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doctrine, nous repoussons implicitement celle des arrêts de Besançon et de Metz précités, d'où il semblerait résulter que toute cause de récusation provenant d'un fait volontaire de l'arbitre n'en est pas une pour lui; ce qui anéantirait les cinq sixièmes des dispositions de l'art. 378, les plus importantes, peut-être, sans qu'un seul mot dans la loi autorise une pareille conséquence, sans que rien, d'ailleurs, en justifie la nécessité. Le déport n'a rien de commun avec la récusation; il est le fait de l'arbitre, et la récusation le fait de la partie, qui est libre de ne pas la demander. Il nous paraît donc sans importance que le motif de suspicion provienne de la volonté des juges ou du concours des événements. Dans tous les cas, l'intérêt est le même, et rien ne doit empêcher la partie de s'en prévaloir.

Mais lorsque la nomination des arbitres a dû être faite d'office par le juge, il importe peu que le moyen de récusation antérieur au compromis ait été ou non connu de ceux qui l'ont signé, puisqu'on ne peut, de leur part, supposer la renonciation implicite à ce moyen. L'art. 1014 est donc inapplicable dans ce cas. ] 3317. Quel est le délai dans lequel on doit former la récusation contre des arbitres forcés [oules arbitres volontaires nommés d'office par le juge?]

Suivant Pardessus, no 1590, la récusation devrait être, par analogie des règles relatives aux experts, proposée dans les trois jours après que la nomination a été notifiée au récusant, ou légalement connue de lui.

Merson, p. 47, pense que cette récusation ne pouvant avoir pour motif que des causes graves, ou d'une nature telle que la partie qui recourt à cette extrémité a dù faire des recherches pour s'appuyer d'une preuve ou d'un commencement de preuve litterale (1), le délai

bref. H ajoute, et nous partageous son opinion, que, quant à recourir à des analogies pour de terminer la durée de ce délai, mieux vaut les puiser dans une loi spéciale à une sorte d'arbitrage que dans un recueil général de règles de procédure. Or, dit-il, le décret du 2 octobre 1795, après avoir déterminé les causes de récusation des arbitres (institués pour les contestations des communes), portait, art. 6, que les moyens de récusation seraient proposés dans la quinzaine.

Il nous reste à dire quelques mots de l'interprétation que donne Carré à ces termes de l'art. 1014 pour cause survenue depuis le compromis. Il est évident que les arbitres étant en général nommés par les parties, celles-ci, libres de ne pas admettre les causes de récu-indiqué par Pardessus est évidemment trop sation, si elles les croient moins puissantes que l'impartialité et la conscience de leurs juges, sont censées y renoncer, par cela seul qu'elles ont fait choix de personnes dont elles auraient, pour quelques-uns de ces motifs, à suspecter la décision. Aussi l'art. 578 serait-il inapplicable à l'arbitrage, si la plupart des moyens qu'il énumère n'étaient de nature à survenir postérieurement aussi bien qu'antérieurement au compromis: ce qui a rendu nécessaire la seconde disposition de l'art. 1014. Nous avons déjà dit, sous la Quest. 1594, qu'il ne faut pas, comme le fait au même endroit Carré, et comme il le répète ici, interpréter d'une manière trop litterale le sens de cet article, et qu'un fait d'alliance, d'inimitié, antérieur au compromis, mais ignoré des parties, serait valablement proposé par elles comme cause de récusation. Telle est aussi l'opinion de Dalloz, t. 2, p. 541, note 1; de Goubeau, t. 1. p. 252; de Thomine, no 1235; de Boitard, sur l'art. 1014. et de Rodière, t. 3, p. 17.

