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interruption dans l'exploitation d'une usine cause les plus grands dommages à la masse. A qui faudra-t-il s'adresser pour savoir s'il y avantage ou désavantage à la continuation des travaux de l'usine? Qui pourra bien juger cette question? Ce seront les parties intéressées, ce seront les créanciers. Il faut donc nécessairement consulter la majorité des trois quarts en nombre et en somme, et s'en rapporter à sa décision.

On prétend qu'il faut s'en remettre à la minorité et s'adresser au tribunal? Je conçois que le tribunal examine si le concordat doit être ou non homologué, qu'il décide, d'après le vu et l'inspection des livres, s'il est régulier ou non, s'il y a eu fraude ou non de la part du failli. Mais comment voulez-vous que le tribunal décide s'il est bon, avantageux pour la masse de continuer ou non l'exploitation d'une usine. Songez donc que le tribunal se compose de commerçants, et qu'au nombre de ces commerçants peut se trouver des exploitants d'usines de même nature que celle qui est le gage des créanciers, et que, avec toute la bonne foi possible, ils pourront être très embarrassés pour prononcer.

Il est donc absolument impossible de laisser aux tribunaux de commerce le soin de décider; l'intérêt de la masse des créanciers exige qu'à eux seuls la solution de la question soit complètement abandonnée.

M. Réalier-Dumas. Le tribunal décidera sur le rapport du juge-commissaire.

M. Guénault, commissaire du roi. Je ne crois pas nécessaire d'écarter un soupçon contre les juges des tribunaux de commerce, qui doit être échappé sans intention, sans doute, à l'honorable préopinant.

M. Moreau (de la Meurthe.) Sans intention bien certainement; il n'y avait aucun soupçon de ma part; je parlais d'un fait.

M. Guénault, commissaire du roi. Je me bornerai donc à répondre à une autre observation: dans le cours de cette discussion, vous avez eu fréquemment l'occasion de remarquer que les tribunaux de commerce sont appelés à statuer sur des mesures d'administration du genre de celles dont il est ici question. J'ajouterai que pour maintenir la garantie que le projet du gouvernement conservait en faveur du créancier dissident et du failli, il y a une raison très forte que la Chambre ne doit pas perdre de vue.

Il ne faut pas perdre de vue qu'il ne s'agit pas ici d'une opération ordinaire qui soit comprise dans le mandat général des syndics définitifs. Ce mandat n'a pour objet que la liquidation des biens du failli, et n'a pas pour objet d'autoriser à faire le commerce et de se livrer à des opérations plus ou moins importantes.

Dans l'état actuel des choses et par suite du défaut de dispositions légales, il est arrivé que les syndics se sont engagés dans des opérations tellement préjudiciables, qu'ils ont fait une nouvelle faillite et qu'ils ont mis la masse des créanciers elle-même en faillite.

Il n'y a donc pas de mal à conserver des garanties contre l'entreprise de pareilles opérations, à les conserver aux créanciers dissidents et même au failli qui n'est pas exproprié tant que la vente de ses biens n'a pas eu lieu, qui a intérêt à ce que la vente de ses biens et le produit se liquident le mieux possible, qui a intérêt à ce que tous ses créanciers soient payés, et enfin à ce qu'on ne dissipe pas, dans de folles opérations, le gage commun des créanciers.

M. Renouard, rapporteur. J'ai le regret d pouvoir partager l'opinion qui vient de exprimée.

Je dois d'abord dire que, quelle que soit has lution à laquelle la Chambre s'arrête, l'ar n'en sera pas moins utile, et n'aura pas pour ef de trancher des difficultés qui ont trop l temps divisé la jurisprudence, et pour lesque il n'existe dans notre droit actuel aucune re certaine. Ainsi, soit qu'on adopte le projet a l'addition du dernier paragraphe proposé pr le gouvernement, soit qu'on l'adopte sans ce addition, dans l'un et l'autre cas il y aurat jours une amélioration notable apportée au Cod de commerce actuel.

