, qui entrera en vigueur un mois après la date ci-dessus, et qui cessera d'être en vigueur un mois après que la dénonciation en aura été faite par une des parties déclarantes. »

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Cet arrangement vient à l'appui de ce que nous avons dit plus haut (page 280). La Suisse n'a pas craint de s'engager, d'une manière générale, sous des réserves déterminées, à autoriser le transit des malfaiteurs dont l'extradition sera accordée en exécution du traité conclu le 31 octobre 1871, entre l'Allemagne et l'Italie.

CHAPITRE IX.

ATTRIBUTION DES FRAIS.

Toute extradition entraîne des frais. La recherche et l'arrestation du malfaiteur fugitif; la surveillance dont il faut l'entourer jusqu'au jour de sa livraison; sa nourriture et son entretien pendant sa détention dans le pays requis; les démarches nécessaires pour la constatation de son identité; l'examen des preuves fournies à l'appui de la demande d'extradition, dans le cas au moins où cet examen donne lieu à des débats contradictoires; le transfèrement de l'extradé depuis le lieu de son arrestation jusque sur le territoire du pays requérant, la remise des objets saisis, que le fugitif avait emportés ou qui peuvent servir à constater l'infraction: toutes ces mesures, dont nous ne donnons qu'une énumération sommaire, occasionnent des dépenses. Il y est pourvu, d'ordinaire, par le gouvernement du pays requis, auquel incombe le soin de provoquer la plupart de ces mesu res. Mais ce gouvernement doit-il en supporter définitivement la charge?

La pratique des extraditions a pris, depuis un demi-siècle, un développement considérable; la remise d'uu malfaiteur fugitif ne constitue plus, comme jadis, un fait isolé : ce qui était l'exception est devenu la règle. Depuis quelques années, notamment, un grand nombre de délits ont été introduits dans les nomenclatures des traités, et le nombre des procédures d'extradition a plus que doublé entre pays voisins. Les dépenses qui en résultent, et dont le montant annuel s'accroît incessamment, forment, dès aujourd'hui, la matière d'un chapitre important des frais généraux de justice. Il est donc intéressant de savoir à laquelle des deux Puissances intéressées l'attribution en doit être faite.

Établissons, tout d'abord, une distinction: une partie des mesures nécessaires pour replacer un malfaiteur fugitif sous la main des juges compétents reçoivent leur exécution en dehors du territoire du pays requis. Il ne saurait être question d'en attribuer les frais à cet État, qui y est resté étranger. Par exemple, on ne

comprendrait pas à quel titre ce gouvernement pourrait être tenu de supporter le prix du transfèrement de l'extradé et des objets saisis au delà de ses frontières. Le règlement des dépenses de cette nature incombe évidemment au gouvernement du pays requérant.

Restent les frais afférents aux mesures prises sur le territoire du pays de refuge. Il n'est guère possible d'hésiter, si l'on songe à la nature et à l'objet de ces dépenses. L'extradition d'un malfaiteur est autorisée au profit de l'État requérant. Sans doute, la Puissance requise est tenue, en dehors de toute stipulation écrite, de prêter son concours à la recherche du malfaiteur fugitif et de le livrer à l'autorité compétente. Mais là se bornent ses obligations, et il n'y a pas de motif pour que l'exécution lui en soit onéreuse. Si l'extradition est une mesure d'intérêt général, qui profite au pays requis comme à tous les autres pays, en contribuant à l'observation universelle de la justice, elle n'en constitue pas moins, à un point de vue particulier, un service directement rendu au pays requérant. Il y a donc une raison toute spéciale pour faire supporter à ce pays des frais, qui sont la condition et comme le prix du service rendu.

Ainsi, en principe, les frais doivent incomber au gouvernement requérant.

En pratique, l'application de ce principe n'est pas sans inconvénients. Par la force même des choses, le montant des frais est avancé par l'État requis sur le territoire duquel ils sont faits. Il faut donc qu'il en obtienne le remboursement, lorsque la procédure d'extradition est terminée. A cet effet, il doit s'adresser au gouvernement requérant, et lui faire passer, à l'appui de sa demande, un bordereau détaillé et certifié. Ce règlement de comptes ne sera pas toujours arrêté sans difficulté, car le débiteur sera disposé à décliner la charge de toute dépense qui lui paraîtra avoir été effectuée sans une nécessité réelle, ou qui ne semblera pas tenir directement à l'extradition. Ce sera donc l'occasion d'un échange prolongé de correspondances diplomatiques et de discussions qu'il y aurait intérêt à éviter. L'accord une fois établi sur le chiffre de la créance, de nouveaux embarras se présentent relativement au mode de payement. Les fonds doivent être versés par l'agent diplomatique du pays requérant, accrédité dans le pays requis. Pour le mettre en mesure d'opérer ce versement, il faudra toute une série d'écritures et de comptes avec le minis

tère des affaires étrangères et l'administration sur le budget de laquelle les frais doivent être imputés définitivement. Toutes ces difficultés seraient, en somme, de peu d'importance, si les rapports internationaux se bornaient, en cette matière, à quelques procédures isolées; mais elles prennent une gravité réelle entre des pays pour lesquels les extraditions demandées et accordées se chiffrent annuellement par plusieurs centaines. Aussi, dans la pratique, en est-on venu rapidement, lorsque l'état des choses l'a permis, à se départir du principe établi par la théorie.

