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firmative (avait dit Carré dans ses manuscrits, et nous partageons son sentiment); un pareil acte nous paraît en effet équivalent à celui qui aurait été dressé après le décès, d'après la maxime: idem est esse certum per se vel per relationem alicujus rei certæ. Il faudrait donc, pour priver la veuve du bénéfice de la

renonciation faite dans le délai, prouver immixtion, infidélité, fausse déclaration, succession avenue et cachée, en un mot, une ou plusieurs circonstances auxquelles la loi attache la perte des avantages de la renonciation. »]

TITRE IX.

DE LA SÉPARATION DE CORPS ET DU Divorce.

Le législateur s'est borné, dans les art. 506 et 307, C. civ., à déclarer que la demande en séparation de corps serait instruite et jugée de la même manière que toute autre action civile.

Mais, d'un côté, la qualité des parties exigeait des égards particuliers et certaines modifications concernant l'essai préalable de conciliation; de l'autre, l'intérêt des tiers commandait quelques précautions, relatives à la publicité qu'il convenait de donner à un jugement qui entraîne nécessairement la sépation de biens.

L'art. 881 porte, à l'égard du divorce, qu'il sera procédé comme il est prescrit au Code civil; mais on verra sur cet article que cette disposition doit être considérée comme non avenue par la suppression du divorce.

ART. 875. L'époux qui voudra se pourvoir en séparation de corps, sera tenu de présenter au président du tribunal de son domicile requête contenant sommairement les faits; il y joindra les pièces à l'appui, s'il y en a (1).

Tarif, 29 et 79.-C. civ., art. 236, 506 et suiv., 511. -Voy. FORMULE 746.)

d'une ordonnance portant que les parties comparaîtront devant le président au jour qui sera indiqué par ladite ordonnance.

Tarif, 29.-C. civ., art. 238.-(Voy. FORMULES 747 et 748.)

ART. 877. Les parties seront tenues de comparaître en personne, sans pouvoir se faire assister d'avoués ni de conseils.

C. civ., art. 238.

ART. 878. Le président fera aux deux époux les représentations qu'il croira propres à opérer un rapprochement : s'il ne peut y parvenir, il rendra, ensuite de la première ordonnance, une seconde portant qu'attendu qu'il n'a pu concilier les parties, il les renvoie à se pourvoir, sans citation préalable au bureau de conciliation; il autorisera par la même ordonnance la femme à procéder sur la demande, et à se retirer provisoirement dans telle maison dont les parties seront convenues, ou qu'il indiquera d'office; il ordonnera que les effets à l'usage journalier de la femme lui seront remis. Les demandes

ART. 876. La requête sera répondue en provision seront portées à l'audience (2).

(1) Il ne faut pas, comme pour le divorce, que la requête soit détaillée. (Brux., 18 avril 1835.)]

(2) [Si l'ordonnance du président qui n'a pu concilier les parties prescrit la remise des effets à la femme et que le mari refuse, il peut être fait commandement par l'exploit même d'ajournemeut, sinon par un commandement spécial.(. notre Comm. du Tarif, t. 2, p. 263, no 15.)]

* Un négociant, après avoir fait abandon de tout son bien à ses créanciers, se retire de sa maison commerciale et quitte même la ville où en était le siége; sa femme, après une séparation de biens et une renonciation à la communauté, prend en location ladite maison pour son propre compte et pour y faire un

commerce, le tout sans contradiction du mari; dans ces circonstances, on ne peut considérer cette maison comme le domicile conjugal, de telle sorte que la femme, agissant en séparation de corps, ne puisse pas demander à y rester pendant l'instance et à ce qu'il soit fait défense au mari de venir l'y trouver. (Brux., 29 juin 1832.)

En matière de séparation de corps, le président du tribunal, chargé par la loi de tenter la réconciliation des époux, ne peut, lorsque cette tentative a été vaine, enjoindre par son ordonnance de renvoi l'exécution provisoire du contrat de mariage. Pour obtenir cette exécution, il faut se pourvoir en référé. (Liége, 28 juin 1827.)]

