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LIV. III.

Cette juridiction est tout à la fois volontaire | gissent aujourd'hui l'arbitrage ordinaire sont et contentieuse. contenues au livre III de cette troisième partie du Code de procédure, et se rapportent au compromis, à la rérocation et à la récusation des arbitres, à la procédure, au jugemont, à son exécution, et aux manières de l'attaquer.

Elle est volontaire (1), parce qu'en général les parties sont libres de s'y soumettre ou de déférer leurs différends aux magistrats institués par la loi.

Elle est contentieuse, parce qu'elle ne s'exerce jamais qu'à fin de jugement à rendre sur un litige (2).

Il n'est aujourd'hui qu'un seul cas dans le quel les parties soient obligées de faire choix d'arbitres, c'est celui d'une contestation élevée entre associés, et pour raison d'une société commerciale. (Voy. ci-dessous la note 1 in fine. La loi (Code de commerce, art. 51) prescrit ici l'arbitrage comme le plus sûr moyen de régler promptement les droits des parties (3).

Pour distinguer ces arbitres forcés de ceux que les parties choisissent en toute autre circonstance que celle dont nous venons de parler, ceux-ci sont appelés volontaires, et on les distingue eux-mêmes en arbitres proprement dits, et en arbitrateurs ou amiables compositeurs, suivant que les parties les ont institués à l'effet de prononcer d'après la rigueur du droit et les formes prescrites par la ioi, ou à l'effet de statuer avec dispense de ces formes, et conformément aux règles de l'équité. (Articles 1009 et 1019.)

Toutes les dispositions législatives qui ré

Elles établissent une procédure véritablement judiciaire, puisqu'elle conduit à une décision qui, après l'apposition de l'ordonnance d'exécution, a tous les caractères et tous les effets d'un jugement.

[Les additions nombreuses qu'exigerait l'état actuel de la doctrine et de la jurisprudence sur l'arbitrage forcé nous obligeaient à restreindre notre travail aux questions de procédure civile. Tout ce qui se rattache d'une manière exclusive aux sociétés commerciales sortant de notre cadre a dù, par conséquent, en être écarté. On peut consulter avec beaucoup de fruit l'excellent Dictionnaire du Contentieux commercial de Devilleneuve, et le Dictionnaire des temps légaux de Souquet, vo Arbitrage, aux 27° à 30° tableaux, ouvrage si utile, et que nous aurons occasion de citer plusieurs fois. ]

ART. 1003. Toutes personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition.

Loi du 24 août 1790, art. 1.

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C. civ., art. 1127 et

ceptis, qui arbitrium receperunt ut sententiam dicant, auquel on doit joindre le tit. LVI du liv. Il du Code, Receptis arbitris. L'ancien droit français autorise pareillement les arbitrages. (Vor. édit de 1535 et 1560.) La coutume de Bretagne, art. 48, permettait expressément aux parties de soumettre à des arbitres la décision de leurs contestations.

(1) Le droit romain ne forçait en aucun cas les citoyens à s'éloigner des tribunaux ordinaires pour mettre leurs procès en arbitrages; mais l'édit de 1560. art. 3, ouvrage du célèbre chancelier de Lhopital (c'est ainsi qu'il signait comme chancelier de France), confirmé par l'ordonnance de Moulins, obligeait les parents de s'en rapporter, à l'égard de certaines contestations au jugement de leurs plus proches parents et amis; disposition qu'on retrouvait dans l'art. 566 de la coutume de Bretagne, mais qui ne s'observait pas à la rigueur comme le dit Duparc-Poullain sur cet article.

L'assemblée constituante la rétablit dans l'art. 12, tit. X de la loi du 24 août 1790, en l'étendant à toutes contestations entre conjoints, père et fils, grand-père et petits-fils, freres et sœurs, oncles et neveux. La Convention nationale soumit en outre à un arbitrage forcé une foule de contestations nées de ses lois spoliatrices, notamment en matière de biens communaux. (V. loi du 10 juin 1793.) Les abus qui résultèrent de cette exécution de l'arbitrage forcé en amenèrent la suppression pour tous les cas (loi du 9 vent, an iv), à la seule exception des contestations entre associés, et pour cause de société commerciale, conformément aux dispositions de l'ordonnance de 1675, qui resta en vigueur. Tel est encore l'état de la législation, d'après le tit. Jer de la loi du 24 août 1790, et les dispositions des Codes de commerce et de procédure.

