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auxquels il vient d'accorder sa confiance prétendent être en sa faveur les organes de la nation.

Voici le texte de cette déclaration : il mérite d'être conservé, parce qu'il caractérise l'époque.

« Le conseil d'état, en reprenant ses fonctions, croit devoir faire connaître les principes qui font la règle de ses opinions et de sa conduite. La souveraineté réside dans le peuple; il est la seule source du pouvoir. En 1789, la nation reconquit ses droits, depuis long-temps usurpés ou méconnus. L'assemblée nationale abolit la monarchie féodale, établit une monarchie constitutionnelle et le gouvernement représentatif. La résistance des Bourbons aux vœux du peuple amena leur chute et leur bannissement du territoire français. Deux fois le peuple consacra par ses actes la nouvelle forme de gouvernement établie par ses représentants.

«En l'an 8, Bonaparte, déjà couronné par la victoire, se trouva porté au gouvernement par l'assentiment national; une constitution créa la magistrature consulaire. Le sénatus-consulte du 28 floréal an 12 conféra à Napoléon la dignité impériale, et la rendit héréditaire dans sa famille. Ces trois actes solennels furent soumis à l'acceptation du peuple, qui les consacra par près de quatre millions de votes.

<«< Ainsi, pendant vingt-deux ans, les Bourbons avaient cessé de régner en France; ils y étaient oubliés par leurs contemporains, étrangers à nos lois, à nos institutions, à nos mœurs, à notre gloire : la génération actuelle ne les connaissait que par le souvenir de la guerre étrangère qu'ils avaient suscitée contre la patrie, et des dissensions intestines qu'ils y avaient allumées.

«En 1814, la France fut envahie par les armées

ennemies, et la capitale occupée. L'étranger créa un prétendu gouvernement provisoire; il assembla la minorité des sénateurs, et les força, contre leur mission et contre leur volonté, à détruire les constitutions existantes, à renverser le trône impérial, et à rappeler la famille des Bourbons. Le sénat, qui n'avait été institué que pour conserver les constitutions de l'empire, reconnut lui-même qu'il n'avait point le pouvoir de les changer. Il décréta que le projet de constitution qu'il avait préparé serait soumis à l'acceptation du peuple, et que Louis-Stanislas-Xavier serait proclamé roi des Français aussitôt qu'il aurait accepté la constitution, et juré de l'observer et de la faire observer. L'abdication de l'empereur Napoléon ne fut que le résultat de la situation malheureuse où la France et l'empereur avaient été réduits par les événements de la guerre, par la trahison, et par l'occupation de la capitale; l'abdication n'eut pour objet que d'éviter la guerre civile et l'effusion du sang français. Non consacré par le vœu du peuple, cet acte ne pouvait détruire le contrat solennel qui s'était formé entre lui et l'empereur, et quand Napoléon aurait pu abdiquer personnellement la couronne, il n'aurait pu sacrifier les droits de son fils, appelé à régner après lui. Cependant un Bourbon fut nommé lieutenant-général du royaume, et prit les rênes du gouvernement. Louis-Stanislas-Xavier arriva en France; il fit son entrée dans la capitale; il s'empara du trône d'après l'ordre établi dans l'ancienne monarchie féodale. Il n'avait point accepté la constitution décrétée par le sénat; il n'avait point juré de l'observer et de la faire observer; elle n'avait point été envoyée à l'acceptation du peuple; le peuple, subjugué par la présence des armées étrangères, ne pouvait pas même exprimer

librement ni valablement son vou. Sous leur protection, après avoir remercié un prince étranger de l'avoir fait remonter sur le trône, Louis-Stanislas-Xavier data le premier acte de son autorité de la dix-neuvième année de son règne, déclarant ainsi que les actes émanés de la volonté du peuple n'étaient que le produit d'une longue révolte. Il accorda volontairement, et par le libre exercice de son autorité royale, une charte constitutionnelle, appelée ordonnance de réformation ; et, pour toute sanction, il la fit lire en présence d'un nouveau corps qu'il venait de créer, et d'une réunion de députés qui n'était pas libre, qui ne l'accepta point, dont aucun n'avait caractère pour consentir à ce changement, et dont les deux cinquièmes n'avaient même plus le caractère de représentants.