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lui. Nous ne voyons pas que rien, dans notre titre, l'oblige à prendre ce terme plutôt que tout autre. Si la loi l'établit en matière ordinaire, c'est que la citation en conciliation, étant faite par les parties elles-mêmes, ne pouvait être abandonnée à leur arbitraire ou àleur mauvaise foi mais ici, c'est le président du tribunal qui les appelle; et dès lors on n'a plus à redouter des inconvénients de ce genre. Voilà ce qui explique le silence de la loi.] 2968. Y a-t-il lieu à comparution des parties devant le président, dans tous les cas où la séparation de corps peut être de

mandée?

:

Quatre causes de séparation sont énumérées au Code civil (voy. art. 229, 230, 231, 232 et 306), savoir l'adultère de la femme, l'adultère du mari en certains cas, les excès, sévices ou injures graves de l'un des époux envers l'autre; enfin, la condamnation de l'un des époux à une peine infamante. Ce n'est qu'au- | tant que la demande est fondée sur l'une des trois premières causes qu'elle est susceptible de l'application des dispositions du Code de procédure; la quatrième pouvant être facilement démontrée, il suffit à l'époux demandeur de présenter requète au président contenant l'objet de sa demande, avec expédition du jugement criminel et certificat de la cour, qui constate qu'il a acquis l'autorité de la chose jugée.

nous paraissent repousser une telle décision. Toutes les causes de séparation énumérées par l'art. 229, C. civ., sont facultatives; il dépend de l'époux qui peut s'en prévaloir de prévenir par son silence ou d'empêcher par sa renonciation les résultats que la loi leur attribue. Lors même que la nécessité est plus puissante que toutes les considérations contraires, il faut encore qu'un dernier essai de conciliation soit tenté, et la loi le confie, non naire, mais au président du tribunal Jui-même, pas au juge de paix, comme en matière ordiplus capable, par son expérience et sa position,

d'en assurer la réussite.

Et lorsque les offenses les plus déshonorantes, les excès les plus graves, l'adultère même, ne dispensent point ce magistrat d'une tâche aussi importante que délicate, il n'en serait pas ainsi à raison du fait, bien grave, sans doute, aux yeux de la société, mais qui en définitive ne porte atteinte ni à l'honneur, ni à la sûreté d'un conjoint, et qui mème, s'il n'écoute que la voix de la religion et le sentiment de l'affection, n'est pour lui qu'un motif de plus de s'attacher à celui dont la loi lui permet de se séparer?

Nous croyons donc qu'il est non-seulement permis, mais convenable, mais moral, que le président appelle en sa présence celui dont le conjoint a été frappé par la justice d'une peine infamante, qu'il essaye d'empêcher une séparation, qui serait peut-être, pour ce dernier, le malheur le plus grand de tous, et que la

Le président nomme un rapporteur, et jugement intervient sur les conclusions du mi-loi n'a pas prononcé contre lui; qu'il se connistère public, dans la forme des jugements sur requête.

Telles sont, dit Pigeau, t. 5, p. 131, les formes très-simples que l'on suit en cas de condamnation de l'époux défendeur à une peine infamante.

La preuve de ce fait est si claire qu'il n'est pas besoin d'assigner ni d'entendre la partie adverse; mais on peut opposer que cette procédure si rapide n'est autorisée qu'en matière de divorce. (Voy. Cod. civ., art. 261.)

Nous répondons qu'à plus forte raison elle doit être suivie pour la séparation de corps qui est bien moins importante.

[Tel est également l'avis de Pigeau, Comm., t. 2, p. 574; de Duranton, t. 2, no 367; de Thomine, no 1025, et de Massol, de la Séparation de corps, p. 106.

Nul doute, en ce qui concerne la procédure, que la pièce la plus importante à joindre à la requête, dans ce cas, ne soit le jugement de condamnation à une peine infamante; mais de cela que cette pièce est produite suit-il que tout est fini, que le président n'a plus de mission pour concilier les époux, que le tribunal doit à l'instant mème, et sans autre information, prononcer entre eux la séparation de corps? La religion et la morale la plus vulgaire

forme enfin, si l'on ne trouve pas de telles raisons assez juridiques, à la loi, qui lui impose cette obligation dans tous les cas indisinclement...

