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NOTES

DISCOURS

PRONONCÉ PAR M. DUBOYS D'ANGERS, AU NOM DE LA DÉPUTATION DES ÉLECTEURS, LE 31 MAI 1815.

<< Sire,

<< Le peuple français vous avait donné la couronne, vous l'avez déposée sans son aveu; ses suffrages viennent vous imposer le devoir de la reprendre.

« Un contrat nouveau s'est formé entre le peuple et Votre Majesté.

« Rassemblés de tous les points de l'Empire autour des tables de la loi où nous venons inscrire le vœu du peuple, ce vou, seule source légitime du pouvoir, il nous est impossible de ne pas faire retentir la voix de la France dont nous sommes les organes immédiats, de ne pas dire, en présence de l'Europe, au chef auguste de la nation ce qu'elle attend de lui, ce qu'il doit attendre d'elle.

«Nos paroles sont graves comme les circonstances qui les inspirent.

«Que veut la ligue des rois alliés avec cet attirail de guerre dont elle épouvante l'Europe et afflige l'humanité!

<< Par quel acte, pour quelle violation avons-nous provoqué leur vengeance, motivé leur agression?

«< Avons-nous, depuis la paix, essayé de leur donner des lois? nous voulons seulement suivre celles qui s'adaptent à nos mœurs; nous ne voulons point du chef que veulent pour nous nos ennemis, et nous voulons celui dont ils ne veulent.

<< Ils osent vous proscrire personnellement, vous, Sire, qui, maître tant de fois de leurs capitales, les avez raffermis généreusement sur leurs trônes ébranlés. Cette haine de nos ennemis ajoute à notre amour pour vous; ils proscriraient le moins connu de nos citoyens que nous devrions le défendre avec la même énergie; il serait comme vous sous l'égide de la loi et de la puissance françaises.

« On nous menace d'une invasion, et cependant, resserrés dans les frontières que la nature ne nous a point imposées, que longtemps et avant votre règne la victoire et la paix même avaient reculées, nous n'avons point franchi cette étroite enceinte par respect pour des traités que vous n'avez pas signés et que vous avez offert de respecter.

«Ne demande-t-on que des garanties, elles sont toutes dans nos institutions et dans la volonté du peuple français unie désormais à la vôtre. Ne craint-on pas de nous rappeler des temps, un état de choses naguère si différents, et qui pourraient encore se reproduire?

« Ce ne serait pas la première fois que nous aurions vaincu l'Europe armée contre nous.

« Ces droits sacrés, imprescriptibles, que la moindre peuplade n'a jamais réclamés en vain au tribunal de la justice et de l'histoire, c'est à la nation française qu'on ose les disputer une seconde fois, au XIXe siècle, à la face du monde civilisé.

<< Parce que la France veut être la France, faut-il qu'elle soit dégradée, déchirée, démembrée, et nous réserve-t-on le sort de la Pologne?

» Vainement veut-on cacher de funestes desseins sous

l'apparence du dessein unique de vous séparer de nous, pour nous donner à des maîtres avec qui nous n'avons plus rien de commun, que nous n'entendons plus et qui ne peuvent pas nous entendre, qui ne semblent appartenir ni au siècle, ni à la nation, qui ne les a reçus un moment dans son sein, que pour voir proscrire et avilir par eux ses plus généreux citoyens.

<< Leur présence a détruit toutes les illusions qui s'atta chaient encore à leur nom.

<< Ils ne pouvaient plus croire à nos serments, nous ne pourrions plus croire à leurs promesses La dime, la féodalité, les privilèges, tout ce qui nous est odieux était trop évidemment le but et le fond de leurs pensées, quand l'un deux, pour consoler l'impatience du présent, assurait ses confidents qu'il leur répondait de l'avenir.

ans

« Ce que chacun de nous avait regardé pendant vingt-cinq comme titres de gloire, comme services dignes de récompense, a été pour eux un titre de proscription, un sceau de réprobation.

