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reuse, et c'est pour empêcher à l'avenir de pareilles prétentions de s'élever que je m'étais proposé de présenter à la sanction de la Chambre un amendement ainsi conçu :

<< ART. 7 bis. - Il sera toujours loisible à l'individu dont l'extradition est demandée de renoncer à tout ou partie des formalités préliminaires de l'extradition.

« Dans ce cas, il n'en sera pas moins considéré comme ayant été extradé et jouira du bénéfice de l'article 7. »

A la suite d'un entretien avec l'honorable ministre de la justice, j'ai été amené à renoncer à mon amendement.

« Toutefois, à raison des inquiétudes que l'incident dont j'ai parlé a éveillées, je crois qu'il serait infiniment désirable que le gouvernement fit connaître publiquement quelle est son opinion dans cette question et par quel moyen il compte à l'avenir faire prévaloir cette opinion vis-àvis des Puissances étrangères avec lesquelles il a contracté des traités d'extradition. >>

« M. Bara, ministre de la justice. Une difficulté a effectivement surgi entre le gouvernement belge et le gouvernement français au sujet de l'application de la loi sur les extraditions. Le gouvernement français a soutenu que, lorsqu'un prévenu lui était livré sans l'accomplissement des formalités inscrites dans la loi de 1833, le prévenu était censé s'être rendu volontairement à la justice de son pays et que dès lors ce prévenu devait répondre de toute espèce de délit.

<< Cette opinion n'a pas été partagée par le gouvernement belge; nous avons continué à réclamer les personnes ainsi livrées, et la cour d'appel de Paris a adopté notre opinion.

« Mais, pour prévenir le retour des faits dont il vient d'être parlé, pas n'est besoin de disposition dans la loi, il suffit d'une clause dans le traité, et cette clause est facile à obtenir.

« Lorsqu'un individu ne voudra pas passer par les formalités prescrites par la loi, nous dirons au gouvernement français : L'acceptez-vous ainsi? S'il s'y refuse, nous ne livrerons pas le prévenu, ou il passera par les formalités prescrites.

« Le gouvernement français sera averti, les personnes à extrader seront averties. Si un accusé nous dit je veux retourner en France quand même! il est libre, il peut aller répondre à la justice de son pays. « Je crois que ces explications suffiront pour que M. Liénart n'insiste pas sur son amendement. >>

« M. LIENART. Comme je l'ai déjà dit, je n'insiste pas, puisqu'il est entendu que la loi des extraditions doit recevoir l'interprétation que j'ai indiquée, et que le gouvernement, après avoir défendu cette interprétation par ses protestations, a pris une mesure qui à l'avenir rendra impossible le renouvellement de ce conflit. >>

Il résulte de la déclaration de M. Bara que, dans la pensée du gouvernement belge, l'extradé volontaire doit être considéré comme livré en vertu d'une extradition régulière, et doit être admis à bénéficier des conditions stipulées dans le traité conclu avec le pays requérant.

Cette même déclaration indique aussi le mode de procéder suivi par le gouvernement belge, pour le règlement de cette question, dans ses rapports avec le gouvernement français. Lorsqu'un individu, arrêté provisoirement en Belgique sur la requête du gouvernement français, demande à être livré sans attendre l'accomplissement des formalités de l'extradition, l'administration belge le prévient des conséquences qui sont attribuées, en France, à l'extradition volontaire. S'il persiste dans sa résolution, il est conduit à la frontière. Mais on lui fait signer préalablement une déclaration constatant sa renonciation formelle au bénéfice que lui aurait asssuré, le cas échéant, une extradition effectuée conformément aux prescriptions du traité franco-belge.

La convention actuellement en vigueur entre les deux pays a été conclue le 29 avril 1869, c'est-à-dire, postérieurement à la promulgation de la loi belge de 1868 et postérieurement aux affaires Renneçon-Charpentier et Faure de Monginot. La question de l'extradition volontaire n'y fait l'objet d'aucune clause spéciale. Il faut en conclure que les négociateurs n'ont pu se mettre d'accord sur la solution qu'elle comporte; car il n'est pas admissible qu'elle n'ait pas été examinée et mûrement discutée. Les traités conclus depuis lors, soit par la France, soit par d'autres Puissances, n'ont également consacré aucune stipulation au règlement de l'extradition volontaire. C'est donc un point sur lequel le droit conventionnel n'est pas encore fixé. Mais il est facile de prévoir que, les demandes d'extradition volontaire se multipliant à mesure que la pratique des extraditions prend plus d'extension, les gouvernements ne tarderont pas à comprendre qu'il est de l'intérêt de la justice de favoriser de telles requêtes. Sous l'empire de cette pensée, les divergences s'évanouiront, et le droit d'extradition aura fait une nouvelle conquête.

