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.......... ',, Mais le nom de Moreau était plus populaire, et la „nation l'eût préféré, si la dictature l'avait séduit, ou si la ,,noble et secrète ambition de se faire le Monk des Français „l'avait excité; il aurait pu, bien avant cette époque, faire in,,tervenir l'armée, et devancer son rival; il avait plus que lui ,,l'affection du soldat: on le connaissait davantage. Il avait ,, eu partout de grands succès, en Flandre, en Allemagne et en „Italie, où sa retraite devant Souwarow ne l'illustra pas moins ', que celle qu'il avait faite devant M. l'archiduc. Moreau n'avait pas la résolution d'esprit nécessaire pour de telles entre,,prises; il crut, en secondant l'élévation du premier consul, ,, se réserver le rôle de généralissime, qui lui convenait mieux: ,, mais ce partage parut trop inégal à ce brillant et farouche ,, amant de la gloire, qui se montra toujours jaloux de ses moin„dres faveurs, et n'en connut jemais le véritable prix..........

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(Page 82).

,,Son plan de campagne ne fut point d'abord adopté par le gouvernement; il voulait agir par son aile droite, et se bor„ner à observer le Saint-Gothardt et les principaux passages „, du haut Valais jusqu'aux Grisons: il pensait que as premiers ,, mouvements de l'armée de réserve suffiraient pour dégager „Masséna; qu'il ne fallait rien entreprendre de plus jusqu'à ce », que l'offensive contre le général Kray eût pleinement réussi, ,, et qu'on l'eût mis hors d'état de tenir campagne; que jusque,, là il fallait bien se garder d'affaiblir l'aile droite de l'armée ,, du Rhin, et qu'on devait, au contraire, la soutenir en portant en avant, à la naissance des plus hautes vallées, au dé,,bouché de l'Engadine et du Vorarlberg, une partie de l'armée ,,de réserve, et qu'elle s'y trouverait également bien placée pour

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;, fermer l'entrée de la Suisse, du côté du Tyrol, si le général ,,Kray tentait d'y opérer une diversion, ou pour prendre des „, revers sur la nouvelle ligne d'opérations du général Mélas en ,, Lombardie, et couvrir d'autant mieux celle de l'armée fran,,çaise du Rhin, agissant dans le bassin du Danube. Bona,,parte, au contraire, ne songeait qu'à reconquérir l'Italie et ,, ses premiers trophées; il avait, à la vérité, porté d'abord sur ,, l'armée de Moreau toutes les ressources disponibles et les plus „à portée pour la mettre plus promptement en état d'agir, per,, dant qu'il rassemblait avec peine, à de grandes distances, le „ personnel, le matériel et grand nombre de chevaux nécessai„res pour son expédition: mais il considérait cette grande ar,,mée du Rhin comme une masse qui devait seulement paraly,, ser les principales forces de l'Autriche, après que les premiers „, mouvements auraient rompu tout concert entre l'armée impé,,riale d'Allemagne et celle d'Italie. Il suffisait done au pre,,mier consul que la Suisse fût bien gardée, et la chaîne des ,,Alpes rendue impénétrable. Moreau devait rester en obser,,vation, et détacher toute son aile droite pour renforcer l'ar,,mée de réserve dans les plaines de la Lombardie, afin que lui ,, seul pût frapper les grands coups sur le théâtre où il lui con,, venait de remporter d'éclatantes victoires. "

Le général Moreau n'a jamais commandé en Flandre, ni en Hollande; il a fait les campagnes de 1794 et 1795 sous les ordres des généraux Pichegru et Jourdan, comme Souham, Taponnier, Michaud etc.; il commanda en chef pour la première fois au mois de mai 1796 à l'armée du Rhin; il passa ce fleuve au moi de juillet. Napoléon était alors maître de toute l'Italie.

La campagne en Allemagne de 1796 ne fait honneur ni aux talents militaires de ceux qui en ont conçu le plan, ni au général qui en a eu la principale direction, et qui à commandé

la principale armée: 1° il passa sur la rive droite du Danube et du Lech, après la bataille de Neresheim le 11 août, tandis qu'en marchant devant lui sur l'Altmuhl par la rive gauche du Danube, il se fût joint en trois marches avec l'armée de Sambre-et-Meuse qui était sur la Rednitz, et eût par ce mouvement décidé de la campagne; 2° il resta inactif six semaines pendant août et septembre en Bavière, pendant que l'archiduc battait l'armée de Sambre-et-Meuse, et la rejetait au delà du Rhin; 3° il laissa assiéger Kehl pendant plusieurs mois par une armée inférieure, à la vue de la sienne, et il le laissa prendre.

