Oeuvres complètes, Volume 2

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A. Lemerre, 1890

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Page 226 - Sans avoir recours à l'opium, qui n'a connu ces admirables heures, véritables fêtes du cerveau, où les sens plus attentifs perçoivent des sensations plus retentissantes, où le ciel d'un azur plus transparent s'enfonce comme un abîme plus infini, où les sons tintent musicalement, où les couleurs parlent, où les parfums racontent des mondes d'idées ? Eh bien, la peinture de Delacroix me paraît la traduction de ces beaux jours de l'esprit.
Page 202 - Le beau est toujours bizarre, je ne veux pas dire qu'il soit volontairement, froidement bizarre, car dans ce cas il serait un monstre sorti des rails de la vie. Je dis qu'il contient toujours un peu de bizarrerie, de bizarrerie naïve, non voulue, inconsciente, et que c'est cette bizarrerie qui le fait être particulièrement le Beau.
Page 246 - L'artiste, le vrai artiste, le vrai poète, ne doit peindre que selon qu'il voit et qu'il sent. Il doit être réellement fidèle à sa propre nature. Il doit éviter comme la mort d'emprunter les yeux et les sentiments d'un autre homme...
Page 110 - C'est non seulement la douleur qu'il sait le mieux exprimer, mais surtout, prodigieux mystère de sa peinture, la douleur morale! Cette haute et sérieuse mélancolie brille d'un éclat morne, même dans sa couleur, large, simple, abondante en masses harmoniques, comme celle de tous les grands coloristes, mais plaintive et profonde comme une mélodie de Weber.
Page 242 - Ainsi l'industrie qui nous donnerait un résultat identique à la nature serait l'art absolu ». Un Dieu vengeur a exaucé les vœux de cette multitude. Da.guerre fut son Messie.
Page 114 - ... la vue de ces dessins m'a mis sur des pentes de rêverie immenses , à peu près comme un livre obscène nous précipite vers les océans mystiques du bleu. Bien des fois je me suis pris à désirer, devant ces innombrables échantillons du sentiment de chacun, que le poète, le curieux, le philosophe, pussent se donner la jouissance d'un musée de l'amour, où tout aurait sa place, depuis la tendresse inappliquée de sainte Thérèse jusqu'aux débauches sérieuses des siècles ennuyés.
Page 201 - ... paraissait tel. Et toujours un produit spontané, inattendu, de la vitalité universelle, venait donner un démenti à ma science enfantine et vieillotte, fille déplorable de l'utopie. J'avais beau déplacer ou étendre le criterinm, il était toujours en retard sur l'homme universel, et courait sans cesse après le beau multiforme et versicolore qui se meut dans les spirales infinies de la vie.
Page 247 - Mystérieuse faculté que cette reine des facultés! Elle touche à toutes les autres; elle les excite, elle les envoie au combat. Elle leur ressemble quelquefois au point de se confondre avec elles, et cependant elle est toujours bien elle-même...
Page 310 - Les majestés de la pierre accumulée, les clochers montrant du doigt le ciel, les obélisques de l'industrie vomissant contre le firmament leurs coalitions de fumées...
Page 247 - Elle décompose toute la création, et, avec les matériaux amassés et disposés suivant des règles dont on ne peut trouver l'origine que dans le plus profond de l'âme (et qui sont les règles prosodiques et rhétoriques comme Baudelaire le dira maintes fois), elle crée un monde nouveau, elle produit la sensation du neuf.

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