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(Les deux premiers paragraphes sont adoptés.)

M. le Président. Il serait convenable de faire de ces deux paragraphes un article 1er, parce qu'ils statuent d'une manière définitive, quand les deux autres s'occupent du transitoire.

M. Duséré, rapporteur. La majorité de la commission, consultée à ce sujet, a été de l'avis de la division proposée par M. le Président.

(Les deux paragraphes ci-dessus votés, formeront l'article 1r de la proposition de loi.)

M. de Montozon. Le deuxième paragraphe de l'article est ainsi conçu Cette enquête sera faite par l'Administration, ou d'office, ou sur la demande du conseil général. »

En proposant cette rédaction, le rapporteur de la commission s'exprime ainsi :

<< Sans doute, l'Administration ne fera jamais difficulté de fournir aux conseils généraux les moyens de connaître les vœux du pays par cette enquête.

"

Sans doute, elle n'essaiera jamais d'empêcher les votes des conseils généraux, en refusant d'y faire procéder.

Cependant, il a paru d'une sage prévoyance d'assurer aux conseils généraux le libre exercice de leurs droits contre toute éventualité. »

C'est pour compléter la garantie que la commission a voulu donner au conseil général, que j'ai l'honneur de vous proposer le paragraphe additionnel suivant :

« Dans ce dernier cas, la délibération du conseil général qui ordonnera l'enquête déterminera le nombre des membres de la commission d'enquête, et leur répartition entre les arrondissements intéressés à la route dont il s'agira. »

Messieurs, lorsqu'il s'agira d'élever un chemin au rang de route départementale, il y aura presque toujours plusieurs arrondissements intéressés à cette mesure. Si vous laissez à l'Administration seule le soin de composer la commission d'enquête comme elle le jugera convenable, il pourra arriver que le préfet, préoccupé de motifs louables peut-être dans leur principe, mais cependant peu équitables dans leur application, veuille favoriser tel arrondissement aux dépens de tel autre, ou faire prévaloir un projet sur un autre.

L'Administration qui voudrait arriver à ce but aurait un moyen bien simple à sa disposition. S'il y avait, par exemple, à nommer une commission d'enquête de sept membres pour une entreprise qui intéresserait trois arrondissements, il est certain que si le préfet prend la majorité de la commission dans un seul arrondissement, il y en aurait deux qui ne seraient représentés que d'une manière tout-à-fait illusoire, et dès lors l'enquête manquerait tout à fait son but, qui doit être la manifestation de l'opinion la plus conforme à l'intérêt général du département.

On dira peut-être qu'on ne peut supposer que l'Administration puisse tomber dans de telles erreurs; mais je crois qu'il est toujours bon que, lorsqu'il s'agit d'intérêts comme ceux-là, qui touchent à la propriété particulière sur un grand nombre de points, qui mettent en jeu des intérêts aussi variés et souvent aussi opposés les uns aux autres, il est bon, dis-je, que la loi comprenne toutes les garanties possibles.

Et permettez-moi de vous citer, Messieurs,

un exemple de cette vérité dans la loi même à laquelle se rapporte la proposition qui nous occupe.

Lorsque les Chambres ont adopté la loi de juillet 1833 sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, la commission avait proposé de déterminer, dans la loi même, les formes des enquêtes. Cette proposition fut rejetée; on s'en rapporta à l'Administration. Eh bien! Messieurs, il en est résulté, suivant moi, un grave inconvénient. Le gouvernement a dù faire un règlement d'administration publique pour l'exécution de cette loi; ce règlement est de février 1834. Il existait auparavant une ordonnance sur la même matière, celle du 28 février 1831, qui prescrivait que toutes les ouvertures de routes et de canaux qui seraient entreprises seraient préalablement soumises à une enquête; et cette ordonnance de février 1831 prescrivait toutes les formes de l'enquête.

Il y avait au nombre de ces formalités-là une garantie précieuse pour les départements; c'était celle résultant de l'article 8 de l'ordonnance dont je parle, qui portait :

Si l'enquête est encore ouverte, ou si, l'enquête étant fermée, la décision du gouvernement n'est point encore arrêtée à l'époque de la tenue des conseils généraux et des conseils d'arrondissement, ces conseils seront appelés à exprimer leur opinion sur les avantages ou les inconvénients de l'entreprise projetée.

