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Ordre du jour du mardi 17 février.

A midi et demi, réunion dans les bureaux, pour l'examen du projet de loi tendant à modifier l'article 28 du décret du 1er germinal an XIII. A une heure, séance publique. 1o Renouvellement des bureaux;

2o Discussion ou nomination d'une commission pour l'examen du projet de loi dont les bureaux se seront occupés avant la séance;

3° Rapport sur l'amendement proposé par M. le comte d'Ambrugeac au projet de loi relatif aux élèves des écoles spéciales, et discussion, s'il y a lieu, de ce projet de loi;

40 Rapports du comité des pétitions.

CHAMBRE DES PAIRS.

PRESIDENCE DE M. LE DUC DE BROGLIE, VICE-PRESIDENT.

Séance du mardi 17 février 1835.

La séance est ouverte à deux heures. MM. le président du conseil, ministre de la guerre, et le ministre de la marine sont présents. M. le secrétaire-archiviste donne lecture du procès-verbal de la séance du lundi 9 février, dont la rédaction est adoptée.

M. le Président. M. Proud'hon, doyen de la Faculté de droit de Dijon, fait hommage à la Chambre d'un ouvrage intitulé: Traité du domaine public.

(La Chambre ordonne le dépôt à sa bibliothèque.)

M. le Président. Je vais procéder au renouvellement des bureaux.

(Cette opération a lieu.)

M. le Président. Je propose à la Chambre de remettre à la prochaine séance l'organisation de ses bureaux et de passer immédiatement aux autres objets à l'ordre du jour.

De toutes parts: Oui, sans doute!

M. le Président. Le premier objet à l'ordre du jour est la discussion du projet de loi examiné dans les bureaux avant la séance, et relatif à la modification de l'article 28 du décret du 1er germinal an XIII (contraventions en matière de contributions indirectes), ou la nomination d'une commission à laquelle serait renvoyé cet examen. La Chambre veut-elle discuter, ou nommer une commission?

De toutes parts: Une commission!

M. le Président. La Chambre veut-elle désigner elle-même les membres de cette commission, ou en laisser le choix à son Président?

De toutes parts: Que M. le Président nomme! M. le Président. J'aurai donc l'honneur de proposer la composition suivante :

MM. le comte Bérenger, le comte Cholet, le comte Duchâtel, le baron de Fréville, Gautier, le comte de Montguyon, le comte Perregaux.

M. le Président. La suite de l'ordre du jour appelle le rapport de la commission sur l'amendement de M. le comte d'Ambrugeac, relatif au projet de loi qui concerne les élèves des écoles spéciales susceptibles d'être promus au grade de sous-lieute

nant.

Cet amendement tendrait à remplacer l'article unique du projet de loi par les deux articles suivants :

Art. 1or (de l'amendement proposé).

« Pourront être promus au grade de souslieutenant les élèves de l'Ecole spéciale militaire qui ont satisfait aux examens de sortie de ladite école, ainsi que les élèves de l'Ecole polytechnique qui sont admis à l'Ecole d'application d'état-major, lorsque, par suite de réductions dans les cadres constitutifs de l'armée, il n'existera pas d'emplois vacants au moment de leur sortie. Ils seront classés à la suite des officiers en activité par suppression d'emploi, et les dispositions des articles 7 et 17 de la loi du 19 mai 1834 leur seront applicables.

Art. 2 (de l'amendement proposé).

« Les dispositions de la présente loi seront appliquées aux élèves de l'Ecole spéciale militaire qui ont satisfait, en 1834, aux examens de sortie de ladite école, ainsi qu'aux élèves de l'Ecole polytechnique qui ont été admis dans la même année à l'Ecole d'application d'étatmajor.

La parole est à M. le comte Mathieu Dumas, rapporteur.

M. le comte Mathieu Dumas, rapporteur. Dans la dernière séance, la Chambre a bien voulu permettre, à cause de la faiblesse de ma vue, que je fisse lire mon rapport. Je demande aujourd'hui la même obligeance, et que M. le marquis de Laplace lise mon rapport sur l'amendement renvoyé à la commission.

