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jouissance provisoire des détenteurs, par une concession définitive, a fait l'objet, dès 1825, d'un examen spécial, de la part des autorités locales et de l'administration des domaines.

Les avis sont unanimes sur la nécessité d'adopter, pour cette aliénation, le mode exceptionnel de vente sur estimation rigoureuse et contradictoire.

Les habitants de Lachalade et autres communes forment une population entière de bûcherons et d'ouvriers verriers, que la suppression de l'abbaye a privé de beaucoup de ressources, et qui serait réduite à la misère, ou au moins dispersée, si, par la vente aux enchères publiques, des biens qu'elle est accoutumée à considérer comme son patrimoine, cette population était exposée aux effets de spéculations particulières.

La continuation de l'emphytéose serait contraire à l'intérêt de l'Etat, puisqu'elle laisserait les biens pour ainsi dire hors du commerce, et ramènerait toujours les mêmes difficultés à l'expiration des baux.

Au reste, ce ne sera pas la première fois que le mode d'aliénation, sur estimation contradictoire, aura été préféré à la vente aux enchères.

Une loi du 22 mars 1806 a autorisé, en faveur des habitants d'Essert, département de l'Yonne, la concession de tous les terrains qu'ils tenaient à bail emphyteotique de l'ancienne abbaye de Regny.

Une autre loi du 21 avril 1832 à également autorisé, en faveur des habitants du hameau de Charbonnière (même département), la concession des terrains qu'ils tenaient de la même abbaye, aussi à bail emphythéotique.

D'après ces considérations, nous espérons que vous voudrez bien, Messieurs, accorder votre sanction au projet de loi que nous vous soumettons, et dont nous allons avoir l'honneur de vous donner lecture.

PROJET DE LOI.

« Article unique. Le ministre des finances est autorisé à concéder au nom de l'Etat, sur estimation contradictoire, à chacun des habitants de Lachalade, de Claon, Montblainville, Varennes et Vauquois, arrondissement de Verdun (Meuse), les biens provenant de l'ancienne a baye de Lachalade, qu'il tient à bail emphyte tique.

Les frais seront à la charge des concessionnaires. »

M. le Président. La Chambre donne acte a M. le ministre des finances des communicatio qu'il vient de faire, en ordonne l'impression la distribution dans les bureaux.

L'ordre du jour est le rapport de la commu sion (1) chargée d'examiner la proposition te de M. Jacques Lefebvre et plusieurs de ses co tendant à modifier la section II, du titre i livre 1" du Code de commerce (Mandat de ci

M. Dufaure, rapporteur. Messieurs, plus de nos honorables collègues se sont réut proposer d'introduire dans notre Code d merce une disposition nouvelle.

Cette disposition, fort simple en app peut être en réalité fort importante par

(1) Cette commission est composée de Humblot, Guestier, Martell, Sévère-Mareas Préfeln, Dufaure, François Delessert, Fan

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nt, sous l'empire de ces graves s, le projet de loi qui vous est prén'avons point hésité à penser qu'ausité ne nous obligeait à poser, pour e règle législative d'interprétation, orsque l'interprétation qu'on vous desanctionner, serait la plus rigoureuse, serait au prévenu le bénéfice du doute, une sorte de droit acquis dans les mapénales.

Commission, en exprimant le vœu que l'adstration se pénètre de cette importante vé, et n'autorise pas légèrement des poursuites que toujours indiscrètes et souvent vexares quand elles sont trop tardives, vous proPose de laisser le passé à l'empire du droit ommun et à la sagesse des tribunaux.

fois le même engagement, en mettant leurs signatures en circulation, sur des billets à échéances rigoureuses; il est bon qu'il ait la faculté de déléguer sa créance, sans porter aucune atteinte aŭ bénéfice du terme, sans donner au porteur le droit de requérir une acceptation.

C'est donc un besoin réel qui a fait choisir ce nouvel effet de commerce; il est utile de lui donner une existence légale.

On a craint, à la vérité, qu'il ne se substituât peu à peu à la lettre de change; cette crainte ne nous a pas touchés. Fournissons au commerce la monnaie qu'il réclame; qu'il soit libre ensuite de la préférer à toute autre. L'intérêt public s'accommode mieux dejcette liberté que de toute restriction forcée; si les preneurs successifs sont privés de la garantie d'une acceptation, c'est qu'elle leur a paru inutile. Ils se sont confiés à la signature du tireur; nous leur permettons de le faire. Voilà toute l'étendue de la loi proposée.

