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canne avoit tenu jufqu'alors comme une ve rité conftante, que le Concile général eft au-deffus du Pape.

Il répond enfuite aux raifons de politique, que le Cardinal du Perron avoit emploiées pour rendre fa doctrine & fa perfonne odieufes. Le Cardinal lui objectoit que les preuves qu'il alléguoit pour établir le gouvernement Ariftocratique de l'Eglife, pouvoient donner atteinte aux Etats Monarchiques. Richer ré pond que l'on ne peut rien conclure du gouvernement de l'Eglife à celui des Roïaumes, parce que la Puiffance temporelle eft abfolue de fa nature, au lieu que la Puiffance Ecclé fiaftique, qui s'exerce fur les confciences, ne peut pas ufer de force extérieure, ni de contrainte. Le Cardinal du Perron avoit aufli parlé de la Sorbonne, & avoit fait valoir la condamnation de la Pucelle d'Orléans, & le decret contre Henri III. Richer fait voir qu'on ne doit point juger de la difpofition de ce Corps par ces temps de trouble & de guerre, où la liberté étoit opprimée par violence & par les factions, & remarque que quand ce Corps a été libre, il a toujours vengé les droits du Roi, foutenu les Liber tés de l'Eglife Gallicanne, & procuré le bien de l'Etat. Il ajoute encore que les anciens Docteurs étoient du temps d'Henri III trèséloignés de la doctrine du decret fait contre ce Prince par quelques Docteurs factieux qui avoient entraîné de jeunes gens fans expé rience. Il foutient que la doctrine qu'il a établie dans fon Livre ne favorife ni le fchifme, ni l'héréfie que c'eft celle de Gerfon & du Concile de Conftance, & qu'elle ne fe doit pas feulement appliquer au temps du fchifme

la

des Papes, mais qu'elle eft de tous les fiécles & de tous les temps.

Il fe défend enfuite contre Boucher fur l'appellation comme d'abus qu'il avoit interjettée de la Sentence des Prélats de la province de Sens. Il foutient que les Magiftrats

civils ont droit de maintenir les Loix Eccléfiaftiques quand elles font violées, de juger des queftions Eccléfiaftiques qui confiftent en faits, & de protéger les Eccléfiaftiques qui font opprimés & calomniés. Il prouve que l'affemblée des Prélats de Sens n'est pas un Synode, parce qu'elle s'eft tenue pour des affaires temporelles fans l'autorité du Roi, & fans y appeller le Clergé de la Province. Les autres livres de la défense de Richer, font entiérement dogmatiques; il y établit fes principes, & réfute fes adverfaires par des paffages de l'Ecriture, par une infinité de témoignages des Peres & des Docteurs, par les decrets des Conciles, par des exemples tirés de l'Hiftoire Eccléfiaftique, par la pratique de l'Eglife & par des raifonnemens. fondés fur ces autorités. On a mis à la fin de ce recueil des notes fur la Cenfure de la Faculté de Théologie de Paris contre les livres de la République Eccléfiaftique d'Antoine de Dominis on fçait qu'elles font de Richer. Elles ont eté imprimées à Londres dès l'an 1617, & réimprimées fur la fin du même fiécle. On voit par ces notes que quoiqu'il n'approuvât pas la doctrine d'Antoine de Dominis, il n'étoit pas fur bien des articles de l'avis des Cenfeurs, particuliérement fur la Cenfure de la feconde propofition touchant la jurifdiction coactive de l'Eglife, où il dit que les Cenfeurs ont mal pris le fens de l'Au

teur, qui ne refufe pas à l'Eglife le pouvoir d'excommunier, mais celui de pouvoir con traindre extérieurement par la force. A la fin de ces notes il remarque que les anciens Docteurs ont toujours eu pour but dans leurs Cenfures la vérité & le bien du peuple, & que c'eft pour cela qu'en qualifiant les propofitions, ils ont pris foin d'expliquer les équivoques & les ambiguités, pour faire voir qu'ils ne vouloient point chicanner, & afin qu'il ne fût pas befoin d'expliquer leurs Cenfures.

I.

ARTICLE V.

Auteurs Eccléfiaftiques qui ont écrit pendant les cinquante premieres années du dix-feptième Siècle.

Le Cardi-C

nal Baro

I.