M. le Président. M. le marquis de Laplace a la parole pour lire le rapport de M. le comte Mathieu Dumas.

M. le comte Mathieu Dumas, rapporteur. Messieurs, dans la dernière séance, où la discussion a été ouverte sur le projet de loi relatif à la promotion au grade de sous-lieutenant sans emploi des élèves de l'Ecole militaire et de l'Ecole polytechnique au mois d'octobre 1834, la Chambre, après avoir entendu la proposition incidente faite et développée par M. le comte d'Ambrugeac, en a renvoyé l'examen à la commission dont j'ai l'honneur d'être l'organe.

La question devenait d'autant plus grave, ainsi que l'a fait observer un de nos honorables collègues, qu'elle se compliquait encore par le nouveau point de vue sous lequel MM. le comte Dejean et le comte d'Ambrugeac venaient de la présenter. Pour se mieux éclairer, la commis

sion a invité nos honorables collègues et M. le commissaire du roi à se réunir à nous. Je vais comme je l'ai fait dans mon premier rapport, rendre à la Chambre un compte fidèle du débat qui s'est élevé entre les opinions diverses et du résultat auquel s'est fixée la majorité.

Nous avons pris pour texte, et comme le meilleur ordre de discussion, la proposition, et puisqu'elle a été ainsi qualifiée par son honorable auteur, je dirai l'amendement présenté par M. le comte d'Ambrugeac.

Cet amendement est sous vos yeux, et vous pourrez remarquer qu'il diffère de l'article unique proposé par le gouvernement: Premièrement, en ce qu'il supprime cette phrase : « Sans préjudicier à l'avancement des sous-officiers dans la proportion déterminée par la loi. Secondement, en ce que la rédaction de l'article 1er, de M. le comte d'Ambrugeac rend permanente la mesure exceptionnelle proposée par le gouvernement, et fait de cette déviation une règle fondamentale pour tous les cas semblables à celui qui la rend nécessaire aujourd'hui, et en ferait, selon l'expression très juste de l'auteur de l'amendement, un appendice à la loi sur l'état des officiers. Troisièmement, l'auteur de l'amendement, après avoir établi, par sa nouvelle rédaction, le principe de la permanence de cette loi exceptionnelle, en fait l'application aux élèves sortis des écoles en 1834.

Sur le premier point, la suppression de la phrase Sans préjudicier à l'avancement des sous-officiers dans la proportion déterminée par la loi », on a fait observer que cette garantie était au moins surabondante, puisqu'elle existe dans la loi d'avancement; que si elle était conservée, il faudrait y ajouter une explication : le motif allégué pour la nécessité de cette explication est la difficulté de s'accorder sur le mode d'exécution de l'article 11 de la loi d'avancement combiné avec l'application de l'article 7 de la loi sur l'état des officiers, qui destine pour le remplacement des officiers hors cadres la moitié des emplois vacants, et réserve l'autre moitié au cours ordinaire de l'avancement. On a répondu à cette objection spécieuse que l'expression de cette réserve était purement déclarative et n'avait d'autre but, d'autre portée que de rassurer les sous-officiers sur la conservation des avantages qui leur sont dévolus dans la proportion déterminée par la loi. La commission a pensé que cette expression générique, déterminée par la loi, comprend toutes les dispositions législatives sur la matière; qu'il est inutile d'y ajouter aucune explication et qu'il faut laisser au gouvernement le soin d'appliquer ces différentes dispositions.

Sur le second point, qui est la partie essentielle de l'amendement et que l'honorable auteur a si bien développée devant la Chambre, la commission a suivi, avec un vif intérêt, l'éloquente argumentation de l'honorable général. Il s'est attaché à nous démontrer que, puisqu'on ne pouvait s'empêcher de prévoir à une époque prochaine, et même dans un avenir plus éloigné, la même nécessité de recourir à une mesure législative exceptionnelle, toute semblable à celle qui est aujourd'hui l'objet de la loi proposée, il était sage d'y pourvoir d'avance et d'éviter au gouvernement de nouveaux embarras.