On ne repousse pas le dernier paragrapherposé par la commission. M. le garde des scean et M. le commissaire du roi adhèrent à cette d position qui a pour objet d'établir une majorite plus forte que les majorités ordinaires, à l'effet de servir de garantie aux délibérations prises pour une continuation d'exploitation.

Il est certain que ces continuations d'exploi tation sont assez peu favorables, qu'il est souvent arrivé qu'elles ont entraîné les masses dans des dépenses assez considérables; mais enfi malgré les abus, il ne faut pas détruire entièrment cette faculté qui, dans certains cas, est seul moyen possible pour la masse de tirer part de l'actif qui est en ses mains.

La commission a très bien reconnu qu'il était nécessaire d'établir de fortes garanties contre l'esprit aventureux de quelques créanciers. Ce pour cela qu'elle a demandé une majorite plas forte que toutes les majorités ordinaires. ticle est le seul dans tout le Code des fares dans lequel à la majorité des trois quars somme, on ajoute la majorité des trois quarte nombre il a paru à votre commission que c sur cette appréciation de l'intérêt de la masse les créanciers eux-mêmes, que devait se p la principale garantie. Nous aurions cor." que si la garantie n'était pas trouvée suffist on portât plus loin l'exigence d'une major qu'au lieu de demander les trois quarts o mandât les quatre cinquièmes: qu'en un c l'effort pour donner des garanties se portal: la nécessité du concours d'un grand nombr volontés, nous aurions même été jusqu'à le nimité, s'il ne nous avait pas paru que ce ser donner une prime trop forte aux créanciers pour se faire une condition meilleure, draient leur adhésion.

Mais ceci adopté, il reste à examiner l ragraphe dernier qui était dans le projet du vernement. Ce paragraphe est ainsi con La voie de l'opposition sera ouverte contre délibération au failli et aux créanciers de dents. >>

On dit Comment voulez-vous priver la rité du droit de faire juger ses prétentions les tribunaux? comment voulez-vous en pr le failli? Je dirai d'abord que la condition failli et des créanciers dissidents n'est pa même,

Quant au failli, je ne conçois dans au hypothèse qu'on puisse le maintenir dans ticle, et je crois que, dans tous les cas, ! même qu'on adopterait le dernier paragra il faudrait effacer le failli. En effet, Messie pour ne nous occuper d'abord que du songez qu'on est en état d'union, qu'il n'a pu obtenir un concordat, qu'il est`dessail'administration de tous ses biens, qu'il ne

serve sur les biens de sa masse que l'expectative qu'on peut réserver en droit, mais que les faits n'ont jamais réservé l'expectative d'un bénéfice, après toutes les dettes payées, sur les biens restants.

Ceci, on peut le soutenir pour l'honneur des principes, et dire que la propriété n'a pas abandonné le failli, mais il est sans exemple que, après liquidation, un bénéfice survienne au failli. Ce n'est donc pas se placer dans une hypothèse extraordinaire, c'est au contraire répondre à tous les cas qui se présentent que dire que le failli, dessaisi de son actif par l'état d'union, ne conserve plus d'intérêt à la conservation de ses biens...

M. Parant. Il a intérêt à être libéré?

M. Renouard, rapporteur. Sans doute; mais les créanciers ont un intérêt non moins fort que le sien, car ils ont intérêt à être payés. Or, pour faire apprécier quel est celui qui est le plus intéressé à la bonne gestion de l'actif, il faut considérer quel est l'intérêt le plus direct; c'est évidemment celui des créanciers.

Remarquez, Messieurs, que si vous ouvrez la voie d'opposition au failli en même temps qu'aux créanciers, vous pouvez supposer le cas où pas un seul ne jugera à propos de former opposition, où l'unanimité des créanciers croira nécessaire de continuer l'exploitation des biens; où le failli seul pourra contrarier les opérations de la masse qui lui aura refusé un concordat, et avec laquelle, par conséquent, il sera fort peu d'accord pour former une opposition je dis qu'il y aurait ici de graves inconvénients.