Ce que nous disons des causes de récusation prévues par l'art. 578, nous le dirons par la même raison de tous les faits de nature à jeter un doute sérieux sur l'indépendance des arbitres vis-à-vis de l'une des parties, faits que celle-ci aurait cachés à l'antre, et qui n'auraient été découverts qu'après le compromis. Il y a, dans ces cas, dol et surprise, comme l'ont jugé les cours de Besançon, 11 prair, an XI, et de Colmar, 31 janv. 1811, et la sentence rendue peut être arguée de nullité.

[L'avis de Pardessus est partagé par Mongalvy, p. 75, no 80, et la cour de Rennes, 4 fév. 1818 (Pasicrisie), s'est prononcée dans le même sens. Celui de Carré à obtenu l'approbation de Goubeau, t. 1, p. 249. Quant à nous, la question nous parait bien simple; il s'agit uniquement de savoir si le delai de la recusation des arbitres sera celui que prescrit l'art. 420, pour les experts, ou celui de l'art. 582, relatif aux juges. Or, il est evident que cette dernière disposition est seule applicable, puisque les arbitres sont des juges et non des experts.

Nous repousserons par le même motif l'opinion qui se fonde sur le décret du 2 oct. 1793, decret spécial dont les dispositions sont restreintes au cas qu'il régit, surtout en présence d'une règle générale et fondée sur la raison.

Ce n'est donc ni dans les trois jours, ni dans les quinze jours de leur nomination que les arbitres peuvent être récusés : c'est pendant toute la durée de l'instruction, et plus tard

(1) [Par annalogie de l'art. 388 qui, s'il n'existe pas un commencement de preuve par écrit, laisse à la prudence du juge de rejeter la déclaration ou d'ordonner

la preuve testimoniale, voy. cass., 8 fév. 1832 (Devill., t. 32, 1re, p. 672).]

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Carré, sur l'impossibilité d'une notification par l'intermédiaire du greffier. Boitard, sur l'art. 1014, croit aussi que l'acte de récusation doit être adressé directement à l'arbitre, et que la loi l'a voulu ainsi parce que les motifs de bienséance qui ont fait créer un intermédiaire entre le récusant et son juge n'existent point plaint du silence de la loi et de la lacune qui dans ce cas. Quant à Bellot, t. 3, p. 68, il se en résulte. Il croit cependant que l'acte de récusation doit être adressé à l'arbitre, et que cet acte doit être revètu des formalités indiquées par Carré; mais aucune, selon lui, n'est

en quelque sorte à l'arbitraire des parties.

Enfin, de Vatimesnil, no 187, ouvre, bien qu'avec hésitation, un avis qui nous paraît préférable. Il voudrait que la notification fût faite par l'intermédiaire du greffier du tribunal dont le président revèt la sentence arbitrale de l'ordonnance d'exequatur.

En ce qui concerne les arbitres choisis par les parties, roy. la question suivante. ] [3317 bis. Quand doivent être récusés les arbitres volontaires du choix des parties? Dalloz, t. 2, p. 342, en rapportant l'opinion de quelques-uns des auteurs cités sur la question précédente, fait la remarque que nul d'entre eux ne s'occupe du délai de la récusa-prescrite par le législateur, qui les abandonne tion, en matière d'arbitrage volontaire. Il ne nous paraît pas qu'il puisse s'élever sur ce point de difficulté sérieuse. Nous avons déjà dit que le choix des parties suppose une renonciation tacite aux moyens antérieurs à l'arbitrage et connus de tous les compromettants. La récusation ne pouvant donc avoir pour cause que des faits nés pendant la durée du compromis, il est évident qu'un délai fixe est impossible, et que tout doit dépendre du moment où l'existence de ces faits sera constatée. Est-il vrai de dire, avec Carré, Merlin, etc., Ici, par conséquent, s'applique, avec bien plus que la procédure ordinaire de la recusation a de raison que daus la question précédente, la pour cause un simple sentiment de convenance disposition de l'art. 382: tel est l'avis de Ro- vis-à-vis du juge dont on demande l'eliminadière, t. 3, p. 17. Il est d'ailleurs indubitabletion, et, avec Boitard, que l'arbitre n'a pas que certains actes de la partie emporteraient droit aux mêmes égards? Ces deux opinions implicitement renonciation aux moyens de ré- nous paraissent également mal fondées. cusation postérieurs, de même que le choix de l'arbitre implique renonciation aux moyens antérieurs au compromis telle serait, par | exemple, la remise des pièces, qui formerait une fin de non-recevoir contre la demande en recusation, comme l'a jugé la cour d'Orléans, le 28 déc. 1820. ]