Qu'oppose-t-on à ces arguments?... une dis position insérée au titre du Divorce? Mais le divorce est aboli... L'analogie des matières?... Carré a lui-même combattu toute induction de ce genre, notamment sur les Quest. 2975, et 2979 (voy. aussi Quest. 2985); la difficulté, ou même l'impossibilité, dans certaines circonstances, de transporter le condamné au lieu où doit s'effectuer l'essai de conciliation? Mais ce n'est pas la présence de ce dernier qui est nécessaire, c'est celle du demandeur en séparation. D'ailleurs l'obstacle sera généralement facile à lever, et lors même qu'il en serait autrement, ce n'est pas là ce qui arrête l'observation des formes prescrites par l'art. 878, ainsi qu'il est dit sur la Quest. 2970, et comme le reconnaissent tous les auteurs. Ainsi, nulle objection sérieuse ne vient contrarier notre doctrine, conforme d'ailleurs au texte précis de la loi.

Toullier, no 719; Favarde, t. 5, p. 113, et Zachariæ, t. 5, p. 363, se sont prononcés en faveur de ce dernier avis. Dalloz, t. 25, p. 33, semble indécis entre les deux systèmes.]

2969. Si l'un des époux était empêché, par maladie, de se présenter devant le président, que devrait faire ce magistrat?

testables, diverses conséquences ont été tirées. Thomine, no 1025, qui veut que l'ordonnance porte un délai de trois jours francs, et soit signifiée par huissier commis, enseigne qu'à défaut d'observation de ces formalités, le pré

Il agirait ainsi qu'il est dit dans l'art. 256 du Code civil. (Voy. Pigeau, t. 5, p. 134, et De-sident ne doit point passer outre, en cas d'ab- ́ laporte, t. 2, p. 411.)

sence de la partie assignée, mais au contraire [Cette disposition porte que, sur la réquisi-surseoir jusqu'à ce qu'elle ait été mise à mème tion de la partie demanderesse et le certificat de deux docteurs en médecine, le président se transportera en son domicile pour y recevoir sa demande. On sent bien que toutes ces formes ne sont nullement prescrites, lorsqu'il s'agit, non plus de divorce et de demande à cet effet, mais de séparation de corps et d'essai de conciliation; la partie n'aura donc pas à requérir le magistrat, qui n'a pas non plus de certificat à exiger mais il est incontestable que ce dernier peut, suivant les circonstances, se rendre au domicile du demandeur, ou renvoyer la comparution des parties à un autre jour qu'il indiquera; un pouvoir discrétionnaire lui est laissé à ce sujet, ainsi que nous l'avons dit dans notre Comm. du Tar., t. 2, p. 362, no 6. C'est aussi ce qui paraît résulter des explications de Pigeau, Comm., t. 2, p. 574, et de Thomine, no 1025.}

2970. Si le défendeur refusait de se présenter [ou se trouvait dans l'impossibilité de le faire], le président passerait-iloutre?

Il ferait à l'époux présent les observations propres à opérer un rapprochement, et rendrait, conformément à l'art. 878, l'ordonnance de renvoi à se pourvoir.

sans

En effet, ainsi que le fait observer Delvincourt, t. 1, p. 458, l'art. 877, par ces mots seront tenus, ne dit pas que le défendeur est absolument tenu de comparaître, mais que s'il comparaît, ce doit être en personne, avoué ni conseil; observation qui ne détruit point la solution donnée au numéro précédent, qui se rapporte à l'espèce où une partie fait connaître son empèchement et annonce par là qu'elle ne refuse pas d'entendre les représentations du président.

par

[Les règles tracées par l'art. 878, il ne faut pas le perdre de vue, ne concernent qu'une tentative de conciliation, et l'on sait qu'en cette matière, aux termes de l'art. 56, les ties sont toujours libres de ne pas se présenter, sauf la condamnation à une amende que, même dans les séparations de corps, la loi ne prononce pas. Toutefois, dans ce dernier cas, l'utilité d'une semblable tentative est d'un ordre bien plus élevé; il est, en quelque sorte, de l'intérêt de la société tout entière, que les époux n'abandonnent pas la vie commune; et la loi, en confiant au président du tribunal l'essai de conciliation, montre assez combien elle tient à son succès. De ces principes, qui sont inconCARRÉ, PROCÉDure civile. - TOME VI.