Tout en reconnaissant la justesse de ces motifs, on a répondu que l'amendement n'était admissible ni dans la forme dans laquelle il était présenté, ni au fond. Dans la forme, parce que,

tout en respectant le droit d'initiative que la Charte attribue aux Chambres, votre commission n'a pas pensé que l'exercice de ce droit påt s'étendre jusqu'à vous proposer, par voie d'amen dement, d'introduire une loi nouvelle, et remplacer ainsi la loi sur laquelle la Chambre est appelée à délibérer au fond, parce que cette disposition permanente est en discordance manifeste avec cet article fondamental de la li d'avancement: « Il ne pourra être nommé à un grade sans emploi. » De ce que des circons tances extraordinaires, soit qu'on en blâme, soit qu'on en justifie les causes, forcent à dévier de ce principe par une mesure législative transitoire, il n'en faut pas conclure que le princip doive être abandonné et faire une règle de cette exception par la seule raison qu'il n'est pas inpossible que des causes semblables amèner une semblable perturbation. Tout au contraire il importe d'affermir de plus en plus ce principe salutaire, base de toute bonne organisatio digue la plus sûre contre les abus que la le voulu prévenir. Il faut, disons-nous, l'affermi en restreignant au cas présent, qui la nécessite, la déviation à laquelle on est forcé par des motifs sur lesquels il n'y a pas de contestation.

C'est dans cet esprit de conservation religieuse du principe de la loi d'avancement, c'est dans la prévision de l'époque où sa rigoureuse exécu tion n'admettra plus de grade sans emploi, qu'a été conçu l'article unique du projet du gouvernement, et nous pensons qu'il faut s'y arrêter. L'adoption de l'amendement de M. le comte d'Ambrugeac, si elle était possible, donnerait au ministre une trop grande latitude pour la création de grades sans emploi, et consacrerait, comme un fâcheux précédent, la continuité des dérogations à la loi.

Quant au troisième point, objet de l'article! proposé par M. le comte d'Ambrugeac, la commission n'a point eu à s'en occuper, puisqu' n'est que la conséquence naturelle et immédiate du principe énoncé dans son article 1".

Dans cette discussion consciencieuse, les opnions ont été diverses et souvent balancée l'auteur même de l'amendement a paru disper à modifier la sienne, et à adhérer à un SLY amendement qu'a proposé M. le duc de Bassar et que son auteur voudra sans doute dévelop devant vous.

La majorité de votre commission m'a char de faire connaître à la Chambre qu'elle pers dans les conclusions de son premier rapper c'est-à-dire qu'elle a l'honneur de vous prop de nouveau l'adoption de l'article unique qu'il a été présenté par le gouvernement, suppression du paragraphe que la Chambre députés y avait ajouté.

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En terminant ce rapport, Messieurs, je devoir faire connaître à la Chambre que sa c mission a été constamment et également pr cupée de la position et des intérêts des s officiers et des élèves des écoles : elle croit de émettre le vœu que le gouvernement puis parer, en tout ce qui dépendra de lui, le ! mage que causera à ces élèves le retard de pédition de leur brevet.

M. le comte d'Ambrugeae. Messieurs. venez d'entendre le rapport de ce qui s'est ?samedi dernier dans le sein de votre col sion. Je persiste à croire, je suis même vaincu que nous n'abordons pas francheme question qui nous est soumise.

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En effet, si l'embarras dans lequel nous nous trouvons a pour cause première l'inexécution de la loi du 19 mai 1834, il est indispensable de rentrer le plus qu'il sera possible dans ses dispositions; tandis que les calculs qui sont joints au premier rapport de votre commission semblent avoir pour but de maintenir la loi, j'ose le dire, illégale, sous l'empire de laquelle se trouve placé le ministre de la guerre.