Votre commission, après s'être convaincue qu'il était nécessaire de reconnaître un nouvel engagement contenant remise de place en place, et non soumis à l'acceptation, a dû s'occuper de la forme sous laquelle il pouvait être admis.

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Nos honorables collègues vous proposaient une disposition ainsi conçue: « Lorsque la lettre de change est qualifiée mandat de change dans le corps du titre, l'acceptation ne peut en être exigée. Ainsi, cet effet nouveau devait se distinguer par sa qualification, par le nom que le tireur lui donne. Etait-il appelé mandat de change, il n'était pas sujet à acceptation; recevait-il toute autre dénomination, le porteur pouvait le faire accepter.

Il y a toujours, Messieurs, un grave inconvénient à subordonner les effets d'un acte au nom qui lui est donné. Remarquez, de plus, que le sens attaché à cette qualification serait arbitraire. Le mot mandat de change pris en luimême n'exprime pas plus que le mot lettre de change une dispense d'acceptation. Ces deux expressions ont une même force; elles supposent, l'une et l'autre, remise de place en place, délégation de créance, mandat donné au preneur de recevoir, et au tiré de payer.

Il est beaucoup de places en France où cette différence n'a même pas été soupçonnée. Longtemps encore après notre loi, on recevrait un mandat de change avec la persuasion que l'on prend un titre sujet à acceptation.

Nulle part, même, la qualification de mandat n'avait la conséquence que l'on veut lui attacher. Si le mandat de change avait été fait sur papier timbré, il était présenté à l'acceptation; il était entièrement assimilé à la lettre de change; l'effet dont nous avons reconnu le besoin était distingué, caractérisé par sa forme et non par la qualification qu'il recevait.

La loi du 24 mai 1834, en soumettant à une double amende le tireur et le preneur de tout effet commercial non timbré, a rendu cette forme à peu près impossible; nous proposons de la remplacer, non par une qualification, mais par une convention; nous proposons de donner au tireur de la lettre de change la faculté de stipuler qu'elle ne sera pas sujette à acceptation. Avec une stipulation de cette nature, pour laquelle nous n'instituons aucuns mots sacramentels, mais que l'usage saura bien réduire à sa plus brève et plus nette expression, nous croyons répondre aux besoins que nous avons reconnus. Deux objections nous ont été adressées : quel

ques personnes pensent que la loi ainsi réduite serait inutile, que la législation actuelle n'interdisant pas cette stipulation, chacun peut déjà l'ajouter à une lettre de change. Cette opinion, Messieurs, nous a paru douteuse; l'acceptation a toujours été considérée comme une garantie obligée, comme un complément de la lettre de change; l'article 110 du Code de commerce règle la forme de ce titre, énumère les mentions qu'il doit contenir et ne semble pas y admettre d'autres stipulations. C'est une monnaie courante que chaque preneur doit recevoir dans la forme tracée par le législateur, et où il est autorisé à ne rechercher rien autre chose. Si vous voulez que la lettre de change puisse être affranchie de l'acceptation, il est indispensable, ou tout au moins fort utile de le dire.

D'autres personnes ont craint que cette stipulation ne soit pas assez facilement, assez promptement aperçue. Cette crainte n'est pas fondée; le preneur d'une lettre de change est toujours obligé, en la recevant, de voir si elle est tirée d'un lieu sur un autre, pour quelle somme, sur quelle personne, à quelle échéance, si elle est à ordre et par première, seconde ou troisième; averti par la disposition de votre loi, il verra non moins aisément si elle est ou non sujette à acceptation.

Il nous a donc paru suffisant de créer une disposition qui permettrait d'affranchir la lettre de change de la formalité de l'acceptation. Nous en faisons un second paragraphe de l'article 110 du Code, qui indique les énonciations que toute lettre de change doit contenir.

Ce sera toujours une lettre de change; elle ne sera modifiée qu'en ce qui concerne l'acceptation et ses conséquences. Elle sera toujours, par elle-même, indépendamment de sa cause, un titre commercial, puisqu'il y a remise de place en place. Vous ne voudrez pas lui faire subir d'autres modifications que celles qui ont été réclamées.

