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chera le premier, & le Seigneur fe mettra à leur tête (a). Méditons-les de telle forte, que nous ne les regardions pas feulement comme le fujet de notre admiration & de notre reconnoiffance mais encore

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comme l'objet de notre imitation ; & comprenons bien fur-tout, que le falut apporté au monde par Jefus-Chrift, fe changera en une plus rigoureufe condamnation pour ceux, qui méprifant fes exemples, n'auront pas eu foin de s'y conformer; en un mot, dont la vie ne fera pas femblable à la fienne. Ainfi craignons & redoutons cette menace d'un autre Prophete: J'exterminerai ceux qui fe détournent du Seigneur, & ne veulent pas marcher après lui (b).

CHAPITRE IV.

'Amour infini que Dieutémoigne aux hommes dans le Myftere de l'Incarnation.

'ON ne peut faire réflexion fur le Myftere de l'Incarnation, fans être dans l'admiration & dans l'étonnement que Dieu pour fauver l'homme, devenu très-miférable par fa propre faute

pour

(a) Afcendet pandens iter ante eos, divident & tranfibunt portam, & ingredientur per eam : & tranfibit Rex eorum Coram eis, & Dominus in capite eorum, Mich. 2.

(6) Difperdam cos qui avertuntur de post tergum Domini.“ Mophon. 1.

avoir violé le Commandement de fon Dieu qui venoit de le combler de biens dans fa création; que Dieu, dis-je, ait bien voulu envoyer fur la terre fon Fils unique, revêtu d'une nature femblable à la nôtre. C'est là le prodige des prodiges, & la grande merveille que Dieu a opérée; merveille admirable & incompréhenfible, & que nous n'aurions jamais ofé espérer de fa miféricorde, toute infinie qu'elle eft.

Ce qui frappe donc d'abord en confidérant ce grand mytere un peu attentivement, c'eft la charité infinie de Dieu qui a tant aimé les hommes, qu'il leur a donné fon Fils unique. Car c'eft l'amour de Dieu envers les hommes, qui eft le principe de ce myftere. Auffi faint Paul l'appelle-t-il le grand myftere de la piété & de la charité de Dieu (a), & les Ecritures ne nous parlent que d'amour, quand elles nous en inftruifent. Par les entrailles de la miféricorde de notre Dieu, le foleil levant nous eft venu vifiter d'en haut, dit Zacharie, pere de faint Jean (b). La charité de Dieu envers nous a paru en ce qu'il· a envoyé fon Fils, afin que nous vivions par lui, dit le Disciple bien-aimé (c).

(4) Magnum pietatis Sacramentum, Deus manifeftatus in carne. 1, Timoth. 3.

(b) Per vifcera mifericordiæ Dei noftri vifitavit nos Oriens ex alto. Luc. I.

(c) In hoc apparuit caritas Dei in nobis, quoniam mifit Fi

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Dieu nous a aimés jufqu'à nous donner fon Fils unique quelle charité ! quelle tendreffe! fon amour pour nous pouvoit-il aller plus loin?« Quelle bonté & quelle miféricorde envers des miférables, di» foit autrefois faint Auguftin, que celle qui a fait defcendre du ciel le Créateur » du ciel, & a revêtu d'un corps terreftre » le Créateur de la terre; que celle qui a » fait femblable à nous, en le rendant » mortel comme nous, celui qui est égal à fon Pere par l'éternité qu'il poffede » avec lui; que celle qui a fait prendre » au maître du monde la forme & la na»ture de ferviteur, afin que le pain véri» table eût faim; que celui qui défaltere » toutes les créatures eût foif; que celui qui eft la vertu & la force de toutes » chofes devînt foible; que la fanté du » monde fût percée de plaies : & tout cela » pour pour raffafier notre faim, arrofer notre » féchereffe, confoler & fortifier notre " foibleffe, effacer notre iniquité, & nous embrafer du feu de la charité! Quelle plus grande miféricorde que le » Créateur foit créé, que le Maître, le Seigneur ferve, que le Rédempteur » foit vendu, que celui qui éleve en gloire ceux qu'il lui plaît, foit humi» lié & anéanti, & que celui qui refluf

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lium fuum in mundum, ut vivamus per eum. 1, Joan. 4o

» cité les hommes foit lui-même mis à

» mort (a)!

Cette charité infinie de Dieu doit beaucoup occuper les fideles en ces faints jours; & pour la comprendre autant que des hommes foibles en font capables, pefons bien les paroles par lefquelles JefusChrift lui-même l'a expliquée. Dieu, ditil, a tant aimé les hommes, qu'il leur a donné fon Fils unique (b).

C'eft Dieu qui a aimé les hommes; Dieu qui eft véritablement, effentiellement, immuablement, en comparaison duquel tout ce qui eft créé n'eft rien; qui eft la plénitude de tout être, le principe, la fource, la fin & le terme de toutes les créatures, qui fortent de lui, fe rapportent à lui, & ne font que pour fa gloire; Dieu très-fort, grand, puiffant, qui a fait le monde, le ciel, la terre, la mer & tout ce qu'ils contiennent; qui eft le Seigneur du ciel & de la terre, qui donne à tous les hommes la vie, la refpiration &

(a) Quæ major effe mifericordia fuper miferos potuit, quàm illa quæ cœli Creatorem de cœlo depofuit, & terreno corpore terræ induit conditorem, eum qui in æternitate Patri manet æqualis, mortalitate coæquavit nobis, & formam fervi Domino impofuit; ut ipfe panis efuriret, fatietas fitiret, virtus infirmaretur, fanitas vulneraretur, vita moreretur? Hoc autem ut noftra pafceretur fames, rigaretur ariditas, confolaretur infirmitas, extingueretur iniquitas ardefceret caritas. Quæ major mifericordia, quàm creari creatorem, fervire dominatorem, vendi redemptorem, humiliari exaltatorem, occidi fufcitatorem? Serm. 207.

(b) Sic Deus dilexit mundum, ut Filium fuum unigenitum daret. Joan. 3,

:

toutes chofes Dieu dont la fageffe eft infinie & la puiffance fans bornes, qui tient dans fa main l'ame de tout ce qui a vie, & tous les efprits qui animent la chair des hommes, qui a tout pouvoir fur la vie & fur la mort, qui conduit aux portes de l'enfer & qui en retire, qui fait tout ce qui lui plaît dans le ciel, fur la terre, dans la mer & dans tous les abymes, & à la volonté duquel rien ne peut réfifter, devant qui toutes les nations ne font qu'une goutte d'eau qui tombe d'un feau, & comme ce petit grain qui donne à peine la moindre inclination à la balance : toutes les Ifles font devant fes yeux comme un petit grain de pouffiere; tous les peuples font comme s'ils n'étoient point, & il les regarde comme un vuide & un néant. Dieu qui n'a nul befoin de l'homme, qui fe fuffit à lui-même, & trouve fon fouverain bonheur dans la contemplation de fes perfections qui pouvoit réduire en cendre tous les hommes, & venger par des fupplices éternels l'injure qu'ils lui avoient faite.

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Il a aimé les hommes, qui ne font qu'un pur néant & un abyme de vanité, dont les jours paffent comme l'ombre, dont la fubftance n'eft devant lui qu'un néant ;. qui vivent très-peu de temps, & font remplis de beaucoup de miferes; qui naiffent comme une fleur qui n'est pas plutôn

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