« Un million de fonctionnaires, de magistrats, qui depuis vingt-cinq ans suivent les mêmes maximes, et parmi lesquels nous venons de choisir nos représentants, cinq cent mille guerriers, notre force et notre gloire, six millions de propriétaires investis par la Révolution; un plus grand nombre encore de citoyens éclairés qui font une profession de foi réfléchie de ces idées devenues parmi nous des dogmes politiques, tous ces dignes Français n'étaient point les Français des Bourbons; ils ne voulaient régner que pour une poignée de privilégiés, depuis vingt-cinq ans punis ou pardonnés.

« L'opinion même, cette propriété sacrée de l'homme, ils l'ont persécutée jusque dans le paisible sanctuaire des lettres et des arts.

« Sire, un trône un moment relevé par les armes étrangères, et environné d'erreurs incurables, s'est écroulé en un instant devant vous, parce que vous nous apportiez de la retraite, qui n'est féconde en grandes pensées que pour les grands hommes, tous les errements de notre véritable gloire et toutes les espérances de notre véritable prospérité.

« Comment votre marche triomphale de Cannes à Paris n'a-t-elle pas dessillé tous les yeux? Dans l'histoire de tous les peuples et de tous les siècles est-il une scène plus nationale, plus héroïque, plus imposante? Ce triomphe qui n'a point coûté de sang ne suffit-il pas pour détromper nos ennemis? En veulent-ils de plus sanglants! eh bien, Sire, attendez de nous tout ce qu'un héros fondateur est en droit d'attendre d'une nation fidèle, énergique, généreuse, inébranlable dans ses principes, inébranlable dans le but de ses efforts, l'indépendance à l'extérieur et la liberté au dedans. « Les trois branches de la Législature vont se mettre en action un seul sentiment les animera. Confiants dans les promesses de Votre Majesté, nous lui remettrons, nous remettrons à nos représentants et à la Chambre des pairs le soin de revoir, de consolider, de perfectionner de concert, sans précipitation, sans secousse, avec maturité, avec sagesse, notre système constitutionnel et les institutions qui doivent en être la garantie.

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Et, cependant, si nous sommes forcés de combattre, qu'un seul cri retentisse dans tous les cœurs marchons à l'ennemi qui veut nous traiter comme la dernière des nations, serrons-nous tous autour du trône où siège le père et le chef du peuple et de l'armée.

« Sire, rien n'est impossible, rien ne sera épargné pour nous assurer l'honneur et l'indépendance, ces deux biens plus chers que la vie. Tout sera tenté, tout sera exécuté pour repousser un joug ignominieux. Nous le disons aux nations: puissent leurs chefs nous entendre! S'ils acceptent vos offres de paix, le peuple français attendra de votre administration forte, libérale, paternelle, des motifs de se consoler des sacrifices que lui a coûtés la paix; mais si on ne nous laisse que le choix entre la paix et la honte, la nation tout entière se lève pour la guerre; elle est prête à vous dégager des offres trop modérées peut-être que vous avez faites pour épargner à l'Europe un nouveau bouleversement. Tout Français est soldat; la victoire suivra nos aigles, et nos ennemis qui comptaient sur nos divisions regretteront bientôt de nous avoir provoqués. »

ÉTAT OFFICIEL DES TROUPES

RÉUNIES SOUS LES MURS DE PARIS, LE 29 JUIN 1815, ET QUE L'EMPEREUR INTERNÉ A LA MALMAISON DEMANDAIT LA PERMISSION DE CONDUIRE CONTRE BLUCHER, AVENTURÉ SUR NOTRE TERRITOIRE ET NE DISPOSANT QUE DE 50,000 HOMMES HARASSÉS DE FATIGUE ET MANQUANT D'APPROVISIONNEMENTS ET DE MUNITIONS:

1o Armée de Belgique ramenée par le maréchal Grouchy...

2o Garde impériale...

33.000 h.

30 000

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9o Tirailleurs de la garde nationale (fédérés). 12.000

10° Garde nationale de Paris (mémoire).

11o Artillerie attelée et non attelée: 1,150 canons.

Total: 109,000 hommes dont 25,000 de cavalerie, et 550 pièces attelées.

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