(2) Si l'art. 429, C. proc., autorise les tribunaux de commerce à renvoyer les parties devant des tiers pour examen de comptes, pièces et registres, c'est improprement qu'il les qualifie d'arbitres, puisque ces tiers n'ont à donner qu'un simple avis auquel le tribunal a tel égard qu'il juge convenable, et non pas une décision qui termine le différend. On les appelle arbitres pour les distinguer des experts, qui sont des hommes de l'art; mais, dans la réalité, leurs attributions sont les mêmes que celles de ces derniers.

(5) Ces arbitres sont nommés par les parties, ou, à défaut, d'office par le tribunal de commerce. (C. de comm., art. 55 et 55.) Ils prononcent dans un délai convenu, sinon déterminé par le tribunal. (Art. 54.) L'instruction à faire devant eux n'est assujettie à aucune formalité; ils jugent sur les pièces et mémoires des parties, appellent un surarbitre en cas de partage (art. 56,60); leurs jugements sont rendus exécutoires par une ordonnance du tribunal de commerce, et sont susceptibles d'appel devant la cour royale, et de recours en cassation, si les parties n'y ont pas renoncé.

Nous traiterons, sur chaque article du Code de procédure, avec lesquels elles peuvent avoir quelques rapports, les questions concernant ces arbitrages. On peut au reste consulter. sur cette matière, le Traité de l'arbitrage forcé en matière de société com merciale, par Merson, avoué près le tribunal de première instance de Nantes; ouvrage qui, pour n'être pas très-étendu, n'en contient pas moins des notions utiles, des observations judicieuses, des solutions exactes; et particulièrement le Cours de droit commercial de Pardessus, et les Institutions commer ciales de Delvincourt.

suiv., 1989. C. comm., art. 51, 65. C. proc. art. 1006. Devilleneuve, vo Compromis, no 1 à 20. - [Carré, Compétence, t. 5, p. 234 et suiv. et p. 383. -Locré, t. 23, p. 2, élém. 6, no 6, et élém. 7, no 3.] (1). -Voy. FORMULES 880 à 885.

DXCVII. Le compromis (2) est un acte synallagmatique par lequel on renonce à la juridiction des juges établis par la loi, et l'on s'oblige d'exécuter la décision qui sera rendue par un ou plusieurs arbitres que l'on nomme pour prononcer sur les différends qu'on leur

soumet.

Cet acte est un contrat, il en a tous les caractères, il doit en avoir tous les effets; mais il doit aussi être soumis à toutes les règles établies par les lois en matière de contrat.

On trouve une première application de ces règles dans la permission que l'art. 1003 accorde à toutes personnes de compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition; c'est une suite de la règle du droit romain à Illi possunt compromittere, qui possunt efficaciter obligari.

On ne pouvait, san's injustice, refuser à celui que la loi autorise à disposer librement d'un droit quelconque, la faculté de soumettre à des arbitres la question de savoir s'il doit perdre ou conserver ce droit, ou de quelle manière il peut en jouir.

Il est juste, au contraire, de ne pas accorder cette faculté à celui qui ne peut pas disposer librement du droit qu'il conteste ou qui lui est contesté.

Le compromis, en effet, emporte une véritable disposition, au moins conditionnelle, puisqu'il oblige celui qui le souscrit à abandonner le droit litigieux, si les arbitres l'y | condamnent. Ce serait donc permettre de faire par une voie indirecte ce que la loi défend de faire directement, que d'autoriser à compromettre sur des droits dont on ne peut disposer. Les lois ne comportent point de pareilles contradictions.

3251. Un tuteur, lorsqu'il est autorisé par le conseil de famille, et qu'il remplit les formalités prescrites par l'art. 467 du Code civil, relatif aux transactions, peutil valablement compromettre sur les inté réts du mineur ou de l'interdit?

