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influence, on doit faire abstraction de tout ce qui n'agit pas directement et rétroactivement sur l'existence juridique ou sur la validité des clauses de l'acte.

300. Quelques applications démontreront l'exactitude de la règle (1).

Le droit perçu sur un procès-verbal d'adjudication que le vendeur avait refusé de signer, a été déclaré restituable, parce que faute de cette signature, il n'y avait pas eu de vente et que le droit avait été irrégulièrement perçu (2).

Le droit perçu sur un contrat de mariage doit toujours être restitué, si le mariage ne s'ensuit pas, parce que le contrat est toujours conditionnel (5).

Le droit de tout acte soumis à une approbation, est restituable si l'acte n'est pas approuvé; le défaut d'approbation empêche la convention d'exister (4).

Quand il est prouvé que le contrat avait déjà subi le droit sur un acte précédent, la perception est encore irrégulière, puisque au moment où elle a eu lieu, l'acte était affranchi de tout droit (5).

Les droits ne sont pas restituables sur une donation révoquéc pour survenance d'enfants. Au moment où l'acte a été enregistré, le droit était dû. La survenance d'enfants est un événement ultérieur qui ne peut altérer la régularité de la perception (6).

Quand une vente est résolue pour défaut de payement de prix ou pour toute autre cause postérieure à l'enregistrement, la perception est toujours régulière et le droit ne doit pas être restitué (7).

On doit en dire autant de toute vente qui est déclarée nulle pour

(1) Nous verrons dans la partie spéciale les questions qui se rattachent à la licitation.

(2) Déc. B., 23 mai 1843 (Journ., no 3038).

(3) Déc. B., 25 avril 1848 (Mon. not., 1848, p. 442) ; 19 juillet 1849 (Journ., no 4547). (4) Déc. B., 13 septembre 1843 (Journ., no 3165). La même solution a été donnée au contrat de remplacement, quand le remplaçant n'est pas agréé. Déc. B., 29 août 1836 et 10 septembre 1840 (Journ., nos 846, 2238).

(5) Déc. B., 15 mai 1837 (Journ., no 1137).

(6) Déc. F., 17 juillet 1824.

(7) Cass. F., 14 mars 1857.

des faits qui se produisent en dehors de l'acte, les nullités fussentelles absolues. Ainsi, la vente de la chose d'autrui n'empêche pas la perception d'être régulière, alors que la circonstance que la chose appartient à autrui n'est pas énoncée dans l'acte (1).-La vente des biens d'un mineur, qui n'a pas été faite avec les formalités voulues, rend les droits exigibles et non restituables, quels que soient les événements ultérieurs (2). La loi doit présumer que les parties ont la capacité, que les tuteurs, par exemple, sont dûment autorisés et que toutes les formalités ont été accomplies; s'il est prouvé plus tard que rien n'a été fait, cette preuve n'exerce aucune influence sur la valeur de l'acte, tel qu'il a été présenté à l'enregistrement, et ne peut rendre irrégulière la perception des

droits.

301. La seconde condition à laquelle la demande en restitution est subordonnée, est que l'action ne soit pas prescrite. Nous verrons au chapitre suivant dans quels cas la Régie peut invoquer la prescription.

302. En principe, l'action en restitution appartient à ceux qui sont redevables du droit envers le fisc.

Ainsi, les notaires étant personnellement débiteurs de l'Administration pour les droits d'acte, doivent avoir l'action en restitution. Ce point a été longtemps douteux; mais on peut dire que la jurisprudence est fixée (5). Dès qu'il est reconnu que le notaire est le véritable débiteur du droit, on doit forcément admettre que, si ce droit a été irrégulièrement perçu, c'est à celui qui l'a payé, qu'il doit être restitué (4).

303. Pour les actes sous seing privé, on doit décider aussi que

(1) Déc. B., 22 juillet 1840; 25 avril 1842; 22 mars 1843 (Journ., no 2195, 2575, 3103). (2) Déc. B., 29 avril 1842 (Journ., no 2605). Cass. B., 18 novembre 1839 (Journ., n° 2525). On a voulu étendre ces cas un avis du Conseil d'État du 22 octobre 1808 qui avait décidé, que les adjudications faites en justice devant être enregistrées dans les vingt jours, le droit est restituable si elles sont annulées par les voies légales. — Mais cet avis, fait pour un cas spécial et motivé sur l'impossibilité de fraude et sur ce que l'appel du jugement d'adjudication est suspensif, n'est pas applicable. MERLIN, Rep., vo Restitution de droits.

(3) Circul. B., 25 septembre 1832 (Journ, no 202).

(4) Circul. B., 17 mars 1847. - DALLOZ, no 5426.

celui qui a payé peut demander la restitution. Mais, comme nous l'avons vu, le payement doit se faire par celui qui requiert la formalité, qu'il soit ou non partie à l'acte. Or, il arrive le plus souvent qu'il ne reste pas de trace de celui qui a requis la formalité et payé les droits. Dans ce cas, et chaque fois qu'il n'y a pas de preuve du contraire, la présomption est que les droits ont été payés par celui qui était légalement tenu de les acquitter au fisc. L'action en restitution appartient alors à celui-là seul sans qu'on puisse exiger la preuve que c'est lui qui a payé les droits.

