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ils ont été rendus, ou dans la maison de correction du département, s'il en a été établi. Cette règle est une conséquence de l'art. 197 du Cod. d'inst. crim., qui veut que les procureurs du roi puissent surveiller cette exécution. Elle est une conséquence encore de l'exemplarité dont le législateur a voulu douer la peine; car ce but ne serait pas atteint si l'exécution n'avait pas pour témoins les lieux mêmes où le délit a été commis, si ce délit n'était pas expié sous les yeux qui l'ont vu commettre. Ce n'est donc qu'avec une grande circonspection et pour les motifs les plus graves, que l'administration ou le ministère public peut autoriser l'exécution d'une peine dans un autre lieu que celui de la condamnation ; mais cette règle n'est exécutée qu'à l'égard des peines de moins d'un an : l'institution des maisons centrales de détention, qui sont alimentées chacune par plusieurs départemens, y dérobe les autres condamnés (1).

Nous hésitons à signaler ici un usage, que des considérations d'humanité peuvent justifier quelquefois, mais qui n'en constitue pas moins même alors une infraction grave à la loi des condamnés obtiennent fréquemment, sous prétexte de maladie, leur translation dans des maisons particulières appelées maisons de santé. Aucune disposition légale ne justi

:

1) Voy. suprà, pag. 321.

fie une telle mesure : La loi du 4 vendémiaire an 6, qui a prévu le cas de maladie des détenus, ne permet leur translation que dans les hospices et à la charge qu'il sera pourvu à leur garde (art. 15 et 16). Les maisons particulières n'offrent aucune des garanties d'un établissement public, et il est visible que la peine est interrompue pendant la résidence des condamnés dans ces maisons. Ces translations sont donc évidemment illégales, et si l'on ajoute qu'elles peuvent être accordées avec légèreté, qu'elles le sont toujours par faveur, et que les condamnés qui ont quelque fortune peuvent seuls en profiter, il s'ensuit qu'elles sont encore entachées d'injustice vis-à-vis des autres dé

tenus.

Lorsque la condamnation émane du tribunal d'appel, est-ce dans la prison de la résidence de ce tribunal, ou dans celle de la résidence des premiers juges, que la peine doit être subie? cette question se résout par une distinction. Si les juges d'appel n'ont fait que confirmer purement et simplement le jugement de première instance, c'est en définitive ce dernier jugement qu'il s'agit d'exécuter, et dès lors c'est aux lieux où il a été rendu que la peine doit être subie. Si ce jugement, au contraire, a été modifié dans quelque partie par les juges d'appel, la condamnation est le fait de ces juges, elle leur appartient, et c'est alors dans la prison de leur résidence que le condamné doit être écroué.

L'exécution des peines appelle dans tous les cas le concours de l'autorité judiciaire et de l'autorité administrative, et comme les limites de ces deux autorités en cette matière sont mal définies, il en résulte des froissemens assez fréquens. Ces difficultés étaient inconnues sous l'ancienne législation, où l'administration des prisons appartenait aux lieutenans généraux des sénéchaussées et bailliages royaux et autres premiers juges des justices ordinaires, chacun dans son ressort(1). L'assemblée constituante en divisa les attributions, et remit au pouvoir administratif l'administration matérielle de ces établissemens, c'est-à-dire, la direction de leur police, la surveillance de leur régime et de leur salubrité, la fixation et le paiement de leurs dépenses; à côté de ces attributions, la loi a reservé une attribution, pour ainsi dire, parallèle à l'autorité judiciaire: les présidens des assises et les juges d'instruction sont d'abord investis d'un droit d'inspection et de surveillance sur l'administration même des prisons (art. 611 et 613 du Cod. d'inst. crim.). Mais ce droit devient plus étendu entre les mains du ministère public; la loi le charge spécialement de donner tous les ordres nécessaires pour l'exécution des peines (art. 197 et 376 du Cod. d'ins

(1) Décl., 6 février 1753; arr., 30 juill. 1678; arr., 1 sept.1717 16 mars 1705.

arr. cons.,

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erim.) Or, quelles sont les bornes légales de ce pourvoir? Ce magistrat doit-il requérir seulement la translation des condamnés dans les maisons destinées à l'exécution de leurs peines? doit-il l'ordonner lui-même directement? ne peut-il pas du moins faire écrouer tel condamné dans telle ou telle maison? est-ce à lui, est-ce à l'administration qu'il appartient de faire cette désignation?

Cette difficulté ne peut guère se présenter à l'égard des condamnés à plus d'un an de prison, puisque les ordonnances des 2 avril 1817 et 6 juin 1830, ont fixé d'une manière précise les lieux de détention où cette peine doit être subie; mais elle peut s'élever fréquemment dans l'exécution des peines inférieures, et l'on chercherait vainement dans la législation une règle fixe la résoudre. De ce silence on doit sans doute pour inférer que le droit d'ordonner l'exécution d'une peine de moins d'un au dans telle ou telle prison, peut être exercé concurremment, soit par le ministère public, soit par le préfet. Il est facile d'apercevoir que cette double action doit amener quelque confusion dans la pratique. Une ligne plus nette devrait être tracée entre les deux pouvoirs.

Toutefois, la compétence de l'administration cesse nécessairement lorsqu'il s'élève sur l'exécution de la peine quelque incident contentieux; le ministère public peut seul statuer sur cet incident, sauf au condamné que cette solution concerne, à en référer, si

le juge convenable, aux juges dont la condamnation est émanée. Cette dernière règle, que nous avons établie au sujet de l'exécution des peines afflictives, s'applique entièrement aux peines correctionnelles, et c'est même en cette matière que la Cour de cassation l'a consacrée (1).

Une autre règle également commune aux peines afflictives et correctionnelles, est celle qui prohibe la cumulation de ces peines: l'art. 365 du Cod. d'inst. crim. porte, en effet : « En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte sera seule prononcée. » Il serait sans objet de reproduire la théorie qui a été exposée dans le précédent paragraphe, sur l'application de cet article; les mêmes principes s'appliquent dans toutes les hypothèses. Nous ajouterons cependant quelques brèves observations.

On a vu que la Cour de cassation admet la cumulation des peines de la même nature jusqu'à concurrence du maximum, pour des faits antérieurs à la première condamnation. Et l'on doit remarquer, pour l'application de ce système que nous avons combattu, d'abord que le maximum de la peine d'emprisonnement n'est que de cinq ans (art. 40, 57 et 58 Cod. pén.); d'où il suit que les diverses condamnations pour sim

(1) Arr. cass., 23 février 1833. ( Journal du droit crim., page 157.)

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