Remarquez en effet, Messieurs, dans quelles circonstances intervient cette autorisation de continuer l'exploitation; c'est lorsque des biens @sont en souffrance, lorsque la discontinuation de l'opération peut faire perdre le gage tout entier.

Je vous ai cité, Messieurs, l'exemple qui se présente souvent, celui de l'exploitation d'une usine: et, je le demande, si vous laissez le temps pour qu'un procès soit débattu sur la question de continuation, à la fin du procès, quelle que soit la décision, la cause en fait n'aurait-elle pas perdu de son importance? Et lorsqu'une usine aura chômé pendant le temps nécessaire pour qu'on plaide sur la question de savoir si l'on devra continuer son exploitation, je demande si tout le mal ne sera pas fait. Cette objection porte à la fois et contre l'opposition des créanciers dissidents et contre l'opposition du failli; mais elle est beaucoup plus forte contre l'opposition du failli, car on peut supposer le cas où tous les créanciers unanimement seront d'avis que l'exploitation soit continuée, et où le failli seul entravera toute l'opération par l'opposition. qu'il aura faite.

Je pense que ce motif, qui est celui qui a surtout déterminé la commission, et auquel il n'a = pas été répondu, celui de l'inconvénient résultant de l'interruption de l'exploitation; je pense que ce motif vaut à la fois et contre l'opposition des créanciers et contre celle du failli, si l'on se décidait à adopter le dernier paragraphe du gouvernement, non que j'y consente, mais seulement subsidiairement, pour le cas où cet article serait adopté, je demanderai dans tous les cas qu'on en retranchât le failli. Je pense donc, même après avoir supprimé le failli, qu'il faudrait encore voter la suppression du paragraphe. Mais, comme un sous-amendement doit être mis aux voix avant un amendement, je de

mande, par sous-amendement, que le mot de failli soit retranché du paragraphe, me réservant de voter contre ce paragraphe alors même qu'on aurait fait droit à la suppression que je propose. M. le Président. M. le garde des sceaux con

sent?

M. Persil, garde des sceaux, ministre de la justice. Non; je demande au contraire le maintien entier de l'article, parce que, selon moi, le failli a autant d'intérêt que les créanciers, peut-être davantage, parce qu'il est propriétaire. Il serait extraordinaire que, lorsque la majorité des créanciers a délibéré sur la chose du failli de manière à la compromettre, le failli ne pùt s'adresser aux juges pour demander la réformation de l'arrêt de la majorité. Ce serait le mettre hors la loi.

M. le Président. Je vais d'abord mettre aux voix les trois premiers paragraphes de la commission. On votera ensuite sur le dernier paragraphe contesté.

Plusieurs voix: Il n'y a pas de secrétaires au bureau.

D'autres voix M. Félix Réal y est.

(Les trois premiers paragraphes de l'article 529 sont successivement mis aux voix et adoptés.) M. le Président. Je donne lecture du paragraphe proposé par le gouvernement :

"

La voie de l'opposition sera ouverte contre cette délibération, au failli et aux créanciers dissidents. »

M. Renouard, rapporteur. Je demande la suppression des mots :« au failli. »

M. le Président. Par conséquent, c'est un sous-amendement que vous proposez.

M. Réalier-Dumas. Le failli est le plus intéressé, puisqu'il n'est pas dépossédé et qu'il n'a perdu que l'administration de ses biens.

M. Thil. J'ajouterai, en outre de ce qu'a dit M. le garde des sceaux, qu'on a reconuu précédemment que le failli avait le droit d'intervention, que les tribunaux étaient juges de son intérêt.

Ayant reconnu ce droit d'une manière générale, on semblerait contrarier ce qui a été fait en enlevant au failli le droit de s'opposer, devant les tribunaux, à une délibération des créanciers qui tendrait à prolonger son incertitude et son état de faillite.

