Page images
PDF
EPUB

tions: les directeurs éclairés d'un recueil qui jonit à juste titre d'une haute réputation, la Revue Britannique, se sont empressés de les publier dans leurs livraisons; et l'accueil flatteur que le public a fait à ces articles est pour nous un sûr garant de leur exactitude et de leur mérite.

On nous reprochera peut-être de n'avoir pas exécuté le même travail pour l'Europe et pour l'Asie. Nous le déclarons ici avec franchise; nous ne nous sommes pas cru compétent pour embrasser une semblable tâche, qui est plutôt du domaine de l'histoire, de l'archéologie et des hautes sciences morales et philologiques. Nous n'avons pas osé aborder les questions délicates et encore indécises relatives à ces théogonies aussi bizarres que diverses qui ont tour-à-tour dominé l'Asie, et qu'on peut regarder jusqu'à un certain point comme les sources les plus fécondes et les plus anciennes de sa civilisation primitive; à ces invasions multipliées qui, à différentes époques, et avant les temps historiques, ont tant de fois changé la face de cette partie du monde. Comment aurions-nous été assez téméraire pour entreprendre de débrouiller le chaos que présente la population primitive de la vieille Europe, de suivre dans toutes leurs phases les longues pertur bations qu'elle a subies avant les époques brillantes de la Grèce et de Rome, de pénétrer ensuite dans la nuit du moyen âge, et d'arriver enfin jusqu'à notre époque, en traversant les longs orages qui ont accompagné la renaissance des lettres et des arts. Non, nous n'avions fait ni les études préparatoires, ni les recherches immenses qu'exige la détermination de l'état social primitif et actuel des Asiatiques et des Européens. Espérons cependant que quelques-uns des doctes rédacteurs du Recueil où ont été insérées nos esquisses sur l'état de la civilisation de l'Amérique, de l'Afrique et de l'Océanie, ou quelques-uns des savans célèbres qui ont bien voulu nous aider de leurs lumières, soit dans la rédaction de cet Abrégé, soit dans celle de l'Atlas ethnographique, ou bien même quelques-uns de

d'une composition très difficile. Voici les titres de quelques-uns: Tableau météorologique du Globe; Tableau orographique de la Terre, offrant les points culminans de tous les systèmes montueux connus et ceux de leurs chaînes principales, ainsi que les plateaux les plus remarquables, avec l'indication d'un grand nombre de villes situées à une grande élévation audessus du niveau de la mer; Tableau des principales cascades du Globe, avec la désignation de leur hauteur et de leur largeur; Tableau des bains et des eaux minérales, avec l'indication du degré de leur température et de la qualité de leurs canx; Tableau des terreins ignivomes du Globe; Tableau statistique des principales mines du Globe; Tableau statistique des produits du règne végétal et des animaux domestiques de tous les etats de l'Europe et de quelques-uns des autres parties du monde; Tableau des monumens anciens et modernes les plus remar quables, offrant la comparaison des pyramides, des tours, des flèches et des coupoles les plus hautes, les dimensions des principaux temples et celles des plus grandes statues; Tableau des importations et des exportations des principaux états et des principales villes du monde; Tableau statistique des religions; Tableau statistique des langues; Tableau de l'éta social des Africains, des Américains et des Oceaniens, etc.; Tableau statistique du Globe vers la moitié du xv siècle, dans les années 1789, 1813, 1826 et dans l'année de la publication de l'ouvrage; Tableau statistique des prisonniers, des criminels, des pauvres, des suicides, des enfans illegitimes, des écoliers, etc., etc., de presque tous les états de l'Europ et de quelques-uns des autres parties du monde. Nous n'osons prendre aucun engagemen pour la publication de cet ouvrage, parce que la multiplicité des recherches qu'exige s composition, la situation de nos affaires privées et les temps difficiles où nous vivons, u nous permettent pas de déterminer l'époque précise où nous le ferons paraître. Nous nou plaisons à croire cependant que ce retard ne nous dépossédera pas de la faveur avec laquell le public avait accueilli la première partie de cet ouvrage, alors que ce retard sera justifi par un soin plus rigoureux que nous apporterons à sa rédaction, et par les importante additions dont elle sera enrichie et que nous n'avions pas promises.

ces érudits profonds et sagaces dont l'Angleterre et l'Allemagne sont si riches, hommes toujours empressés à approfondir un sujet lorsqu'il y a de la gloire à acquérir, voudront bien compléter ces tableaux en y ajoutant ceux de l'Europe et de l'Asie : travail du plus haut intérêt, et qui offre à celui qui s'en sera dignement acquitté de bien belles palmes à cueillir.