<«< Tous ces actes sont donc illégaux. Faits en présence des armées ennemies et sous la domination étrangère, ils ne sont que l'ouvrage de la violence; ils sont essentiellement nuls et attentatoires à l'honneur, à la liberté et aux droits du peuple. Les adhésions données par des individus et par des fonctionnaires sans mission n'ont pu ni anéantir ni suppléer le consentement du peuple, exprimé par des votes solennellement provoqués et légalement émis. Si ces adhésions, ainsi que les serments, avaient jamais pu être même obligatoires pour ceux qui les ont faits, ils auraient cessé de l'être dès que le gouvernement qui les a reçus a cessé d'exister. La conduite des citoyens qui, sous ce gouvernement, ont servi l'état, ne peut être blâmée. Ils sont même dignes d'éloges, ceux qui n'ont profité de leur position que pour défendre les intérêts nationaux, et s'opposer à l'esprit de réaction et de contre-révolution qui désolait la France.

« Les Bourbons eux-mêmes avaient constamment

violé leurs promesses; ils favorisèrent les prétentions de la noblesse féodale; ils ébranlèrent les ventes des biens nationaux de toutes les origines; ils préparèrent le rétablissement des droits féodaux et des dîmes; ils menacèrent toutes les existences nouvelles ; ils déclarérent la guerre à toutes les opinions libérales; ils attaquèrent toutes les institutions que la France avait acquises au prix de son sang, aimant mieux humilier la nation que de s'unir à sa gloire; ils dépouillèrent la Légion-d'Honneur de sa dotation et de ses droits politiques; ils en prodiguèrent la décoration pour l'avilir; ils enlevèrent à l'armée, aux braves, leurs grades, leur solde et leurs honneurs, pour les donner à des émigrés, à des chefs de révolte; ils voulurent enfin régner et opprimer le peuple par l'émigration. Profondément affectée de son humiliation et de ses malheurs, la France appelait de tous ses voeux son gouvernement national, la dynastie liée à ses nouveaux intérêts, à ses nouvelles institutions.

<< Lorsque l'empereur approchait de la capitale, les Bourbons ont en vain voulu réparer, par des lois improvisées et des serments tardifs à leur charte constitutionnelle, les outrages faits à la nation et à l'armée. Le temps des illusions était passé, la confiance était aliénée pour jamais. Aucun bras ne s'est armé pour leur défense; la nation et l'armée ont volé au-devant de leur libérateur. L'empereur, en remontant sur le trône où le peuple l'avait élevé, rétablit donc le peuple dans ses droits les plus sacrés. Il ne fait que rappeler à leur exécution les décrets des assemblées législatives, sanctionnés par la nation; il revient régner par le seul principe de légitimité que la France ait reconnu et consacré depuis vingt-cinq et auquel toutes les autorités s'étaient liées par

ans,

des serments dont la volonté du peuple aurait pu seule les dégager. L'empereur est appelé à garantir de nouveau, par des institutions (et il en a pris l'engagement dans ses proclamations à la nation et à l'armée), tous les principes libéraux, la liberté individuelle et l'égalité des droits, la liberté de la presse et l'abolition de la censure, la liberté des cultes, le vote des contributions et des lois par les représentants de la nation légalement élus, les propriétés nationales de toute origine, l'indépendance et l'inamovibilité des tribunaux, la responsabilité des ministres et de tous les agents du pouvoir.

<< Pour mieux consacrer les droits et les obligations du peuple et du monarque, les institutions nationales. doivent être revues dans une grande assemblée de représentants, déjà annoncée par l'empereur. Jusqu'à la réunion de cette grande assemblée représentative, l'empereur doit exercer et faire exercer, conformément aux constitutions et aux lois existantes, le pouvoir qu'elles lui ont délégué, qui n'a pu lui être enlevé, qu'il n'a pu abdiquer sans l'assentiment de la nation, que le vœu et l'intérêt général du peuple français lui font un devoir de reprendre. » Suivent quarante-cinq signatures, parmi lesquelles on distingue celles de MM. Andréossy, LasCazes, Najac, Merlin (de Douai), Dumas, C. D. Lacuée, Saint-Jean-d'Angely, etc., etc.

28. Les troupes napolitaines font une irruption dans les états du pape, et prennent Terracine. Murat attaque les Autrichiens à Césène (V. 26 février).

Sa couronne lui est garantie par le traité du 11 janvier 1814 avec l'Autriche, ainsi que par des déclarations positives de l'Angleterre et de la Russie; mais, à ce jour, craignant quelque altération dans la poli

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