Oui, suivant l'opinion de Demiau, p. 672, et de Boucher, dans son Manuel des arbitres, p. 485, no 948 à 959; mais nous adoptons

|

l'opinion contraire de Berriat, tit. des Arbitres, note 9, et des auteurs du Praticien, t. 5, p. 335 à 340, qui a pour appui deux arrêts de la cour de cass., des 25 pluv. an x et 4 fruct. an XII, rapportés par ces deux auteurs, et qui avaient jugé de la sorte, attendu que l'art. 2 de la loi du 24 août 1790 interdisait la faculté de compromettre à tous ceux qui n'avaient pas le libre exercice de leurs droits.

Or, l'art. 1003 reproduit cette disposition, à la seule différence qu'il substitue le mot dis position à celui d'exercice; d'où il nous semble qu'il est permis de conclure que l'on peut encore argumenter de l'arrêt ci-dessus mentionné. A la vérité, on permet au tuteur de transiger en observant certaines formes (article 467); mais le pouvoir de transiger ne comprend pas celui de compromettre. (Voy. Code civ., art. 1989.)

Quand on admettrait, comme l'a décidé la cour de Nimes, par arrêt du 17 août 1806 (voy. Jurispr. du Code civ., art. 344), que des lettres écrites ensuite pussent suppléer à ce pouvoir, on ne saurait maintenir que cela s'appliquât au tuteur, et d'ailleurs on sent que le cas d'une transaction est bien différent de celui d'un compromis.

Dans la transaction, les conditions de l'accommodement sont connues, tandis que l'on ignore les résultats futurs du compromis. D'un autre côté, le tribunal, sur les conclusions du ministère public, homologue la transaction, sur l'avis de trois jurisconsultes, et le jugement arbitral n'est soumis qu'à la simple formalité d'une ordonnance d'exequatur. (Voy. Prat., ubi suprà, p. 239.)

Opposerait-on qu'autrefois (voy. Jousse, Traité de l'administration de la justice, t. 2, p. 689, no 13, et Duparc Poullain, t. 8, p. 436), il paraissait d'usage constant que les sentences arbitrales rendues par suite de la compromission d'un tuteur pour son mineur n'étaient pas nulles dans la forme, et ne poumal jugé au fond? que le motif de cet usage vaient être réformées que pour injustice ou fondé sur ce que la voie d'appel de la sentence doit être le même aujourd'hui, puisqu'il était arbitrale était ouverte au mineur? Dirait-on qu'il est toujours avantageux à ce dernier que ses droits soient défendus et jugés, sans qu'il ait à faire les frais toujours trop considérables de la procédure ordinaire?

Nous répondrons que cet usage, contre le

(1)

JURISPRUDENCE.

10 Le tuteur légal de ses enfants mineurs, partie en cette qualité au procès qui est devenu l'occasion d'un arbitrage, est censé avoir figuré au compromis en cette même qualité, bien que cela n'y soit pas exprimé. (Poitiers, 22 juill. 1819.)

2. Un compromis est nul lorsqu'il est passé avec une partie qui se trouvait sans intérêt par la cession qu'elle CARRÉ, PROCÉDURE CIVILE,-TOXE VI.

avait faite de ses droits à un tiers et qu'elle avait laissé ignorer à son adversaire. (Cass., 5 fév. 1807; Sirey, t. 7, p. 254.)

72) COMPROMIS, du latin compromittere (de promittere cum), promettre ensemble, avec, parce que les parties promettent ensemble, et chacune envers l'autre, de se conformer à l'avis des arbitres qu'elles nomment.