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Eh bien! dans le règlement d'administration publique de février 1834, pris sur l'exécution de la loi de juillet 1833, la condition d'intervention des conseils généraux et des conseils d'arrondissement a été entièrement omise, de manière qu'il peut arriver aujourd'hui que le gouvernement statue sur un travail aussi important que l'ouverture d'une route ou d'un canal, qui peut porter de graves atteintes aux intérêts des départements, ou causer un déplacement majeur dans ces mêmes intérêts, sans être obligé de consulter préalablement le conseil général et les conseils d'arrondissement.

Et cependant, je vous le demande, Messieurs, si lorsque la Chambre a voté la loi de 1833 on fût venu proposer ici que les conseils genéraux ne fussent pas appelés à émettre leur opinion dans l'enquête sur des travaux de cette nature, cette proposition n'eût-elle pas été unanimement rejetée? Cependant, il résulte de ce que cette disposition a été omise dans la loi, que le gouvernement l'a omise également dans le règlement d'administration publique fait pour l'exécution de la loi.

Cet exemple me confirme dans l'opinion que les lois doivent toujours présenter le plus de garanties possible, quand il s'agit d'intérêts aussi graves que ceux-ci c'est cette considération qui a dicté l'amendement que j'ai eu l'honneur de proposer, et que je soumets à la décision de

la Chambre.

M. Duséré, rapporteur, monte à la tribune.

Un grand nombre de voix : L'amendement n'est pas appuyé!

M. Duséré, rapporteur. M. le Président m'atteste qu'il est appuyé; je dois le combattre.

Le moyen de repousser cet amendement est simple.

Lorsque fut discutée la loi de juillet 1833, on proposa d'y régler les formes de l'enquête do.it cette loi créa la nécessité.

La proposition faite à cet égard fut rejetée,

soit par la Chambre des députés, soit par la Chambre des pairs. On y soutint, et avec raison, que la loi ne devait que poser des principes, et qu'à l'Administration seule appartenait le soin de mettre ces principes en action.

Ce qui fut alors décidé, quelle raison y auraitil pour ne pas le décider aujourd'hui ?

Si du moins l'auteur de l'amendement pouvait prétendre que l'enquête ordonnée par la loi actuelle a une plus grande importance que celle ordonnée par la loi du mois de juillet 1833, je concevrais qu'à raison de cette plus grande importance, le législateur fit aujourd'hui ce qu'il crut superflu de faire en 1833.

Mais dans la loi de 1833, il s'agissait de tous les grands travaux d'utilité publique, et, dans la loi actuelle, il ne s'agit que des routes départementales.

Lors donc que, dans la première, vous ne voulûtes rien régler du mode d'exécution, quant à l'enquête, vous n'admettrez pas, dans la seconde, la proposition qui vous est faite sur ce mode d'exécution; car il y a aujourd'hui beaucoup moins d'interêt à le faire qu'à la première des deux époques.

J'irai plus loin. La loi de juillet 1833 met pour les grands travaux le gouvernement qui les veut faire, en présence de la population qui les voudrait empêcher; il n'y a pas entre eux d'intermédiaire.

Pour les routes départementales, il peut bien y avoir lutte entre l'utilité publique et des intérêts privés; mais il y a entre ceux-ci et le gouvernement un intermédiaire. Il y a les conseils généraux, qui, prenant dans l'enquête tous les moyens possibles de s'éclairer, en combattront néanmoins les erreurs, et garantiront aux intérêts que celles-ci pourraient compromettre, une protection d'autant plus rassurante que ces conseils sont les mandataires, les représentants de tous ceux qui peuvent avoir intérêt à ce que les travaux sur l'utilité desquels doit porter l'enquête soient ou ne soient pas autorisées.

Je demande le rejet de l'amendement proposé. M. de Montozon. Je regrette que M. le ministre de l'intérieur ne soit pas présent à la séance, car j'aurais désiré qu'il s'expliquât sur cette circonstance singulière que j'ai fait remarquer à la Chambre, relativement à l'exécution de la loi de juillet 1833. C'est que, dans lordonnance rendue pour l'application de cette loi, on a omis une garantie précieuse pour les départements, qui existait dans l'ordonnance dé février 1831.