En conséquence, votre commission amende ainsi la proposition que vous avez renvoyée à

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M. le Président. Le rapport sera imprimé et distribué. Le jour de la discussion sera ultérieurement indiqué.

M. Pataille. Il conviendrait d'indiquer dans quel ordre viendra la discussion...

M. le Président. Il faut d'abord que le rapport soit imprimé et distribué. M. Gillon a présenté un rapport qui prend rang avant celui-ci. M. Gillon (Jean-Landry). Mon rapport a été distribué aujourd'hui; on pourra le discuter quand il plaira à la Chambre.

M. le Président. L'ordre du jour appelle le rapport de la commission (1) chargée d'examiner le projet de loi sur l'interprétation de l'article 28 du décret du 1er germinal an XIII (Contraventions en matière de contributions indirectes.)

M. Sauzet, rapporteur. Messieurs, le décret législatif du 1er germinal an XIII règle les formes de la procédure à suivre sur les contraventions en matière de contributions indirectes. Son article 28 est ainsi conçu :

« L'assignation à fin de condamnation sera donnée dans la huitaine au plus tard de la date du procès-verbal. Elle pourra être donnée par les commis. »

Cet article, en exigeant que l'assignation soit donnée dans la huitaine, ne s'explique pas formellement sur la nullité des assignations qui seraient données plus tard.

La Cour de cassation en a conclu que de telles assignations étaient valables, parce qu'il est impossible de suppléer une nullité ou une déchéance qui n'est pas expressément prononcée par la loi.

Plusieurs cours royales ont pensé, au contraire, que notre législation n'admet pas de formules sacramentelles; qu'il importe peu que le mot de déchéance ne soit pas littéralement ínséré dans la loi, pourvu que la volonté de la prononcer résulte évidemment de son texte, et que les mots au plus tard ne permettent aucun doute sur ce point, car autrement la loi dégénérerait en conseil impuissant, et perdrait tout à fait cette sanction qui fait l'essence de son caractère.

Deux arrêts de cours royales qui avaient jugé dans ce dernier sens ont été successivement cassés par la Cour de cassation qui, en renvoyant la décision du procès à une troisième cour, a ordonné, conformément à la loi de 1828, un référé législatif.

(1) Cette commission est composée de MM. Lacroix, Prévost-Leygonie, Molin, Sauzet, Isambert, Poullé (Emmanuel), Hébert, Moreau, Golbéry.

M. le ministre des finances a présenté à la Chambre, sous la forme interprétative, un projet de loi qui fixe le sens du décret, conformément à la doctrine de la Cour de cassation.

Votre commission s'est d'abord demandé si la loi que vous porteriez étendrait comme les lois interprétatives, proprement dites, son effet sur le passé, et si la puissance législative avait aujourd'hui le droit de faire de telles lois. Cette question a divisé votre commission.

Plusieurs membres, tout en convenant que le pouvoir interprétatif aurait dù rester au législateur, pensent que la loi de 1828, entendue suivant la discussion qui l'a précédée, a voulu enlever pour l'avenir à la puissance législative, le droit d'interprétation proprement dit, et que ce pouvoir ne pourrait lui être rendu que par une loi nouvelle.

D'autres, au contraire, sont demeurés convaincus qu'à la vérité, malgré l'apparente netteté de son texte, la loi de 1828 n'a imposé aux Chambres d'autre obligation que celle de faire cesser pour l'avenir l'obscurité de la loi passée, par une loi nouvelle, mais qu'elle n'a point entendu dépouiller le législateur du droit de régler, quand il le voudrait, les incertitudes du passé par un droit véritablement interprétatif, qui a été considéré, dans tous les temps, comme un des attributs essentiels de sa puissance.

Quoi qu'il en soit de ces deux théories, votre commission a presque unanimement pensé que, dans tous les cas, le droit d'interpréter, pour le passé, ne devait s'exercer qu'avec une extrême réserve et en présence des nécessités les plus graves. De telles lois, en effet, n'ont point, à proprement parler, le caractère de la rétroactivité, puisqu'elles se rattachent à la loi interprétée dont le législateur fixe le sens par sa puissance; mais elles en présentent les apparences et en entraînent quelquefois les dangers. Elles obligent d'ailleurs le pouvoir législatif à donner un démenti doctrinal et éclatant à la Cour de cassation ou aux cours royales, puisque, entre ces deux autorités, elle ne lui laisse que le choix de déclarer de quel côté fut l'erreur, et on comprend ce que la dignité de la magistrature peut perdre à de telles déclarations.