M. Garnon. Il est cependant certain que le failli, mécontent de n'avoir pas obtenu un concordat de ses créanciers, chercherait, par tous les moyens possibles, à entraver les opérations. M. Réalier-Dumas. Le tribunal statuera. (La suppression des mots : « au failli, » est mise aux voix et rejetée.)

(Le paragraphe proposé par le gouvernement est mis aux voix et adopté.)

L'ensemble de l'article 529 est ensuite mis aux voix et adopté pour la teneur suivante :

Art. 529 (amendé).

« Les syndics définitifs représentent la masse des créanciers, et sont chargés de procéder à la liquidation.

Néanmoins, les créanciers pourront leur donner mandat pour continuer l'exploitation de l'actif.

« La délibération qui leur conférera ce mandat en déterminera la durée et l'étendue, et fixera les sommes qu'ils pourront garder entre

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Le tribunal prononcera si le failli est ou no excusable et susceptible d'être réhabilité. » M. Parant. J'ai un amendement à propose sur le dernier paragraphe.

Messieurs, hier j'ai demandé à la commissi si elle entendait qu'un banqueroutier simpe condamné comme tel, pût être déclaré excusalue. Sur sa réponse affirmative, j'ai dù faire ressor tir les inconvénients d'une semblable disposi tion. Ces inconvénients, je viens vous les signaler de nouveau, et proposer en conséquence un amendement au deuxième paragraphe qua ainsi conçu :

« Le tribunal prononcera si le failli et on on excusable, à moins que ce dernier n'ait été codamné comme banqueroutier simple. »

M. Renouard, rapporteur. La place de l'mendement serait à l'article 538, qui énonc quelles personnes peuvent être déclarées excosables. Si cet amendement était adopté, ce qui n'est pas mon avis, c'est à l'article 538 qu'il fau drait le reproduire.

M. Parant. Je n'ai pas d'objection à faire. (L'article 536, mis aux voix, est adopté.) L'article 537, est ensuite mis aux vois et adopté, sans discussion, comme suit :

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«Ne pourront être déclarés excusables banqueroutiers frauduleux, les stellionatai les personnes condamnées pour fait de vcl d'escroquerie, les comptables de deniers blics. >>

M. Parant. Messieurs, persistant dans amendement, je proposerai à la Chambre d'a ter dans l'article 538, à la suite de ces mos les banqueroutiers frauduleux, ceux-ci : les queroutiers simples, les stellionataires, etc.

Messieurs, le projet de loi détermine les? dans lesquels il y aura nécessité de déclarer failli banqueroutier simple, et d'autres cas de lesquels les tribunaux auront à apprécier circonstances de la faillite.

Ce que je dis est justifié par les articles 5 587 du projet.

Remarquez bien que je ne parle pas ici: dispositions actuelles du Code de commer parce qu'on ne manquerait pas de me d Mais dans le projet il y a changement. Pren. donc les articles 586 et 587 du projet. L'art

586 porte que celui-là sera déclaré banqueroutiers simple qui se trouvera dans un des cas suivants: 1° si ses dépenses personnelles ou les dépenses de sa maison sont jugées excessives; 2o s'il a consommé de fortes sommes, soit aux opérations de pur hasard, soit à des opérations fictives de bourses ou sur marchandises.

Je me borne, Messieurs, à citer ces deux paragraphes pour ne pas fatiguer votre attention; mais vous pouvez vous convaincre que les deux autres circonstances dans lesquelles le failli doit être déclaré banqueroutier simple, ne sont pas moins graves que celle-ci. Est-il possible que quand la loi a elle-même déterminé ainsi les caractères auxquels les juges reconnaîtraient nécessairement un banqueroutier simple, les cas dans lesquels il devrait être condamné comme tel, vous autorisiez le tribunal de commerce, après qu'un tribunal correctionnel aura prononcé, à dire : Celui-là est excusable, qui cependant a été déclaré coupable de banqueroute simple aux termes de la loi et pour des causes graves?

Passons à l'article 587.

