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Quesnel en particulier. Quelques uns de leurs adversaires, à l'exemple d'un illustre chef d'Israël, leur répondaient (en se moquant et d'eux et de la bulle) qu'elle proposait à croire d'une foi implicite des vérités indéterminées; les autres disaient simplement, que dans une liste de poisons, il n'était pas nécessaire de marquer expressément le degré de malignité de chacun, pour avertir les citoyens de s' s'en préserver. On demandait encore aux jansénistes, comment l'Église pouvait conserver un de ses caractères essentiels, celui d'être visible, s'il fallait la réduire à une poignée de prêtres opposés à tout le reste des pasteurs; et ils répliquaient que la véritable Eglise visible, était celle qui enseignait visiblement la saine doctrine, et qui n'autorisait pas, comme la bulle, le pélagianisme le plus révoltant.

Ils ajoutaient que l'Église, toute visible qu'elle est et qu'elle doit être, n'était pas moins cachée en apparence dans ces temps malheureux où les prêtres de l'Eglise assurent que tout l'univers fut étonné de se voir arien. En un mot, les jansénistes répondaient à leurs adversaires, comme Sertorius à Pompée :

Rome n'est plus dans Rome, elle est toute où je suis.

C'est ainsi que les uns et les autres défendaient leur cause. On ne parle point des injures qu'ils y

ajoutaient, et qui, de part et d'autre, étaient dignes des raisons.

Les philosophes, c'est à dire les ennemis les plus avancés du pouvoir spirituel, en triomphèrent. Leur joie était extrême de voir les chrétiens sévères et attachés au fond même de la morale catholique, lutter contre les chrétiens politiques et actifs qui négligeaient la morale pour le succès. Cette guerre d'extermination devait amener la mort du pouvoir spirituel; et bientôt après la chute du trône despotique, affermi par Louis XIV; tous ces élémens étaient enchaînés l'un à l'autre par un intime lien.

CHAPITRE V.

Destruction des jésuites et chute du pouvoir spirituel
en Europe.

Louis XIV n'eut pas de serviteurs plus dévoués que les jésuites; non seulement il considérait l'ordre comme le meilleur agent de sa politique intérieure, mais il l'employa dans ses relations avec l'étranger, surtout avec l'Angleterre, et c'était par ces services diplomatiques que les membres de l'Institut de Loyola achevaient de mériter ses faveurs. Louis XIV, redoutant à juste titre le développement

des principes républicains dont le protectorat de Cromwell avait laissé le germe, et que le catholicisme ne cessait pas d'activer, comprenait de quel intérêt il serait pour la monarchie de ramener l'Angleterre sous le pouvoir des Stuarts, sous celui de l'ancienné religion et des institutions anciennes. Les jésuites, en le servant sous ce point de vue, étaient fidèles à Rome et à leur institution. Ils allèrent par centaines et la plupart sous de faux noms et des déguisemens, travailler à l'œuvre impossible de la conversion britannique; plusieurs payèrent cette tentative de leur vie. Ils avaient trouvé peu d'accès à la cour de Jacques Ier, et s'étaient introduits à celle de Charles Ier, grâce à la protection de Henriette de France. Aidés de Louis XIV, qui accordait des subsides à Charles II, ils convertirent ce prince, sans oser lui conseiller une profession publique. Jacques II fut plus hardi; la révolution de 1688 fut le fruit de sa hardiesse maladroite. Il céda la place à un prince protestant et vint mourir à Saint-Germain, confessé par un jésuite. Il fallait bien que Louis XIV eût de l'estime et de la reconnaissance pour des hommes aussi zélés. En Suède, ils convertirent la reine Christine qui se vit obligée d'abdiquer avant même de pouvoir professer sa nouvelle foi.

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En Pologne, en Bavière, en Autriche, en Italie, en Portugal, en Espagne, en Asie et en Ame

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