Sans doute, il peut se présenter, surtout pour les lois civiles, des circonstances impérieuses où de tels inconvénients s'effacent devant le danger, plus grand encore, de laisser pendant 30 années se perpétuer des incertitudes d'interprétation qui créent, entre les grands corps de magistrature une dissidence, et presque une sorte d'hostilité systématique et d'anarchie judiciaire, et détruisent ainsi la foi en la justice, qui est le premier besoin des sociétés.

En examinant, sous l'empire de ces graves considérations, le projet de loi qui vous est présenté, nous n'avons point hésité à penser qu'aucune nécessité ne nous obligeait à poser, pour le passé, une règle législative d'interprétation, surtout lorsque l'interprétation qu'on vous demande de sanctionner, serait la plus rigoureuse, et enlèverait au prévenu le bénéfice du doute, qui est une sorte de droit acquis dans les matières pénales.

La commission, en exprimant le vœu que l'administration se pénètre de cette importante vérité, et n'autorise pas légèrement des poursuites presque toujours indiscrètes et souvent vexatoires quand elles sont trop tardives, vous propose de laisser le passé à l'empire du droit commun et à la sagesse des tribunaux.

Quant à l'avenir, il est sage de mettre un terme aux incertitudes par une lõi véritablement nouvelle, qui ne nous enferme plus dans le cercle d'une interprétation doctrinale, en nous obligeant à choisir entre les deux systèmes qui ont partagé la jurisprudence. La loi est libre puisqu'elle ne doit régler que l'avenir. Votre commission a pensé, d'abord, que le délai qu'elle déterminera doit être prescrit, à peine de déchéance. La loi ne conseille pas, elle ordonne et ne doit rien ordonner en vain.

Mais il nous a paru en même temps que le délai de huitaine, fixé par l'article 28 du décret de 1er germinal an XIII, était trop court, et que le délai de la prescription de 3 ans, établi par le Code d'instruction criminelle, était beaucoup trop long.

Ce dernier laisse vivre trop longtemps des actions fiscales qui ne doivent pas rester comme une menace, et qu'il importé de circonscrire dans un terme court pour assurer leurs bons effets, et prévenir les abus d'un retard qui peut si facilement prêter à l'arbitraire.

L'autre ne laissait point à l'administration le temps nécessaire pour s'informer et réfléchir; il tendait d'ailleurs à paralyser le droit de transaction si précieux pour les redevables comme pour le Trésor, et que l'exercice une fois commencé des actions judiciaires rend toujours plus difficiles. Le délai de trois mois nous a paru propre à concilier tous les intérêts.

Votre commission vous propose, en conséquence, d'amender le projet de loi qui vous a été présenté, en remplaçant l'article unique, dont il se compose, par un autre article qui serait ainsi conçu:

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ministère public ni à la chambre du conseil.

«Si le procureur du roi a requis la délivrance ou le maintien d'un mandat de dépôt, le juge d'instruction ne pourra ordonner la mise en liberté provisoire qu'avec l'assentiment du ministère public; en cas de dissentiment entre le procureur du roi et le juge d'instruction, ou toutes les fois qu'il y aura partie civile, la chambre du conseil pourra seule prononcer.

« Art. 2. Le cautionnement pour la mise en liberté provisoire d'un prévenu pourra être réduit au minimum de 50 francs.

« Art. 3. Sur les conclusions du ministère public, et la partie civile entendue ou appelée, la mise en liberté pourra être autorisée, sous la garantie d'une personne domiciliée et solvable, ou même sans caution, à la charge par la personne de se représentér à toute réquisition.

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Art. 4. Toute personne arrêtée en vertu d'un mandat qui pourra ne lui pas être applicable, pourra en référer au tribunal du lieu de l'arrestation, lequel prononcera sur cette réclamation, toute affaire cessante.

« Art. 5. Nul prévenu ne sera mis au secret sans que, dans les 3 jours, il ne soit rendu compte par le juge d'instruction à la chambre du conseil, qui, sur le réquisitoire du procureur du roi, pourra autoriser la continuation de cette mesure pour 5 autres jours au plus. Cette autorisation pourra être renouvelée lorsque la chambre du conseil en reconnaîtra l'absolue nécessité.