ÉTAT. A la page 107, nous avons vu qu'il est impossible de tracer des divisions naturelles de l'Europe qui correspondent exactement à ses divisions politiques. Nous avons signalé d'autres difficultés relatives au même sujet dans diverses parties de cet ouvrage. Ici nous devons nous arrêter sur un point, qui est le plus important de toute la géographie politique; car il ne s'agit de rien moins que de la base d'après laquelle nous devons décrire les principaux pays du globe. A la page 28, nous avons vu ce que c'est qu'un état; définition qu'on cherche en vain dans les traités de géographie, malgré son importance, et malgré la confusion et les erreurs graves qui résultent de son absence. Pénétré de cette vérité, dès l'année 1816 nous nous sommes empressé de la mettre à la tête des définitions de la geographie politique, en traduisant de l'allemand celle que nous avait donnée M. le conseiller Passy, géographe et statisticien très distingué. Mais quelques observations sont indispensables pour démontrer sa justesse et les inconveniens du silence que gardent à ce sujet des géographes connus pour marcher à la tête de la science.

Tous les pays qui forment les monarchies Anglaise et Prussienne, les empires d'Autriche et de Russie, n'ont qu'un seul pouvoir suprême qui reside dans leurs capitales respectives; toute contrée qui forme partie de ces états, quels que soient d'ailleurs son étendue, son importance et le titre dont elle est décorée, n'en est pas moins une partie intégrante qui reconnait le pouvoir suprême résidant à Londres, à Berlin, à Vienne, à SaintPetersbourg, et ne peut et ne doit jamais figurer parmi les états.

Ce principe, qui devrait être inaltérable pour tous les géographes qui aiment à soumettre cette science comme les autres à des principes fixes, n'est pas toujours observé. Il en résulte la plus grande confusion dans la géographie. Non-seulement toute division politique devient vague hors de l'Europe, mais on trouve une foule de contradictions et d'erreurs dans cette même partie du monde, que les demi-savans prétendent connaître si bien, mais dont la description offre encore aux véritables savans tant de lacunes et tant d'incertitudes. Ne voyons-nous pas des traités de géographie très estimés, publiés dans ces dernières années, dans lesquels les divisions politiques forment la base principale des descriptions des differens pays compris dans chaque partie du monde, accorder une place principale à la Corée, au Tibet, à la Mongolie, à l'Arabie, et tout cela avec le titre de principaux états de l'Asic! N'avons - nous pas trouvé dans ces mêmes ouvrages un tableau statistique où, parmi les principaux états de l'Europe, figurent l'Islande et la Laponie! Mais la Corée est un royaume tributaire de la Chine et du Japon; le Tibet et la Mongolie sont des régions géographiques, qui depuis long-temps peuvent être regardres comme comprises dans l'empire Chinois; l'Arabie n'est pas un état, mais une région géographique subdivisée en un grand nombre d'états de différente étendue et gouvernés différemment; l'Islande appartient géographiquement à l'Amérique, et forme sous le rapport politique une partie intégrante du royaume de Danemark; la Laponie n'a jamais été un état,

d

et n'est qu'une grande région géographique, partagée aujourd'hui entre la monarchie Norvégiéno-Suédoise et l'empire Russe. En admettant de semblables divisions politiques, l'auteur aurait pu compter avec autant de raison, parmi les états actuels de l'Europe, les républiques de Venise et de Gênes, les péninsules Hispanique et Italienne, et les nombreux états ecclésiastiques allemands qui ont cessé d'exister au commencement du XIX siècle.

En adoptant la définition de l'état telle que nous l'avons donnée, cette confusion disparaîtrait, mais il resterait toujours quelques doutes, conséquence des anomalies qu'offrent le gouvernement et les relations politiques de certains petits états vis-à-vis d'autres beaucoup plus considérables, ou bien des grands privilèges que d'anciens traités ou des chartes ont accordés à certains territoires. Quelques exemples mettront le lecteur en état de se former une idée précise de ces anomalies politico-géographiques sur lesquelles les géographes gardent le silence, en se contentant seulement de renvoyer à l'article administration, sans appeler pour cela l'attention du lecteur sur un sujet éminemment important pour la géographie politique et surtout pour un traité élémentaire de cette science.