Pourra être déclaré banqueroutier simple tout commerçant failli qui se trouvera dans un des cas suivants :

1° S'il est de nouveau déclaré en état de faillite, sans avoir satisfait aux obligations d'un précédent concordat. >

Suit l'énumération des autres causes qui peuvent déterminer la déclaration de culpabilité contre un prévenu de banqueroute simple.

Je reconnais que, d'après l'article 596, il n'y a pas pour les tribunaux la nécessité de prononcer qu'un individu est coupable de banqueroute simple, et de le condamner comme tel; il n'y a qu'une simple faculté. Mais d'ailleurs que font les juges? Ils apprécient les circonstances, et si les circonstances sont assez graves pour que le négociant failli ne soit pas reconnu excusable, pour que dès lors il doive être reconnu coupable et condamné comme banqueroutier simple, dans cette situation le tribunal de commerce ne peut pas être autorisé à déclarer le contraire de ce qu'aura décidé le tribunal correctionnel.

Autrement vous autoriseriez un conflit entre deux tribunaux d'ordre différent; vous autoriseriez le tribunal de commerce à juger contrairement à ce qu'a prononcé le tribunal correctionnel. Je dis contrairement à ce qu'il a prononcé, car il est impossible qu'un tribunal correctionnel condamne un négociant failli comme banqueroutier simple pour des faits matériels; seulement il faut que les circonstances soient telles, que les faits soient accompagnés de telles circonstances qu'il puissent déterminer le tribunal correctionnel à déclarer la culpabilité.

Eh bien! certes, dans cette position, le négociant failli déclaré coupable ne peut pas être ulterieurement reconnu excusable dans les mêmes circonstances et pour les mêmes faits.

Je comprendrais encore ce conflit entre deux juridictions différentes, s'il y avait un tribunal supérieur auquel on put appeler dans le même moment des deux sentences à la fois. Mais, d'une part, la sentence du tribunal correctionnel peut être passée en force de chose jugée et n'être point susceptible de réformation, et d'une autre part la décision du tribunal de commerce ne pourra jamais être déférée, dans le système du projet, à un tribunal supérieur. Lisez en effet l'article 583, et vous verrez que la sentence qui

prononce sur la question de savoir si le failli est ou non excusable, n'est susceptible d'être frappée d'aucun appel."

Ainsi, nous aurions ce scandale, qu'il faut soigneusement éviter quand on fait des lois, qu'une juridiction commerciale prononcerait le contraire de ce qu'aurait prononcé une juridiction correctionnelle. C'est là, Messieurs, je le répète, ce qu'il faut soigneusement éviter; et pour cela, il faut dire que le banqueroutier simple né pourra jamais être déclaré excusable.

Je comprendrais les objections qui ont été faites si, en décidant que le failli n'est jamais excusable, ou ne peut être déclaré excusable par le tribunal, vous l'empêchiez d'être un jour réhabilité. Remarquez bien que le banqueroutier simple, bien que condamné comme tel, est cependant susceptible de réhabilitation. Ainsi, vous n'ôtez pas au banqueroutier simple, en interdisant au tribunal de commerce de s'occuper de la question d'excusabilité, vous ne lui ôtez pas, dis-je, la faculté d'être plus tard admis à la réhabilitation.

Vous ne lui causez donc aucun préjudice; ainsi, sans causer aucun préjudice au failli réhabilité, vous apportez un remède au mal que j'ai signalé, et vous empêchez qu'on ne tombe dans des inconvénients très graves, inconvénients que le législateur doit avoir prévus.

M. Réalier-Dumas. Je demande à sousamender l'amendement de M. Parant. Je voudrais qu'on dit «Ne pourront être déclarés excusables les banqueroutiers frauduleux, les banqueroutiers simples qui seraient en état de récidive, etc. »

Le banqueroutier simple pouvait n'être qu'imprudent, mais celui qui s'expose à faire banqueroute deux fois, n'a plus droit à la même indulgence. Je propose donc d'établir que lorsqu'un négociant aura été condamné deux fois pour banqueroute simple, il ne puisse pas être déclaré excusable. Je crois que M. Parant se ralliera à un amendement qui rentre tout à fait dans ses vues.