« Art. 6. Tout gardien de maison d'arrêt ou de justice qui aura tenu au secret un prévenu sans avoir inscrit sur son registre l'ordonnance qui aura prescrit cette mesure, ou au delà du terme fixé, sera passible des peines prononcées par l'article 343 du Code pénal.

« Le prévenu pourra, en outre, former une demande en dommages-intérêts contre le gardien, et méme prendre à partie le magistrat qui aura illégalement autorisé cet acte de rigueur..

J'avais besoin moi-même, Messieurs, de relire cette proposition pour me convaincre qu'une grande partie des critiques de M. le garde des sceaux n'était pas suffisamment fondée, et que la Chambre pouvait et devait la prendre en considération.

Je commencerai, au reste, par remercier M. le garde des sceaux de ce qu'il a bien voulu ne pas opposer une fin de non-recevoir à cette proposition. Elle touche en effet à la liberté individuelle, et, du moment que les changements faits au Code pénal en 1832 n'ont rien statué sur cette matière ni sur tout ce qui la regarde, je crois que la Chambre ne doit pas s'arrêter à l'objection qui vous a été faite à ce sujet par un honorable collègue dans la dernière séance.

Et, quant à moi, de même que je repousserais toute innovation à l'égard des mesures réformatrices qui ont été adoptées en 1832, jusqu'à ce que l'expérience les rende nécessaires, de même je ne concevrais pas qu'on pùt opposer une fin de non-recevoir aux améliorations réclamées par un habile jurisconsulte, et sur laquelle il n'a rien été préjugé par la législation de 1832.

Autrement, Messieurs, M. le garde des sceaux lui-même ne pourrait pas vous présenter des améliorations sur la constitution des chambres d'accusation, sur toutes les matières qui peuvent appeler des améliorations. M. le garde des sceaux a combattu la proposition sur 3 rapports. D'abord il a fait une observation très juste dans sa généralité, mais qui ne me paraît pas tomber sur la proposition. M. le baron Roger propose de

donner au juge d'instruction la faculté de retirer le mandat de dépôt qu'il aurait donné d'office, sans qu'il soit besoin d'avoir recours au ministère public, et d'en appeler à la chambre du conseil.

M. le garde des sceaux s'est fondé sur la disposition du Code d'instruction criminelle, qui veut que les mandats ne puissent être décernés sans le concours du ministère public. Il dit que ce serait une grave dérogation au Code d'instruction criminelle, et qu'elle serait funeste. Je conviens avec lui qu'il peut y avoir de graves objections à refuser le concours du ministère public pour les actes qui sont relatifs à la liberté individuelle. Le juge d'instruction pourrait, dans tous les cas, avant de rapporter le mandat qu'il a décerné, en référer auparavant au ministère public. Je conviens qu'il peut y avoir de bonnes raisons à alléguer par le ministère public, et dans tous les cas, c'est un principe incontestable en droit criminel que le ministère public doit être entendu.

Mais cependant la proposition de notre honorable collègue M. Roger, ne manque pas de logique ni de raison, et se justifie par d'assez bonnes considérations. S'il était vrai, comme l'a dit M. le garde des sceaux, que ce soit le procureur du roi qui décernât tous les mandats, et que le juge d'instruction n'en décernât qu'en cas de flagrant délit, il serait vrai aussi qu'alors le ministère public aurait la principale part dans les mesures relatives à la liberté individuelle. Mais je crois que M. le garde des sceaux ne me démentira pas quand je dirai qu'il a pris l'inverse des attributions du juge d'instruction et du procureur du roi. Ce magistrat n'a droit de décerner de mandat qu'en cas de flagrant délit, et c'est au juge d'instruction que la loi confie le droit de délivrer les mandats qui tendent à priver un individu de sa liberté; et quand on dit vulgairement dans le monde qu'un citoyen a été mis à la disposition du procureur du roi, c'est une locution vicieuse qui tendrait à altérer le véritable caractère de notre législation. La loi ne met à la disposition du procureur du roi que les condamnés.