3318. En quelle forme sefait la récusation?

Nous croyons que non-seulement cette dernière marche est licite, mais encore qu'elle doit être suivie à l'exclusion de toute autre.

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delai qui sera fixé par le jugement... »

La récusation, disent les art. 384 et 385, sera proposée par un acte au greffe, qui en contiendra les moyens, et sera signé de la partie. Sur l'expédition de l'acte, remise dans les 24 heures par le greffier au président du tribunal, il sera, sur le rapport du président et les conclusions du ministère public, rendu jugement qui, si la récusation est inadmissible, la rejettera, et, si elle est admissible, ordonnera Nous avons cru, sur les art. 45 et 384, que, la communication au juge récusé pour s'expar des motifs de bienséance, le législateur n'apliquer en termes précis sur les faits, dans le pas permis que les actes de récusation fussent adressés directement au juge; qu'ils lui sont notifiés par l'intermédiaire du greffier; mais il n'existe point comme autrefois de greffier des arbitrages il faut donc que la récusation soit signifiée aux arbitres eux-mêmes, ou par un huissier, ou, ce qui nous paraîtrait plus convenable, par un notaire. L'acte, dit Merson, p. 50, doit être signé sur l'original et sur la copie par la partie ou son fondé de procuration speciale et authentique. laquelle doit y demeurer annexée; il doit encore contenir les motifs et les moyens de récusation (arg. des art. 45 et 364); enfin, l'original peut être visé par l'arbitre, ou, à son défaut, par le procureur du roi près le tribunal de son domicile. (Arg. de l'art. 1059.)

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[Mongalvy, no 87; Dalloz, t. 2, p. 342; Goubeau, t. 1, p. 251, enseignent la mème marche, et ces auteurs se fondent, comme

Évidemment, il y a dans ces dispositions quelque chose de plus que le soin des bienséances; il y a le vœn d'étouffer en germe une contestation odieuse et mal fondée, de faire régler par un tribunal indépendant et calme la marche ainsi que les délais de l'action. En matière d'arbitrage, l'opportunité de cette procédure n'est-elle pas la même? Pourquoi les juges du choix des parties en seraient-ils privés?

Si Boitard a tort de soutenir qu'il n'y a pas dans ce cas identité de motifs, Bellot ne nous semble pas mieux fondé à dire que la loi n'a point réglé les formes de récusation propres à l'arbitrage. La section de législation du tribunat avait proposé de dire: « qu'il y serait procédé ainsi qu'il est dit dans le titre XXI du livre II ci-dessus. » Cette proposition resta sans résultat; mais l'intention du législateur

n'en est pas moins évidente, si l'on part de ce principe que les arbitres sont juges. Nous avons déjà vu, sous les numéros précédents, que la doctrine et la jurisprudence s'accordent pour appliquer à l'arbitrage les règles ordinaires de la récusation. C'est ce qui a lieu, notamment, à raison des art. 378, 389, etc. (Voy. suprà, Quest. 3516 et 5517 à la note.) Pourquoi n'en serait-il pas de même des articles 584 et 585?

Mais, dit-on, ces dernières dispositions sont inapplicables à la matière, puisque les arbitres n'ont pas de greffier.