de comparaitre devant lui. Nous avons dit suprà, Quest. 2967 ter, qu'il fallait sans doute prendre toutes les précautions nécessaires pour que le défendeur fût averti ; mais qu'un pouvoir discrétionnaire était à cet égard abandonné au président, ce qui rend sans intérêt la précision de Thomine. Mais si la partie se trouvait dans l'impossibilité constatée de comparaître; si, par exemple, elle était atteinte d'une maladie grave, il nous paraît, avec la cour de Pau, 18 janv. 1850 (Sirey, t. 30, p. 183), qu'en renvoyant, sans autre forme, devant le tribunal, le président manquerait au devoir que la loi lui impose, et que tous les actes postérieurs seraient frappés de nullité. En cas de refus de sa part, il doit en être autrement, puisque le défendeur est toujours libre, par son absence, d'empêcher, autant qu'il dépend de lui, la réconciliation, mais qu'il n'a rêter les poursuites dirigées contre lui. Aussi pas le pouvoir, par cette manière d'agir, d'artous les auteurs enseignent-ils que le président rendra, dans cette occasion, l'ordonnance de renvoi devant les tribunaux.

Si l'un des époux se trouve dans une maison mine, no 1026, pourra prononcer son extracde force, le président, comme l'enseigne Thotion, qui aura lieu sur l'injonction du procureur du roi, inscrite à la suite de l'ordonnance. (Voy. notre Quest. 2968.) ]

[2970 bis Le président devrait-il également passer outre, si le demandeur ne. se présentait pas?

Non, évidemment, suivant la juste observaserait censé, dans ce cas, s'être désisté de son tion de Favard, t. 5, p. 112. Le demandeur action : ici l'art. 56, qui statue dans les cas de cable. (Voy. d'ailleurs la question précédente.)] conciliation ordinaire, n'est nullement appli2971. Le président doit-il dresser procèsverbal constatant qu'il n'a pu concilier les époux, ainsi qu'il le devait faire en matière de divorce, conformément à l'article 259 du Code civil?

Non [évidemment], puisque l'art. 878 veut suite de celle qui ordonne la comparution. que l'ordonnance de renvoi soit inscrite à la

2972. Le président qui n'a pu parvenir réconcilier les parties doit-il les renvoyer à se pourvoir en bureau de conciliation? Ne doit-il pas, au contraire, les renvoyer

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Dans quelques éditions du Code [même officielles], les mots sans citation préalable sont placés entre deux virgules; de là plusieurs avaient conclu que le président devait renvoyer les parties à se pourvoir au bureau de conciliation, mais sans qu'il fût besoin de citation préalable.

Aujourd'hui personne ne doute que telle n'a point été l'intention du législateur, et qu'afin que les expressions que nous venons de citer expriment la véritable intention du législateur, il faut supprimer la seconde virgule, et lire comme s'il y avait il les renvoie à se pourroir, sans citation préalable au bureau de conciliation; d'où il suit que le président renvoie directement au tribunal: c'est au reste ce que prouvent les discours du conseiller d'État Berlier et du tribun Mouricault, p. 289 et 318. En effet, le président ayant fait l'office de conciliateur, à quoi bon les parties seraient-elles renvoyées en bureau de paix? (Voy. art. 49.)

[L'opinion contraire semble pourtant résulter d'un arrêt de Bruxelles, 29 janv. 1806. Mais le sentiment de Carré, conforme à la seule interprétation raisonnable de la loi, a été adopté par Berriat, h. t., note 4; Favard, t. 5, p. 112, note; Dalloz, t. 25, p. 35, et Massol, p. 108; et sanctionné par arrêts de cassation, 17 janv. 1823 et 17 juill. 1825; et de Lyon, 12 janv. 1825. Il a même été jugé par la cour d'Orléans, 2 août 1821, que le défendeur à une séparation de corps qui forme une demande incidente n'est pas tenu d'épuiser à cet égard le préliminaire de la conciliation devant le président du tribunal civil. Toutefois, cette décision ne devrait pas être étendue au cas où ce même défendeur demanderait reconventionnellement la séparation : il n'y a pas de raison pour que le président soit alors dispensé de la mission de conciliateur que la loi lui confie. Nous approuvons donc un arrêt de Rennes, 26 déc. 1820, qui a décidé la question dans ce sens.] [2972 bis. Pour que la femme demande resse en séparation puisse se pourvoir devant les tribunaux, faut-il qu'elle y soit expressément autorisée par l'ordonnance du président?

