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tere.

Son carac- qu'on lui demandoit. Le pieux & favant Cardinal répondit que le Saint-Siége ni l'Eglife ne pouvoient faire de nouveaux articles de Foi, mais feulement déclarer ce que Dieu avoit révélé à fon Eglife, en difcernant les véritables traditions tranfmifes depuis les Apôtres jufqu'à nous Mais, répliqua le Pa pe, pourrois-je faire une décifion, fi le SaintEfprit me révéloit ce qu'il faut croire fur cette queftion. T. S. Pere, votre révélation particuliere ne pourroit fervir qu'à vous, dit le Cardinal, & vous ne pourriez en conféquence impofer aucune obligation de croire votre décifion, ni aux Fidéles ni à moi. La même année 1667, le Pape mourut après avoir été douze ans fur le Saint-Siége. Il étoit fort odieux au peuple, que fes parens avoient ruiné; & très-1 s-peu eftimé des Princes de l'Europe, qui le regardoient comme un hypocrite, & une aine fans élévation. Il paffoit pour un homme de minuties; perfonne ne pouvoit compter fur ce qu'il difoit: il mettoit de la fineffe par-tout, & ne parloit jamais que par des équivoques. Il aimoit la pompe des bâtimens ; & il ne tint pas à lui que toute la ville de Rome ne devint également magnifique & réguliere. Les dépenfes qu'il faifoit pour y parvenir, épuifoient la Chambre Apoftolique ; & en ordonnant la démolition de plufieurs bâtimens qui choquoient la fymétrie, il ruinoit les propriétaires. Ce Pape a laiffé des poëfics qui furent imprimées au Louvre in-folio en 1656, fous ce titre : Philomathi Mufa juveniles. L'Auteur ne voulut point fouffrir qu'on y mît fon nom; mais il approuva le titre qu'on donna à fes poëfies, parce

qu'il les regardoit comme un amusement de fa jeunefle, & qu'il étoit de l'Académie des Philomathi de Sienne. On voit à Rome plufieurs Manufcrits ornés de notes de fa propre main, & un gros recueil d'actes & de piéces autentiques qu'il avoit dreffé & compilé: ce qui montre fon application à l'étude. Le favant P. Mabillon ajoûte à cela une chose qui prouve quelle étoit l'inclination de ce Pape pour les Lettres. Il dit qu'Alexandre VII attira à Rome trois Libraires des PaïsBas, qui le tromperent fur la Bible Poliglotte de Paris, lui faifant accroire que c'étoit une Edition qu'ils entreprenoient en fon honneur & fous les aufpices. Ils у firent imprimer un nouveau titre avec une Epître dédicatoire très-flatteufe : mais ils ne purent cacher long-temps leur friponnerie. On doit dire à la louange de ce Pape, qu'il y a du grand dans le deffein du Collège de la Sapience qu'il acheva de faire bâtir, & qu'il orna d'une très belle Bibliothéque. C'eft lui qui a canonifé S. Thomas de Ville-neuve & 5. François de Sales.

XIII.

IX.

Vingt-fept jours après la mort, Jules Rof- XXVIII. pigliofi, Cardinal du titre de S. Sixte, fut Election élu Pape, & prit le nom de Clément IX. 11 de Clément n'avoit ni brigué ni recherché cette éminente Dignité. Sa famille étoit une des plus confidérables de la ville de Piftoye en Tofcane ; & Jules qui l'éleva à de nouveaux honneurs, étoit né en cette ville l'an 1600. Il occupa divers Emplois confidérables. Urbain VIII, qui avoit beaucoup de difcernement dans le choix des fujets, le fit Auditeur de la Légation du Cardinal Barberin fon neveu,

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en France. Aïant été fort fatisfait de sa conduite, il l'envoia Nonce en Efpagne, où il fut continué onze ans en cette commiffion, qui n'eft ordinairement que de trois ans. Après la mort d'Innocent X, le Collége des Cardinaux le nomma Gouverneur de Rome. Alexandre VII le créa Cardinal dans fa premiere promotion, & lui donna enfuite la charge de Secrétaire d'Etat, qui lui fervit de dégré pour monter fur le Saint-Siége. Il avoit un grand fonds de probité, beaucoup de littérature, de goût pour la poësie, & un caractere propre à fe faire aimer de tout le monde,

Les commencemens de fon Pontificat firent Bonnes connoître ce qu'on pouvoit attendre de lui. qualités de il déchargea d'abord les peuples de l'Etat Ecce Pape.