Au reste, on doit appliquer les principes généraux et dire que l'action appartient encore à tous ceux qui ont le droit d'exercer les actions des parties, comme étant leurs représentants ou ayants droits.

304. Quand l'Administration est condamnée à la restitution de droits irrégulièrement perçus, doit-elle les intérêts?

La Cour de cassation de France juge que les intérêts ne sont pas dus, par le motif que la Régie n'est pas dans l'usage, et que d'ailleurs aucune disposition de la loi ne lui permet, d'exiger du redevable en retard des intérêts moratoires; que, par une juste réciprocité, on ne peut en exiger d'elle (1).

La Cour de cassation de Belgique décide constamment que les intérêts sont dus à partir de la demande judiciaire. Sa jurisprudence, qui nous paraît à l'abri de toute objection sérieuse, est basée sur la généralité des règles consacrées par les art. 1147 et 1153 du Code civil et sur l'absence de toute exception à ces règles dans la loi fiscale (2).

Le motif peu juridique sur lequel repose la jurisprudence de la Cour de cassation de France, ne peut tenir devant cette double considération que la Régie a la voie de la contrainte et peut, en thèse générale, exiger le payement immédiat; que, d'un autre côté, la loi établit des amendes et des doubles droits pour les retards que les contribuables mettent à faire enregistrer les actes ou mutations.

(1) Voir les arrêts cités par DALLOZ, no 5432.

(2) Arrêts 24 février 1835; 22 juin 1836; 7 novembre 1836; 12 novembre 1838 (Journ., nos 385, 1219, 1266, 1742).

CHAPITRE IV.

DE LA PRESCRIPTION.

SOMMAIRE.

305. Texte de la loi et objet de ce chapitre.

306. Caractère exceptionnel de la prescription spéciale. 307. On ne peut y renoncer avant qu'elle ne soit acquise. pléée d'office.

Elle ne peut être sup

308. Conditions requises pour la prescription de deux ans. 309. Première condition: Quels sont les cas pour lesquels la loi de frimaire établit la prescription de deux ans.

310. Règle pour les dispositions indépendantes d'un acte.

311. Comment appliquer la règle aux actes ou aux mutations qui sont énoncés dans d'autres actes?

312. Distinction: on mentionne un acte écrit ou une mutation.

313. De quelle manière la prescription s'applique à l'acte qui fait mention d'un autre acte.

314. Mais cette prescription n'atteint pas les droits dus sur l'acte mentionné, quand il appartient à la catégorie de ceux qui ne doivent pas être enregistrés dans un délai déterminé.

315. Éléments d'une double difficulté, lorsque la mention porte sur un acte qui devait être enregistré dans un délai de rigueur, ou sur une mutation sans acte.

316. Examen de cette difficulté quant aux droits de mutation.

317. Examen du même point quant aux droits d'acte.

318. Prescription applicable à la mutation qui n'est révélée dans aucun acte

enregistré.

319. Prescription applicable quand une disposition particulière est soumise à une

condition suspensive.

320. Règle pour les suppléments de droits.

321. Les réserves sont inopérantes pour empêcher le cours de la prescription.

322. Règle pour la demande d'expertise.

323. Règle pour la demande de restitution de droits.

324. Règle pour les amendes.

325. Prescription des jugements de condamnation.

326. Deuxième condition: Quand commence le délai de la prescription.

327. En cas de vente avec réserve d'usufruit.

328. Le jour à quo est-il compris dans le délai?

329. Comment la prescription est arrêtée.

330. Causes qui arrêtent la prescription.

331. Les causes ordinaires de suspension et d'interruption ne sont pas applicables

à la prescription de deux ans.

332. Prescription d'un an.

333. Conditions de cette prescription.

334. Comment cette prescription peut être interrompue.

335. Comment elle est arrêtée.

336. Effet de la prescription de deux ans.

337. Effet de la prescription d'un an.

305. L'art. 61 de la loi de frimaire porte: « Il y a prescription pour la demande des droits, après deux années à compter du jour de l'enregistrement, s'il s'agit d'un droit non perçu sur une disposition particulière dans un acte, ou d'un supplément de perception insuffisamment faite, ou d'une évaluation dans une déclaration, et pour la constater par voie d'expertise.

« Les parties seront également non recevables, après le même délai, pour toute demande en restitution de droits.

« Les prescriptions seront suspendues par des demandes signifiées et enregistrées avant l'expiration des délais; mais elles seront acquises irrévocablement, si les poursuites commencées sont interrompues pendant une année, sans qu'il y ait d'instance devant les juges compétents, quand même le premier délai pour la prescription ne serait pas expiré. »

Il s'agit de rechercher le caractère de ces prescriptions - les conditions requises pour les invoquer les causes qui peuvent les arrêter et les effets qu'elles produisent.

306. La prescription particulière établie par la loi de frimaire, constitue une exception à la prescription ordinaire. Elle ne peut donc être étendue par analogie, ni interprétée extensivement. Les cas qui ne rentrent pas directement dans les conditions exigées par la loi fiscale, restent sous l'empire de la prescription trentenaire de l'art. 2262 du Code civil.

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