L'objection, sans doute, aurait quelque valeur, si l'action en récusation était portée devant le tribunal arbitral lui-même. Mais nous verrons, sur la Question 3520. que les juges de première instance sont seuls compétents pour en connaître. Cela posé, nous ne voyons pas qu'il existe la moindre difficulté dans cette marche que l'on déclare impossible. L'acte de récusation sera notifié au greffe du tribunal, où le litige qui fait l'objet du compromis aurait dû être porté, et qui, d'ailleurs, peut seul juger la demande en recusation. Le greffier, dans les 24 heures, en donnera communication au président du tribunal, sur le rapport duquel jugement sera rendu, qui statuera sur l'admissibilité, et fixera le délai dans lequel l'arbitre récusé sera tenu de fournir ses explications, etc. I suffit, en un mot, de se reporter an texte des articles qui règlent ces diverses formalités.

La jurisprudence n'a pas eu à s'expliquer sur la question posée, dans ses termes généraux. Toutefois, nous pouvons, en faveur de notre opinion, nous prévaloir d'un arrêt de Montpellier, 26 juin 1834 (Devilleneuve, t. 35, 2o, p. 191), qui admet la nécessité pour la par tie de signer son acte de récusation, nécessité qui n'existerait pas si les règles ordinaires étaient inapplicables à l'arbitrage.

La cour de Bourges, 3 déc. 1815 (Pasicrisie), a également admis la voie du dépôt au greffe, à l'égard de l'arbitre nommé d'office par le tribunal.]

[3318 bis. Toutes les parties qui ont souscrit le compromis doivent-elles étre mises en cause, sur la demande en récusation d'un ou de plusieurs arbitres?

On peut, pour soutenir la négative, dire avec un arrêt d'Orléans, 28 déc. 1820, qu'un procès en recusation ne concerne que trois personnes, le récusant, le ministère public et le récusé. D'ailleurs, l'art. 585, qui établit les formes de récusation, auxquelles nous avons dit, sur la question précédente, qu'il fallait se référer en matière d'arbitrage, exige simplement la communication de la demande au juge récusé, et non aux autres parties du procès, étrangères, d'ailleurs, à cet incident.

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Ces arguments sont loin de nous paraître péremptoires. La mise en cause de toutes les parties est, en quelque sorte, de droit commun, puisque la demande en récusation tend à leur enlever un ou plusieurs de leurs juges, et par là, peut-être, à les soustraire à leur juridiction naturelle. L'art. 47, au titre des Justices de paix, qui, dans un but de célérité, dispose que la récusation sera jugée sans qu'il soit besoin d'appeler les parties (ce qui, du reste, n'empêche pas celles-ci d'intervenir, comme il est dit sous la Quest. 202), est une disposition exceptionnelle, et qui ne se retrouve plus au titre de la Recusation des juges de première instance.

Remarquons ici que l'arrêt précité d'Orléans a été rendu dans l'espèce d'un arbitrage forcé, où les inconvénients de l'opinion que nous combattons sont moins sensibles. puisqu'il est permis en cette matière de remplacer, indépendamment de la volonté des parties, le juge récusé: mais dans l'arbitrage volontaire, où un tel incident a pour effet de rendre incomplet le tribunal arbitral, et, par conséquent, de faire tomlier le compromis, on ne peut dire qu'il concerne uniquement la partie récusante et le juge récusé; et les autres compromettants ne seraient-ils pas en droit de se plaindre, si, plus tard, en poursuivant l'instance, on leur opposait un jugement de récusation qui la rend impossible, et auquel ils n'ont pas été appelés? Évidemment leurs intérêts seraient blessés par une telle marche. Aussi croyons-nous nonseulement qu'il leur est permis d'intervenir dans le procès en récusation et de contester la validité de la demande, mais encore qu'ils doivent être mis en cause, sauf à procéder en leur absence, s'ils ne jugeaient pas à propos de se présenter. (Voy. encore notre Quest. 1598 ter.)]