Loin de moi, Messieurs, la pensée d'adresser le moindre reproche aux ministres qui, pendant le cours de 1834, ont administré le département de la guerre! Je connais toutes les difficultés qu'ils ont eu à vaincre pour établir d'une manière complète les différentes dispositions de la loi du 19 mai 1834. Je les avais tellement appréciées, que, rapporteur de la commission chargée de l'examen de cette loi, j'avais, au nom de cette même commission, demandé que les dispositions contenues dans l'ordonnance du 9 mars 1834 fussent insérées dans la loi, ou, en d'autres termes, que la totalité des vacances fùt donnée par la loi sur l'état des officiers, aux officiers qui, par suite de la réduction dans les cadres, venaient de perdre leur emploi.

Par qui cette proposition de la commission at-elle été combattue? Par beaucoup d'entre vous; mais surtout par l'honorable maréchal qui avait alors le portefeuille de la guerre. Il a représenté avec justice qu'il était indispensable de laisser une part à l'avancement. Il vous a représenté tous les inconvénients qui pouvaient en résulter sous le rapport de cette émulation qu'il est si nécessaire d'entretenir dans l'armée. Vous avez approuvé les idées du ministre, et en conséquence, par l'article 7 de la loi du 19 mai 1834, vous avez borné les droits des officiers hors cadre à la moitié des emplois.

Je dis, Messieurs, que si les dispositions de cette loi avaient été rigoureusement observées, qu'il ne se fut pas présenté des obstacles qu'on n'a pas cru possible de vaincre, nous ne serions pas dans la position où nous sommes, et surtout nous ne serions pas exposés à nous y trouver lans un avenir prochain.

Il est donc indispensable de rappeler à votre némoire, aussi sommairement qu'il me sera ossible, les différentes dispositions de la loi du i avril 1832 et de celle du 19 mai 1834, qui, une et l'autre, forment le code, en quelque orte, d'avancement et de position des officiers e l'armée.

N'oublions jamais ce grand principe: Le grade st la propriété de l'officier; l'emploi est à la isposition du roi. Le grade, cette propriété de officier, ne pouvait être fondé, institué, corrooré que par la loi seule. C'est ainsi que, par la i de 1832, on s'est occupé de désigner claireent comment et à quelles conditions on pouit parvenir au grade (veuillez remarquer que ne me sers pas du mot emploi), comment, s-je, on pouvait parvenir au grade de sousutenant. La loi a successivement conduit, et run tour d'ancienneté, et par un tour au oix du roi, les officiers jusqu'au grade de chef bataillon inclusivement. Telle est la loi de 32, qui doit contenir tout ce qui concerne vancement des officiers à un grade quelconque. Mais que devient l'officier possesseur de son de et privé de son emploi? Vous n'avez pas lu que la possession du grade ne consistat e dans un brevet; vous avez voulu qu'à ce de fussent joints certains droits qui garansaient l'état de l'officier; et alors, obeissant

à une injonction précise de la Charte de 1830, vous vous êtes specialement et exclusivement occupés, dans la loi du 19 mai 1834, du sort des officiers brevetés, possédant un grade, mais privés de leur emploi pour une cause quelconque.

C'est ainsi qu'est arrivé l'article 7 de la loi. Nous devons remercier notre honorable rapporteur d'avoir eu la pensée de citer, à la suite de l'amendement que j'avais eu l'honneur de vous proposer, cet article 7. Il est ainsi conçu: « Les officiers mis en non-activité ou hors cadres par suite de licenciement de corps, de suppression d'emploi ou de rentrée de captivité à l'ennemi, seront appelés à la moitié des emplois de leur grade vacant dans les armes auxquelles ils appartiennent. >>

Rien n'est clair, n'est positif comme cette disposition. On a pris la totalité des vacances, et on a dit: Sur toutes ces vacances, la moitié des emplois sera donnée aux officiers déjà en possession de grade. Comme il ne s'agit pas ici de conférer de grade, n'est-il pas clair, n'est-il pas manifeste qu'il ne s'agit pas de la loi d'avancement?