LIVRE VI

DE QUELQUES PROCÉDURES ACCESSOIRES

Les diverses procédures, qui forment l'objet de ce livre, n'ont pas toujours avec l'extradition un rapport direct. Cependant, elles s'en rapprochent par plusieurs points d'analogie; elles sont destinées, comme l'extradition, à concourir au service de la justice et ne s'exercent qu'en matière pénale; ce sont des procédures internationales, qui permettent à l'autorité judiciaire d'étendre son action au delà des frontières et de rechercher le malfaiteur en fuite à l'étranger; souvent, elles sont poursuivies concurremment avec l'extradition, dont elles complètent les effets; elles empruntent aussi la voie diplomatique; la forme en est réglée par des stipulations conventionnelles; enfin, c'est dans les traités d'extradition qu'il faut rechercher les clauses qui s'y rapportent. Voilà des motifs suffisants pour qu'une place y soit donnée dans cet ouvrage.

Ces procédures sont au nombre de cinq: Commissions rogatoires, comparution de témoins, confrontation des détenus, communication de pièces et notification d'actes.

Nous allons les reprendre séparément et en indiquer, dans une rapide étude, l'objet et le mécanisme.

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En matière pénale, lorsque des témoins, domiciliés hors du canton ou de l'arrondissement où se poursuit l'information, se trouvent dans l'impossibilité de comparaître, le juge d'instruction commet le juge de paix de leur canton ou le juge d'instruction de

leur arrondissement à l'effet de recevoir leur déposition. (Art. 83, 84, 90, Code d'instr. cr.). De même, lorsque des témoins résident dans une localité éloignée et que leur comparution personnelle ne paraît pas nécessaire, leur déposition est reçue par le magistrat compétent du ressort de leur résidence, sur un mandat adressé par le juge chargé de l'instruction du procès criminel ou correctionnel. La même procédure est encore suivie, quand il s'agit d'effectuer, dans un autre arrondissement, une constatation quelconque, un relevé d'état de lieux, une enquête, une expertise,... etc. - Ce mandat, adressé par un magistrat à un autre magistrat, ou par un tribunal à un autre tribunal, pour provoquer dans un autre ressort certains actes de procédure, est ce qu'on appelle une commission rogatoire.

L'usage des commissions rogatoires existe également en matière civile (art. 266 et 1035, Code de pr. civ.) dans les rapports entre magistrats d'un même pays, et il s'est étendu jusqu'aux relations avec les tribunaux étrangers. Mais nous n'avons à nous occuper ici que de celles qui sont adressées en matière pénale; ce sont les seules qui soient réglées dans les traités d'ex tradition, et qui aient avec l'extradition des points communs.

L'utilité que peut offrir, en certains cas, pour une instruction criminelle, l'emploi des commissions rogatoires, adressées à une autorité judiciaire étrangère, est facile à saisir : il peut y avoir intérêt à obtenir la déposition d'un témoin actuellement établi à l'étranger, à effectuer une enquête ou une expertise au delà de la frontière. Les commissions rogatoires permettent de pourvoir à ces éventualités, et de réunir toutes les informations qui peuvent éclairer l'œuvre de la justice. Il y a donc intérêt à en régulariser l'emploi et à déterminer les conditions nécessaires pour que l'exécution en soit assurée.

Le magistrat ou le tribunal, qui reçoit une commission rogatoire d'un magistrat ou d'un tribunal étranger, n'est pas tenu d'y donner suite, si une loi spéciale ou un traité diplomatique ne lui en fait une obligation expresse. Aussi les gouvernements ont-ils été amenés à régler cette question par des stipulations conventionnelles.

Les clauses, qui y sont consacrées, font partie des traités d'extradition. Ce n'est pas que des commissions rogatoires, en matière criminelle, ne puissent être adressées à l'étran

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