Si M. le ministre de l'intérieur eût été présent, je lui aurais demandé si, quand il se présentera des circonstances de cette nature, c'est-à-dire quand il s'agira de tracer de nouvelles routes ou de creuser de nouveaux canaux, il croira pouvoir se dispenser de consulter les conseils généraux; si, enfin, depuis la loi de 1833, nous serions entrés dans un système moins liberal qu'en 1831. Quant à moi, je pensais que ce devrait être le contraire, et que si l'intervention du conseil général était alors reconnue nécessaire, elle devrait l'être à bien plus forte raison aujourd'hui que les conseils généraux sont le produit de l'élection.

M. Legrand. Je n'ai qu'un mot à répondre à M. de Montozon: c'est qu'il n'y a pas un seul canal, une seule route, une seule entreprise quelconque d'un interet un peu étendu, que le gouvernement ait jamais ordonne de sa pleine

science; toujours ces travaux ont été provoqués par les conseils d'arrondissements où par les conseils généraux. L'Administration ne peut guère, à cet égard, devancer les besoins du pays; si le règlement d'administration ne parle pas des conseils d'arrondissements ou des conseils généraux, c'est qu'ils ne sont pas en permanence. Mais, je le répète, je mets M. de Montozon au défi de citer un seul canal, une seule route royale, qui jamais ait été entreprise sans le vote des conseils généraux et des conseils d'arrondissements.

M. de Montozon. J'accepte l'assurance de M. le directeur des ponts et chaussées; mais puisque l'intention du gouvernement est de ne jamais décider sans avoir entendu les conseils généraux, il est, je le répète, tout à fait extraordinaire qu'il ait fait disparaître de l'ordonnance de 1834 une disposition qu'il avait introduite de son propre mouvement dans le règlement de 1831. Il me suffit aujourd'hui de l'assurance de M. le directeur géneral, pour que je sois convaincu qu'à l'avenir jamais le gouvernement ne statuera sans cette garantie; au surplus, la loi d'attributions départementales pourvoira à cette lacune, je l'espère, de manière à rendre l'intervention des conseils généraux obligatoire.

(L'amendement est retiré.)

M. le Président donne de nouveau lecture du paragraphe 3 de l'article de la commission, et annonce qu'il formera un article à part.

Ce paragraphe, devenu l'article 2 de la proposition de loi, est mis aux voix et adopté; il est ainsi conçu :

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Le tout sans préjudice des mesures d'administration prescrites par le titre 2 de la loi du 7 juillet 1833, et relatives à l'expropriation.

M. le Président. On va procéder au scrutin sur l'ensemble de la loi.

M. Glais-Bizoin. Monsieur le Président, M. Dupont (de l'Eure) demande à prêter serment. (M. Dupont (de l'Eure), admis dans la séance du 22 décembre dernier, prête serment.)

On procède au scrutin sur l'ensemble de la proposition de loi relative au classement des routes départementales.

En voici le résultat :

Nombre des votants....
Majorité absolue..
Boules blanches.
Boules noires...

La Chambre a adopté.

267

134

211 56

(La séance est levée à quatre heures trois quarts.)

Ordre du jour du samedi 31 janvier 1835.

A une heure précise, séance publique. Rapport de la commission des pétitions. (Voir le feuilleton no 55.)

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Séance du samedi 31 janvier 1835.

La séance est ouverte à une heure et demie. Le procès-verbal de la séance du vendredi 30 janvier est lu et adopté.

Cent quarante-six pétitions sont renvoyées à la commission compétente.

M. le Président. Il a été fait hommage à la Chambre par M. Emile de Girardin d'un ouvrage intitulé Le véritable programme, ou ce qui s'est fait, ce qu'il fallait faire, ce qu'il faudrait faire.

(La Chambre en ordonne la motion au procèsverbal et le dépôt en sa bibliothèque.)

L'ordre du jour appelle plusieurs rapports de la commission des petitions.

M. Auguste Giraud, 1er rapporteur. Le sieur Simon Cristinauc, ex-instituteur à Vico, departement de la Corse, expose à la Chambre qu'amené, par suite des événements de notre glorieuse révolution, sur le sol d'Alger, il conçut le projet d'y exercer sa profession d'instituteur secondaire; mais quelque louables, quelque pures que fussent les intentions du pétitionnaire, il lui fut impossible de les réaliser dans un pays qui, suivant lui, est devenu le théâtre de Tñorreur et du brigandage, et où le despotisme militaire s'oppose au développement de toute pensée noble et généreuse.