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quel nous pourrions opposer des autorités |
respectables, puisées dans les annales de l'an-
cienne jurisprudence elle-même, ne peut être
suivi maintenant, parce que la disposition de
l'art. 1004 vient appuyer les conséquences à
tirer de l'art. 1003, en ce que cette disposition
décide qu'on ne peut compromettre sur aucune
des contestations qui seraient sujettes à com-
munication att ministère public. Or, l'art. 85,
§ 6, met au nombre de ces contestations les
causes des mineurs, et généralement toutes
celles où l'une des parties est défendue par un
curateur (1),

Que si l'on insiste, en disant que les mineurs seront souvent privés des avantages que leur offre l'arbitrage, relativement à l'économie des frais, dans des affaires compliquées, pour les quelles, par exemple, l'art. 309 de la coutume de Bretagne autorisait le compromís à ce sujet, Toullier, qui, d'ailleurs, partage notre | opinion, dit qu'en ces sortes d'affaires, les parties conviennent souvent de remettre respectivement leurs pièces et mémoires à un ou à plusieurs jurisconsultes, pour s'en rapporter | à leur avis, qui est rédigé en forme de jugement, qu'on passe ensuite par expédient sur les conclusions du ministère public. Il ajoute que les tribunaux favorisent, indiquent même, en certains cas, cette manière d'épargner des frais qui pourraient souvent surpasser le principal.

fira de citer ici l'opinion de Rodière, t. 3, p. 6; de Mongalvy, no 163; de Goubeau de la Bilennerie, t. 1, p. 36 et 47; de Boitard, sur l'art. 1003, et de Bellot des Minières, t. 1, p. 14. Il importe peu, d'après ces auteurs, qu'il s'agisse de choses mobilières ou immobilières, que le mineur ait été ou non lésé. Dans tous les cas, l'action en rescision lui appartient. Il existe toutefois une décision contraire de la cour de Turin, 19 vent. an xr (Sirey, t. 4, p. 620), mais antérieure au Code civil, et rendue d'ail leurs dans une espèce particulière, comme le font remarquer Dalloz, t. 2, p. 240 et de Vatimesnil, Encyclopédie du Droit, vo Arbi| trage, no 80.

La difficulté est plus sérieuse quant aux moyens proposés soit par Toullier, soit par Carré, pour éluder cette incapacité et faire jouir le mineur des avantages du jugement arbitral. Ces moyens nous paraissent tous pécher par l'idée qui les a inspirés. Selon nous, en effet, et cela nous paraît résulter de la discussion au conseil d'État, il a été dans l'intention du législateur d'empêcher le mineur de compromettre, dans quelque cas que ce puisse être; ainsi, sous quelque forme qu'ait été fail le compromis, le mineur peut l'attaquer : « Il faut, dit Toullier, s'en rapporter à l'avis d'un ou de plusieurs jurisconsultes, qui sera rédigé en forme de jugement, et le faire passer ensuite par expédient sur les conclusions du ministère public. » Mais si, dans ce cas, le jugement se fonde sur l'avis des jurisconsultes, le compro

gulier d'abord, et ensuite radicalement nul; si, au contraire, le jugement n'en parle pas, le mineur se pourvoira par requête civile, sous te prétexte qu'il n'a pas été défendu. Ce mode nous parait done fort dangereux, et la raison

Mais, en agissant ainsi, c'est recourir à un véritable arbitrage que la foi prohibe, ainsi que Toullier en convient avec nous. Cepen-mis est alors évident, et le jugement est irrédant, nous ne voudrions pas que le mineur ou l'interdit fût privé de ce moyen, que notre estimable collègue indique pour éviter les frais; et nous croyons qu'on y parviendrait d'une manière plus conforme à l'esprit de la loi, si, au lieu de donner leur avis en forme de juge-d'équité que donne Toullier n'est pas, selon ment, les jurisconsultes choisis par les parties rédigeaient un modèle de transaction qui fût soumis au conseil de famille, et ensuite à l'homologation du tribunal, sur les conclusions du ministère public, et après un nouvel avis de trois jurisconsultes désignés par lui: nous avons va procéder ainsi plusieurs fois.

[En ce qui concerne l'incapacité du mineur pour compromettre, même avec l'assistance de son tuteur, la décision de Carré nous paraît inattaquable, et ses motifs de distinguer entre la transaction et lè compromis nous semblent également bien fondes. Du reste, la doctrine est aujourd'hui fixée dans ce sens. Il nous suf

(1) Mais cette décision ne s'appliquerait pas (voy. Delvincourt, t. 1, p. 497) au cas où le mineur se trouverait, du chef de son auteur, intéressé dans une société commerciate. L'arbitrage est alors forcé, et le tuteur ne pourrait s'y refuser; seulement il ne peut renoncer à la faculté d'appeler du jugement arbitral. (C. comm., art. 61.)

nous, assez forte pour combattre la lettre de la loi; le savant professeur cite l'adage romain summum jus, summa injuria; mais combien nos Codes offrent-ils d'exemples où les règles qu'ils prescrivent pourraient être ainsi qualifiées, summa injuria!....