Les personnes qui ne sont pas condamnées sont à la disposition des magistrats. Ainsi, comme c'est le juge d'instruction qui est chargé de décerner les mandats en tout ce qui tient à la liberté individuelle, M. le baron Roger a été fondé à demander que le juge d'instruction n'eût à rendre compte qu'à lui-même de la rétractation d'un mandat qu'il a décerné d'office sans réquisition du ministère public.

En effet, il peut se rencontrer une foule de circonstances où il serait vexatoire que le juge d'instruction fût obligé de recourir à la chambre du conseil ; cette chambre peut être difficilement assemblée, et il y a urgence qu'il soit statué immédiatement sur la liberté.

Du reste, comme l'auteur de la proposition, je ne récuse pas l'intervention des magistrats de la chambre du conseil, quand le ministère public et le juge d'instruction ne sont pas d'accord.

J'accorde même à M. le garde des sceaux que le juge d'instruction ne puisse agir sans contradicteur.

Je ferai plutôt à la proposition de M. le baron Roger le reproche de ne pas aller assez loin. En effet, les publicistes, les criminalistes ont depuis longtemps reproché à la forme du mandat de ne présenter de garanties suffisantes; je dirai même

les garanties constitutionnelles accordées par la Constitution de l'an VIII, et qui sont en harmonie avec la Charte qui protège la liberté individuelle. Aussi le mandat d'arrêt est soumis à des formalités qui sont la garantie des citoyens.

Il faut que les faits pour lesquels un individu est arrêté soient exprimés dans le mandat, ainsi que la disposition de la loi qui qualifie le fait crime ou délit. C'est là une garantie véritable.

Les mandats de dépôt ne sont soumis à aucune de ces formalités, ils ne sont pas même contresignés par un greffier en telle sorte que pour se décharger de la responsabilité qui pèse sur l'auteur d'un mandat d'amener, on délivre un mandat de dépôt; et de cette manière les garanties que la société et la loi constitutionnelle exigent n'existent pas, ou disparaissent à l'aide d'un mandat de dépôt. Aussi un criminaliste qu'on n'accusera pas, ou qu'on accuserait à tort, d'être un théoricien sans application, comme on l'a fait à l'égard de l'honorable M. Roger, qui a rempli avec distinction les fonctions d'avocat aux conseils et à la Cour de cassation, et qui se connaît aussi bien en pratique qu'en théorie ce reproche irait plus loin encore, il atteindrait l'honorable magistrat dont la science peut bien entrer en balance avec celle de M. le garde des sceaux; le criminaliste que je voulais citer, Legraverend, a fait ressortir les inconvénients actuels qui résultent des mandats de dépôt. 11 demande que des formalités imposées au mandat d'arrêt leur soient appliquées, et qu'ils soient contresignés par le greffier; vous comprendrez l'importance quand vous saurez qu'autrement ces mandats échappent à la censure de la Cour de cassation.

La Cour de cassation n'est appelée à prononcer que sur les procédures postérieures à la mise en accusation. Toutes les procédures antérieures échappent à son examen, et il ne reste plus que la triste et illusoire ressource de la prise à partie.

Si le mandat de dépôt était signé par un greffier, il y aurait au moins la sanction de l'amende prononcée par l'article 412 du Code.

Je pense avoir démontré que, sous ce premier rapport, M. le baron Roger n'a pas été assez loin; et si vous renvoyez la proposition dans les bureaux, la législation actuelle, qui a dérogé à la Constitution de l'an VIII, sera complétée de manière à remplir le vœu de la Charte.

La Constitution de l'an VIII, par son article 77, voulait ainsi :

« Pour que l'acte qui ordonne l'arrestation d'un citoyen puisse être exécuté, il faut : 1° qu'il exprime formellement le motif de l'arrestation, et la loi en exécution de laquelle elle est ordonnée. »

Du moment que le mandat de dépôt a pour résultat de priver un citoyen de la liberté, il n'existe aucun motif de les affranchir de cette garantie; or, les mandats de dépôt sont habituellement préférés par les juges d'instruction; et au moyen du Code qui en règle la forme, ils échappent à toute formalité.

D'où je conclus que la proposition doit être prise en considération, afin de rétablir une garantie constitutionnelle qui a été fort malheureusement effacée exclusivement par les mandats d'arrêt.

Je passe maintenant au deuxième point de la proposition. Il s'agit de la quotité du cautionnement. Cette mesure est véritablement indispensable à cause de l'inégalité des fortunes; et j'a

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