Dans la campagne de 1799, il servit d'abord en Italie sous Schérer, comme général de division; il y montra autant de bravoure que d'habileté à la tête d'une ou deux divisions; mais, appelé au commandement en chef de cette même armée, à la fin d'avril, par le rappel de Schérer, il ne fit que des fautes, et ne montra pas plus de connaissances du grand art de la guerre, qu'il n'en avait montré dans la campagne de 1796. 1° Il se fit battre à Cassano par Souwarow; il y perdit la plus grande partie de son artillerie, et laissa cerner et prendre la division Serrurier. 2o Il fit sa retraite sur le Tésin, tandis qu'il eût dû la faire sur la rive droite du Pô, par le pont de Plaisance, afin de se réunir à l'armée de Naples que commandait Macdonald, et qui était en marche pour s'approcher du Pô: cette réunion faite, il était maître de l'Italie. 3° Du Tésin il fit sa retraite sur Turin, laissant Souwarow maître de

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se porter sur Gênes; et de le couper entièrement de l'armée de Naples: il s'apperçut à temps de cette faute, revint en toute hâte par la rive droite du Pô sur Alexandrie; mais quelques jours après il commit la même faute en marchant sur Côni, et abandonnant entierement l'armée de Naples, et les hauteurs de Gênes. 4° Pendant qu'il marchait à l'ouest, Macdonald arriva avec l'armée de Naples, sur la Spezia; au lieu d'opérer sa jonction avec ce général sur Gênes derrière l'Apennin, et de déboucher, réunis, par la Bocchetta pour faire lever le siége de Mantoue *), Moreau préscrivit à Macdonald de passer l'Apennin, et d'entrer dans la vallée du Pô pour opérer sa jonction sur Tortone; il arriva ce qui devait arriver: l'armée de Naples seule, eût à supporter tous les efforts de l'ennemi aux champs de la Trebbia, et l'Italie alors fût véritablement perdue.

En 1799, Moreau ne jouissait d'aucun crédit ni dans l'armée ni dans la nation; sa conduite en fructidor 1797, l'avait discrédité dans tous les partis; il avait gardé pour lui les papiers trouvés dans le fourgon de Klinglin, qui prouvaient les correspondances de Pichegruavec le duc d'Enghien et les autrichiens, ainsi que les trames des factions de l'intérieur, pendant que Pichegru, masqué par la réputation` qu'il avait acquise en Hollande, exerçait une

Ceci parait une erreur du copiste.

N. Tome I.

Note de l'éditeur.

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grande influence sur la législature. Moreau trahit son serment, et viola ses devoirs envers son gouvernement en lui dérobant la connaissance de papiers d'une si haute importance, et auxquels pouvait être attaché le salut de la république; si c'était son amitié pour Pichegru, qui le portait à ce coupable ménagement, il fallait alors ne pas communiquer ces papiers au moment où leur connaissance n'était plus utile à l'état, puisque, après la journée du 18 fructidor, le parti était abattu et Pichegru dans les fers. La proclamation de Moreau à l'armée, et sa lettre à Barthélemi furent un coup mortel, qui priva Pichegru et ses malheureux compagnons de la seule consolation qui reste aux malheureux, l'intérêt public.

Moreau n'avait aucun systême ni sur la politique, ni sur le militaire; il était excellent soldat, brave de sa personne, capable de bien remuer sur un champ de bataille une petite armée, mais absolument étranger aux connaissances de la grande tactique. S'il se fût mêlé dans quelques intrigues pour faire un 18 brumaire, il eût échoué. Il se serait perdu ainsi que le parti qui se serait attaché à lui. Lorsqu'au mois de novembre 1799 le corps législatif donna un dîner à Napoléon, un grand nombre de députés ne voulurent point y assister, parce que Moreau devait y occuper un rang distingué, et qu'ils ne voulaient rendre aucun témoignage de considération au général qui avait trahi la république en fructidor. Ce fut dans cette circonstance, que ces deux généraux se virent pour la première fois. Quelques jours

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