La vue de cet état de choses détermina le sieur Cristinauc à changer de dispositions; mais un ordre d'embarquement émane du géneral Trezel l'empêcha de mettre à exécution ses nouveaux projets deux agents de la force publique l'amenèrent à bord du bateau à vapeur le Castor, et là il fut mis aux fers jusqu'au départ de ce bâtiment pour Toulon.

Le pétitionnaire demande en vertu de quel code un pareil acte d'arbitraire a été commis à son égard; il ne réclame pas l'application des lois penales contre le genéral signataire de son ordre d'embarquement, mais il lavoque la justice de la Chambre et son intervention pour que cet officier soit hautement blâmé de sa conduite, et invité à montrer désormais plus d'humanité et de modération.

Le sieur Cristinauc ne rapporte aucune preuve à l'appui des faits consignés dans sa réclamation; il ne s'explique pas non plus sur les motifs qui l'ont empêche d'exercer à Alger les fonctions d'instituteur. Votre commission n'a rien vu, dans les réflexions du pétitionnaire, qui indiquât qu'il se fût adressé et pourvu aupres des autorités compétentes pour réclamer contre la conduite que l'on aurait tenue à son égard. Les récrimi

nations du pétitionnaire ne peuvent être considérées que comme de simples allégations qui, pour avoir quelque apparence de fondement, devraient être appuyées sur des pièces officielles. Dans tous les cas, ce ne serait qu'après un déni de justice que la Chambre pourrait intervenir; le petitionnaire ne s'est adressé à aucune autorité avant de recourir à vous. Jusque-là, votre commission ne peut que vous proposer l'ordre du jour. (Adopté.)

Le sieur Proquez, à Paris, expose à la Chambre qu'après avoir été employé pendant 35 ans 9 mois dans divers administrations, et avoir subi la retenue de 3 010 sur ses appointements, il a été mis en retraite au 1er avril 1832.

A l'époque de sa mise en retraite, le pétitionnaire exerçait, depuis dix-huit ans, les fonctions de chef de comptabilité à l'intendance des MenusPlaisirs et du mobilier de la Couronne; aussi devenait-il, par ce fait, pensionnaire de la caisse de veterance; et, en effet, sa pension a été liquidée par les soins de M. le commissaire du roi près de l'ancienne liste civile, et le brevet provisoire lui a eté délivré. Cependant la loi qui doit fixer le sort des pensionnaires de la caisse de véterance n'est pas encore rendue, et le défaut de payement des arrérages qui lui sont dus laisse le petitionnaire dans la plus affreuse situation; c'est ce qui le met dans la nécessité de demander l'intervention de la Chambre auprès de M. le président du conseil des ministres l'obtention du paiement de sa pension. pour

La pétition du sieur Proquez est digue de votre intérêt; la position de ce pétitionnaire, comme celle de ceux qui ont les mêmes droits, fait désirer qu'enfin une loi vienne régler le sort des pensionnaires de la caisse de vétérance. Un ministre du roi a dit, il y a quelques jours, à l'autre Chambre, et à l'occasion d'une pétition de même nature, qu'incessamment une loi serait présentée qui permettrait de venir au secours des anciens pensionnaires de la caisse de vétérance; dans cette attente, votre commission vous propose le renvoi de cette pétition à M. le president du conseil des ministres.

M. Lherbette. Dans quel but le renvoi ?

M. le Président. Vous opposez-vous au renvoi ?

M. Lherbette. Je m'oppose au renvoi parce que je n'en comprends pas les motifs.

M. Auguste Giraud, rapporteur. Nous l'avons demande pour que les titres du pétitionnaire soient examinés.

M. le Président, à M. Lherbette. Quel est votre proposition? faites-en une.

M. Lherbette. Je demande l'ordre du jour. M. le Président. L'ordre du jour est proposé par M. Lherbette. Je vais consulter la Chambre. M. le général Demarçay. De quoi s'agit-il? M. le Président. Le rapporteur a fait son rapport, il fallait écouter.

De toutes parts: On ne l'a pas entendu !
M. le Président. A qui la faute ?

(M. le rapporteur donne une nouvelle lecture du rapport.)