Quant au mode indiqué par Carré, ce n'est plus là un compromis qui donne lieu à un arbitrage, puisqu'on ne peut agir ainsi que du consentement de toutes les parties; ainsi, peu importe que l'acte présenté au tribunal ait été fait par le tutear ou par trois jurisconsultes, il n'en conserve pas moins le nom de transaction. Si, après l'avis des jurisconsultes, la

Nous disons du chef de son auteur, car si le mineur était lui-même commerçant et membre d'one société de commerce, il serait alors réputé majeur pour tous les faits de son commerce, et par conséquent de la société (ibid, art. 2) : il pourrait donc être jugé par arbitres, et même renoncer à l'appel.

partie adverse du mineur ne veut plus se conformer à cet avis, elle n'y est nullement forcée, puisque, selon Carré, ce n'était qu'un modèle de transaction, et alors pourquoi chercher un mode qui tienne tout à la fois et du compromis et de la transaction, puisque le compromis est défendu, et que les formalités ajoutées dans ce cas ne facilitent nullement les transactions qui peuvent avoir lieu dans les procès qui intéressent les mineurs? Nous croyons donc que le tuteur ne peut jamais compromettre, mais seulement transiger, en suivant les formalités prescrites par les articles 2045 et 467, Code civ.

Mongalvy, loco citato, et de Vatimesnil, Encyclop, du Droit, vo Arbitrage, p. 595, no 81, ont émis à ce sujet une opinion entièrement conforme à la nôtre. Du reste, dans son Traité de compétence, no 575, Carré conseille lui-même de ne pas mettre en usage les moyens qu'il avait indiqués dans les Lois de la procé dure.

L'incapacité résultant de la qualité de mimeur est tellement absolue, que la cour de Turin, 17 mai 1806 (Sirey, t. 7, 2°, p. 1047), a cru devoir annuler le compromis souscrit par un majeur redevenu mineur, par suite des dispositions du Code civ., du moment de sa rentrée en tutelle.

Ajoutons cependant qu'un compromis entre majeurs ne devrait pas être annulé, sous le prétexte d'un intérêt éventuel qu'aurait un mineur à la contestation : sans doute, ce der- | nier, si l'intérêt existe réellement, pourra repousser l'effet du jugement en ce qui le concerne; mais ce n'est là qu'une faculté, et il n'est pas permis à des tiers d'exciper de son droit pour anéantir le compromis. La cour de Paris, 13 avril 1810 (Dalloz. t. 2, p. 242), a rendu dans ce sens un arrêt approuvé par Gonbeau, 1. 1, p. 51; et Bellot, t. 1. p. 55; et la cour de cassation, 21 août 1829, à jugé de la même manière, à l'égard d'un autre incapable. Cette solution n'est, du reste, qu'une conséquence des principes exposés sous la question 3258.]

[3251 bis. Le mineur commerçant peut-il compromettre, et sur quels objets?

Il est incontestable que les règles exposées au précédent numéro ne reçoivent pas leur application à l'égard du mineur commerçant, lequel, par la nature mème des operations auxquelles la loi permet qu'il se livre, est soumis à l'arbitrage forcé, dans le cas où cette procédure a lieu. (Voy. C. comm., art. 2, et C. civ., art. 487.) Toutefois, comme l'arbitrage forcé est restreint aux sociétés com

