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semblé que cette brochure pourait étre de quelque utilité pour les hommes qui étudient sincèrement la question de la colonisation, et que le Ministère des Colonies y trouverait des éléments d'appréciation sur la valeur des concessions.

M. le Ministre des Colonies ne peut pas se faire une opinion par intuition, ou à la suite de récriminations multiples. Il appartient donc aux coloniaux pratiquants de lui exposer les faits dont ils ont été témoins et de lui exprimer les idées que la pratique leur a suggérées. J'estime donc que chacun de nous doit contribuer à faciliter l'étude de la question de la colonisation, et par conséquent fournir des documents.

Je ne veux pas terminer cet avant-propos sans répondre à ceux de mes confrères concessionnaires qui, lorsqu'ils m'entendent exprimer mon opinion sur les grandes concessions me disent invariablement : Pourquoi avez-vous demandé une concession au Congo? Je leur réponds ici de nouveau, que m'étant donné tout entier à la colonisation depuis de nombreuses années, j'ai voulu me rendre compte par moimême de la valeur du régime des concessions au Congo, comme je le fais du régime des concessions dans les autres colonies françaises chaque fois que j'en ai l'occasion. Ayant horreur du pharisaïsme, j'ajouterai que j'ai satisfait avec d'autant plus d'empressement ce désir d'instruction qu'à l'époque où le ministère des Colonies distribuait les concessions au Congo, celles-ci étaient fort en faveur dans le monde colonial-financier, et qu'en revendant en Belgique avec une légère prime les actions que j'avais souscrites

au-delà de celles qui m'étaient nécessaires pour être administrateur, j'ai pu réduire à très peu de chose le risque que ma passion coloniale me faisait encore encourir.

L'argument employé par certains partisans du statu quo au Congo est que dans l'ensemble des Sociétés concessionnaires les capitaux belges sont en majorité. Loin d'avoir de la valeur auprès des Français il ne peut que servir à hater la recherche de la meilleure solution. Or, comme le grand apôtre de la colonisation, M. Joseph Chailley-Bert, l'a démontré avec la clarté qui lui est particulière, nous sommes à un tournant de la politique coloniale qui exige la plus grande attention.

A. C.

CONCESSIONS CONGOLAISES

L'engouement subit qui s'est produit en France pour les affaires congolaises après l'inauguration du chemin de fer belge, événement ayant appelé l'attention sur les prodigieux bénéfices réalisés par diverses Compagnies belges, a été vite suivi d'un certain état d'inquiétude.

Les Sociétés concessionnaires n'obtenant pas aussi rapidement qu'elles l'espéraient lors de leur formation, les résultats qu'elles avaient entrevus, attribuent leur déception soit à certaines stipulations des cahiers des charges, soit aux dispositions de l'Administration locale.

L'Union Congolaise Française, Association syndicale des Sociétés concessionnaires au Congo, et, indépendamment, plusieurs Administrateurs de ces Sociétés, ont porté de nombreuses doléances à Monsieur le Ministre des Colonies qui, animé d'une très grande bienveillance à l'égard de quiconque s'adonne à la colonisation, s'est préoccupé d'apporter des améliorations à l'état actuel des choses.

Il a répondu à l'Union Congolaise par les deux lettres suivantes :

Paris, le 11 Mai 1901.

UNION CONGOLAISE FRANÇAISE.

MONSIEUR,

Par deux communications en date des 12 Mars et 22 Avril 1901, vous avez appelé l'attention de mon Département sur les difficultés

de toute nature que les Sociétés concessionnaires du Congo rencontraient, à l'heure actuelle, dans la mise en valeur de leur concession.

Vous avez insisté notamment, d'une part, sur la fréquence des réquisitions dont les bateaux à vapeur des dites Sociétés étaient l'objet de la part de l'Administration locale, et, d'autre part, sur la question de la main-d'œuvre indigène, et de la perception de l'impôt en nature.

J'ai l'honneur de vous faire connaître que je viens d'adresser, sur ces deux points, des instructions particulières à M. le Commissaire Général du Gouvernement au Congo.

Je l'ai invité, tout d'abord, à réglementer, d'une façon formelle, les conditions dans lesquelles les fonctionnaires placés sous ses ordres seraient autorisés à faire usage du droit de réquisition. Je lui ai fait remarquer combien l'abus de l'exercice d'un pareil droit pouvait présenter d'inconvénients, combien il était nécessaire d'en restreindre l'emploi aux seuls cas de nécessité absolue et reconnue.

En ce qui concerne la question de la main-d'œuvre et du paiement de l'impôt en nature, il m'a paru possible d'envisager une solution qui ne peut que donner satisfaction à la fois aux intérêts des Sociétés concessionnaires, et à ceux de la Colonie, qui sont, comme vous l'indiquez intimement liés ».

J'ai été amené, en effet, à considérer que le seul moyen que nous possédions de déterminer peu à peu les indigènes au travail, était d'instituer, dans la Colonie, d'une façon définitive, le Régime de l'impôt de capitation payé en nature.

Je prie M. le Commissaire général du Gouvernement au Congo Français d'étudier les moyens de réaliser, auprès des Sociétés concessionnaires, la transformation en numéraire de l'impôt ainsi perçu dans les territoires concédés.

Recevez, Monsieur, les assurances de ma parfaite considération.

Le Ministre des Colonies,

Signé DECRAIS.

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