M. Lherbette. Messieurs, je ne conteste pas les droits qu'un pétitionnaire peut avoir à une pension sur la caisse de vétérance. Je dis seulement que la Chambre n'a pas à s'immiscer dans cette question d'intérêt purement privé. Des projets de loi ont été présentés plusieurs fois sur la

liquidation de la caisse de vétérance et une commission est nommée en ce moment pour en préparer un nouveau. D'ici là, à quoi servirait votre renvoi? le ministre n'a pas de fonds. Il existe bien un fonds de retenues appartenant à la caisse de véterance; mais le ministre n'a pas le droit d'en disposer. Voudriez-vous simplement, par un renvoi, solliciter la présentation d'un projet de loi? Mais nous avons l'initiative, et nous ne devons provoquer le ministère à user de ce droit, qui lui appartient comme à nous, que dans le cas où il aurait seul les documents pour préparer les projets.

A l'occasion de cette pétition, je demande à la Chambre la permission de lui rappeler les principes relatifs aux pétitions. Je crois que la Chambre se montre trop facile pour les renvois au ministère. Nous sommes nommés pour nous occuper, non d'interêts privés, mais de questions d'intérêt géneral.

C'est un abus de renvoyer ainsi légèrement des pétitions au ministre. Si vous voulez lui renvoyer celle-ci, il faudrait décreter des londs, et prejuger la question que vous aurez à résoudre lors de l'examen du projet de loi relatif à la caisse de veterance, sauf le cas où les recours judiciaires ont éte épuises, où le ministère refuserait d'adherer à des jugements, ou bien où il y aurait déni de justice. La Chambre ne doit ordonner des renvois qu'autant qu'il s'agit de questions d'intérêt public. (Murmures.)

M. Fulchiron. C'est une erreur.

M. Lherbette. L'honorable M. Fulchiron dit que je commets une erreur. Je crois, au contraire, énoncer les vrais principes. En les méconnaissant, la Chambre s'erige en tribunal ou descend au rôle de solliciteur, tandis qu'elle doit rester Corps législatif.

Si le droit de pétition jusqu'à présent a été presque dérisoire, ç'a été en grande partie par l'abus que la Chambre a fait de renvois au ministère.

Lorsque nous ne les ordonnons qu'avec réserve, dans les limites des principes que j'énonce, alors nous pourrons demander avec plus d'autorité que le ministère y ait egard, et nous devrons provoquer une loi qui l'oblige à rendre, après certain délai, compte des petitions à lui renvoyées.

M. Guizot, ministre de l'instruclion publique. Cela n'est pas admissible!

M. Réalier-Dumas. Je ne saurais approuver, quant à moi, les principes qui viennent d'ètre professés par l'honorable collègue qui descend de la tribune. On doit recourir à la voie de pétition toutes les fois qu'il y a eu infraction aux lois, toutes les fois qu'il y a eu injustice commise. Toutes les fois qu'un citoyen n'est pas traité selon son droit où la justice, c'est auprès de nous députés qu'il vient chercher un dernier refuge, et c'est avec votre renvoi que vous appelez l'attention des ministres sur un acte d'injustice qu'ils peuvent avoir commis sans aucune intention de le commettre.

M. Lherbette, Vous m'avez mal compris. J'ai dit qu'il fallait ordonner les renvois au ministère de petitions d'intérêts privés, quand les pétitionnaires avaient épuisé les recours judiciaires, en cas de justice ou de refus d'oblempérer à un droit reconnu par jugement.

M. le Président. La commission a proposé le renvoi au président du conseil, M. Lherbette

a proposé l'ordre du jour ; je vais mettre l'ordre du jour aux voix.

(L'ordre du jour n'est pas adopté. Le renvoi à M. le président du conseil, proposé par la commission, est ordonné.)

(Les rapports de pétitions sont interrompus.) M. le Président. La parole est à M. le comte Roger pour un rapport d'élection.

Rhône.

M. le comte Roger, rapporteur du 8 bureau, propose l'admission de M. Verne de Bachelard, élu par le quatrième collège du département du Rhône; les opérations electorales ont été reconnues régulières et les pièces concernant l'éligibilité ont été soumises.

M. Verne de Bachelard est admis.

M. le Président. La parole est à M. Roul pour un autre rapport d'élection.

Aude. M. Roul, rapporteur du 5° bureau, propose ensuite l'admission de M. Esperonnier, elu par le cinquième collège du département de l'Aude, les operations électorales ont été reconnues régulières et les pièces constatant l'éligibilité ont eté fournies.

M. Esperonnier est admis,

MM. Verne de Bachelard et Esperonnier pré

tent serment.