merciales, on s'est demandé si, en toute autre
matière, le négociant mineur pourrait volon-
tairement souscrire un compromis. La ques-
tion ainsi posée, la solution paraît facile; car
ce que le mineur est tenu de faire en certaines
circonstances, pourquoi ne serait-il pas libre
d'y procéder dans les autres actes de son com-
merce? Ajoutons que l'art. 487, C. civ., n'ad-
met pas de distinction ; qu'il n'attribue pas ca-
pacité au mineur, uniquement pour ce qui
regarde les sociétés, mais sous tous les rap-
ports. Cette distinction, proposée par Pigeau,
Comm., i. 2, p. 714, ne peut donc être ad-
mise: tel est, du reste, l'avis des Pardessus,
no 1388 et 1418; de Dalloz, t. 2, p. 238, note 1,
et de Vatimesnil, no 86.]
[3251 ter. Quelles sont les parties qui,
jouissant d'ailleurs de la plénitude de
leurs droits, ne peuvent compromettre sur
les intérêts qu'elles sont chargées de dé-
fendre? Quid du mandataire, du gérant
d'une société en activité, du liquidateur
d'une société dissoute? Quid des syndics
d'une faillite?

Le pouvoir de soustraire un différend à la connaissance des tribunaux ordinaires et de le porter à des juges du choix des parties, enlevé à certaines personnes, ainsi que nous l'avons vu sous le numéro précédent, ou bien à raison de certains objets énumérés par l'art. 1004, appartient en principe à tout individu libre et maître de ses droits; mais ce pouvoir est si grand, son exercice entraîne des conséquences si importantes, qu'à l'égard des objets dont un tiers se trouve, dans l'un des cas nombreux que prévoit la législation, avoir l'administration ou la surveillance, il ne peut être permis à ce tiers de les soumettre, à sa volonté, au jugement d'arbitres, c'est-à-dire de compromettre à leur égard. Aussi la loi et la doctrine se montrent-elles rigoureuses sur ce point. Des explications données par Carré sur la Quest. 3231, et dont l'exactitude est universellement reconnue, il résulte que la faculté mème de transiger n'emporte pas celle de cet endroit aux actes consentis par le tuteur, compromettre (1), et ce principe appliqué en

s'étend à tous les droits conférés à des tiers par la loi ou les parties. Aussi est-il unanimement admis qu'un mandataire, mème général, et pourvu d'une procuration portant pouvoir de transiger, ne peut compromettre sans une autorisation spéciale de son mandant. Les art. 1988 et 1989, C. civ., ne laissent d'ailleurs aucun doute sur ce point. En conformité de cette doctrine, la cour de Toulouse, 29 avril 1820, a annulé le compromis signé par un

(1) (Ni de proroger un compromis (cass., 18 août que le mandataire pourra transiger par médiation 1819; voy, notre Quest. 3284), lors même qu'il est dit | d'arbitres. (Aix, 6 mai 1812; Sirey, L. 13 p. 205,)

fils représentant son père, mais sans mandat de ce dernier.

Du reste, la même cour a jugé avec raison, le 25 juin 1831 (Sirey, t. 31, p. 319), que le compromis passé par un mandataire sans pouvoir est valable quand celui-ci s'est porté fort en son nom personnel; mais il est bien évident que la convention n'est valable qu'entre les parties qui l'ont souscrite, et non par rapport au mandant, qui n'est nullement lié par elle.

La question de savoir si le gérant d'une société commerciale a le droit de compromettre sur les contestations existant entre la société et des tiers nous semble plus délicate. La difficulté n'est pas susceptible de la mème solution dans tous les cas, à cause de la différence des pouvoirs attribués, selon la nature de l'association, au représentant des intérêts communs. Mongalvy, no 180, et Dalloz, t. 2, p. 261, après Pothier, lui refusent absolument le droit de compromettre.