Il est certain que la femme ne peut intenter une action si importante sans y être autorisée par justice, c'est-à-dire par l'ordonnance que rend le président à la suite d'une tentative infructueuse de conciliation. Sans cet acte préliminaire, sa demande serait repoussée par une insurmontable fin de non-recevoir, comme l'a jugé la cour de Rennes, 26 déc. 1820; mais suit-il de là que l'autorisation doit être conçue en termes exprès, et en quelque sorte sacramentels? qu'elle ne résulte pas, par exemple,

| d'un renvoi à se pourvoir, clairement exprimé dans l'ordonnance? Malgré la décision contraire, d'un arrêt d'Orléans, 20 janv. 1809, nous ne croyons pas que les termes de l'article 878 doivent être si rigoureusement entendus. Lorsque le président permet d'assigner ou de se pourvoir, sans entrer dans d'autres détails, il ne peut évidemment exister aucun doute sur son intention, et sur la validité des poursuites. Nous pouvons, du reste, en faveur de notre opinion, invoquer un arrêt de Colmar, 12 déc. 1816 (Sirey, t. 18, p. 190). Quant à la question de savoir si le président pourrait refuser d'accorder l'ordonnance dont parle l'article 878, et si sa décision, en quelque sens qu'elle soit rendue, est susceptible d'appel, voy. nos questions sur l'art. 1040.] 2973. La demande en séparation de corps doit-elle être affichée conformément à l'art. 867, attendu qu'elle entraîne nécessairement la séparation de biens?

Non, d'après ce que nous avons dit sur la Quest. 2933. Telle est l'opinion de Merlin (voy. Nouv. Répert., au mot Séparation de corps), contraire à celle de Pigeau, t. 3, P. 134, et des rédacteurs de la Bibliothèque du barreau, 1re part., t. 3, p. 162.

[C'est l'opinion que nous avons émise sous la même question. (Voy. aussi notre Comm., t. 2, p. 367, n°o 28.)]

2974. Le président peut-il autoriser la femme à fixer sa résidence hors de l'arrondissement dans lequel le mari à son domicile.

La cour d'appel de Paris, par arrêt du 4 déc. 1810 (Sirey, t. 11, p. 455), a décidé cette question négativement, malgré la généralité des termes de l'art. 878, attendu que la femme et les enfants doivent être placés près du mari et sous sa surVeillance. (Voy. les développements donnés par Coffinières à ces motifs de décision, dans le J. des Av., 1TM édit., t. 3, p. 31, et t. 4, p. 244.) dans le J. des Av., loco citato, l'accompagne [Coffinières, en rapportant l'arrêt de Paris de quelques réflexions qui tendent à en justifier la doctrine. La séparation, d'après lui, ņe dissout pas le mariage, elle ne fait qu'en relacher le lien. Elle doit laisser intacts les droits de surveillance du mari sur son épouse et sur ses enfants, ce qui serait impossible, s'ils étaient autorisés à fixer leur résidence hors de l'arrondissement de son domicile.

En thèse générale, nous ne contestons ni l'exactitude de ces principes, ni même la convenance de leur application; mais résulte-t-il de là qu'il soit interdit au président d'indiquer à la femme une résidence hors du lieu du domicile de son époux? La loi lui laisse, au contraire, toute latitude à cet égard, par la généralité des termes de l'art. 878, et nous croyons

que c'est dans une intention qu'il n'est pas | crisie, à ces dates.) On peut donc considérer permis de méconnaître; si les père et mère de la jurisprudence comme fixée en ce sens. la femme résident dans un autre lieu, et que, dans celui du domicile du mari, elle n'ait ni parents, ni protecteurs, pourquoi veut-on que le magistrat lui refuse un asile que toutes les convenances indiquent impérieusement? Rien de plus arbitraire, d'ailleurs, que cette fixation de l'arrondissement : pourquoi pas plutôt celle de la ville où le mari réside, si l'on s'attache aux raisonnements de Coffinières ? La cour de Paris, le 13 juin 1827, est revenue sur sa première juriprudence, et nous croyons que c'est avec raison, sans méconnaître toutefois l'importance des motifs qui doivent généralement engager le président à ne pas indiquer un domicile trop éloigné.]

Remarquons, toutefois, que ce sont là généralement des décisions d'espèces qui ne tranchent nullement la question de savoir si l'abandon du domicile assigné à la femme peut constituer une fin de non-recevoir contre sa demande. Carré, comme on le voit, semble admettre d'abord la négative, puis ensuite l'affirmative; Favard, t. 5, p. 113, et Pigeau, Comment., t. 2, p. 579, paraissent croire, le premier, que cette fin de non-recevoir n'existe pas; le second, au contraire, qu'il est permis dans certains cas de prononcer la fin de non-recevoir.

