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des dispositions impératives de l'article 1356, relatives à la force probante de l'aveu judiciaire, on ne fait qu'écarter une disposition exceptionnelle pour se placer sous l'empire du droit commun. (T. VI, p. 345, comp. Cass., 29 avril 1820, Sirey, 1820, 1, 232; Cass., 10 déc. 1839, Leger, Dev., 1840, I, 467; Limoges, 20 mars 1848, Archer, Dev., 1848, II, 736; Bonnier, n° 361; Larombière, t. V, art. 1356, no 23.)

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555. Les mêmes arguments s'appliquent à la question de rétractation de l'aveu extrajudiciaire.

D'où il faut conclure qu'il peut être, en effet, rétracté, sans que la partie soit tenue de prouver qu'il a été la suite d'une erreur de fait;

Sauf aux juges à tenir compte ou à ne pas tenir compte de cette rétractation, suivant les circonstances.

556. Nous concluons donc que ce sont, encore aujourd'hui, comme autrefois, des règles simplement doctrinales, qui gouvernent l'aveu extrajudiciaire. (Comp. supra, no 508.)

Il est évident toutefois que, dans l'application, les magistrats ne perdent point de vue les règles législatives, qui gouvernent l'aveu judiciaire;

Et que, pour s'en écarter, en ce qui concerne l'aveu extrajudiciaire, surtout relativement à la question de savoir s'il peut être divisé, il faut que les circonstances du fait déterminent fortement leur conviction dans le sens de l'affirmative.

Car nous tenons toujours que cette règle de l'indivisibilité est, en soi, logique et équitable! (supra, no 507); Et que l'application en est particulièrement désirable, lorsqu'il s'agit d'un aveu extrajudiciaire écrit.

SECTION V.

DU SERMENT.

Exposition. Division.

SOMMAIRE.

557.

558.

559.

560.

Transition.

- Définition du serment.

Appréciation critique de ce mode de preuve.

Le serment judiciaire est de deux espèces : décisoire ou supplétoire.

561.

Il n'y a pas, dans notre Droit nouveau, d'autre serment judiciaire. Du serment, que, dans notre ancien droit, la partie, interrogée sur faits et articles, devait prêter avant son interrogatoire. 562. Notre Code ne mentionne que le serment judiciaire. — En faut-il conclure qu'il ne reconnaît pas le serment extrajudiciaire comme pouvant produire un moyen de preuve?

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568.

569. 570.

-

Suite.
Suite.

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Est-il

Quel est le caractère du serment déféré par l'une des parties à l'autre, devant le juge de paix, au bureau de conciliation? judiciaire ou extrajudiciaire?

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575. Le serment décisoire est-il admissible devant la juridiction administrative?

576. - Le serment décisoire est évidemment inadmissible devant la juridiction criminelle.

577. Division.

557.-Il ne nous reste plus qu'à traiter du serment, que l'article 1316 met, en dernier lieu, au rang des preuves, en matière civile.

558. Le serment est un acte tout à la fois civil et religieux, par lequel une partie prend Dieu à témoin de la vérité d'un fait, qu'elle affirme;

Un acte religieux, disons-nous, en même temps que

civil; telle a toujours été, en effet, la signification essentielle de ce mot.

Le projet de Code civil y avait, dans son article 246, substitué ces mots : l'affirmation judiciaire. (Locré, Législat. civ., t. XII, p. 129.)

Mais il est évident qu'une telle formule en dénaturait le caractère, ou plutôt même qu'elle supprimait le serment!

Est-ce que, en effet, le serment, considéré comme une simple déclaration civile, ne disparaît pas tout à fait ! Que signifierait, par exemple, avec une terminologie pareille, le serment supplétoire, qui serait déféré par juge au demandeur ?

le

Ce demandeur affirme, bien entendu; à quoi bon lui demander d'affirmer encore, si cette nouvelle affirmation est la même, que celle qu'il présente, et n'offre pas d'autre garantie !

Or, cette garantie précisément, que va présenter sa nouvelle affirmation, c'est le caractère religieux, dont elle sera revêtue.

Le serment est une affirmation assurément, mais une affirmation religieuse, par laquelle la partie, prenant Dieu à témoin de sa sincérité, l'invoque comme vengeur du parjure. (Comp. art. 312 du Code d'instruction criminelle.)