De Vatimesnil, no 109, est entré à ce sujet dans des détails assez étendus, dont nous approuvons les principes, ainsi que Devilleneuve, Dict. du Content. comm., v° Compromis, n° 4 il distingue entre les sociétés civiles et commerciales. Dans les premières, nul associé ne pouvant, aux termes de l'art. 1862, engager les autres s'ils ne lui en ont donné mandat, se trouve, par conséquent, hors d'état de passer un compromis, sans l'autorisation expresse de ses coassociés. Dans les secondes, il faut distinguer encore entre les diverses sortes d'associations; celle en nom collectif laisse toute latitude, sauf convention contraire, à chacun des associés envers les autres, ou aux gérants, s'il en a été nommé. (Voy. Paris, 10 août 1809.) Celle en commandite n'attribue pas de moindres pouvoirs à son gérant, auquel l'art. 23, C. comm., abandonne la disposition des objets qui en dépendent, sauf toujours la dérogation qui résulterait des termes de l'acte. Dans celles en participation, le titulaire agissant, à l'égard des tiers, comme maître exclusif de l'affaire, jouit des droits les plus étendus, comme l'ont reconnu les cours de Paris, 9 avril 1851, et de cass., 2 juin 1834, et par conséquent de celui de compromettre; mais ici, encore, c'est aux conventions des participants qu'il faut s'en référer, aux termes de l'art. 48, Cod. comm., et si l'objet social était au nom de tous et non d'un seul, ils seraient censés par là n'avoir conféré à aucun d'eux le pouvoir de souscrire un compromis. Ces règles sont, du reste, consacrées par un usage général.

si ce droit lui a été conféré, est indispensable pour attribuer au gérant la faculté de compromettre.

Le motif des distinctions précédentes s'applique au point de savoir si le même droit appartient au liquidateur d'une société dissoute; ce liquidateur n'est effectivement que le mandataire des anciens membres de la société, et son mandat n'a rien de commun avec celui d'un gérant ordinaire, puisqu'il ne s'agit plus que de régler les comptes, solder l'arrieré, recouvrer les créances, etc. Réduit à ces termes, le pouvoir qui lui est conféré n'emporte pas évidemment celui de compromettre, s'il n'y est autorisé par l'acte qui l'a constitué liquidateur, ou par un mandat spécial. Il importerait peu, d'ailleurs, que ce liquidateur ne fût autre que le gérant lui-même, puisque la société est dissoute, et que les droits qu'il tirait de l'acte social n'existent plus. C'est ce qu'a jugé la cour de cass., le 15 janv. 1812, et ce qu'admettent Mongalvy, no 181; Dalloz, t. 2, p. 260, de Vatimesnil, no 117; Devilleneuve, vo Compromis, no 5.

Dans quelle classe faut-il ranger les syndics d'une faillite? Sont-ce de simples mandataires sans pouvoir pour consentir à un arbitrage sur les contestations que la masse des creanciers aurait à soutenir? Pardessus, no 1588, n'hésite pas à déclarer nul le compromis passé par les syndics sans une autorisation expresse et spéciale. La même doctrine paraît résulter d'un arrêt de cassation du 6 avril 1818 (Sirey, t. 18, p. 326), dont l'opinion est adoptée par de Vatimesnil, no 122 et 123, et Bellot, t. 1, p. 279.

Moins absolu dans sa décision, Mongalvy, nos 183 et 184, pose des cas où le compromis consenti par des syndics serait valable. «C'est, » dit-il, lorsqu'il s'élève des contestations entre » eux et un créancier du failli, au sujet d'une » liquidation de société commerciale, parce » qu'en pareille occurrence l'arbitrage est forcé.

» Les syndics définitifs d'une faillite peuvent » encore compromettre sur une contestation » née de l'exécution d'un acte passé de bonne foi » entre des tiers et le failli avant la faillite, » lorsque dans cet acte il a été stipulé que les con»ventions auxquelles son exécution pourrait >> donner lieu seraient soumises à des arbitres. » Cette clause modifie le principe général.

» Si, cependant, ajoute-t-il, sur une contes »tation entre associés, les syndics avaient fait » dégénérer l'arbitrage forcé en arbitrage vo» lontaire, en donnant aux arbitres la qualité » d'amiables compositeurs, sans une autorisa»tion expresse de tous les créanciers, le compromis serait nul. »

Quant aux sociétés anonymes, administrées» par des mandataires à temps (art. 31, Code comm.), les principes sont nécessairement différents. Le concours de tous les associés, ou du moins l'autorisation de l'assemblée générale,

En definitive, il faut convenir que ce dernier avis se rapproche beaucoup de celui de Pardessus et de la doctrine de la cour de cassation, puisque Mongalvy admet en général la

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