Mais, m'objectera-t-on, il n'est nullement question de la disposition de l'autre moitié des emplois. C'est une chose toute simple, et qu'il n'était nullement besoin de mettre dans la loi; car comment peut-on arriver à un emploi quelconque? C'est lorsqu'on est possesseur de l'emploi, ou lorsque le roi confère le grade. Quant aux possesseurs d'emploi, leur part est faite par la loi. Que reste-t-il? Il reste les grades vacants. Or, ces grades vacants ne pouvaient être conférés qu'en se conformant strictement aux dispositions de la loi du 14 avril 1832.

Permettez-moi de vous montrer par des chiffres les résultats de la loi. Il y a 420 emplois vacants dans l'armée. Ces 420 emplois, par la loi du 19 mai 1834, sont partagés en deux moitiés. La première moitié est donnée aux officiers possédant un grade, mais se trouvant sans emploi par suite de l'ordonnance du 9 mars 1834; l'autre moitié des grades vacants est donnée suivant les dispositions de la loi. Toutes les dispositions de la loi de 1832 sont, à la rigueur, applicables à cette partie des grades vacants. Ainsi, les sousofficiers ont un tiers; la loi de 1832 le leur accorde; aucune autre disposition ne peut leur être opposée.

Ainsi, l'avancement à l'ancienneté a lieu pour les deux tiers, mais l'autre tiers est au choix du roi. Toujours est-il que le premier effet de la loi du 19 mai 1834 a été de diminuer le nombre des grades laissés à l'ancienneté, mais jamais elle n'a pu vouloir modifier les conditions auxquelles on pouvait obtenir un emploi.

On devait suivre les dispositions qui viennent d'être indiquées. Le premier emploi vacant devait être, conformément à la loi de 1834, donné à l'officier ayant un grade, mais venant de perdre son emploi par l'ordonnance de 1834. La seconde vacance devait être donnée à l'ancienneté. Ne voyez-vous pas déjà que si la loi avait été exécutée depuis neuf mois, une partie des élèves de l'école militaire de Saint-Cyr auraient joui du droit qui leur a été assuré par la loi, droit qu'on ne pouvait pas leur contester. Mais telle n'a pas été l'interprétation donnée à la loi par M. le ministre de la guerre.

Certainement l'ordonnance du 10 septembre 1834 a été un grand bienfait. Elle rentre autant qu'il était possible dans les dispositions de la

loi du 19 mai 1834. La seule chose qui lui ait manqué pour satisfaire complètement à cette loi, ç'a été de ne pas s'occuper des sous-lieutenants, ou pour mieux dire, de laisser les souslieutenants dans la position où les avait placés l'ordonnance du 9 mars précédent.

La loi, strictement exécutée, aurait, comme je viens de le dire tout à l'heure, donné place à une partie des élèves de l'Ecole militaire; mais d'après l'exposé des motifs lui-même, d'après les calculs qui suivent le rapport de la commission, je vois qu'il n'y a nulle disposition à se conformer strictement à cette loi du 19 mai 1834. En effet, et ici je parle sans aucun mauvais vouloir contre M. le ministre de la guerre, l'exposé des motifs a dit: Vous avez 589 officiers à la suite. Ainsi les élèves de l'Ecole militaire ne peuvent arriver à des emplois qu'après que ces 589 officiers seront eux-mêmes pourvus d'emplois.

Notre honorable rapporteur va plus loin; il nous fait un calcul, il dit: Il y a tant d'emplois, le tiers pour les sous-officiers, le reste pour les officiers hors d'emploi. N'est-il pas évident que cette disposition d'emplois est arbitraire, et qu'elle est entièrement contraire aux dispositions de la loi du 19 mai 1834 ? Cette loi est-elle bonne, est-elle mauvaise? fait-elle une part trop large aux uns, une part trop rétrécie aux autres ? Ce n'est pas le cas, dans ce moment, de m'occuper de cette grave question. Je dois prendre la foi telle qu'elle est, et faire valoir les dispositions qui y sont contenues.

