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abrogée (1), et M. Bourguignon se range à cette opinion en se fondant sur ce que le retard de l'exposition prolongerait illégalement la durée de la peine (2). Ce dernier motif ne pourrait plus être invoqué, puisque, depuis la révision du Code pénal, la durée des peines temporaires a cessé de prendre son point de départ dans l'exposition. Mais, indépendamment de cette considération, comment prétendre que cette loi qui se rattache au système pénal, a pu traverser un Code qui a réédifié ce système sans la sanctionner? le Code pénal ne renferme-t-il pas un ordre complet de pénalités? n'a-t-il pas réglé l'exposition comme la peine de mort? comment admettre, en dehors de ses dispositions, des dispenses et des exceptions qui lui sont étrangères (3)?

Aucune condamnation ne peut, aux termes de l'art. 25, être exécutée les jours de fêtes nationales ou religieuses, ni les dimanches. Nous ne ferons qu'une seule observation sur cet article, c'est qu'il

(1) Cod. d'inst. crim., sur l'art. 375, obs. 11; et Cod. pén., sur l'art. 24, obs. 4.

(2) Juri-p. des Cours crim., tom. III, pag. 26.

(3) Basnage (sur l'art. 143 de la Coutume de Normandie), enseigne encore qu'on doit éviter de prononcer le jugement de condamnation à la femme qui est enceinte. Ces diverses exceptions respirent l'human té; mais l'interprétation ne peut s'appuyer que sur le texte de la loi.

crée une exception évidente à l'art. 375 du Cod. d'inst. crim. qui prescrit l'exécution dans les 24 heures de la réception de l'arrêt de rejet, ou de l'expiration des délais du pourvoi. La même exception n'existait pas dans l'ancien droit les jugemens étaient exécutés le jour même où ils étaient prononcés (1).

Le lieu des exécutions criminelles a varié avec les diverses législations qui se sont succédé. L'ordonnance de 1670 (tit. 26, art. 16) voulait que les condamnés fussent renvoyés sur les lieux, s'il n'était autrement ordonné par les cours, par des considérations particulières. Le Code pénal de 1791 (tit. 1, art. 5) prescrivait, au contraire, que l'exécution se fît dans la place publique de la ville où le juré d'accusation avait été convoqué, c'est-à-dire du chef-lieu d'arrondissement. Le Code du 3 brumaire an 4 modifia encore cette législation : l'exécution dut se faire, aux termes de son art. 445, sur une des places publiques de la commune où le tribunal criminel tenait ses séances, c'est-à-dire du chef-lieu du département. « C'était là, disait le rapporteur du projet de Code pénal au Corps législatif, une des fautes les plus graves de la législation actuelle ; en effet, c'est dans les lieux qui ont été témoins du crime, c'est sur les personnes qui se sont entretenues de ses détails et qui ont connu le

(1) Ord. de 1670, tit. 25, art. 21.

coupable, que l'impression produite par l'exécution est plus profonde.... »

L'art. 26, dans le projet du Code, était ainsi conçu: « L'exécution se fera sur l'une des places publiques de la ville chef-lieu de l'arrondissement communal dans lequel le crime aura été commis. Néanmoins le procureur général pourra, suivant les circonstances, ordonner que l'exécution de tel arrêt, ou même les exécutions criminelles en général, se feront dans un autre lieu qui sera déterminé. » On fit observer avec raison, dans le sein du conseil d'Etat, que cette disposition attribuait au procureur général un pouvoir qui ne doit appartenir qu'aux juges. M. Berlier proposa de maintenir, comme une règle, que l'exécution serait faite dans le lieu même du crime. Sans contester cette règle, Napoléon émit l'avis de laisser ces détails à la sagesse des juges, et de là l'art. 26 qui porte que « l'exécution se fera sur l'une des places publiques du lieu qui sera indiqué par l'arrêt de condamnation (1). » Mais il est évident que ce lieu ne peut être que celui du jugement, ou une des communes de l'arrondissement où le crime a été commis.

En quel lieu procéderait-on à l'exécution, si cette désignation avait été omise dans l'arrêt? Il est visible, d'abord, que cette omission ne pourrait être suppléée

(Locré, tom. XXIX, pag. 146.

par le ministère public, car l'art. 376 du Cod. d'inst. crim. ne lui confère d'autre pouvoir que celui de faire exécuter la condamnation. On doit remarquer que le droit commun, au moment de la rédaction du Code pénal, était l'exécution au chef-lieu du département. Le législateur, trouvant cette mesure trop absolue, donna aux juges la faculté d'y déroger suivant les circonstances, et de fixer eux-mêmes le lieu de l'exécution. Or, s'ils n'ont pas usé de cette faculté, il est évident qu'on rentre sous l'empire du droit commun, et que cette exécution doit demeurer au chef-lieu de la Cour d'assises.

L'art. 26 ne délègue aux juges que le pouvoir de désigner le lieu de l'exécution, c'est-à-dire la ville, le bourg ou le village où la peine sera subie; ils n'ont point à déterminer la place publique de ce lieu où l'exécution sera faite. Ce choix n'appartient qu'à l'autorité administrative à laquelle compête tout ce qui regarde la police de la voie publique, mais elle doit cependant se concerter à cet égard avec le ministère public. C'est ainsi qu'un arrêté du préfet de la Seine, du 20 janvier 1832, a transporté le lieu des exécutions de la place de Grêve à l'extrémité du faubourg Saint-Jacques. Il est essentiel que ce lieu soit une place publique; tel est le vœu de l'art. 26, et cette publicité est une garantie contre des exécutions clandes

nes, en même temps qu'elle assure à la peine l'accomplissement de sa mission (1).

La loi du 22 germinal an 4 autorise le ministère public à requérir les ouvriers de faire les travaux nécessaires pour l'exécution des jugemens, à la charge de leur en faire compter le prix; et le refus de ces ouvriers est puni pour la première fois d'une peine de simple police, et, en cas de récidive, d'un emprisonnement de six à trente jours (2). L'art. 114, du décret du 18 juin 1811, prescrit que cette loi continuera d'être exécutée. Cependant quelques jurisconsultes ont pensé que sa disposition pénale se trouvait remplacée par le § 12 de l'art. 475 du Code pénal, qui prononce une amende contre les personnes qui,

(1. Un décret de la convention du 16 août 1793 contenait une exception à ce principe à l'égard des pays occupés par l'ennemi : les jugemens criminels pouvaient y être exécutés dans tous les lieux où le tribunal tenait ses séances; cette exception était le résultat de la force majeure, seule excuse qui pût la justifier.

(2) L. 22 germ. an 4. — Art. 1. Les commissaires du directoire exécutif requerront les ouvriers, chacun à leur tour, de faire les travaux nécessaires pour l'exécution des jugemens, à la charge de leur en faire compter le prix ordinaire. - Art. 2. Tout ouvrier qui refuserait de déférer à la réquisition des dits commissaires, sera condamné, la première fois, par voie de simple police, à un emprisonnement de trois jours; en cas de récidive, il sera condamné, par voie de police correctionnelle, à un emprisonnement qui ne pourra être moindre d'une décade, ni excéder 30 jours.

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