La Chambre donne acte du serment.

(Les rapports de pétitions sont repris.)

M. le Président. M. Thil a la parole pour un rapport de petitions.

M. Thil, 2 rapporteur. Deux pétitions, sous les numéros 6 et 25 du rôle général, sont présentées à la Chambre dans l'intérêt de l'ex-gendarmerie de Paris, qui demande 416,248 fr. 45 c. d'indemnites pour les pertes qu'elle a éprouvées en juillet 1830.

Les pétitionnaires s'appuient sur la généralité des termes de la loi du 30 août 1830, dont nous allons bientôt vous signaler quelques dispositions, sur la liquidation faite en leur faveur par la commission nommée pour l'exécution de cette loi, et sur le renvoi que la Chambre des pairs a fait de leur demandé à M. le ministre de l'intérieur.

Ils cherchent, au reste, à établir que le rejet par la dernière Chambre des députés de l'indemnité de 416.248 francs est le résultat de l'erreur où elle était sur leur conduite après l'apparition des ordonnances de Juillet, et ils groupent divers faits et circonstances de nature, suivant eux, à prouver qu'ils ne méritent pas les reproches qu'on leur a adressés, et qu'ils sont dignes d'invoquer le bénéfice de la loi du 30 août.

Votre commission, convaincue qu'un simple exposé de ce qui a eu lieu lors du rejet législatif, des indemnités de nouveau réclamées, suffira pour justifier aux yeux de la Chambre la conclusion qu'elle lui proposera d'adopter, ne s'oc cupera pas des détails dans lesquels sont entrés ¦ les pétitionnaires, et elle s'abstiendra de retracer. en ce qui peut les concerner, les événements qui se sont rapidement succédé dans la capitale. lorsque les citoyens ont glorieusement combatt pour la défense des lois et l'indépendance da

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Ce double but fut atteint par la loi du 30 aoùt 1830, qui notamment dans son article 2, déclara qu'il serait accordé des indemnités aux frais de l'Etat.

En exécution de l'article 4 de cette loi, une commission chargée de faire les recherches nécessaires pour constater les titres de ceux ayant droit à des indemnités, fut nommée par le roi. Cette commission se livra à de nombreuses investigations, fit un travail pénible et étendu, et prononça sur un grand nombre de demandes.

Elle élagua beaucoup de réclamations; et, par exemple, elle rejeta une demande en indemnité de 82,000 francs formée par l'archevêque de Paris, en déclarant qu'il n'y avait lieu de faire l'application à ce prélat de la loi du 30 août 1830. » Elle rejeta d'abord également, et par le même motif, l'indemnité de 700,000 francs, réclamée par l'ex-gendarmerie de Paris.

On revint bientôt à la charge; le ministre de l'intérieur appuya la demande de l'ex-gendarmerie; on réduisit les 700,000 francs, auxquels les pertes étaient évaluées, à 416,248 fr. 55, et cette somme fut enfin allouée par la commission.

Toutes les indemnités liquidées par la commission formèrent un capital de 2,200,000 francs, pour lequel le gouvernement présenta un projet de loi que la dernière législature discuta dans les séances des 18 et 19 février 1833.

Le débat s'ouvrit sur un amendement ayant pour objet le retranchement de l'indemnité accordée à la gendarmerie. Un assez grand nombre d'orateurs furent entendus M. le ministre de l'intérieur et quelques honorables membres de la commission de liquidation parlèrent contre l'amendement; plusieurs députés le défendirent, et, après une vive discussion, la Chambre, reconnaissant que la loi du 30 août ne pouvait profiter à l'ex-gendarmerie de Paris, adopta l'amendement à l'unanimité, moins un seul membre qui se leva contre.

L'adoption de cet amendement et quelques autres faibles retranchements réduisirent à 1,605,505 fr. 8 c., les 2,200,000 francs du projet de loi et l'article 1er (la loi a pour date le 3 avril 1833) fut conçu en ces termes : « Il est ouvert au ministre de l'intérieur un crédit de 1 million 605,505 fr. 8 c., applicables au payement des indemnités liquidées par la commission établie à Paris, en faveur des personnes dont les propriétés ont souffert par suite des événements de juillet 1830. »

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L'article 2 ouvre un autre crédit de 60,000 fr. applicable au payement des indemnités à liquider en faveur des habitants des départements dont les propriétés ont souffert par suite des mêmes événements ».