M. Renouard, rapporteur. Je désirerais savoir, avant de prendre la parole, si l'amendement de M. Parant est encore en discussion, où s'il l'abandonne pour se réunir à la proposition de M. Réalier-Dumas.

M. Parant. Je ne renonce pas à mon amendement; c'est avec conviction que je l'ai présenté, et je suis loin de l'abandonner.

M. Renouard, rapporteur. Nous avons donc à nous expliquer sur deux amendements différents, bien que l'un soit appelé le sous-amendement de l'autre.

Deux propositions fort distinctes sont faites, l'une par M. Réalier-Dumas qui demande que le banqueroutier simple, en état de récidive de banqueroute, ne soit pas déclaré excusable, et T'autre par M. Parant qui demande que le banqueroutier simple ne soit jamais déclaré excusable.

Permettez-moi de m'occuper d'abord de l'amendement de M. Parant.

Je ne crois pas que cet amendement soit admissible; il me semble beaucoup trop rigoureux; et quoique je ne sois pas d'avis d'énerver la législation, je pense que, si on la rend trop sévère, trop dure, on s'expose à ce qu'elle ne soit pas appliquée. Examinons d'abord les conséquences de cette déclaration d'excusabilité;

elles sont tracées dans l'article 538 que vous avez voté tout à l'heure, et qui porte :

« Si le failli n'est pas déclaré excusable, les créanciers rentreront dans l'exercice de leurs actions individuelles, tant contre sa personne que sur ses biens. »>

Ainsi, un failli qui n'est pas déclaré excusable, retombe sous le coup de la contrainte par corps.

Peut-on, sans trop de rigueur, prononcer cette disposition contre le banqueroutier simple? Je dis qu'on ne le peut pas, et cela pour plusieurs motifs.

Et d'abord ce serait ajouter une rigueur qui n'est pas dans le Code de commerce actuel.

Nous avons, dans le projet, supprimé le titre relatif au bénéfice de cession, parce qu'on a pensé qu'on pouvait, avec utilité, le remplacer par une disposition générale du Code. Mais il faut penser que ce bénéfice de cession avait les mêmes résultats qu'aura aujourd'hui la déclaration d'excusabilité.

Eh bien, ouvrez le Code de commerce; l'article 575 du Code de commerce disait : « Ne

pourront être admis au bénéfice de cession les stellionataires, les banqueroutiers frauduleux, etc. >> C'est l'énumération prise dans le projet pour indiquer les personnes qui ne pourront pas être déclarées excusables.

Quels étaient les résultats du bénéfice de cession? c'étaient les mêmes que ceux de déclarations d'excusabilité, l'affranchissement de la contrainte par corps.

Remarquez, Messieurs, que si vous attachez à la condamnation en banqueroute simple une conséquence aussi rigoureuse, vous vous exposez à ce que les tribunaux chargés de proque noncer sur les frais de banqueroute reculent devant une conséquence aussi grave. Lorsqu'un individu, par sa négligence ou son imprudence, s'est exposé à être déclaré banqueroutier, il est puni par la loi d'un emprisonnement qui peut être élevé à un temps assez considérable.