M. le rapporteur vous a dit qu'au sein de la commission s'était élevé un sous-amendement à mon amendement, et que j'avais paru incliner vers ce sous-amendement. J'ai fait plus que de paraître incliné, je me suis tout à fait rangé à l'avis de MM. le duc de Bassano. J'ai mis de côté la permanence que je voulais donner à la loi; mais je me suis dit, comme M. le duc de Bassano : Tous les élèves qui se trouvaient à l'Ecole militaire au moment de l'ordonnance de réduction du 9 mars 1834 peuvent et doivent recevoir, par la loi que nous discutons, un droit égal à avoir le brevet de leur grade immédiatement après la sortie de l'école de Saint-Cyr. Ici il n'y a plus à craindre d'abus; ce qui a été fait en 1834 n'a pas été changé depuis. Je me trompe, en 1834 il y a eu 20 élèves en tout admis à l'Ecole militaire. D'où provenaient ces 20 élèves? Ils provenaient des boursiers du collège de La Flèche. Qu'en eût-on fait, si on ne les avait pas admis à l'école de SaintCyr? On se fût trouvé dans un grand embarras. Je remercie l'illustre maréchal qui était alors à la tête du département de la guerre d'avoir consenti à leur admission.

Considérez dans quelle singulière position se trouvent une grande partie des élèves de l'école par suite de l'inexécution de la loi. Ils sont sortis au 1er octobre 1834; que sont-ils devenus? A leur sortie de l'école, on ne leur a pas donné de brevets, on ne leur a donné aucune solde; de telle manière que ces élèves, dont quelques-uns peuvent avoir de la fortune, mais dont la plupart appartiennent à des familles peu aisées, dont plusieurs même sont orphelins, vous les renvoyez, où? dans leurs familles, dans leurs foyers. Ont-ils un foyer? ont-ils une famille? On a dirigé sur l'école de cavalerie de Saumur un certain nombre de ces jeunes gens. La plupart étaient boursiers à l'école, c'est-à-dire que le gouvernement s'était chargé de payer les frais de leur instruction militaire.

Arrivés à Saumur, ils ne peuvent porter l'épar lette, ils ne sont pas officiers, ils ne toucher même pas de solde. Les laisser dans cette situ tion est une chose fâcheuse, et ce n'est pas seule chose fâcheuse qu'ils aient à éprouver: ont encore à éprouver précisément ce que commission blåme dans l'amendement de la Chambre des députés.

Voilà sept mois qu'ils sont sortis. Si vous n'étendez pas la loi aux élèves qui sortiront at 1er octobre 1835, vous brisez, vous détruisez ce principe sans lequel il n'y ni discipline, ni hierarchie militaire, ce principe en vertu duquel le commandement est dû à l'ancienneté du grade. Voici quelle est la position des choses. Consentirezvous dans ce moment-ci, qu'il s'agit, non pas d'une loi de faveur, mais de réparation, consentirezvous à placer les élèves qui sortironten 1835, ces 20 élèves admis en 1834, dans la triste posttion où on tient encore les élèves sortis en 18317 Non, Messieurs, vous ne le ferez pas; vous voudrez réparer, autant qu'il est en vous, le tort manifeste éprouvé par les élèves de l'Ecole militaire, tort qui aurait eu dans la suite de graves résultats; et vous accepterez le sous-amendement de M. le duc de Bassano, qui le développera beaucoup mieux que je ne l'ai fait, et, repoussant la permanence que j'avais proposée, vous étendrez la loi aux élèves qui sortiront de l'Ecole militaire au 1er octobre 1835, et à ceux qui en sortiront au 1er octobre 1836.

J'avais proposé de supprimer le dernier paragraphe: Sans préjudicier en rien aux droits des sous-officiers. » Je ne croyais pas qu'il fût convenable que dans la loi on dit: Telle loi sera exécutée. Il convenait mieux, selon moi, à la majesté de la loi, de ne pas se répéter, et de bien établir par là qu'une fois le commandement fait, personne ne peut se dispenser d'y

obéir.

