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civile et militaire et du titre de gouverneurgénéral de la colonie, le général ToussaintLouverture; de confier les commandements aux généraux noirs; de consolider, légaliser l'ordre de travail établi par Toussaint, qui, déja, était couronné par les plus heureux succès; d'obliger les fermiers noirs à payer un cens annuel ou redevance aux anciens propriétaires français; de conserver à la métropole le commerce exclusif de toute la colonie, en faisant surveiller les côtes par de nombreuses croisières. Le deuxième parti consistait à reconquérir la colonie par la force des armes, à rappeler en France tous les noirs qui avaient occupé des grades supérieurs à celui de chef de bataillon, à désarmer les noirs en, leur assurant la liberté civile, et en restituant les propriétés aux colons. Ces projets avaient chacun des avantages et des inconvénients. Les avantages du premier étaient palpables: la république aurait une armée de 25 à 30,000 noirs qui ferait trembler toute l'Amérique; ce serait un nouvel élément de puissance qui ne lui coûterait aucun sacrifice, ni en honrmes, ni en argent. Les anciens propriétaires perdraient sans doute les trois quarts de leur fortune; mais le commerce français n'y perdrait rien, puisqu'il jouirait toujours du privilege exclusif. Le deuxième projet était plus avantageux aux propriétaires colons, il était plus conforme à la justice; mais il exigeait une guerre qui traînerait la perte de beaucoup d'homme d'argent: les pretentions contraires des no des hommes de couleur, des propriétai

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blancs, seraient toujours un objet de .discorde,
d'embarras pour la métropole; Saint-Domin-
gue serait toujours sur un volcan, aussi le pre-
mier consul inclinait pour le premier parti,
parce que c'était celui que paraissait lui con-
seiller la politique, celui qui donnerait le plus
d'influence à son pavillon dans l'Amérique.
Que ne pouvait-il pas entreprendre avec une
armée de 25 à 30,000 noirs sur la Jamaïque,
les Antilles, le Canada, sur les États-Unis
même, sur les colonies espagnoles? Pouvait-
on mettre en compensation de si grands inté-
rêts politiques avec quelques millions de plus
ou de moins qui rentreraient en France? Mais
un pareil projet avait besoin du concours des
noirs; il fallait qu'ils montrassent de la fidé-
lite à la mère- patrie, et à la république qui
leur avait fait tant de bien. Les enfants des
chefs noirs élevés en France dans les écoles
coloniales, établies à cet effet, resserraient tous
les jours d'avantage les liens de ces insulaires
avec la métropole. Tel était l'état de Saint-
Domingue et la politique adoptée par le gou-
vernement français à son égard, lorsque le
colonel Vincent arriva à Paris.
Il était por-
teur de la constitution qu'avait adoptée de sa
pleine autorité Toussaint-Louverture, qui l'avait
fait imprimer et mise à exécution, et qu'il
notifiait à la France. Non- seulement l'auto-
rité, mais même l'honneur et la dignité de la
république étaient outragés: de toutes les ma-
nières de proclamer son indépendance et d'ar-
borer le drapeau de la rebellion, Toussaint-
avait choisi la plus outrageante,

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celle que la métropole pouvait le moins tolérer. De ce moment, il n'y eut plus à délibérer, les chefs des noirs furent des Africains ingrats et rebelles avec lesquels il était impossible d'établir aucun système. L'honneur, comme l'intérêt de la France, voulurent qu'on les fit rentrer dans le néant. Ainsi la ruine de Toussaint-Louverture, les malheurs qui pesèrent sur les noirs, furent l'effet de cette démarche insensée, inspirée sans doute par les agents de l'Angleterre, qui, déja, avait pressenti tout le mal qu'éprouverait sa puissance, si les noirs se contenaient dans la ligne de modération et de soumission, et s'attachaient à la mère-patrie. Il suffit, pour se faire une idée de l'indignation que dut éprouver le premier consul, de dire que Toussaint, non-seulement s'attribuait l'autorité sur la colonie pendant sa vie, mais qu'il s'investissait du droit de nommer son successeur, et voulut tenir son autorité, non de la métropole, mais de lui-même, et d'une soi-disant assemblée coloniale qu'il avait créée; et comme Toussaint-Louverture était le plus modéré des généraux noirs que Dessalines, Christophe, Clervaux etc., étaient plus exagérés, plus désaffectionnés et plus opposés encore à l'autorité de la métropole, il n'y eut plus à délibérer: le premier parti n'était plus praticable, il fallut se résoudre à adopter le deuxième, et à faire le sacrifice qu'il exigeait.

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II NOTE.

(Volume II, chap. XI.)

Les liaisons du colonel Vincent avec les noirs et la grande confiance qu'avait en lui Toussaint-Louverture, l'avaient rendu depuis longtemps suspect à l'administration, qui, cependant, employait cet officier pour influer et convaincre, autant que possible, les noirs de ses bonnes dispositions à leur égard. Mais, lorsqu'il se présenta porteur de la déclaration de l'indépendance des Noirs, et qu'il parut vouloir la justifier, il inspira un sentiment de dégoût que l'on dissimula pour ne pas donner l'éveil à Toussaint, et pour recueillir les renseignements précieux que ce colonel avait sur la position militaire des noirs, et sur les fortifications qu'ils avaient élevées dans les mornes; cela fait, on lui ordonna de se tenir désormais étranger aux affaires de Saint-Domingue: il fut mis à la disposition du ministre de la guerre pour être employé dans son grade. II désira être dans un pays chaud, et il obtint la direction des fortifications de la Toscane. Il assista plusieurs années de suite, au conseil des travaux du mois de janvier, comme directeur des fortifications, qui se tenait en présence de l'empereur, et il fit adopter ses plans pour les châteaux des Présides, de Florence, de Livourne et de Porto-Ferrajo. Il se plaisait à Florence où il maria une de ses filles. Tout cela ne devait pas donner lieu à des ass de libelles qui déshonorent un ouvrage Le premier consul n'a pas pu

faire

part

part de ses projets sur Saint-Domingue qui devaient rester secrets, et pouvaient être exécutés quelques mois après, à une personne qui était l'agent de Toussaint, et dont les machinations secrètes n'étaient plus un mystère : il n'a pas pu non plus lui communiquer ses négociations avec la cour de Londres, et cela pour l'expédition de Saint-Domingue par une notion préparatoire, puisqu'il n'y a eu ni notes, ni pourparlers, ni négociations avec l'Angleterre pour l'expédition de Saint-Domingue.

III NOTE.

(Volume II, chap. XII.)

Il contient le départ de France de l'armée du capitaine-général Leclerc, son arrivée à Saint-Domingue, et ses premières opérations. Il y est dit:

» 1° Que Napoléon avait, dans son cabinet particulier, plu,,sieurs fonctionnaires de la colonie qui rédigeaient des instruc,, tions secrètes, sans que l'homme de mer expérimenté, qui ,, tenait à cette époque le porte-feuille de la marine, eût été ,,appelé à donner son avis, même sur les détails nautiques de ,, l'expédition: il n'avait eu qu'à signer, pour copie conforme, ,, les instructions déja revêtues de l'approbation et de la signa,,ture du premier consul; que le temps que les flottes de Brest, ,, de Rochefort, de Lorient, ont mis à se rallier au cap Samana, ,,empêcha l'expédition de surprendre Toussaint - Louverture ; »,2° que les négociations entamées par le cabinet de SaintCloud auprès des cabinets étrangers, relativement à l'axpédi ,, tion, en avaient ébruité les détails; 3° que les instructio ,, secrètes sur l'expédition de Saint-Domingue renfermaient N. Tome I.

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