Tous les géographes s'accordent maintenant à classer parmi les états la république des Iles Ioniennes, parce que son existence politique a été reconnue par le congrès de Vienne. Mais l'indépendance de cette république, que quelques géographes nomment Etats-Unis des Iles Ioniennes, est plutôt nominale que réelle; car le protectorat qu'y exerce le roi d'Angleterre par l'intermédiaire du lord haut-commissaire, est une véritable souverainete. Tous ceux qui voudront se donner la peine d'examiner les attributions accordées à ce fonctionnaire, et tous les privilèges dont jouissent les deux intéressantes peuplades qui habitent le Saterland, dans le royaume de Hanovre, et l'île d'Helgoland, annexe du Royaume-Uni, n'hésiteront pas à accorder à ces deux petits pays l'honneur de figurer parmi les états de l'Europe à côté de la République Septinsulaire; on pourrait même dire avec plus de droit, car leur administration est presque entièrement indépendante des deux royaumes dont ils sont censés faire partie.

Nous avons vu dernièrement un savant sortir de la routine, en accordant une place dans le tableau général des états de l'Europe à la Principauté de Monaco, que mal-à-propos tous les géographes et les auteurs d'almanachs politiques et statistiques s'accordent à classer parmi les souverainetés médiatisées. Mais pourquoi, ayant fait cette utile innovation à l'égard d'un aussi petit état, ne l'a-t-il pas étendue à la république d'Andorre? L'existence de ce pays indépendant entre la France et l'Espagne avait déjà été signalée à l'attention des géographes dès l'année 1823 par la Revue Encyclopédique. Pendant la dernière guerre de la péninsule Hispanique nous avons vu la poursuite des soldats de la foi par l'armée des Cortès être considérée comme une violation du territoire de cette république, que la France considérait comme un état neutre. La petite redevance que les Andorrans payaient aux autorités françaises résidantes dans le ci-devant comté de Foix, en France, et à l'évêque d'Urgel, dans la Catalogne, ne saurait être citée contre son indépendance, puisque tous les géographes s'étaient accordés à classer parmi les états indépendans la république de Raguse, malgré la redevance de trois mille ducats que tous les trois ans elle payait à la Porte Ottomane. Au reste, nos lecteurs trouveront ce sujet traité de la manière la plus satisfaisante

dans le savant travail que M. de La Roquette a fait sur cette république, travail qu'il se propose de publier, et dont il a bien voulu nous donner communication.

Des transactions récentes ont assuré l'indépendance politique du nouvel Etat de la Grèce, et des trois principautés de Servie, de Valachie et de Moldavie, naguère encore regardées comme parties de l'empire Ottoman; mais plusieurs autres contrées de cet empire, même en Europe, pourraient étre considérées, sinon de droit, au moins de fait, comine des pays indépendans : tels sont le Montenegro, le vaste territoire des Mirdites, qui compte plus d'habitans que certains états de l'Europe; les territoires des Abdiotes, des Sphakiotes, etc. Plusieurs motifs nous ont empêché de faire cette innovation; mais nous avons cru indispensable de signaler au lecteur l'indépendance de ces territoires, tout en les décrivant comme parties intégrantes de l'empire Ottoman, de peur qu'il ne les confondit avec les pays qui étant complètement soumis, ne peuvent être rangés dans la même catégorie. Et puisque nous en sommes sur ce sujet, nous mentionnerons aussi en Espagne la vallée de Roncal, dans la Navarre, qui a un gouvernement presque démocratique, et la ville et territoire de Cazar de Caceres, dans l'Estremadure, qui jouissait de tant de privilèges qu'on pouvait presque la regarder comme une république démocratique ; enfin, dans le grand-duché de Mecklembourg-Schwerin, la ville de Rostock qui, par les privilèges dont elle jouit, peut être regardée, dit M. Stein, plutôt comme une espèce de république vassale que comme une ville soumise au grand-duc.

Nous nous sommes souvent demandé pour quelle raison les géographes et les auteurs de statistique, dans leurs traités élémentaires et leurs tableaux statistiques, s'accordent à décrire avec les plus grands détails jusqu'aux plus petits états indépendans de la Confédération Germanique, tandis qu'ils ne décrivent qu'en masse et comme ne formant qu'un seul état les 22 cantons de la Confédération Helvétique. Cependant ces derniers pays sont tout aussi indépendans les uns à l'égard des autres que le grand-duché de Bade l'est à l'égard du royaume de Wurtemberg, ou que ce dernier état l'est à l'égard de celui de Bavière. Nous avons senti l'inconséquence d'une semblable méthode, et dans le chapitre de la Confédération Suisse nous avons indiqué tous les états différens que comprennent ses 22 cantons.