Enfin, pour qu'aucun autre crédit ne pût être demandé sous prétexte de nouvelles liquidations, la Chambre ajouta au projet de l'article 3, qui est ainsi conçu: « Le présent crédit est applicable aux réclamations admises jusqu'à ce jour. A l'avenir il ne sera plus reçu aucune réclamation.»

Les articles adoptés par la Chambre l'ont été également et sans aucune modification par la Chambre des pairs; et il est à remarquer que lors de la présentation du projet à cette Chambre, le ministre de l'intérieur, qui avait fortement appuyé l'indemnité pour l'ex-gendarmerie, ne chercha pas à la faire revivre. Deux classes de réclamants, dit-il dans son exposé, ont paru devoir être exclues du bénéfice de l'indemnité... Lorsque la loi s'exprimait en termes généraux, la commission et le gouvernement ne se seraient

T. XCII.

a

pas crus autorisés à prononcer des exclusions. C'était au pouvoir législatif seul qu'il pouvait appartenir de donner à une disposition législative une interprétation restrictive... Cette interprétation de la loi adoptée par la Chambre des députés a motivé une réduction de... »

Ainsi, Messieurs, la Chambre des députés a fixé, en 1833, le véritable sens de la loi du 30 août; elle a solennellement déclaré que cette loi ne pouvait être appliquée à l'ex-gendarmerie de Paris; et la loi du 3 avril, en accordant les sommes nécessaires pour le payement des indemnités justement et légalement liquidées, a fermé la porte à toutes nouvelles demandes.

Il est vrai, ainsi que l'articulent les pétitionnaires, que la Chambre des pairs a pris leur pétition en considération, et qu'elle l'a renvoyée à M. le ministre de l'intérieur. Nous n'avons pas cru devoir nous occuper des motifs de ce renvoi, ni les discuter; la décision de la Chambre des pairs ne nous est aucunement soumise, nous n'avons pas à la reviser, et elle ne peut enchaîner notre opinion.

Votre commission s'attachant donc uniquement à l'esprit et au texte de la loi du 3 avril 1833, et pensant qu'il y aurait inconséquence à renvoyer à un ministre une demande que cette loi repousse énergiquement, a l'honneur de vous proposer de passer à l'ordre du jour sur les deux pétitions de l'ex-gendarmerie de Paris. (Adopté.) Le sieur Delafaut, ancien officier retraité, demeurant à Villeneuve-lès-Avignon, voudrait que la Chambre s'intéressât au sort des ex-ministres de Charles X détenus au fort de Ham, et intercédât pour eux auprès du roi, afin d'obtenir leur grâce.

M. Golbéry. Je demande la parole.

M. Thil, rapporteur. « Votre intermédiaire unanime, dit le pétitionnaire, peut porter l'auguste magnanimité du roi à rompre enfin les fers des hommes que des circonstances fortuites ont égarés un moinent... Quel est l'homme qui peut croire échapper à l'inclination (ce sont les termes de la petition) que son rang lui commande de suivre, surtout lorsqu'il touche de trop près le trône de son souverain? Je laisse à vous, Messieurs, le droit de prévenir tout ce que ma faible éloquence ne peut vous exprimer... »

Votre commission n'a pas cru devoir vous proposer de vous associer au vœu que forme le pétitionnaire, et de demander la grâce des exministres condamnés par la Chambre des pairs. Le droit de grâce, attribué au roi par l'article 58 de la Charte, est une prérogative qui doit être exercée librement, et sans aucun concours du pouvoir législatif.

Les ex-ministres, le pétitionnaire lui-même peuvent implorer la clémence du roi; mais la pétition du sieur Delafaut est inutilement adressée à la Chambre, parce qu'elle ne peut signaler en faveur des prisonniers du fort de Ham aucune erreur à redresser, aucune injustice à réparer, aucun droit légitime méconnu et à faire respecter.

En conséquence, votre commission a l'honneur de vous proposer de passer à l'ordre du jour sur la petition du sieur Delafaut.

M. Golbéry. Je viens m'opposer à l'ordre du jour, et demander le renvoi à M. le président du conseil. (Nombreux murmures.) Vous entendrez mes raisons. Vous ne pouvez pas demander l'ordre du jour avant de m'avoir entendu. (Parlez! parlez!) Le règlement dit que je serai entendu,

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