3319. De quelle époque court le délai pour récuser?

Il court, comme dit [avec raison} Pardessus, no 415, à partir de la nomination des arbitres, légalement connue des parties, si la nomination a eu lieu d'office, ou de la nomination extrajudiciaire, si on a eu recours à ce moyen pour y procéder.

[ Lorsque les arbitres ont été nommés par les parties, il est impossible de rien déterminer à cet égard, comme nous l'avons fait observer sous la Quest. 3317 bis.]

3320. Les arbitres sont-ils juges de la

récusation de l'un d'eux?

Non, à moins que le compromis ne les y autorise expressément; autrement, ils jugeraient hors de ses termes, et les parties pourraient se pourvoir par opposition à l'ordonnance d'exécution, conformément à l'art. 1028.

(Voy. arrêt de la cour de cass., du 1er juin 1812. Sirey, t. 12, 1re, p. 349.)

[Pigeau, Comm., t. 2, p. 726, distingue entre le cas où quelqu'un des arbitres serait autorisé par le compromis à juger en l'absence de l'autre, et celui où, à défaut de cette convention, ils ne peuvent juger que réunis. Dans le premier, suivant cet auteur, la récusation sera jugée par les arbitres restants; dans le second, par le tribunal qui aurait dù connaitre du procès. Comme on le voit, d'après Pigeau, l'incapacité des arbitres pour statuer sur leur récusation provient de l'obli- | gation qui leur est imposée de juger réunis. | Telle n'est pas, selon nous, la véritable position de la question; leur incapacité réelle, c'est celle de juger un différend dont le compromis ne fait pas mention, et dont la gravité semble appeler, d'ailleurs, l'intervention de la magistrature. Anssi, à la décision conforme de Carré, pouvons-nous joindre celle de Merlin, Repert., 1. 11. p. 88; de Favard, t. 1. p. 200; de Mongalvy, no 88; de Boitard, sur l'art. 1014; de Vatimesnil, no 189; de Bellot, t. 3, p. 67; de Rodière, t. 5, p. 18, et à l'arrêt précité de. cassation d'autres arrêts de Paris, 17 mai 1813, et Metz, 12 mai 1818. La doctrine et la jurisprudence peuvent donc être considérées comme fixées dans ce sens.

Une décision plus récente de la cour de Bordeaux, confirmée par la cour de cassation, le 1er fév. 1837, semble toutefcis porter atteinte à cette doctrine: «Attendu, dit la cour de Bordeaux, qu'une récusation ne peut suspendre le pouvoir des arbitres et devenir un obstacle à leur sentence que lorsqu'elle a été intentee dans le delai et pour une cause légalement exprimée; que, dans l'espèce, Guibert, par acte d'huissier, à l'époque où l'arbitrage allait prendre fin, a recuse les trois arbitres sur le choix desquels toutes les parties s'étaient respectivement accordées; que, pour expliquer cette mesure, Guibert a seulement exposé que deux des arbitres avaient des liaisons avec les autres compromettants; qu'une pareille récusation, declaree tardive par le Code de procédure, qui ne repose sur aucun motif légal, n'a produit aucun effet; que les arbitres, incompetents pour prononcer sur une récusation demandée dans les termes de la loi, n'ont pas dù avoir égard à celle qui n'était susceptible d'aucun examen en justice..... »