Tels sont les motifs qui m'engagent à me rallier entièrement à l'amendement de M. le duc de Bassano.

M. le Président. M. le comte d'Ambrugeac retire son amendement; M. le duc de Bassano demande à en présenter un autre, auquel M. le comte d'Ambrugeac se rallie.

M. le duc de Bassano a la parole pour développer son amendement.

M. le duc de Bassano. M. le comte d'Ambrugeac ne m'a rien laissé à ajouter aux motifs sur lesquels j'ai fondé mon amendement. Il a rappelle avec une très grande exactitude ceux que j'avais développés dans la commission à la quelle son amendement avait été renvoyé. En dire davantage ce serait abuser du temps de la

Chambre.

Je rappellerai seulement, avec moins de force que lui, mais avec des détails que je ne crois pas sans utilité, la position dans laquelle se trouvent aujourd'hui les 117 élèves de l'Ecole de Saint-Cyr et de l'Ecole polytechnique. Ils n'on point de brevet, et en conséquence le temps de leur ancienneté, qui, aux termes de la loi sur l'avancement, ne peut compter que de la date du brevet, est suspendu. C'est un dommage, el un dommage grave.

Un dommage d'un autre ordre, mais non moins grave, est la perte de la solde qui appartiendrait à leur grade et à leur brevet.

Près de six mois se sont écoulés, ils seront accomplis avant que la loi soit rendue et sanctionnée. Vous jugez quelle perte en résultera

pour des élèves qui, pour la plupart, sont des boursiers, ou quí, sans avoir été l'objet des faveurs du gouvernement, appartiennent à des familles qui ont fait des sacrifices, peut-être audessus de leurs forces, pour donner à leurs fils une éducation militaire. Si cette situation est fâcheuse pour les élèves sortis en 1834, comment ne le serait-elle pas pour ceux qui sortiront en 1835? Leur condition est absolument la même, et il sera nécessaire que le gouvernement vous présente, l'année prochaine, une loi qui ne serait autre que celle-ci, qui serait libellée de la même manière, qui tendrait au même but, puisqu'il s'agirait de réparer les mêmes dom

mages.

Tels sont les motifs qui m'ont engagé à ajouter, à l'année 1834, celles de 1835 et de 1836. Mon amendement serait ainsi rédigé :

Pourront être promus au grade de sous-lieutenants, nonobstant le défaut d'emplois vacants, les élèves de l'Ecole spéciale militaire qui ont satisfait en 1834, et qui satisferont en 1835 et 1836, aux examens de sortie de ladite école, ainsi que les élèves de l'Ecole polytechnique qui ont été ou seront admis, dans les mêmes années, à l'Ecole d'application d'état-major, sans que cette disposition puisse préjudicier à l'avancement des sous-officiers dans la proportion déterminée par la loi. »

M. le comte de Colbert. Messieurs, membre de la commission chargée d'examiner la loi votée par la Chambre des députés, relative à l'admission,comme sous-lieutenants dans l'armée, des 117 élèves sortis en 1834 des écoles militaires, bien qu'il n'y ait aucun emploi vacant dans les corps, j'ai dù reconnaître, avec elle, qu'il était convenable de donner au gouvernement le moyen légal de déroger d'une manière exceptionnelle à l article 21 de la loi d'avancement du 14 avril 1832.

J'ai pensé, également comme elle, que le second paragraphe de cette loi, qui a pour but de violer, sans utilité ni justice, l'article 15 de la loi d'avancement, était antimilitaire, contraire à la discipline, et que, par conséquent, il devait être supprimé.

Il me reste maintenant à examiner les amendements proposés par M. le lieutenant général d'Ambrugeac et M. le duc de Bassano.

Toutefois, avant de les discuter, je prendrai la liberté d'appeler un moment l'attention de la Chambre sur le véritable sens à donner aux derniers mots de l'article unique de la loi qui lui est soumise, sens sur lequel les avis ont été partagés dans votre commission.