Si à cet emprisonnement vous ajoutez la pénalité de la contrainte par corps après qu'il aura satisfait à sa peine correctionnelle, vous augmentez la rigueur de la pénalité proposée pour le cas de banqueroute simple, et vous faites que les tribunaux correctionnels, appelés à statuer sur une accusation de banqueroute simple, prononceront, non seulement la peine qu'ils ont à appliquer, mais même la peine non moins grave de la contrainte par corps qui frappera sur cet individu, lorsqu'il aura satisfait à la peine correctionnelle; vous arriverez par là à aggraver de beaucoup la condamnation prononcée contre la banqueroute simple; et, en arrivant à cette gravité, vous ferez reculer les tribunaux qui auraient bien condamné un individu à trois ou quatre mois de prison, mais qui, par un sentiment fort honorable d'humanité, ne consentiront pas à ce qu'il soit soumis indéfiniment à la contrainte par corps. Ce serait une rigueur plus grande que celle du Code qui admet le banqueroutier simple au bénéfice de cession. Cette rigueur ne doit pas exister dans une loi qui a pour but de rendre le Code plus exécutable, en l'adoucissant toutes les fois qu'on peut le faire sans énerver la loi.

Maintenant, reportez-vous au cas pour lequel la banqueroute simple est prononcée. Je n'en veux pas d'autre exemple que celui cité par l'honorable préopinant. Je prends le premier cas, celui qui fait déclarer la banqueroute,

lorsque les dépenses personnelles du débite sont jugées excessives. C'est assurément un t très grave de la part d'un commerçant, et n'est point dans ma pensée de chercher à l'a nuer; mais enfin, remarquez si cette peine, t juste quand elle est renfermée dans les limite du Code et du projet, quand elle est applique un négociant qui s'est livré à des dépenses er cessives, ne serait pas exorbitante pour le où elle entraînerait non seulement la déclaration de la banqueroute simple, mais encore perte totale de la liberté, en défendant de jama affranchir de la contrainte par corps. Ce men raisonnement peut s'appliquer à tous les cas qu sont consignés dans les articles 586 et 587.)pense donc que la disposition proposée pa M. Parant est trop rigoureuse, qu'il lui arrivera ce qui arrive toujours aux dispositions trop ri goureuses, c'est-à-dire d'énerver la loi en lant la rendre plus ferme.

Je crois qu'il faut admettre à excuse, c est la même chose que l'admission an denence de cession, l'individu condamné pour banqueroute simple.

Remarquez que vous avez autorisé à passer th concordat, et qu'il serait contradictoire de per mettre à un banqueroutier simple de faire u concordat et d'interdire de le reconnaitre excu sable. Le Code même permet la réhabilitation d'un banqueroutier simple. En entrant dans cette pensée qu'une faute réparée est une faute effacée, le Code avait admis la réhabilitation dans les cas graciables. En effet, on ne peut sans ing séquence déclarer qu'un homme est inexce, et l'admettre, par la réhabilitation, à wa faute complètement rachetée. Je pense qu'on ne peut admettre l'amendement de rant. (Adhésion.)

A l'égard de l'amendement de M. RéalerDumas, il est beaucoup moins rigoureux; je vois aucune difficulté à l'admettre. Il est certa: que la position d'un banqueroutier simple qu trouve condamné pour récidive est moins far rable que celle du banqueroutier condamné po la première fois.

Tout en étant séduit au premier abord l'aggravation du fait qui résulte d'une do! condamnation, il faut voir s'il n'a pas été as puni par une condamnation en récidive quit cessairement s'étendra à une plus longue dur de la peine. Je pense que tout bien consider même l'amendement de M. Réalier-Dumas C je reconnais comme sujet à beaucoup mo d'inconvénients que celui de M. Parant, peut pas être adopté.

M. Réalier-Dumas. Je désire faire observation. Celui qui a déjà subi une pe correctionnelle ne mérite plus la même

veur.

M. Bignon (de la Loire-Inférieure). Il y a considération dans l'intérêt même des créanci Lorsque le failli non concordataire n'est pas . claré excusable, il est soumis à la contrainte corps; vous le mettez dans l'impossibilite diriger ses affaires et d'opérer sa libération ce sont les créanciers eux-mêmes qui seront times. D'où il résulte que tout considéré, il rejeter la proposition de M. Parant.

M. Parant. Il est une objection de l'honora. rapporteur que je dois combattre. Cette ob tion est fondée sur ce point, dont je ne cont pas l'exactitude, que la commission a vo remplacer par la déclaration d'excusabilite

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