Nous ne pouvons concevoir, quant à nous, que ce soit là un motif suffisant pour faire rejeter la demande en séparation; dans quelque 2975. Si la femme avait quitté le domi-hypothèse que l'on se place, il est plus juste cile indiqué par le président, en résulte rait-il une fin de non-recevoir contre sa demande en séparation?

L'art. 268, C. civ., porte que si la femme est demanderesse en divorce, le mari pourra la faire déclarer non recevable à continuer ses poursuites.

Mais l'art. 878, C. proc., n'a point répété cette disposition relativement à la séparation de corps; or, il en est des fins de non-recevoir comme des nullités, on ne peut les étendre d'un cas à un autre.

Ainsi, nous sommes porté à croire que le mari ne serait pas recevable à argumenter de la circonstance dont il s'agit pour repousser la demande en séparation. (Voy. arrêt de la cour de Turin du 11 février 1811.)

Au reste, le tribunal aurait toujours le droit d'admettre ou de rejeter cette fin de non-recevoir, suivant les circonstances; et, par exemple, nous ne doutons pas qu'elle ne fût rejetée, si la femme n'avait quitté la mai- | son qui lui aurait été indiquée que par nécessité, et que sa retraite dans une autre ne présentât rien qui fût en opposition aux bienséances et aux mœurs. (Voy. arrêts de la cour de Bruxelles du 13 juill. 1807; Jurisp. des cours souv., t. 5, p. 411, et de la cour de Dijon du 28 avril 1807; Jurisp. du Code civil, t. 9, p. 19.)

[Il a été également jugé qu'il n'y a pas lieu à la fin de non-recevoir, lorsque la femme quitte la résidence choisie momentanément par ses père et mère, dans le lieu du domicile conjugal, pour les suivre à leur domicile habituel (Orléans, 5 août 1815); ou parce qu'au lien d'habiter la maison assignée par le président, elle s'est retirée dans celle qui lui a été choisie par la personne chez laquelle elle devait se retirer. (Nancy, 30 août 1832.) Voy. aussi arrêts de Turin, 11 fév, 1811; Bruxelles, 26 déc. 1811; Nimes, 26 déc. 1811; cass., 27 janv. 1819; Rennes, 26 déc. 1820; Pasi

de dire, avec Thomine, n° 1030, que faute par la femme de présenter des causes légitimes d'excuse, les juges sont en droit de suspendre les poursuites et de lui imposer telles injonctions qu'il convient. La désobéissance de la femme n'affecte en rien la légitimité de ses demandes ; mais lorsqu'elle s'est placée sous la protection de la justice, elle ne peut se soustraire aux obligations qui résultent de ce fait.] [2975 bis. La femme serait-elle déclarée non recevable si elle quittait le domicile conjugal, sans être autorisée par ordonnance à se retirer provisoirement dans une maison indiquée?

Nous croyons qu'en général, et pour peu que la demande lui paraisse sérieuse, le président, dans l'intérêt même de la réconciliation des époux, doit faire cesser une cohabitation qui serait une source perpétuelle de débats, Aussi l'art. 878 suppose-t-il que l'ordonnance qui autorise la femme à procéder à sa demande, doit indiquer en même temps la maison où elle doit se retirer. (Cass., 26 mars 1828). Mais il peut se faire que la femme ait quitté le domicile conjugal avant de présenter sa requête; ou que, la demande ayant été rejetée, les juges ordonnent sa réintégration, mais que, sans avoir égard à leur injonction, elle recommence l'instance; ou enfin que le président, usant de son pouvoir discrétionnaire, ait cru plus convenable de la laisser pendant le cours de l'instance chez son époux ; et l'on peut, dans tous ces cas, se demander si le refus de la femme élève une fin de non-recevoir contre son action. Ce qui distingue cette question de la précédente, c'est qu'ici le conjoint demandeur commet une désobéissance aux ordres de la justice; il refuse en quelque sorte ouvertement de reconnaître son empire, ce qui paraît rendre plus puissantes les raisons de douter que nous avons déjà exposées. Ajoutons que la jurisprudence est loin d'avoir résolu nettement la question. La cour d'Aix,

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