Nous n'avons pas été peu surpris de voir quelques savans estimables nous reprocher comme autant de fautes et le silence que nous avons gardé, dans la Balance politique du globe, relativement au duché de Saxe-Gotha et à la principauté de Reuss-Lobenstein, et la place que nous avons accordée à la seigneurie de Kniphausen parmi les états de la Confédération Germanique, en nous citant, à l'appui de ces observations, des Géographies et des Tableaux statistiques publiés, en France et ailleurs en 1826 et 1827, dans lesquels les deux premiers états figurent encore parmi les membres de cette confédération, tandis qu'on y cherche en vain le troisieme. Notre justification a été bien facile. Nous n'avons eu que la peine d'ouvrir devant nos aristarques les cahiers des Ephémérides géographiques de Weimar, où l'on voit que dès l'année 1824 la principauté de ReussLobenstein, et dès l'année 1825, le duché de Saxe-Gotha, ont été réunis à d'autres états par la mort de leurs princes respectifs, décédés dans ces memes années sans héritiers mâles. Un autre article de ce même journal

d.

donne l'historique des longs débats entre le comte de Bentink, seigneur de Kniphausen, et le duc de Holstein-Oldenbourg, qui prétendait être son suzerain, débats qui ont fini par l'admission à la Confédération Germanique de la maison de Bentink comme seigneur de Kniphausen. Nous n'avons parlé de ce qui nous est arrivé avec des savans très distingués, mais qui n'étaient pas assez au courant des changemens que subit la géographie politique, que pour démontrer combien se trompent quelques esprits supérieurs qui paraissent dédaigner l'étude de la géographie comme celle d'une science tout-à-fait vulgaire, et qui ne mérite pas une étude sérieuse.

Mais les contradictions et les lacunes dont est semée la géographie politique de l'Europe ne sont rien en comparaison des innombrables et inconciliables incohérences que nous offrirait la géographie politique des autres parties du monde, si nous voulions examiner quels motifs déterminent les géographes dans le choix des pays qu'ils nous présentent comme des états, c'est-à-dire comme des contrées tout-à-fait indépendantes. Ainsi, par exemple, presque tous décrivent encore comme des pachaliks ou des sandjaks, ou comme des provinces turques, les territoires de Bayazid, Mouch, Van, Djułamerk, Amadia, Souleimanieh, Kara-Tcholan et Zahou, dans le Kurdistan, tandis que depuis quelques années un savant orientaliste et voyageur très distingué, M. Jaubert, qui les a traversés, nous a dit positivement, qu'à l'exception de Van, le grand - seigneur n'est guère que de nom le souverain de cette vaste contrée. Ne voyons - nous pas tous les géographes donner encore Balkh, Koulm, Khoundez, Cachemire et autres vastes contrées au schah de Caboul, et ôter au roi de Siam le droit de suzeraineté sur les petits royaumes de la péninsule de Malacca, en les représentant comme tout-à-fait indépendans? Mais, d'après un excellent article publié en 1825 par le Sincapoure Chronicle, journal que, pour ces régions éloignées, on peut citer comme autorité, tous ces prétendus états ne sont réellement que des principautés vassales de la cour de Siam ; le Cachemire, en 1819, est passé sous la domination de Randjit-Singh, le plus puissant chef de la confédération des Sikhs; et le pays de Khoulm avec Balkh et celui de Koundez, non-seulement sont de fait indépendans, mais paraissent même jouer maintenant un rôle important dans cette partie de la Haute-Asie. Myr-Kalitch-Aly-khan a su, non-seulement soustraire à la dépendance immédiate du schah de Caboul le territoire de Khoulm, mais encore y réunir celui de Balkh. Les dernières notices nous représentent le souverain de Koundez comme un guerrier très entreprenant. Én 1829 et 1821, il paraît avoir soumis à sa domination une grande partie des khanats que le voyage à Boukhara de M. de Meyendorf nous représente comme

des états indépendans.

Notre Abrégé, ainsi que toute géographie élémentaire, étant destiné à présenter les points culminans de cette science et par conséquent ce que la géographie politique offre de plus positif, nous nous sommes borné à ne classer parmi les états du Turkestan-Indépendant, de la Perse, de l'Arabie et des autres grandes régions géographiques de l'Asie que ceux qui nous paraissaient offrir plus de stabilité, et sur l'état politique desquels nous avions trouvé le moins de contradictions dans les rapports les plus récens des voyageurs et des journaux de l'Orient. A la page 561, nous avons cité l'opinion d'un savant célèbre à l'appui de notre manière d'envisager les états Barbaresques, qu'on regarde à tort comme des parties intégrantes de l'empire

« PreviousContinue »