Ces mots disent que la mesure exceptionnelle réclamée en faveur des élèves des écoles militaires aura lieu sans que cette disposition puisse préjudicier à l'avancement des sous-officiers, dans la proportion déterminée par la loi.

Quelques-uns des membres de votre commission ont cru que cette proportion déterminée par la loi des emplois vacants de sous-lieutenants qui reviennent aux sous-officiers, était fixée à un sixième, par l'article 7 de la loi du 17 mai 1834, sur l'état des officiers. D'autres, et je suis de ce nombre, ont pensé, au contraire, que l'article 11 de la loi d'avancement du 14 avril 1832, qui fixe cette proportion à un tiers, devait seul servir de règle.

Remarquez, en effet, Messieurs, que les nominations des sous-officiers au grade de sous-lieutenant sont des avancements, et que la loi du

T. XCII.

14 avril règle seule tout ce qui concerne l'avancement dans l'armée; tandis que la loi du 19 mai 1834, sur l'état des officiers, qui n'a pour but que de protéger le grade et la position des officiers contre les mesures arbitraires, ne peut, même par son article 7, être applicable ni à l'avancement, ni aux sous-officiers, dont elle ne parle pas.

Il me paraît donc évident que ces mots : proportion déterminée par la loi, veulent dire par la loi du 14 avril 1832, et nullement par la loi du 19 mai 1834. Si la Chambre admet cette explication, tous les doutes disparaissent, et c'est ici chose importante.

J'arrive aux amendements proposés, et je commence par celui de M. le lieutenant général d'Ambrugeac, qui a été imprimé et distribué à MM. les pairs.

Quoique cet amendement ait été retiré, je crois utile à la discussion de vous en occuper un instant.

Tout en reconnaissant que la pensée qui le lui a dicté aurait le double avantage d'encourager le zèle des jeunes gens qui se destinent à la carrière des armes, et de combler, à leur égard, une lacune de notre législation militaire, je pense qu'il ne pourrait figurer dans la loi sur laquelle vous délibérez actuellement; et voici mes raisons:

Cet amendement rendrait permanente une loi qui doit être essentiellement transitoire, et à laquelle le gouvernement ne voudrait pas ôter le caractère de temporaire, qui est son passeport.

Il annullerait une des dispositions les plus importantes de la loi sur l'avancement, en autorisant des nominations indéfinies de sous-lieutenants sans emplois, abus que vous avez voulu faire cesser.

Enfin, il compromettrait même, parfois l'autorité royale, quì, en définitive, après avoir usé de son droit de conférer des grades, pourrait voir, de fait, ses nominations comme infirmées par un refus d'allouer les fonds nécessaires pour en solder la dépense.

Un seul des inconvénients que je viens de signaler eût suffi, ce me semble, pour faire écarter l'amendement de M. le lieutenant général d'Ambrugeac. Je désire que la Chambre partage mon opinion à cet égard.

Quant à l'amendement de M. le duc de Bassano, que M. le lieutenant général d'Ambrugeac consent à substituer au sien, et qui accorde au gouvernement, pour 1835 et 1836, la faculté de nommer sous-lieutenants les élèves des écoles militaires, faculté que le gouvernement ne demande pas pour 1834, j'avoue que comme il a une moindre portée que l'amendement de M. le lieutenant général d'Ambrugeac, il aurait aussi moins d'inconvénients. Cependant je m'opposerai de même à son adoption.

Pourquoi, Messieurs, lorsque le gouvernement, qui connait ses besoins, réclame seulement et à regret, pour 1834, une loi exceptionnelle qu'il dit lui suffire pour le sortir de l'embarras où il se trouve, pourquoi, dis-je, le forceriez-vous à rester en dehors de la légalité plus longtemps qu'il ne le veut, et qu'il ne lui est nécessaire Ne serait-ce pas, en quelque sorte, l'accuser d'imprévoyance ou d'inhabileté ?

J'ajouterai que, dans le cas dont il s'agit, trop de facilité accordée au gouvernement pourrait peut-être lui faire négliger de prendre les mesures nécessaires pour n'avoir plus besoin,

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