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manière à pouvoir arriver à une heure du matin à Fontainebleau.

Avant de partir d'Auxerre, l'empereur fut rejoint par le prince de la Moskwa. Ce maréchal avoit fait arborer la cocarde tricolore dans tout son gouverne

ment.

L'empereur arriva à Fontainebleau le 20, à quatre heures du matin ; à sept heures, il apprit que les Bourbons étoient partis de Paris; et que la capitale étoit libre. Il partit sur-le-champ pour s'y rendre; il est entré aux Tuileries à neuf heures du soir, au moment où on l'attendoit le moins.

Ainsi s'est terminée, sans répandre une goutte de sang, sans trouver aucun obstacle, cette légitime entreprise, qui a rétabli la nation dans ses droits, dans sa gloire, et a effacé la souillure que la trahison et la présence de l'étranger avoient répandue sur la capitale; ainsi s'est vérifié ce passage de l'adresse de l'empereur aux soldats que l'aigle, avec les couleurs nationales, voleroit de clocher en clocher jusqu'aux tours de Notre-Dame.

En dix-huit jours, le brave bataillon de la garde a franchi l'espace entre le golfe Juan et Paris, espace qu'en temps ordinaire on met quarante-cinq jours à parcourir.

Arrivé aux portes de Paris, l'empereur vit venir à sa rencontre l'armée tout entière que commandoit le duc de Berry. Officiers, soldats, genéraux, infanterie légère, infanterie de ligne, lanciers, dragons, cuirassiers, artillerie, tous vinrent au-devant de leur général que le choix du peuple et le vœu de l'armée

avoient élevé à l'empire, et la cocarde tricolore fut arborée par chaque soldat qui l'avoit dans son sac. Tous foulèrent aux pieds cette cocarde blanche qui a été pendant vingt-cinq ans le signe de ralliement des ennemis de la France et du peuple.

Le 21, à une heure après midi, l'empereur a passé la revue de toutes les troupes qui composoient l'armée de Paris. La capitale entière a été témoin des sentimens d'enthousiasme et d'attachement qui animoient ces braves soldats. Tous avoient reconquis leur patrie! tous étoient sortis d'oppression! tous avoient retrouvé dans les couleurs nationales le souvenir de tous les sentimens généreux qui ont toujours distingué la nation française ! Après que l'empereur eut passé dans les rangs, toutes les troupes furent rangées en bataillons carrés.

Soldats, dit l'empereur, je suis venu avec six » cents hommes en France, parce que je comptois

sur l'amour du peuple et sur le souvenir des vieux » soldats. Je n'ai pas été trompé dans mon attente. » Soldats, je vous en remercie. La gloire de ce » que nous venons de faire est toute au peuple et à » vous; la mienne se réduit à vous avoir connus et >> appréciés.

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» Soldats, le trône des Bourbons étoit illégitime, » puisqu'il avoit été relevé par des mains étrangères, puisqu'il avoit été proscrit par le vœu de la nation exprimé par toutes nos assemblées nationales; puisqu'enfin il n'offroit de garantie qu'aux intérêts » d'un petit nombre d'hommes arrogans dont les » prétentions sont opposées à nos droits. Soldats, le.

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» trône impérial peut seul garantir les droits du » peuple, et surtout le premier de nos intérêts, > celui de notre gloire. Soldats, nous allons marcher » pour chasser du territoire ces princes auxiliaires » de l'étranger; la nation non seulement nous secon» dera de ses vœux, mais même suivra notre im> pulsion. Le peuple français et moi nous comptons » sur vous. Nous ne voulons pas nous mêler des » affaires des nations étrangères; mais malheur à » qui se mêleroit des nôtres ! »

Ce disours fut accueilli par les acclamations du peuple et des soldats.

Un instant après, le général Cambronne et des officiers de la garde du bataillon de l'île d'Elbe pa→ rurent avec les anciennes aigles de la garde. L'empereur reprit la parole, et dit aux soldats : « Voilà » les officiers du bataillon qui m'a accompagné dans » mon malheur; ils sont tous mes amis; ils étoient » chers à mon cœur! Toutes les fois que je les » voyois, ils me représentoient les différens régi>> mens de l'armée; car dans ces six cents braves, » il y a des hommes de tous les régimens: tous me rappeloient ces grandes journées dont le souvenir » est si cher; car tous sont couverts d'honorables >> cicatrices reçues à ces batailles mémorables. En les » aimant, c'est vous tous, soldats de toute l'armée française, que j'aimois! ils vous rapportent ces aigles qu'elles vous servent de point de rallie»ment! En les donnant à la garde, je les donne à » toute l'armée.

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>> La trahison et des circonstances malheureuses

>> les avoient couvertes d'un crêpe funèbre! mais » grâce au peuple français et à vous, elles repa» roissent resplendissantes de toute leur gloire. Jurez

qu'elles se trouveront toujours partout où l'intérêt » de la patrie les appellera! Que les traîtres et ceux qui voudroient envahir notre territoire n'en puissent » jamais soutenir le regard! »

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«Nous le jurons! » s'écrièrent avec enthousiasme tous les soldats. Les troupes défilèrent ensuite au son de la musique, qui jouoit l'air : Veillons au salut de l'empire!

N° XII.

Au palais des Tuileries, le 25 mars 1815. NAPOLÉON, EMPEREUR DES FRANÇAIS;

Nos ministres d'Etat entendus,

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :

Art. 1o. Les lois des assemblées nationales applicables à la famille des Bourbons seront exécutées suivant leur forme et teneur. Ceux des membres de cette famille qui seroient trouvés sur le territoire de l'empire seront traduits devant les tribunaux pour y être jugés conformément auxdites lois.

2. Ceux qui auroient accepté des fonctions ministérielles sous le gouvernement de Louis-StanislasXavier, comte de Lille; ceux qui auroient fait partie de sa maison militaire et civile, ou de celles des princes de sa famille, seront tenus de s'éloigner de notre bonne ville de Paris, à trente lieues de poste. Il en sera de même des chefs, commandans et offi

ciers des rassemblemens formés et armés pour le renversement du gouvernement impérial, et de tous ceux qui ont fait partie des bandes de chouans.

3. Les individus compris dans l'article précédent seront tenus, sur la réquisition qui leur en sera faite, de prêter le serment voulu par les lois. En cas de refus, ils seront soumis à la surveillance de la haute police; et, sur le rapport qui nous en sera fait, il pourra être pris à leur égard telle autre mesure que l'intérêt de l'Etat exigera.

N° XIII.

DISCOURS ET ADRESSE DES MINISTRES, DU 26 MARS.

Le prince archichancelier de l'empire, portant la parole au nom des ministres, a parlé en ces termes : Sire,

Les ministres de V. M. viennent vous offrir leurs respectueuses félicitations. Lorsque tous les cœurs ressentent le besoin de manifester leur admiration et leur joie, nous avons cru devoir consigner nos opinions et l'expression de nos sentimens dans l'adresse que j'ai l'honneur de vous présenter. Puisse V. M. accueillir cet hommage de ses fidèles serviteurs, de ses serviteurs si cruellement éprouvés, mais si complétement dédommagés par votre présence, et par toutes les espérances qui s'y trouvent attachées !

Adresse des ministres de Sa Majesté.

Sire,

La Providence, qui veille sur nos destinées, a rouvert à V. M. le chemin de ce trône où vous

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