Il est, aujourd'hui, de règle générale que les frais sont supportés par le pays requis.

Ainsi se trouvent évités tous les embarras qu'entraînent les règlements de comptes; chaque État pourvoit aux dépenses faites sur son territoire; une sorte de compensation s'établit naturellement par suite du nombre respectif des extraditions demandées par chaque pays, et du montant des dépenses qu'une extradition nécessite suivant l'étendue du territoire du pays requis. Ainsi, supposons deux États voisins d'inégale grandeur : le plus petit adressera probablement moins de demandes d'extradition qu'il n'en recevra; mais les frais de recherche et de transport seront, par contre, plus considérables à l'intérieur de l'autre État. Somme toute, la balance restera à peu près en équilibre. Ces considérations expliquent comment la règle, en vertu de laquelle les frais sont attribués à l'État requis, a été admise presque universellement.

Il convient de remarquer, du reste, que cette règle est en faveur dans les pays qui suivent, pour l'examen des demandes d'extradition, le système français ou belge, et que, dans ces pays, les dépenses se trouvent réduites au minimum qu'il est possible d'atteindre. La recherche du malfaiteur est faite, sans frais, par les agents de la police de l'État; l'examen de la demande d'extradition est effectué, sans frais, soit par des fonctionnaires de l'ordre administratif, soit par des magistrats de l'ordre judiciaire. Il ne reste, le plus souvent, qu'à pourvoir à la nourriture, à l'entretien et au transport de l'extradé.

Il en est tout autrement avec le régime suivi en Angleterre et surtout aux États-Unis. La procédure d'extradition y entraîne un procès onéreux, où l'État requérant est obligé d'être partie et d'avoir l'accusé pour adversaire. Le concours des gens de loi est nécessaire pour écarter les obstacles de chicane que le conseil du

fugitif ne manque pas de susciter. Et puis la police est organisée sur d'autres bases; l'argent est nécessaire pour la mettre en action, et des avances indispensables doivent être faites par le délégué de l'État requérant. L'extradition accordée, le fugitif est mis, sur les lieux mêmes de son arrestation, à la disposition de l'État requérant, auquel revient le soin d'assurer son tranfèrement. En un mot, le gouvernement requis se désintéresse, autant que possible, de la procédure; il se borne à saisir le pouvoir judiciaire de la requête le reste est à la charge du pays requérant. Il ne saurait donc ètre question d'attribuer au gouvernement requis les frais effectués sur son territoire : ces frais ont été faits en dehors de lui, et directement avancés par le gouvernement requérant. Tout au plus pourrait-il se charger des dépenses occasionnées par la garde et l'entretien du détenų. Mais on verra, en parcourant les dispositions du droit conventionnel, que ni l'Angleterre ni l'Amérique n'y ont consenti. Ces deux Puissances ne se sont jamais départies de la rigueur du principe en vertu duquel les frais doivent incomber à la partie qui demande l'extradition et qui a intérêt à l'obtenir. Leur résolution a d'autant plus de gravité pour les autres gouvernements, que, nulle part ailleurs, les frais d'extradition ne sont aussi considérables : c'est, d'ailleurs, une conséquence toute naturelle du système suivi pour l'examen de la demande d'extradition.

A ce propos, il n'est pas sans intérêt de faire connaître le montant des dépenses occasionnées par l'extradition de certains criminels, réfugiés aux États-Unis.

En 1870, le gouvernement suisse demanda au gouvernement américain l'extradition d'un nommé Farez; la procédure ne put aboutir, parce que l'inculpé parvint, dans le cours du procès, Â échapper à ses gardiens et à disparaître; mais, au point où elle en était arrivée, elle avait déjà coûté 12,347 fr. 50 c. « Il parait néanmoins, ajoute le conseil fédéral dans son rapport pour 1870, que l'affaire a été poursuivie à bon marché; car M. le consul de Luze nous a fait observer qu'il connait deux cas de demandes d'extradition formulées par la France, et qui ont coûté, la première, 38,000 dollars, et la seconde, 20,000 (175,000 et 100,000 fr.)! »

Ces chiffres ne sont pas exagérés. Le procès célèbre suivi aux États-Unis, en 1857, contre les caissiers du chemin de fer du Nord (Carpentier et autres), dont l'extradition était demandée par le gouvernement français, n'a pas duré moins de dix mois, et a

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