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une correction proportionnée à sa gravité, ni de crime si atroce qui ne soit efficacement puni par l'accumulation et le concours des différens degrés. Lorsqu'à ces peines on ajoute les règles qui sont établies dans certains cas, relativement à la nourriture et aux autres nécessités de la vie, pendant le temps de la punition, on trouvera que ce genre de châtiment possède au plus haut degré la qualité essentielle de se proportionner à tous les délits et à chacun des délin

quans. »

M. Charles Lucas a emprunté aux prisons américaines, cet emploi du solitary confinement qu'il combine avec la réclusion: de même que M. Livingston, c'est par l'application de cette mesure aggravante de l'emprisonnement, qu'il a proposé de remplacer la peine de mort. En 1791, le comité de législation et de constitution avait émis la même pensée. Cette peine est tellement rigoureuse, qu'on a reconnu en Pensylvanie, l'impossibilité de la faire subir sans intervalles dans toute sa durée : les inspecteurs des prisons ont le pouvoir d'en répartir la durée à leur choix « pourvu, dit M. de Larochefoucaud-Liancourt, que la portion ordonnée par la sentence ait lieu dans le cours du temps de la détention (1). »

Ainsi la peine de la réclusion ou emprisonne

(1) Des prisons de Philadelphie, par un Européen.

ment, peut être variée et dans sa durée et dans son mode d'exécution; temporaire ou perpétuelle, suivant la gravité du délit, elle se combine avec le travail; s'aggrave de la solitude et même de l'obscurité et du changement de nourriture, suivant les exigences de l'ordre ou les besoins de la réforme morale du condamné; elle se plie à tous les genres de criminalité: légère pour les délits légers, grave et terrible pour les crimes atroces. Elle procure à la société l'expiation de l'offense et lui promet la régénération du coupable; elle ne laisse aucune erreur irréparable. C'est donc à cette peine que l'ordre social semble devoir demander le plus souvent les garanties dont il a besoin.

La détention, peine nouvellement introduite dans nos lois, n'est qu'une variété de la réclusion: elle n'en diffère que par le mode d'exécution. « Quiconque, porte l'art. 20 du Code pénal, aura été condamné à la détention, sera renfermé dans l'une des forteresses situées sur le territoire continental du royaume, qui auront été déterminées par une ordonnance du roi, rendue dans la forme des réglemens d'administration publique. Il communiquera avec les personnes placées dans l'intérieur du lieu de la détention ou avec celles du dehors, conformément aux réglemens de police établis par une ordonnance du roi. La détention ne peut être prononcée pour moins de cinq ans, ni pour plus de vingt ans, sauf les

cas prévus par l'art. 33 (1). » Ainsi, les condamnés 33(1). ne peuvent être assujétis à aucun travail, et les communications, soit entre eux, soit avec leur famille et leurs amis sont formellement autorisées. Le législateur a voulu adoucir la peine; toutes les mesures, telles que le travail ou la solitude, qui pouvaient l'aggraver, en ont été bannies: elle se borne à la simple privation de la liberté.

La détention est destinée à réprimer les attentats politiques. « Cette peine, disait M. Taillandier, lors de la discussion de la loi, portera aux âges futurs la preuve du haut degré de civilisation auquel notre patrie est arrivée (2). » Et, en effet, elle manquait à nos lois; elle révèle un esprit de mansuétude et d'humanité qui honore le législateur. Les délits que la détention est destinée à punir, supposent moins de perversité que d'audace, moins de corruption dans le cœur que d'inquiétude dans l'esprit, en un mot, moins de vices que de passions. L'amélioration morale a beaucoup moins à faire : Le temps et la réclusion suffisent; le but que le législateur se propose, c'est la sécurité de la société, et la détention l'assure. Il est donc inutile de l'aggraver soit par le régime hu

(1) Le cas de rupture de ban par un condamné au bannisse

ment.

(2) Code pénal progressif, pag. 114.

miliant, soit par les travaux pénibles des prisons. C'est, a dit le rapporteur de la chambre des députés, une peine spéciale réservée à des crimes spéciaux, et qui ne peut pas plus être comparée aux autres peines que les crimes politiques ne peuvent être comparés aux autres crimes (1).

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Nous terminerons ce chapitre par un rapprochement des systèmes répressifs qui sont considérés comme les moins défectueux.

Le code pénal d'Autriche ne prononce que deux peines la mort et la détention du coupable dans une prison; mais cette dernière peine se divise en trois degrés; la prison est simple, dure et très dure, suivant le degré de la culpabilité; elle peut encore être aggravée par le travail public, par l'exposition au carcan, par des coups de bâton et de verge et par le jeûne. Dans tous les cas, à la peine de la prison est jointe l'obligation du travail.

Les pénalités du code du Brésil sont plus variées: après la peine de mort, viennent les galères, la prison aux travaux, la prison simple, le bannissement, la déportation, l'exil local, enfin l'amende proportionnelle, réglée selon ce que les condamnés peuvent retirer chaque jour de leurs biens.

(1) Code pénal progressif, pag. 100.

Les peines de la loi anglaise se réduisent à un petit nombre la peine de mort, la transportation à Botany-bay, l'emprisonnement avec ou sans travail, (with or without hard labour), le pilori, le fouet et les amendes (1)

Enfin le système pénal du code de la Louisiane se résume dans ces termes : amendes pécuniaires, destitutions d'office, simple emprisonnement, privation temporaire des droits civils, privation permanente des droits civils, emprisonnement aux travaux de force à temps ou à vie, enfin réclusion solitaire durant des périodes fixées par la sentence.

En examinant ces divers systèmes répressifs, en suivant leurs applications, il serait facile d'établir que l'échelle pénale de notre code est moins défectueuse encore que celle des autres codes, celui de la Louisiane excepté. Mais ce dernier code, qui supprime la peine de mort et s'adapte entièrement au système pénitentiaire, attend encore la sanction de l'expérience. En matière pénale, le législateur ne doit s'avancer qu'avec une sage réserve dans la carrière des innovations; on ne doit pas légèrement désarmer la loi. Nous pensons donc, et c'est à cela que se résument nos observations, que le système pénal du code, sans être bou

(1) Summary of the criminal law, by Henry Stephen, 1834, page

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