Cet arrêt, il faut le dire, nous parait mal

fondé de tous points: 1° il suppose qu'il existe un délai dans lequel les parties doivent, à peine de déchéance, proposer leur moyen de récusation; 2o il accorde aux arbitres le droit de décider que ces moyens sont tardivement proposés; 5 il semble même leur permettre de déclarer les motifs de la récusation frivoles et sans importance. Or, il résulte au contraire des explications données sur les numéros précédents et sur celui-ci : 1o qu'il est impossible de déterminer exactement le temps pendant lequel doit être proposée la récusation, qui dépend de circonstances postérieures au compromis; 2° que c'est, non aux arbitres, mais au tribunal de première instance, conformément à l'art. 385, à décider, sur le rapport de son président et les conclusions du ministère public, si l'action est ou non admissible; 3o enfin que, quelque mal fondée que paraisse aux arbitres la cause de la récusation de l'un d'eux, ils n'ont pas à s'en faire les juges. Hatons-nous d'ajouter que le texte de l'arrêt de cassation qui a confirmé cette décision est loin de présenter des assertions aussi hasardées. On y sent plutôt l'embarras des juges régulateurs, dans une multiplicité de motifs. parfois contradictoires, presque toujours indépendants l'un de l'autre, et qui, tendant tous à valider l'arrêt, sont néanmoins une condamnation implicite de sa doctrine. Au nombre de ces considérants, il en est un d'une importance réelle dans l'espèce, la partie, après avoir recusé un arbitre, s'était néanmoins présentée devant tous pour y produire ses défenses, ce qui impliquait de sa part renonciation' au moyen de récusation, comme nous l'avons dit sous le no 3317 bis. Mais la question essentielle n'est point celle-là, et la cour de cassation la résout par des considérations que l'on peut résumer ainsi :

« Les arbitres, sans pouvoir juger la question de récusation, sont en droit de passer outre, et de rendre leur sentence sur l'objet du compromis, si la cause est en état, sauf aux parties à porter leur demande devant les tribunaux compétents, pour statuer ce qu'il appartiendra (1).

» Décider autrement, ce serait abandonner le procès soumis à l'arbitrage à la mauvaise foi de l'une des parties, puisque le délai dans lequel elle doit notifier l'acte de récusation n'étant pas déterminé, il dépendrait d'elle de le prolonger aussi longtemps qu'elle le vou

récusés rendent pendant le temps de l'appel du jugement qui a rejeté la récusation dirigée contre eux, est

(1) [La cour de Bordeaux a jugé, le 25 avril 1833, que des arbitres ne doivent pas surseoir à statner sur les contestations dont ils sont saisis, lorsqu'ils sont ré-valable, si ce jugement est exécutoire par provision, et cusés au moment où l'arbitrage va prendre fin, ou pour autre cause que des liaisons entre eux et l'une des parties; mais c'est à tort, comme il résulte de nos explications. Il est plus juste de dire, avec la cour de Cass., le 11 juill. 1831, que la sentence que des arbitres

s'il n'a pas été formé une demande pour en arte er Pexécution provisoire. On pourrait néanmoins se demander si les termes de l'art. 391 autorisent l'exécntion provisoire, telle que l'entend cet arrêt? V. Quest 3336. J

drait, en laissant les juges choisis sous le coup d'une menace qui peut-être ne se réalisera pas. »

retarder que de très-peu de jours la suite des opérations arbitrales qui sont l'objet du compromis.]

[3320 bis. Les parties pourraient-elles, par une clause du compromis, prévoyant le cas de récusation de l'un des arbitres, autoriser les autres à statuer sur la rẻcusation?

Comme on le voit, ce système, que nous ne jugeons pas encore, paraît supposer implicitement le contraire de celui que nous avons soutenu sur la Quest. 3318; c'est-à-dire que l'acte de récusation doit être, non pas déposé au greffe du tribunal, mais signifie aux arbitres en personne toutefois il n'en est pas ainsi. L'affirmative nous semble ne pouvoir être Voici les propres paroles de Laplagne-Barris, révoquée en doute. Une telle convention n'est dans les conclusions données sur cette affaire contraire ni aux lois, ni à l'ordre public. Un (V. loco citato) : « De là il faut conclure que incident qui ralentirait le cours du débat est les arbitres ne sont pas tenus à peine de nul- prévu et réglé d'avance, dans un but de simlité de surseoir au jugement de la contestation | plification ; évidemment, en ce cas, les formes qui fait l'objet du compromis, ou du moins tracées au titre de la Récusation n'ont plus qu'ils ne sont tenus de surseoir que si on a d'objet. La partie demanderesse présente sa suivi à leur égard les formes de la récusa- réclamation aux arbitres restants. qui en aption des juges, et lorsqu'un juge a ordonné précient la légitimité de la manière convenue. que la récusation leur serait communi- Goubeau, t. 1, p. 258, partage cet avis.] quée. 3321. Quel tribunal doit prononcer sur la récusation des arbitres?