« Est enim jusjurandum affirmatio religiosa, Cicéron. (De Officiis, lib. III, cap. x Ix.)

a dit

Aussi, le Conseil d'État a-t-il rétabli le mot serment, en supprimant les mots : affirmation judiciaire. (Comp. le rapport fait au Tribunat, par M. Jaubert, Locré, loc. supra cit., p. 528-548.)

Mais il était resté une trace du projet primitif dans l'article 1781, où le mot : affirmation avait été conservé par oubli, article d'ailleurs aujourd'hui abrogé par la loi du 2 août 1848.

559. Nous n'avons pas à apprécier ici, au point de

vue philosophique ou moral, le mérite de ce genre de preuve.

Il a, dans tous les temps, soulevé de vives critiques; et on peut en voir l'intéressant historique dans les Études de législations comparées de M. Charles Carpentier : Du serment. (Comp. aussi les Réflexions et recherches sur le serment judiciaire, par Berriat-Saint-Prix, Revue de législation, t. VIII, p. 241 et suiv.)

Une partie, qui fonde sur le mensonge sa demande ou son exception, pourra reculer devant le parjure, si le serment lui est déféré !

Il est vrai; mais il faut bien reconnaître que de tels exemples sont rares.

Combien n'y en a-t-il pas, au contraire, qui, une fois engagés dans leur affirmation première, ne consentiront jamais à se démentir, par entêtement, par amour-propre !

« Quand un homme est honnête homme, disait Pothier, il n'a pas besoin d'être retenu par la religion du serment pour ne pas demander ce qui ne lui est pas dû, et pour ne pas disconvenir de ce qu'il doit; et quand il n'est pas honnête homme, il n'a aucune crainte de se parjurer. Depuis plus de quarante ans que je fais ma profession, et j'ai vu une infinité de fois déférer le serment, je n'ai pas vu arriver plus de deux fois qu'une partie ait été retenue par la religion du serment, de persister dans ce qu'elle avait soutenu. » (N° 925.)

Que pourrions-nous ajouter à un tel témoignage!

On objecte que le serment n'aboutit, en définitive, qu'à une transaction entre les parties.

Eh bien! donc, que les parties transigent, si bon leur semble; qu'elles transigent après l'instance engagée, comme elles auraient pu transiger avant, librement, volontairement.

Mais pourquoi faire intervenir les juges dans ces transactions périlleuses, où les règles de la justice n'entrent pour rien! (Carpentier, loc. supra cit., p. 40.)

TRAITÉ DES OBLIGATIONS.

VII-32

Ces considérations nous paraissent, en effet, trèsgraves. 560.

Aux termes de l'article 1357:

« Le serment judiciaire est de deux espèces :

« 1° Celui qu'une partie défère à l'autre pour en faire dépendre le jugement de la cause; il est appelé déci« soiré;

«< 2° Celui qui est déféré d'office par le juge à l'une « ou à l'autre des parties. >>

Le serment donc est:

Soit décisoire;

Soit supplétoire, ou, comme on dit encore, supplétif.

Dans les deux cas, il est judiciaire, c'est-à-dire déféré ou référé en justice.

561. Il n'y a pas, dans notre Droit nouveau, d'autre serment judiciaire.

Le législateur du Code de procédure a supprimé celui que, dans notre ancien Droit, la partie, interrogée sur faits et articles, devait prêter, devant le juge avant son interrogatoire. (Comp. l'Ordonnance de 1667, titre X; Pothier, n° 920-921.)

Il l'a supprimé, avec grande raison sans doute; car ce serment préalable paralysait injustement la partie dans ses moyens de défense, en la plaçant dans la nécessité de trahir ses intérêts ou de commettre un parjure.

Et puis, n'était-il pas contradictoire, et, sous tous les rapports, regrettable que la loi imposât à une partie l'obligation de prêter serment en matière civile, tout en lui déclarant que le juge aurait la faculté de ne pas y ajouter foi !

Nous savons bien qu'il en est ainsi encore, sous notre Code, du serment supplétoire. (Infra, no 711.)

Mais il nous paraît permis d'exprimer, pour ce cas aussi, le même regret.

562. Tandis que l'article 1354, en ce qui con

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