cléfiaftique, des tailles & des autres subfides. Voiant enfuite avec douleur les Infidéles acharnés à la ruine des Chrétiens & au fiége de Candie, il réfolut de donner du fecours aux Vénitiens. Mais les Chigis avoient épuisé les finances de la Chambre Apoftolique. Il fut donc obligé de fupprimer quel ques Ordres Réguliers les plus inutiles à l'Eglife, & aufquels même le titre de Religieux ne fervoit que de prétexte & de moïen, pour mener une vie fainéante, & quelquefois inême libertine. Cependant le Pape, dont la confcience étoit délicate, témoigna plufieurs fois des fcrupules fur l'extinction de ces Maifons Religieufes, fe fondant fur cette maxime, qu'il faut réformer & non détruire ce qui a été faintement inftitué. Au reste, ce moïen fit trouver au Pape des fommes confidérables, qu'il avoit promifes pour le fecours de Candie. Il ne voulut point enrichir fa

famille; & il s'en falloit beaucoup que le bien qu'il fit à fes neveux, les mît en état de foutenir la qualité de Prince, que néanmoins il fouffrit qu'on leur donnât. Elle seroit infailliblement retombée dans fon ancienne médiocrité, fi le Pape n'eût confenti au mariage d'un de fes neveux avec une riche héritiere du vieux Cardinal Pallavicin, Génois. On ne ceffoit de lui représenter la convenance & les avantages de cet aggran diffement, autorifé par l'exemple de les prédécesseurs ; mais il résistoit à tous les confeils des flatteurs, & fe tenoit toujours en garde contre leurs difcours artificieux & étudiés. Cette modeftie de Clément IX étoit relevée par un amour fincere de la paix. Illa favorisa pendant fon Pontificat, qui fut trop court pour l'avantage de l'Eglife.

Louis XIV avoit déclaré la guerre à l'Efpagne, pour les droits qu'il avoit fur la Flandre, du chef de Marie Thérèse d'Autriche fon époufe. Cette cruelle divifion des deux plus puiffantes Monarchies Chrétiennes affligeoit fenfiblement le Pape, qui fongea d'abord à-pacifier leurs différends. L'on étoit fi fortement convaincu de fon impartialité & de fon amour pour la paix, que les deux Couronnes le choifirent pour Médiateur. Auffi-tôt après fon élection, il avoit écrit à l'Abbé Rospigliosi son neveu, qui réfidoit à Bruxelles en qualité d'Internonce, de paffer en France, avant que de venir à Rome; afin de gagner par cette déférence la confiance du Roi Très-Chrétien, & de le conjurer par l'ancienne piété de fa Maison, & par la générosité d'une ame vraiment royale comme la fienne, de fe vaincre lui

XXX.

même, & d'arrêter la rapidité de fes conquêtes, & la profpérité étonnante de ses armes, en donnant la paix pour le bien commun de toute l'Europe. Cette démarche flatteuse plut beaucoup au Roi, & il crut n'en pouvoir mieux témoigner fa reconnoiffance, qu'en faifant démolir la pyramide dreffée fous le Pontificat d'Alexandre VII, & en acceptant la médiation du Pape, dont le Plénipotentiaire négocia le traité d'Aix-la-Chapelle. L'heureux fuccès de cette négociation lui attira de grandes louanges dans toute l'Eu

rope.

La part qu'il eut à la paix de l'Eglife de Il rend la France troublée par les difputes qui regarpaix à l'E- dojent le Formulaire, ne lui fit pas moins glife. d'honneur. C'eft cet important événement qui a le plus fignalé le Pontificat de Clément IX. Les conditions de cette précieuse paix étoient fi notoires en ce temps - là, qu'elles furent mifes dans les nouvelles publiques. Voici comment en parle la Gazette d'Amfterdam qui, comme perfonne ne l'ignore, fe répand dans toute l'Europe. » On sçait à-préfent de quelle forte s'eft fait l'accommodement des quatre Evêques, & en voici la vérité. Leurs Mandemens fur la fignature du Formulaire aiant été l'occafion des troubles paffés (nous verrons ailleurs quelle en avoit été la vraie cause ) qui avoient attiré sur eux le Bref du Pape Alexandre VII ) portant commiffion à neuf Prélats de leur faire leur procès; vingt de leurs Confreres entr'autres s'intérefferent fur cela pour eux, & en écrivirent au Pape une Lettre, dont le fuccès fat, que fa Sainteté étant mieux inftruite de cette affaire qu'elle ne l'avoit été jufqu'alors,

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