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C'est le tribunal du lieu où la canse eût été portée s'il n'eût pas existé d'arbitrage, et qui, si la récusation a été faite mal à propos, peut statuer sur les dommages-interêts (Pardessus, t. 5, p. 99 et arrêt de Paris, du 50 déc. 1813;

Ainsi le savant magistrat dont nous reproduisons les expressions admet le concours facultatif des deux procédures, en matière de récusation d'arbitres: notification personnelle, dépôt au greffe dans les formes prescrites par les art. 584 et 583. Si cette dernière marche est employée, impossibilité pour les arbitres de passer outre et de juger la contestation elle-Sirey. t. 14, p. 301.) mème. Rien de plus juste; mais par quelle bizarrerie veut-on que les parties aient le choix d'une notification directe à l'arbitre, notification dont nous avons déjà signalé l'illégalité et les inconvénien s?

« C'est, dit Laplagne, la faute de la loi, qui ne trace aucune forme. » La loi, au titre de la Récusation, n'a rien omis, ni rien abandonné aux parties. Au titre de l'Arbitrage, elle n'avait pas besoin de renouveler ces dispositions; n'est-ce pas d'ailleurs ce que la jurisprudence a tant de fois admis?

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[C'est la conséquence de l'opinion émise par Carré sur la question 3520.

Quant à l'arrêt de Paris mentionné, il statue pour le cas où des arbitres forces ont été nommés par le tribunal de commerce, et décide que ce tribunal est seul compétent pour connaître de la récusation proposée contre eux. Cette modification d'espèce ne change rien au principe pose, et la decision de la cour de Paris S'applique avec la mème justesse au cas d'arbitrage volontaire en matière commerciale; car c'est alors le tribunal de commerce, et non le tribunal civil, qui aurait connu de la contesta

tent pour apprécier les causes de la recusation. (Voy, encore les arrêts de Bourges, 3 déc. 1813, et de Metz, 12 mai 1818; Pasicrisie.}]

Ce dont la loi ne dit rien, ce qui est par conséquent contraire à son vœu, c'est la signification : c'est lui, par conséquent, qui est compétion directe aux arbitres. En outre des consi- | dérations que nous avons déjà émises à ce sujet, on voit quel nouvel inconvenient elle presente elle laisserait une partie libre d'empêcher, par le fait, l'accomplissement du compromis, et, pour prévenir cet inconvenient, on tombe dans un inconvénient plus grand en core. On veut que les arbitres passent outre, et jugent la contestation sous le coup d'une action en recusation qui viendra peut-être bientôt

anéantir leur sentence !...

On voit combien la doctrine est encore peu fixée sur ces divers points; en restant dans les termes de la loi, ual inconvénient n'est possible, puisque, une fois la plainte déposée entre les mains de la justice, il ne dépend plus de la partie plaignante d'en ralentir ni d'en suspendre le cours, et que la procédure marchera d'ailleurs avec assez de célérité pour ne

ART. 1015. S'il est formé inscription de faux, même purement civile, ou s'il s'élève quelque incident criminel, les arbitres délaisseront les parties à se pourvoir, et les délais de l'arbitrage continueront à courir du jour du jugement de l'incident.

-Devilleneuve, h. t., no 57.-Locré, t. 23, part. 2, élém. 6, no 8.

DCVIII. Les arbitres n'étant que des hommes privés, la loi, malgré l'indivisibilité du pouvoir juridictionnel, leur a toujours interdit la connaissance des incidents criminels et des inscriptions de faux qui pourraient être formés dans

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