ESAR Baronius nâquit en 1538 à Sora, ville Epifcopale de la Terre de Labour nius. dans le Roïaume de Naples. Ses parens, qui Biblioth. l'éleverent avec beaucoup de foin, lui firent des Aut. Ecc faire les études d'Humanités à Veroli, du XVII. celles de Théologie & de Droit à Naples. fiécle. Les troubles de ce Roiaume l'obligerent de

&

paffer à Rome avec fon pere en 1557.
Y acheva les études de Droit, & fe mit fous
la conduite de S. Philippe de Neri, Fonda-
teur de la Congrégation de l'Oratoire d'Ita-
lie, qui ne manqua d'y aggréger un fujet
qui donnoit de grandes efperances. En 1593
il en fut fait Supérieur-Général par la démis

quatre Controverfes générales : la premiere, des Conciles & de l'Eglife; la feconde, des membres de l'Eglife; la troifiéme, de l'Eglife qui eft en Purgatoire ; & la derniere, de celle qui triomphe dans les Cieux. Ces Controverfes font chacune fous divifées en d'autres parties. Le troifiéme Tome eft fur les Sacremens en général & en particulier. Enfin le quatriéme traite des péchés, de la Juftification, de la Grace, du Libre Arbitre, du mérite des bonnes œuvres. On trouve à la fin quelques questions fur la Morale & la Difcipline. Toutes celles qui compofent ce grand Ouvrage, font traitées avec beaucoup de méthode & de clarté. Il rapporte d'abord fur chaque queftion les erreurs des hérétiques & les fentimens des Théologiens Catholiques. Il donne enfuite les preuves du sentiment qu'il embraffe, propofe les objections, & y répond. Ce qu'il dit de l'autorité du Pape dans plufieurs de fes Controverfes, eft conforme aux principes des plus zélés Ultramontains. Il fait le Pape Monarque abfolu de l'Eglife Univerfelle; il lui donne un pouvoir fans bornes. Il eft infaillible, fupérieur aux Conciles généraux : il eft la fource d'où découle toute la jurifdiction Eccléfiaftique. Il a fur le temporel des Rois un pouvoir, qu'il appelle feulement indirect, mais qui néanmoins eft capable, tout indirect qu'il le fuppofe, de bouleverfer les Roïaumes. Il a été réfuté par Barclai, comme nous l'avons

vû.

Outre fes Controverfes, Bellarmin a compofé d'autres Ouvrages, qui ont été imprimés en deux volumes in-folio à Cologne en 1617. Le premier contient fes Commentaires Tome X.

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ces douze Tomes l'Hiftoire des douze premiers fiécles de l'Eglife.

Cette Hiftoire de Baronius eft composée en forme d'Annales année par année, sépa, rées les unes des autres, & défignées par les années des Papes, des Empereurs & des Confuls. Il rapporte fur chaque année ce qui regarde les Eglifes d'Orient & d'Occident, la fucceffion des Papes, des Patriarches, des Empereurs & des Rois, les Actes des Conciles, les Lettres des Papes, les Loix des Empereurs qui concernent l'Eglife, les perfécutions, les Martyrs, les Saints, les Auteurs Eccléfiaftiques, les héréfies, en un mot tous les événemens qui ont rapport à l'Histoire Eccléfiaftique. Le but qu'il s'eft propofé dans cet Ouvrage, comme il le témoigne dans fa Préface, a été de réfuter les Centuriateurs de Magdebourg, ou plutôt d'oppofer à l'Hiftoire Eccléfiaftique de ces hérétiques un Ouvrage de même nature pour la défense de l'Eglife Catholique. Il feroit à fouhaiter que Baronius eût évité d'entrer dans des controverfes & des intérêts particuliers, & qu'il ne fe fût pas déclaré fi zélé partifan des opinions ultramontaines. On a remarqué depuis dans fes Annales des fautes de Chronologie, des faits faux ou douteux avancés comme vrais & certains, des méprises affez confidérables. Mais tous ces défauts n'empêchent pas que ce grand Ouvrage ne foit trèsutile. On peut même dire qu'il eft composé avec autant d'exactitude qu'on pouvoit l'efpérer d'un homme qui entreprenoit le premier un Ouvrage auffi difficile & auffi étendu que celui-là. Baronius ne poffédoit pas bien Ja Langue Grecque, & c'est ce qui fait qu'il

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